La nouvelle de Yasmina Hanane
Samedi, 10 Novembre 2012
Le jour où j’avais rencontré Youcef sera gravé à jamais dans mon subconscient. Certes, je le connaissais déjà un peu, car nous avions entamé tous les deux une carrière dans la presse dans le même quotidien, mais il était juste ce collègue avec qui je devais échanger des idées, préparer un reportage, ou consulter pour entamer un sujet.
Nous étions liés par notre profession et, durant des années, nous nous voyons quotidiennement, nous nous appelions pour des sujets divers, et nous écrivions nos articles à la même table parfois, sans pour autant nous rapprocher davantage.
Je venais de rompre avec un ancien camarde de promo… Notre relation avait duré le temps des fleurs. Nous étions jeunes, ambitieux, et j’avais une idée floue du mariage. Pour moi, seule ma profession comptait.
Bien sûr, j’ai eu mal… Comme toutes les filles de mon âge, j’ai passé des heures à écouter Julio Iglesias, en versant des tonnes de larmes. Ah ! j’ai rêvé à l’amour parfait et au bonheur d’une vie sereine et sans problèmes avec l’élu de mon cœur.
Hélas ! Nous croyons peut-être trop aux romans à l’eau de rose, à un âge où nous ne connaissions pas encore les roses. Eh oui ! Je veux dire qu’à peine sortie de l’adolescence, nous tombions amoureuses du premier beau gosse bien nippé, qui nous faisait rire aux éclats, ou échafaudait des plans pour détourner la vigilance de nos parents.
Foulard rouge : zone interdite
Foulard blanc : zone libre.
Le message passait bien. Nous étions heureux de braver l’interdit pour nous voir et nous apprécier.
Mais ce plan durait le temps d’une étincelle, dans un ciel d’été. Le temps faisait son œuvre, nous nous quittions en nous promettant mille et une choses : Oui… nous sommes obligés de nous quitter. Oui… nous allons nous séparer. Pas pour longtemps. Juste le temps de faire des études, de trouver un job. Et puis, la vie est pleine de surprises. Nous allons sûrement nous revoir un jour, et entreprendre des projets ensemble.
Promesses, larmes, embrassades, chagrin… Le tout est noyé dans les dédales des sentiments encore inconnus.
Cela faisait tout de même quelque chose d’avoir quelqu’un à qui penser. Cela nous permettait de nous sentir désirées, adulées, et aimées !!! Même si c’était faux !
Peu importe ! c’était l’époque des illusions, et l’âge où tout était permis !
Mais voici que l’âge adulte nous surprend. Nous traçons alors d’autres projets, et finissons par nous oublier. La plaie se cicatrisait sans trop de mal, et nous nous retrouvons à nous demander si vraiment nous avions connu l’amour.
Youcef était différent de tous les garçons que j’avais rencontrés… Enfin, je le pensais.
C’était un jeune homme très attirant et très réservé. Il dégageait une impression de bien-être, et je me sentais sereine en sa compagnie.
Nous étions des compagnons du métier. Nous étions appréciés par nos supérieurs. Si bien, qu’on avait fini par nous accorder tel un violon. Nous étions la paire qu’il fallait pour la couverture des grands évènements et les missions. Il faut le reconnaître aussi, nous étions heureux de bosser ensemble car nous savions nous compléter pour rehausser le niveau de nos couvertures et remettre un compte rendu professionnel des mieux élaborés.
Youcef partageait mes idées et lisait les mêmes œuvres que moi. Mieux encore, plus le temps passait, plus je découvrais en lui des facettes cachées qui me surprenaient agréablement. Il avait un penchant pour le cinéma mondial et la grande musique… Il aimait les voyages et le sport… Il aimait la bonne cuisine et le décor feutré des appartements meublés avec goût. Il nous arrivait d’écouter des tubes de grandes stars orientales ou occidentales, et nous étions tous les deux emportés par les vagues d’un luth discipliné ou d’une guitare enjôleuse. Youcef aimait le flamenco et moi aussi… Youcef aimait Van Gogh et Auguste Renoir et moi aussi… Youcef appréciait l’opéra et moi aussi. En bref, Youcef aimait les belles choses et… moi aussi !
Nous nous découvrions tous les jours des goûts réciproques et nous tentions de nous maintenir à la même enseigne afin de ne pas nous perdre dans nos illusions.
Mais nous n’étions plus des adolescents… Nous étions des adultes… Des adultes mûrs et assez consciencieux.
Lorsque Youcef me proposera le mariage, je demeurais un moment sans voix !
Enfin me dis-je… que pouvais-je attendre de mieux chez un homme qui m’appréciait et dont je partageais pratiquement tous les penchants ?
7 août 2013 à 1 01 36 08368
Illusion 63e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Il fait quelques mouvements avant de s’approcher de moi :
-Tu as enfin compris ce que c’est que l’inquiétude.
-Pourquoi ? Je suis sans cœur ?
-Eh bien j’avais tendance à le penser, lorsque tu passais de longues soirées à palabrer à la rédaction, sans même avoir l’obligeance de téléphoner.
-Mais du moins, tu savais où j’étais.
-Non. Je n’étais pas censé le savoir. Par contre, ce que je savais, c’est que tu étais loin de chez toi, loin de ta famille, et tu ne te souciais même pas de nous.
-Ce n’est pas vrai. Je finissais toujours par me montrer.
-Eh bien vois-tu ! Moi aussi j’ai fini par me montrer.
Je voyais rouge. Je perdais mon sang-froid. Un seul geste de lui, et je n’en garantissais aucune retenue.
Mais Youcef se dirige vers la salle de bains sans un mot.
-Je ne vais tout de même pas le laisser me marcher sur les pieds. !
Il doit payer pour tout le calvaire que j’avais enduré dans la soirée.
Lorsqu’il revint dans la chambre, j’étais prête à entamer ma journée. Lui par contre ne semblait pas pressé. Il s’était rasé, douché et sentait bon l’eau de toilette.
Je lance une dernière flèche :
-Tu as un rendez-vous galant ?
Il hoche la tête :
-Peut-être.
-Je ne plaisante pas. Je me suis fait un sang d’encre. Je ne savais pas où tu étais. Et te voilà ici à me narguer.
