« Espoir »
Soudain, Amar a une idée qui fait battre son coeur d’enthousiasme.
L’air tristement pensif, Amar sort de l’APC, traînant les pieds. Sa déception est grande : encore une fois, son nom ne figure pas sur la liste des bénéficiaires de logement. C’est la troisième affiche depuis qu’il a déposé son dossier.
A 30 ans, Amar, secrétaire dans une entreprise privée, n’a qu’un voeu : avoir son logement.
Vivant au sein d’une famille nombreuse, il s’était juré de ne se marier que lorsqu’il aura sa propre maison.
Que faire ? se demande-t-il.
Dans la petite ville où il vit, 30 ans est un âge avancé pour un célibataire.
Ce qui est sûr, pense-t-il, en se dirigeant vers la maison familiale, c’est qu’il ne doit plus rien attendre de l’APC.
A côté de pères de familles nombreuses, il n’a aucune chance. Pourtant, son problème, il faut bien qu’il le règle. Fatima ne l’attendra pas éternellement. Elle le lui a d’ailleurs clairement signifié.
Soudain, une idée traverse son esprit faisant battre son coeur d’espoir.
Pressant maintenant le pas, le jeune homme a hâte d’arriver chez lui. Il va directement dans la chambre de son père à qui il communique la déception qu’il vient d’apprendre à l’APC, lui demandant de l’autoriser à construire sur une parcelle des terres familiales.
Le vieux ne se fait pas prier, mais n’arrive pas à cacher son étonnement. Il ne comprend pas, en effet, comment Amar va faire pour financer la construction.
Informée des projets de son fiancé, Fatima accepte de se marier et de l’aider comme il le lui a demandé financièrement.
Elle arrive même à convaincre le directeur de l’école où elle enseigne de la laisser habiter provisoirement avec son époux dans un studio de fonction.
Très vite, le couple déchante : les deux salaires ne suffisent pas à financer la construction.
Les mois passent, le chantier est toujours à l’arrêt. Amar ne sait plus quoi faire.
Plus l’échéance prévue pour la libération du studio arrive, plus il se sent pris dans un piège.
Ce soir-là, il est tout seul à noyer ses soucis dans un bar quand il aperçoit Ali. Celui-ci, affairiste milliardaire, est tout heureux de revoir cet ancien voisin de quartier. Il l’invite à boire.
Un verre entraînant un autre, Amar raconte ses misères à Ali. Attendri, surtout par la boisson, celui-ci lui propose immédiatement son aide. Sitôt dit, sitôt fait, dès le lendemain, Amar reprend sa construction.
Et c’est avec bonheur qu’il se rend tous les jours au chantier imaginant sa maison de rêve. Sa joie ne dure pourtant pas longtemps. Ali commence, deux mois à peine après lui avoir avancé de l’argent, à le harceler voulant se faire rembourser.
Encore une fois, les deux hommes se retrouvent par hasard dans un bar. Remettant le sujet sur le tapis, Ali devient de plus en plus agressif.
Le ton monte entre les deux. Les insultes et les menaces fusent de part et d’autre. Mais c’est Amar qui sort un couteau de sa poche et fonce tête baissée sur Ali.
Plus fort physiquement, celui-ci le lui arrache des mains et le lui enfonce dans la gorge, le tuant sur le coup, Ali est arrêté et inculpé d’homicide volontaire.
7 septembre 2013
Lounès Benredjal