A l’intérieur, un vaste chapiteau luxueux, des gâteaux, des hôtesses affables et un terrible vide. Et c’est cela le mal du festival, entre autres ; et celui de la manifestation culturelle algérienne : il n’est pas ouvert au public. Ce n’est pas une décision volontaire mais une mentalité ambiante. Le chroniqueur se souvient de l’une des éditions quand le policier lui demanda de circuler car il n’y avait rien à voir. «C’est le festival du cinéma cela ne vous concerne pas». La manifestation est vécue comme une visite de ministre, fermée, en off-shore. On croit que «c’est cela», de l’agent de police à l’agent de sécurité à l’agent d’organisation. Qu’il faut justement tenir les intéressés à distance. Ils sont une menace, pas des invités. Ils risquent d’envahir, pas d’applaudir.
Cette barrière est solide et depuis des décennies. Elle a enfermé le culturel dans le calendrier des manifestations, isolé la créativité et la célébration dans le folklore et à mis en échec cette jonction nécessaire entre le festif et le festivalier. Pour ce festival, on a mis l’argent qu’il faut mais cela reste froid car coupé de son but : la célébration. Sur les dépliants une petite touche d’idéologie : il est en arabe et en anglais. Pour personne du monde anglo-saxon. Pas de français langue seconde du pays, par coquetterie nationaliste peut être. Mais on y est. Dans l’illustration presque caricaturale du «l’argent ne fait pas le bonheur». Ce festival mourra de solitude s’il n’épouse pas la foule. Et c’est dommage pour nous, pour Oran, pour nos cultures et nos célébrations et nos créateurs et notre prestige.
28 septembre 2013
Kamel Daoud