Il sourit :
-Je ne te nargue pas. Je ne suis pas censé le faire d’ailleurs.
-Alors pourquoi ne me dis-tu pas où tu as passé la soirée ?
-A un débat électoral. Je t’avais prévenue.
-Ne me fais pas marcher. Il était deux heures du matin, et tu n’étais pas encore rentré.
-Eh bien tout simplement parce que le débat s’est éternisé. Il y avait deux partis politiques en ligne.
-Et ton portable? Pourquoi l’avais-tu donc éteint ?
-Mais alors, mais alors ! Tu deviens fada ! Tu sais bien que lors de mes couvertures je ne pouvais être dérangé. Ma parole ! On dirait que tu n’es pas du métier !
On aurait pu s’arrêter là, si mon instinct de femme ne s’était pas mis en alerte. Quelque chose dans l’attitude de Youcef me disait qu’il mentait. Pour la première fois depuis notre mariage, je sentais que mon mari ne disait pas la vérité.
J’arrive à la rédaction vers la mi-journée. Mon article avait fait la une. Une grande photo de la manifestation de la veille trônait au milieu de la première page.
D’autres journaux avaient rapporté l’événement.
Quelques-uns relatèrent même mon agression.
Des messages de sympathie me parvenaient à chaque minute.
Des collègues vinrent s’enquérir de ma santé. Mes collaboratrices déposèrent sur mon bureau des bouquets de fleurs et des cartes comportant des petits mots gentils. Tout le monde voulait me rencontrer. Youcef avait prévenu les journalistes, la veille, que j’avais quitté l’hôpital.
Personne ne s’attendait à ce que je sois à la rédaction dès le lendemain.
-On voulait venir te rendre visite, mais Youcef nous a dit que tu avais quitté l’hôpital.
-Femme courage. Une femme courage que tu es, me lance un autre collègue.
- Dire que c’est une femme qui s’est attaquée à toi, rétorque une collaboratrice.
La photographe qui m’avait accompagnée la veille s’approche de moi, un paquet de photos à la main :
-Tenez. Voici les prises d’hier. Je pense que vous aimeriez revenir sur le sujet. Ou du moins comprendre ce qui s’est passé.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 38 08388
La nouvelle de Yasmina HananeMercredi, 06 Février 2013 09:50Facebook Imprimer Envoyer Réagir
Illusion 64e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Je touche mes pansements, oui, ils sont toujours là. Je devrais repasser à l’hôpital en fin de journée pour les changer.
-Je suis belle ainsi accoutrée. Une nouvelle mode pour les nanas, rétorquais-je.
Tout le monde rit sauf la photographe. Elle prend un air outré et s’approche de moi davantage :
-Vous ne voulez pas rencontrer celle qui vous a agressée?
-Pourquoi faire ?
-Elle est en garde à vue au commissariat de police où on attend votre déposition.
- Ce ne sera pas nécessaire. Je passe l’éponge. Téléphonez pour qu’on la libère.
-Vous n’y pensez pas !
-Mais si, je le pense.
-Vous savez au moins pourquoi elle vous a agressée ?
-Une réaction légitime de la part d’une femme qui n’épouse pas mes idées.
-Mais non, ce n’est même pas ça, cette femme est contre toutes celles qui veulent évoluer. Pour elle, une femme comme vous, n’en vaut pas la peine. Vous êtes toutes des voleuses d’hommes !
-Des quoi ?
La photographe pousse un soupir :
-Cette femme est en colère contre les femmes du monde entier, et en particulier contre toutes celles qui veulent avancer. Elle est victime de son esprit possessif.
-Pourquoi est-elle possessive ?
-Eh bien, elle n’admet pas le fait que son fils unique la quitte. Il est parti il y a de cela deux ans pour faire sa vie de son côté.
- L’esprit critique. Je vois : la belle-mère qui en veut à la belle-fille d’avoir pris son fils. Elle oublie qu’elle-même avait pris le fils d’une autre. Belles-filles nous subissons, et belles-mères nous faisons subir.
Les coups de marteau reprenaient de plus belle dans ma tête. Je n’étais pas en assez bonne forme pour reprendre le boulot. Et pourtant j’étais là.
Je jette un coup d’œil sur les photos prises la veille. Elles étaient formidables. Un beau travail. Tout s’étalait là, tel un film muet, mais très expressif.
-Tu as fais du bon travail. Mais pour la femme qui m’a agressée, il ne faut pas trop s’en faire. Je vais téléphoner au commissariat et demander qu’on la libère.
Elle hausse les épaules :
-Comme vous voudrez.
-Je ne devrais pas donner un mauvais exemple n’est ce pas ?
Mes collaboratrices se mettent à rire :
-Vous êtes le bel exemple vous-même.
-Bien ! et maintenant dites-moi ce qu’il y a comme matière.
-Des femmes sont venues prendre de vos nouvelles ce matin. Nous les avons rassurées. Des lecteurs n’ont pas cessé d’appeler. Vous êtes très sollicitée. L’incident d’hier n’est pas passé inaperçu. Il a même rehaussé votre notoriété.
Je fais un geste de ma main :
- Qu’à cela ne tienne. Je ne peux pas recevoir trop de monde aujourd’hui. Je me sens si fatiguée. Vous allez devoir faire face à toutes les réactions. Je compte sur vous pour remercier toutes celles et tout ceux qui s’étaient inquiétés pour moi.
Je quitte la rédaction, non sans avoir auparavant appelé le commissariat de police pour demander qu’on libère mon agresseur.
Quelques adhérentes de l’Association des femmes en difficulté avaient voulu me rencontrer, mais j’ai refusé.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 39 08398
Illusion 65e partie
Par : Yasmine HANANE
.
D’autres associations ne cessaient d’appeler, ou d’envoyer des e-mails… Quelques femmes d’affaires, des politiciennes et même des femmes au foyer, s’étaient déplacées jusqu’à la rédaction pour avoir de mes nouvelles.
Je ne pouvais recevoir tout ce monde, j’étais cependant heureuse de tout cet élan de sympathie que mon agression avait suscité.
Ayant passé une nuit cauchemardesque, je décide de rentrer chez moi, je repense à Youcef et à son entêtement. Pourquoi a-t-il donc préféré dormir sur la tapis du salon, et non dans son lit ?
Je connaissais déjà sa réponse au cas où je lui en poserais la question : pour ne pas me déranger.
Mais j’étais frustrée, frustrée à l’idée que mon mari ne voulait plus de moi… Il était, certes, un peu en colère, mais ceci n’explique pas, ou ne justifie pas son comportement de la nuit dernière. Et puis, et puis quoi… Il avait pratiquement passé la nuit à l’extérieur, en prétextant cette couverture. Ce débat politique auquel je n’en crois pas un mot.
Je conduisais d’une main nerveuse. Je voulais arriver chez-moi avant le départ de la nurse. D’habitude c’était Youcef ou quelqu’un d’autre qui gardait Mehdi jusqu’à mon retour. Ces derniers jours, j’étais si occupée que souvent je faisais appel à ma belle- sœur ou à ma mère, mais je n’étais pas fière de moi, non vraiment pas fière… J’étais devenue esclave de mon métier et de mes idées libératrices.
Malgré ma réussite et mon succès, il était temps que cela change, il était temps de déposer les armes et de céder le terrain.
Mais je savais que mon retrait de la rubrique féminine ne sera pas facile. C’est un fardeau que j’avais moi-même édifié sur mon propre dos ! Qui voudrait donc le reprendre ?
Je ne me plains pas de ma carrière journalistique. Bien des jeunes femmes de ma génération auraient aimé avoir mon parcours et un CV aussi riche que le mien.
J’étais encore jeune et ambitieuse aussi. Peut-être vais-je lancer un autre “jeu” médiatique…
Je souris à cette pensée, ma rubrique n’était pas un jeu. Elle était trop sérieuse, trop profonde, et trop pénalisante aussi. J’ai contribué à rehausser le prestige de la femme. J’ai redonné l’espoir à des femmes opprimées et moi… ?
Je jette un coup d’œil à mon visage dans le rétroviseur du véhicule.
Je n’étais pas belle à voir, avec mes pansements sur le crâne, les contusions sur mes joues et mes lèvres sèches…
Depuis quelque temps déjà je ne me maquillais plus, je ne faisais même pas attention à ma silhouette. Je mangeais du n’importe quoi à n’importe quel moment, j’avais des bourrelets autour de la taille, et un double menton. Le constat m’effraie, je n’avais plus de féminité, rien, même pas un effluve de parfum.
Je ne me rappelle plus quand j’étais passée chez ma coiffeuse. Mes cheveux en broussaille poussaient dans tous les sens.Youcef me fuit, il avait raison, je ne ressemblais plus à une femme, plus à la jeune insoucieuse qu’il avait connue, aimée et épousée.
Je vais changer !
Je donne un coup de frein rageur :
Je vais changer. Et de comportement, et de tête. Je ne devrais pas laisser le temps m’emporter comme une feuille morte dans un tourbillon d’évènements plus débiles les uns que les autres.
Je passe à l’hôpital où on procéda au changement de mes pansements. La plaie s’était refermée, il n’y avait aucune crainte d’infection. L’infirmière se contenta de déposer un petit carré blanc sur un côté de ma tête :
- Là, on le voit moins ce pansement, vos cheveux sur les côtés vous aident à le camoufler…
- Vous avez rasé une belle touffe de ce côté-là.
- Il le fallait bien, nous ne pouvions pas suturer la plaie sans cela. Et puis, les cheveux repoussent vite. Votre coiffeuse se fera un plaisir de vous changer de tête tout en camouflant votre blessure.
Je rentre à la maison au bon moment. La nurse s’apprêtait à partir. Mehdi regardait des dessins animés à la télévision. Il était aussi sage qu’un ange.
Je me demandais si je devrais appeler Youcef pour lui proposer une sortie. Un dîner en famille, histoire de changer un peu notre quotidien devenu trop routinier.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 41 08418
Illusion 66e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Je pourrais prendre Mehdi car je ne pense pas qu’on va trop tarder. Et puis le petit doit s’ennuyer comme pas un. Cela fait des lustres qu’on n’a pas pensé à le promener, ne serait-ce qu’au parc d’à-côté.
La sonnerie de mon mobile me fait sursauter. C’était justement Youcef. Je m’empresse de répondre :
-Salut, je m’apprêtais justement à t’appeler, on dirait que tu lis dans mes pensées.
-Dans tes pensées non, mais je peux deviner que tu es à la maison.
-Tiens ! Comment le sais-tu ?
-J’entends les babillements de Mehdi.
-C’est vrai je suis à la maison. Heu… et toi… tu rentres bientôt ?
Un silence, puis mon mari me lance d’une voix hésitante :
-Justement non. Je voulais te prévenir que je ne rentrerai pas tôt ce soir non plus.
Je ne pouvais me retenir davantage :
-Quoi ? Tu va encore rentrer à l’aube, un autre débat ?
Tu ne vas pas me faire croire de telles sornettes.
-Heu, non. Pas un débat, un dîner entre amis. Je ne pouvais me dérober. Cela fait déjà bien longtemps que je ne les ai pas revus, et chaque fois je déclinais leur invitation. Ce soir, c’est un peu différent, un ancien camarade de classe vient de rentrer d’Europe, après des années d’exil. Je ne peux pas refuser…
-Mais si, tu peux, tu n’auras qu’à leur dire que tu sors avec ta femme et ton fils.
-Voyons, je ne vais pas revenir sur mes dires. Comprends donc un peu ma gêne devant eux.
-Je comprends que tu préfères tes amis à ta famille, moi qui voulais qu’on dîne ensemble ce soir.
-Quelle surprise ! Depuis le temps qu’on ne voit plus ton ombre à la maison avant minuit. Aujourd’hui comme par hasard, tu veux qu’on sorte. Que se passe-t-il donc?
-Rien, je voulais juste changer un peu, sortir de la routine. C’est pour cela que je suis rentrée tôt.
-Tara ta ta… je vois plutôt une autre raison.
-Laquelle ?
-On t’a tellement harcelée à la rédaction que tu as préféré prendre la clé des champs.
-Pas exactement, j’ai fait un saut juste pour tâter le pouls, je me sentais trop fatiguée pour y passer la journée.
-Désolée ma chérie, nous reporterons ce dîner pour un autre soir. Je vais tâcher de ne pas trop tarder.
J’allais riposter, mais il avait déjà raccroché.
Je regarde mon portable dans la main, avant de le jeter avec rage contre le mur.
Je sentais des larmes de détresse rouler sur mes joues. Je n’avais pas une vie de famille !
Mehdi me regardait, je m’approche de lui, et il se met à caresser mon visage mouillé.
-Tu vois mon fils, je suis toujours une vilaine maman, mais ton papa devient aussi vilain que moi ces derniers temps, et il ne veut pas le reconnaître.
Mehdi souriait, et ses fossettes se creusèrent.
Il était si mignon, si adorable, que je le prends dans mes bras et me met à l’embrasser de toutes mes forces. Je lui chatouille le cou, puis la nuque, et il se met à rire aux éclats.
Mon fils était devenu pour moi, ma seule consolation dans ces moments de détresse.
Je lui prépare sa ration de purée, et lui fait manger un pot de yaourt. Rassasié, il s’endort sans trop de mal.
Je me retrouve alors seule ; la maison était plongée dans un silence que n’interrompait que le tic-tac de la pendule.
Les minutes s’égrenaient. Je n’avais ni faim ni envie de faire quoi que ce soit.
Je décide de prendre un bain, cela va sûrement me détendre.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 43 08438
Illusion 67e partie
Par : Yasmine HANANE
..
Je paresse un moment dans la baignoire, où le moindre petit mouvement me faisait mal.
Mes contusions se réveillaient au contact de l’eau chaude. Le sang se décongestionnait dans mes veines. Je retire tout doucement le pansement de ma tête et décide de me faire un shampooing. Ce qui n’était peut-être pas trop conseillé dans mon état. Mais tant pis. Après le bain, je pourrais désinfecter la plaie.
Je me laisse aller à mes idées, à mes projets. Je caresse l’eau entre mes doigts, et sent du bien-être.
Il va falloir que je discute au plus tôt avec mon mari de ma décision de changer de rubrique. Je ne veux plus vivre sous les feux de la rampe. La célébrité, la réussite, c’était bien beau, mais à quel prix !
Je comprenais beaucoup mieux maintenant les états d’âme des grandes stars. La plupart d’entre-elles finissaient souvent par un suicide, alors qu’elles avaient tout à portée de main. En fait, elles avaient compris que le bonheur n’était pas dans ces paillettes et ce monde d’or et d’argent qu’elles côtoyaient tous les jours.
Le bonheur pourrait être tout près, dans le sourire d’un enfant ou l’amour d’un mari. Et puis, tant pis… tant pis pour le reste, si on peut frôler le paradis par un simple regard. Le succès et l’argent ce n’était rien à côté de ce qu’on pouvait gagner au contact des êtres aimés.
Je repense à Youcef. Ces derniers temps, il a dû se sentir bien seul. Souvent, à mon retour à la maison, je le trouvais occupé à changer Mehdi ou à lui donner son biberon.
Il ne voulait pas me contrarier dans mes projets. Même ses reproches ne m’atteignaient pas. Je n’en faisais qu’à ma tête, alors qu’il avait suffit qu’il rentre tard, une fois, pour que je monte sur mes grands chevaux.
Il faut que tout cela change, il faut que tout redevienne normal. Je ne pouvais pas continuer ainsi. Ma mère avait raison de me mettre en garde contre la folie de mes ambitions.
Je sortis de la salle de bains, aussi fraîche qu’une fleur… Je me sentais si bien après cette “escapade” au fond d’une baignoire.
Je me sèche les cheveux en prenant soin d’éviter ma plaie. Je prends un coton imbibé d’alcool et le passe sur les sutures. Je devrais penser à remettre un pansement, une fois mes cheveux secs.
Dès qu’on me le permettra, je passerais chez ma coiffeuse pour une coupe, et même une teinte. Je vais changer la couleur de mes cheveux, celle que j’avais devenait terne au fur et à mesure que je négligeais son entretien. Je n’avais même pas pensé à camoufler convenablement les quelques fils blancs qui commençaient à encadrer mon visage.
Après mon bain, je retrouve une meilleure mine. Et puis, j’avais faim. Depuis quand n’avais-je pas avalé quelque chose ?
Je cours à la cuisine me préparer une soupe et une salade variée. Je termine mon dîner avec quelques fruits.
Après ce diner revigorant pris en solitaire, je sentais le sommeil alourdir mes paupières.
Rien de tel pour me sentir d’aplomb. Je ne vais pas rater le coche ce soir, le travail pourra attendre.
Mehdi ne se réveilla pas cette nuit. Ce qui fait que lorsque je me réveillais au petit matin, j’étais en pleine forme.
Mais mon enthousiasme s’envola en une seconde : Youcef n’était pas rentré.
Je pensais qu’il voulait me faire une farce en s’endormant au salon, ou dans la chambre de Mehdi, mais un tour dans l’appartement confirma mon premier constat. Mon mari a passé la nuit dehors.
Le dîner s’était-il prolongé jusqu’au matin?
Je jette un coup d’œil à mon réveil, qui indiqua huit heures trente.
Mehdi s’était réveillé et jouait dans son berceau.
Je cours le prendre dans mes bras, avant de tenter de joindre Youcef.
Mais tout comme la veille, son mobile était éteint. Et tout comme la veille, mon instinct m’alerta sur quelque chose que je n’arrivais pas à définir.
Mon mari me mentait !
Je ne savais pourquoi j’avais de tels pressentiments. Je tente de balayer cette mauvaise pensée. En vain… La voix silencieuse et sûre, remontait des tréfonds de mon âme : Youcef me mentait.
La nurse arriva avec une demi-heure de retard. Mais aussi préoccupée que j’étais, je n’en lui fis même pas le reproche.
Je revins dans ma chambre pour tenter de joindre encore une fois mon mari sur son portable.
Rien !
Mais où était-il donc passé ?
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 44 08448
Illusion 68e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Je n’étais pas à proprement parler inquiète. Mais plutôt furieuse. J’avais l’impression qu’on me menait en
bateau.
Mon téléphone se met à vibrer. Je regarde le numéro. C’était encore “Les femmes en difficulté”.
Je décroche nerveusement, avant de débiter :
-Quoi encore, que me voulez-vous, ce qui m’est arrivé ne vous suffit pas ?
Une voix timide me répond :
-Excusez-moi. Je suis la secrétaire générale, la femme qui est passée vous voir à la rédaction. Nous sommes désolées pour tout ce qui vous arrive. Malgré vos blessures, vous avez fait un papier extraordinaire.
Nous sommes toutes très fières de vous. Je ne devrais pas appeler si tôt, mais c’était juste pour vous informer que nous avons organisé une petite réception en votre honneur vers la mi-journée au siège de notre association. Nous tenons vraiment à ce que vous soyez présente.
-Très sympa. Mais vous m’en voyez navrée, je ne pourrais pas assister. Je suis très prise ces derniers temps.
-Même pas pour une petite demi-heure. Nous avons pensé que…
-Non. Je ne pourrais pas assister. Je suis désolée. Je n’aimerais pas qu’on me dérange davantage. Mes nerfs sont à fleur de peau ces derniers temps. J’ai assez d’ennuis comme ça. S’il vous plaît laissez-moi tranquille.
Je raccroche et éteins mon portable. Puis je me rappelle Youcef. Je rallume l’appareil et recompose son numéro. Rien. On dirait que la terre l’avait englouti !
Je m’habille hâtivement avant de quitter mon appartement et de descendre quatre à quatre les escaliers de l’immeuble.
Je n’avais pris que mes papiers, et les clefs de mon véhicule. J’avais oublié mon portable !
Non ! Mon dieu, je vais devenir dingue !
Je m’apprêtais à remonter chez moi lorsqu’une voix m’interpelle :
-Que fais-tu donc dehors à cette
heure-ci ?
Je me retourne vivement. C’était la voix de mon mari. Il était garé non loin de moi et me souriait :
-Où vas-tu donc si tôt ?
Je n’arrivais pas à prononcer un mot, mais je lui lançais un regard qui en disait long sur mes pensées. Non seulement il n’était pas rentré de la nuit, mais il ironisait sur mon inquiétude !
J’avais envie de l’étrangler !
Il descendit de son véhicule et s’approcha de moi :
-Je suis désolé. Nous avons un peu prolongé ce dîner. J’ignorais qu’il faisait déjà jour au moment où je m’apprêtais à rentrer.
Il tente de me prendre la main, mais je devance son geste :
-Ne me touche pas. Tu es inconscient. Pourquoi n’as-tu pas pensé à appeler ?
Il hausse les épaules :
-Je ne pensais pas tarder autant.
-Ah bon ? Monsieur s’était embringué dans les folies nocturnes avec des… Avec qui tu étais donc ?
- Je te l’ai déjà dit. Des amis que j’avais perdu de vue depuis très longtemps.
-Je n’en crois pas un mot. Vaut mieux me dire toute la vérité.
-Quelle vérité ? Je te jure que j’étais avec d’anciens copains. Tu ne me crois pas ?
-Non.
-Comme tu veux. Je te rappelle seulement que nous sommes à l’extérieur de l’immeuble, et qu’on risque de nous surprendre ou d’entendre nos éclats de voix.
Je hausse les épaules :
-Eh bien tant pis. Tu l’auras voulu.
-Remontons chez nous. Cela vaudrait mieux pour une causette en tête à tête.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 45 08458
Illusion 69e partie
Par : Yasmine HANANE
.
- Qu’ai-je donc fais de ma vie ?
Ma migraine reprenait et je porte la main instinctivement à la plaie.
- Oh ! j’ai oublié de remettre un pansement. Elle est sûrement infectée à présent. Je devrais repartir à l’hôpital au plus tôt.
Youcef m’entraîne vers les escaliers. Nous remontons chez-nous.
Je me dirige vers ma chambre et il
me suit.
Les mains sur les hanches je donne libre cours à ma colère :
- Alors… on joue à l’école buissonnière ? On oublie qu’on a une famille, un enfant, une femme qui a passé la moitié de la nuit à t’attendre…Et puis au petit matin, elle découvre que tu n’es pas rentré. Pis encore, tu n’as même pas pris la peine de me contacter pour me prévenir que tu ne rentrais pas. Et puis… Et puis pourquoi as-tu éteint ton téléphone ?
- Je… je ne l’ai pas éteint… C’est la batterie… J’ai oublié de la recharger.
Je ne savais plus quoi faire. Ma méfiance reprenait le dessus…Mon mari me mentait. Cette impression, bien que je tente à maintes reprises de la chasser de mon âme, ne voulait pas me quitter.
- Allons… C’est fini, je suis désolé, je te prie de me pardonner.
Youcef s’approche de moi, mais je le fuis :
- Recule ! Je ne veux pas que tu me touches. Je ne sais pas d’où tu reviens.
Il ne répondit pas et se contenta de quitter la chambre.
Je me laisse tomber sur mon lit effondrée. Des larmes de rage coulaient sur mes joues. Je ne savais plus où j’en étais. Trop ! C’en était trop. Au moment où je voulais tout récupérer, me voici prise entre le doute et le mensonge.
J’entendis Youcef discuter avec la nurse, puis jouer avec Mehdi. Que vais-je faire maintenant ?
Fermer les yeux sur tout ce qui s’est passé et me rendre à la rédaction comme si de rien n’était ?
Une douleur me rappelle ma plaie infectée. Je porte la main à ma tête. Il était grand temps de m’occuper sérieusement de moi.
Sans dire un mot de plus, je passe devant mon mari et quitte la maison.
Une semaine passe. Youcef rentrait de plus en plus tard, mais ne se hasarde plus à passer la nuit dehors.
Je continuais à travailler sans relâche. Lui par contre, semblait plus détendu. Il ne quittait pas la maison très tôt, et revenait en fin de journée prendre un café et jouer avec le petit avant de ressortir.
Il avait l’air heureux et en
pleine forme.
Moi par contre, j’étais épuisée. Pas seulement par le travail, mais par l’atmosphère malsaine qui régnait chez-moi.
Je ne m’adressais plus à mon mari que pour des raisons valables. Nous faisions chambre à part. Je n’arrivais pas à lui pardonner ses escapades nocturnes. Mais, apparemment, il n’en avait cure, car il continuait à rentrer à des heures impossibles.
J’étais passée chez ma coiffeuse. J’avais changé de coupe de cheveux et de couleur mais il ne semble pas le
remarquer.
Je me suis mise à me maquiller discrètement et à porter des bijoux et des tenues très féminines.
Rien de ce côté-là non plus.
Je voulais qu’il sache que je voulais changer. Changer dans tout, dans mon boulot, dans mes habitudes, dans ma façon de m’habiller et de me conduire. Je voulais l’entretenir sur mon intention de changer de rubrique. Depuis quelques jours déjà, je n’écrivais plus d’articles.
Ma chronique était assurée par une collaboratrice. Il y a bien eu une réaction des lecteurs mais je ne voulais plus lire mon courrier. Je voulais changer… changer.
Youcef seul pourra m’aider mais… mais ne voilà-t-il pas que nous nous regardons en chiens de faïence !
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 48 08488
Illusion 70e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Des associations m’avaient contactée pour la prise en main de leurs actions. J’ai refusé. Je ne voulais plus devenir le bouc émissaire d’un objectif loin d’être atteint.
Maintenant je voulais vivre. Vivre pour moi, pour Youcef et pour notre enfant !
Qu’on me laisse donc en paix !
N’en pouvant plus, je prends Mehdi un matin, et me rendis chez ma mère.
Elle fut heureuse de me voir bien sûr, mais remarqua vite mon air outré et les cernes sous mes yeux :
- Que se passe-t-il ? Quelque chose ne va pas ?
Je fondis en larmes et me jette dans ses bras :
- Oh maman ! Maman ! J’ai gâché ma vie….
- Mais non ! Voyons, que dis-tu là ?
Elle me regarde et comprit :
- Quelque chose ne tourne pas rond entre toi et Youcef, n’est ce pas ?
Je hoche la tête et mes larmes redoublèrent :
- Je ne le reconnais plus. Il n’est plus l’homme que j’ai connu. Il… il a totalement changé.
Ma mère me serre contre elle et se met à me bercer comme lorsque, petite fille, je faisais des cauchemars la nuit.
- Allons, allons, calme-toi… Tout va s’arranger.
- Non… Non, je ne le pense pas.
Je renifle et me mouche avant d’essuyer mes yeux qui commençaient à enfler :
- Youcef rentre de plus en plus tard. La semaine dernière, il avait passé toute la nuit dehors. J’étais si inquiète au petit matin, que dès que la nurse était venue, je décidais de partir à sa recherche. Je l’ai rencontré au parking. Il était 8h30 du matin. Monsieur venait de se la rappliquer. Tu imagines un peu ma réaction, maman !
- Tu as fais tout une scène. Et tu as refusé d’entendre ses arguments.
- Quels arguments ? Mon mari me ment.
- Pourquoi dis-tu cela ?
- Mon mari me ment, maman. Je le sens. Je ne pourrais pas me tromper là-dessus. Mon instinct de femme est en alerte.
Ma mère me fait asseoir et me verse un café noir :
- J’aimerais que tu m’expliques un peu tes appréhensions, ma fille. Si je dois comprendre que tu doutes de ton mari, tu devrais m’en donner de bonnes raisons. Ne t’estime pas au-dessus des autres. Les hommes sont ce qu’ils sont. Mais avant de t’emballer, sois certaine de ce que tu avances.
- Je n’avance rien maman. Je… je me sens si malheureuse ces derniers temps. Youcef a un comportement inhabituel.
- Alors prends ton courage à deux mains et engage une conversation avec lui.
- Il ne veut rien savoir. Pour lui, c’est le boulot, les amis et je ne sais plus. Après la scène que nous avions eue la semaine dernière, nous ne nous parlons presque pas. Je n’aimerais pas qu’il prenne mon inquiétude pour une faiblesse.
- Et même si c’est le cas, où est le mal ? Après tout, Youcef est ton mari et le père de ton fils.
- Oui… c’est là le comble. J’ai toujours combattu. J’ai mis des femmes en garde contre les méfaits conjugaux. Et maintenant… et maintenant, je me retrouve moi-même ligotée par ces méfaits.
- Allons donc, il ne s’est rien passé. La crise passe, puis disparaît. C’est pareil chez tout le monde.
- Non, pas chez moi. Je me sens comme ce cordonnier mal chaussé.
- Hum… tu vois où te mènent tes prétentions ?
Je hausse les épaules :
- Je n’ai rien fait de mal. J’ai juste voulu secouer les consciences. Le monde entier vit à l’heure de la technologie et du progrès. Et nous, nous sommes encore à nous demander si on peut instaurer un compromis entre l’homme et la femme.
- Cela aussi se passe partout dans le monde. Oublies-tu donc ce que tu écrivais dans tes articles : la femme qui demande l’égalité doit modérer sa supériorité. C’est un conflit vieux comme le monde. Nous en avions discuté à maintes reprises. Rappelles-toi aussi que je t’avais mise en garde. Je savais que Youcef finirait un jour par craquer. Non pas parce que tu réussis mais parce qu’il a besoin de toi. Ton mari a besoin de sentir ta présence auprès de lui. Tous les hommes sont comme des enfants. Ils recherchent l’affection de leur mère chez toutes les femmes qu’ils rencontrent. C’est pour cela qu’il y a des maris qui ne font pas long feu de leur mariage.
- Tu crois que Youcef me trompe ? dis-je en reniflant.
Ma mère sourit :
- Tu es jalouse ? Et si c’est la réalité… la triste réalité ? Que feras-tu ?
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 50 08508
.
Illusion 71e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Je bondis :
-Je les tuerais. Lui et cette nana voleuse d’homme avec qui il est.
Ma mère souriait toujours :
-Ah ! parce que tu vas connaître cette nana ? Non ma fille. Un homme qui décide de tromper sa femme a des raisons que la raison elle-même ignore. Alors tromper pour tromper… Il continuera à cavaler. Il te trompera avec toutes les femmes qu’il rencontrera sur son chemin.
-Alors, je le tromperais moi aussi.
Ma mère hoche sa tête :
-Facile à dire ! Tu ne le feras pas.
-Pourquoi donc ?
-Eh bien parce que tu n’es pas taillée dans cette étoffe. Et puis, malgré les tempêtes passées et présentes, tu aimes encore ton mari. Tu aimes ton fils. Tu ne pourras jamais les quitter pour courir un autre homme. Quel que soit le degré de ta vengeance. Tes impulsions présentes sont dictées par ta colère. Ta révolte contre ton mari t’ouvre enfin les yeux. Tu veux le voir revenir vers toi, car tu tiens à lui.
Je baisse la tête. J’avais honte. Honte de moi-même.
Youcef avait toutes les raisons de m’en vouloir. Je l’avais ignoré ! C’est un peu comme revenir à la maison après un long exil. Je ne voyais que mes ambitions. Ma réussite professionnelle. D’autant plus que le succès que je rencontrais dans mes initiatives de défendre les femmes m’avait aveuglée, au point que je ne vivais plus que pour moi-même. Je me rappellerai toujours l’anniversaire de mon fils ! Comment Youcef s’était-il donc senti devant tous ces regards inquisiteurs qui attendaient de lui un geste ?
Mais il avait tout supporté sans broncher. Par contre, moi, j’avais réagi en me comportant comme une idiote.
Je ne suis pas déçue de ma carrière. Non. Je peux encore la mener à bon port. Mais je me sentais plutôt déprimée par ma conduite.
Mon mari avait besoin de moi. Mon fils aussi. Mais j’étais toujours loin d’eux.
Ma mère avait raison. Elle n’avait fait que confirmer ce que j’avais déjà prévu. Je voulais changer !
Je revins à la maison avec Mehdi. Il s’était endormi dans la voiture, et je le pris dans mes bras.
-Laisse, je vais le porter.
Je me retourne en reconnaissant la voix de mon mari :
-Tiens ! Tu rentres tôt aujourd’hui. Il n’est même pas 17h.
-Tu n’apprécies pas ?
-Bien sûr que si.
Il prend Mehdi et me précède. Nous nous retrouvons chez nous tous les deux comme au début de notre mariage.
Youcef avait enlevé ses chaussures à l’entrée. Il dépose Mehdi dans son lit, et revint dans la cuisine, où je me suis mise à préparer le café.
-Alors, tu n’as pas travaillé aujourd’hui ?
-Non. J’ai pris Mehdi. Je me suis rendue chez ma mère.
-Comment va-t-elle ?
-Bien. Elle te passe le bonjour.
Youcef me prend la cafetière des mains et va la poser sur la table :
-Nous allons prendre enfin un café en tête à tête comme au bon vieux temps. Allez, passe-moi ta tasse, je vais te
servir.
Je tendis ma tasse, et Youcef me sert la boisson chaude, avant de s’asseoir et de s’en verser à lui-même.
Il semblait plus détendu.
Je ne sais pas pourquoi, mais je constatais que son attitude envers moi avait changé.
Il se met à tourner sa cuillère dans sa tasse puis me regarde :
-Je voulais t’entretenir de quelque chose.
Je relève la tête et le regarde dans les yeux :
-De quoi veux-tu me parler ?
Il prend une gorgée de café et me dit d’une petite voix :
-Je vais te quitter.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 51 08518
Illusion 72e partie
Par : Yasmine HANANE
.
La maison se met à tourner. Je sentis mes muscles se raidir. Une bouffée de chaleur remonte le long de mon corps. Ai-je bien entendu ?
Il reprend calmement :
- Je vais te quitter pour quelques jours. Une mission à l’étranger… Un séminaire que je ne voulais pas rater.
Le sang revint dans mes veines.
- Tu pars quand ?
- Dans une semaine.
- Je t’accompagne.
- Pardon ?
- Je t’accompagne. Moi aussi je suis une journaliste. Ton séminaire c’est quoi au juste ?
- Un recyclage. Une sorte de stage dans la communication et les médias. La publicité par Internet et tout le reste.
- Mais c’est très intéressant ! Qui parraine ?
- Le journal.
- Comment se fait-il qu’on ne m’ait pas mise au courant ?
- Tu n’étais pas au bureau. Cela fait des jours que tu n’écris plus.
C’était vrai.
- Ce n’est pas une raison pour m’écarter. J’ai donné le meilleur de moi-même ces derniers temps. Et puis tu aurais pu m’en informer.
Il secoue sa tête :
- Non, je ne voulais pas que tu participes à ce séminaire, voilà tout.
- Pourquoi ? Parce que je suis une femme ? Parce que je suis celle qui défend mes semblables ?
La moutarde me monte au nez. Ma voix commençait à s’élever. Mehdi s’était réveillé et pleurait dans son lit.
- Tu vois, tu as réveillé le petit.
Je donne un coup de poing sur la table :
- C’est toi le premier coupable. Quoi ? Tu croyais que j’allais me taire alors que tu prends des initiatives à ma place. Qui es-tu donc ?
- Ton mari… et le père de ton fils.
J’allais répliquer lorsque je me rappelle tout ce qui avait été prévu. Je voulais rentrer tôt pour enterrer la hache de guerre. Et ne voilà-t-il pas que je la déterre. Je ne pouvais pas deviner que Youcef prenait des décisions à ma place tout de même !
Je cours prendre Mehdi dans mes bras et revint dans la cuisine. Youcef terminait de siroter son café. Il se lève :
- Bon, je vais ressortir.
- Où vas-tu ?
- Quelque part dans la nature pour oublier la scène que tu viens de faire.
- Ce n’est pas de ma faute. Tu veux prendre les devants. Tu veux te prouver à toi-même que tu es le maître à bord. Je ne te laisserais pas faire. Je participerais à ce séminaire, et adviendra que pourra.
Il hausse les épaules :
- A ta guise !
Il était déjà en train de se rechausser. Tiens, je ne me rappelle plus depuis quand il n’avait pas eu le reflexe de se déchausser à l’entrée. Cela fait bien longtemps…
Il me regarde et poursuit :
- Fais ce que tu veux. Je te préviens seulement : en cas de pépins ne viens pas pleurnicher.
- Quels pépins ? On ne va pas m’égorger quand même. Qu’essayes-tu de me cacher ?
- Moi ? Rien !
-Si, tu me caches des choses. Depuis deux semaines environ, tu sors au crépuscule pour ne revenir qu’aux premières lueurs du jour. Où te rends-tu ? Avec qui passes-tu tes soirées ? Ne me prends surtout pas pour une gourde. Je ne croirais pas à tes sornettes. Ce n’est pas pour le boulot, je me suis renseignée.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup
7 août 2013 à 1 01 52 08528
Illusion 73e partie
Par : Yasmine HANANE
.
Youcef garde le silence quelques secondes, avant de s’approcher de moi en souriant. Il me prend par les épaules et m’attire vers lui :
- Enfin te voici ! Tu reviens… Tu reviens vers moi… Ta jalousie prouve que tu m’es encore attachée.
Je n’en revenais pas. Il continue :
- Je me disais qu’il fallait faire quelque chose, avant que cela ne soit trop tard. Ta mère m’avait proposé une solution. Ma foi, je ne pouvais tomber sur une meilleure complice. Nous avons ensemble échafaudé un plan.
J’avais du mal à le suivre… Ai-je bien entendu ? Ma mère et Youcef… Un plan… Pourquoi ? Pour me faire prendre conscience. Mais je voulais changer moi aussi !
Youcef poursuit :
- Le meilleur moyen pour nous de te secouer, était de te faire croire que j’avais quelqu’un d’autre dans ma vie. Au début, cela n’avait pas trop marché. Mais par la suite, je sentais que tu commençais à douter réellement de mes sorties nocturnes. J’étais heureux de constater que tu t’en inquiétais. Le courant ne passait pas bien entre nous, mais j’ai tenu bon. Ce n’était pas facile. Je faisais chambre à part, alors que tu embellissais de jour en jour. Une torture pour mon cœur ! J’ai déployé des tonnes de patience afin que tu me reviennes telle que je t’avais toujours connue. Mais tu étais loin de moi… Tu t’éloignais de plus en plus. Ce n’est pas que je sois contre tes ambitions, bien au contraire, mais ta réussite t’aveuglait. Tu ne vivais plus pour ta famille. Tu vivais pour la rédaction. Pour les autres… Pour ces femmes que tu consolais, alors que moi je me morfondais dans mon célibat forcé. Combien de fois ta mère a-t-elle voulu redresser la barre ? La pauvre femme craignait le pire pour nous. Et puis, le jour où tu as été agressée, elle avait décidé de prendre les choses en main elle-même. Nous nous étions mis d’accord pour te récupérer, car tu ne savais plus où tu en étais. Mehdi s’était endormi dans mes bras, mais je n’avais pas le courage d’aller le déposer dans son lit. Je buvais les paroles de Youcef. La symbiose que je voulais atteindre était là. Youcef avait voulu me rappeler au rivage de la sérénité, mais moi, je n’en avais cure…
Je ne voyais que mon succès… heu… quel succès !? J’ai failli détruire mon foyer !
Et puis, il y avait quelque chose qui m’échappait : ma mère !
Le matin même j’étais chez-elle. Elle ne m’en avait rien dit ! Pourquoi s’était-elle assignée en moralisatrice, allant jusqu’à appuyer mes doutes, alors qu’elle-même avait encouragé Youcef à quitter la maison, et à passer ses soirées chez-elle.
- Nous avions peur que tu ne découvres le pot aux roses.
- Mais… mais… je ne comprends pas… tu n’avais pas le droit de déserter ton foyer.
- Tu le faisais toi aussi. Rappelle-toi tes retours tardifs et tes missions. Tu ne voulais même pas prendre en considération mes conseils. A la rédaction, on ne voyait que du feu. Mais ici, c’est toute la réalité qui s’étale devant nos yeux. Je ne voulais pas que notre couple soit brisé. Que notre vie soit un échec. Nous n’avons pas le droit de faire ça. Il passe une main caressante sur la tête de Mehdi :
- Ni pour nous ni pour notre fils.
Quelque chose d’humide coule sur ma joue… C’était bien sûr des larmes. Je ne pouvais rester insensible à tant d’amour et de sincérité. Youcef m’aime, et je sentais que je ne pourrais jamais aimer un homme autant que lui. Il avait tout supporté pour moi : mes colères, mes caprices, mes bêtises, mon ignorance envers lui… Quel autre homme supporterait tout ça ?
Il m’essuie les joues et m’embrasse sur le front avant de prendre Mehdi :
- Il s’est endormi. Je vais le mettre
au lit.
Je le suis et admire ses gestes précis et très doux. Mehdi entrouvrit les yeux puis les referme. Youcef le borde et se met à chantonner. Mon fils se rendort comme un ange.
- Je… je suis désolée Youcef…
Il revint vers moi et m’attire dans ses bras :
- Chut… on n’en parle-plus.
Je me laisse aller un moment contre lui. Comment avais-je pu être aussi méchante ?
J’allais lui avouer mes intentions, et ma volonté de redevenir telle qu’il m’avait toujours connue, lorsque je me rappelle de la mission. Alors je le repousse et lui lance d’une voix froide :
- De quel droit avais-tu pris l’initiative de refuser ma participation à ce séminaire dont tu parlais ?
Il me regarde dans les yeux, avant de rejeter sa tête en arrière et éclater de rire :
- Je te prenais pour une femme avertie et intelligente.
- Oui, mais tu disais…
Il lève une main suppliante :
- S’il te plaît… n’en rajoute pas… Tu es la première sur la liste des participants… La direction ne pourras jamais se passer de tes services, tu le sais bien, toi qui es si fière de ta réussite. Et bien entendu je ne serais pas du reste. Nous allons partir ensemble. Et, pourquoi pas, vivre encore une nouvelle lune de miel.
Je retombe dans ses bras :
- Moi qui voulais changer de rubrique.
- Pourquoi donc ? Je sais que, désormais, tu feras en sorte que tes ambitions ne t’aveuglent plus au point d’oublier ta famille. Mais je ne sais pas si nous n’avons pas oublié quelque chose.
- Quoi ?
- Mehdi… pardi ! Nous n’allons tout de même pas le laisser seul avec la nurse.
Cette fois-ci, c’était à mon tour d’éclater de rire :
- Petit menteur, je suis certaine que tu as déjà tout combiné avec ma mère.
- Non, je te le jure…
- Tu n’as pas à jurer, car les menteurs le font toujours.
Pour toute réponse, Youcef me soulève dans ses bras et se met à m’embrasser à en perdre le souffle.
Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup