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La nouvelle de Adila Katia :L’usurpatrice

1 août 2013

Adila Katia

La nouvelle de Adila Katia Dimanche, 13 Janvier 2013

L’usurpatrice 1er partie

Par : Adila KATIALa nouvelle de Adila Katia  :L’usurpatrice  dans Adila Katia 16_200_150

Semra secoue la tête, et d’un geste brusque, elle ferme sa valise. L’éducatrice Nedjma fait la moue. Le geste ne lui a pas échappé. Mais elle ne peut que la comprendre. Aussi, elle sait qu’aucun mot ne pourra la réconforter.
- Tu passes le bac cette année, lui dit-elle. C’est ta chance ! Semra, tu dois réussir !
- Je sais, soupire la jeune fille. Je pars quand à l’internat ?
- Je vais t’y emmener dans un instant, si Racha est d’accord.
- Je voudrais que ce soit toi qui m’y emmènes, la prie Semra qui ne supporte plus les remarques de Racha, une des responsables du foyer. À ses yeux, j’ai tout fait pour me retrouver dans cette situation !
Ce n’est pas de ma faute !
Nedjma sourit, peinée pour elle. Semra n’est pas née sous une bonne étoile. Abandonnée le jour même de sa naissance, dans un vieux quartier de Sour El-Ghozlane, elle n’a pas eu la chance d’être adoptée tout de suite. Et quand ce jour arriva, elle ira d’une famille à une autre.
Elle n’a pas été adoptée par envie ou par amour, mais par besoin. Elle s’est retrouvée à remplir les tâches d’une bonne à tout faire.
Sans plus. Elle ne devait rien attendre en retour, pas un geste affectueux, pas un regard attendri, pas un mot pour la consoler de sa malchance. N’étant pas de nature soumise, elle s’est révoltée chaque fois qu’elle constatait qu’elle comprenait qu’elle ne comptait pas.
C’est pourquoi elle est revenue au foyer d’accueil. Elle ne s’est pas fait d’illusions. Elle ne sera pas accueillie à bras ouverts et elle a toujours su qu’on lui reprocherait de ne pas s’adapter aux exigences de sa famille. De ses familles…
- Tu dois te faire aimer, lui a dit Racha. Par n’importe quel moyen, puisqu’ils te donnent une chance d’avoir une famille, un toit… Tu es en sécurité avec eux ! Pourquoi faut-il toujours que tu crées des problèmes là où tu vas ? C’est à croire que tu aimes ta condition actuelle !
Semra soupire, en se rappelant que chaque fois qu’elle est tombée sur Racha, elle a droit à sa dose de reproches, d’insinuations et surtout le fait de savoir qu’elle la tient pour responsable de la situation la met
hors d’elle.
Car elle ne se plaît pas dans cette situation. Elle ne supporte plus d’aller d’une famille à une autre, d’être à la merci des autres.
Aucune d’elles ne l’a adoptée pour lui donner une chance mais pour profiter de sa malchance.
- Je réussirai au bac, se jure-t-elle intérieurement. Je deviendrai une femme respectable ! Personne ne pourra savoir que je suis une pupille de l’État ! Je ne dépendrai de personne…
- Encore en train de rêver !
La voix de Racha est pleine de colère et de reproches.
Semra a l’impression de recevoir une gifle. Elle sait que si elle était encore enfant, elle l’aurait reçue. Racha ne s’en serait pas privée.
- Tu vas partir à l’internat ! Je t’avertis… S’il y a des problèmes au lycée, tu le regretteras !  Fais-toi petite, reste dans ton coin à rêver !
Personne ne te le reprochera ! Ne cherche pas à te faire des amies. Dans ton cas, tu n’en auras pas la chance… Qui voudra d’une fille comme toi pour amie ? Personne. Alors ne te fais pas d’illusions !
Semra rougit et baisse les yeux pour que la responsable ne voie pas le sentiment qui gronde en elle.
Elle la déteste à un point où elle ne pourra jamais se l’imaginer, tout comme la malchance qui a fait d’elle sa proie favorite, sans raison. Injustement.

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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64 Réponses à “La nouvelle de Adila Katia :L’usurpatrice”

  1. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 2e partie
    Par : Adila KATIA

    - Gardez un œil sur elle !, recommande Racha au proviseur du lycée. Elle est de mauvaise influence… Ne la laissez pas fréquenter ses camarades de classe !
    Madame la proviseur lève les yeux vers Semra qui attend près de la porte, la valise à la main. Le dossier scolaire prouve qu’elle est une brillante élève.
    - Je l’aurais à l’œil !, promet-elle. Je suis sans pitié avec les têtes brûlées… Elle l’apprendra à ses dépens !
    Racha repart, rassurée. Semra, à la demande du proviseur, reste. Houria, réputée très sévère, tient à lui donner son avis.
    - Ton parcours scolaire m’étonne un peu… Comment une fille aussi intelligente peut se faire des ennemies ? Tu ne t’entends pas avec elle ? Pourquoi ?, veut-elle savoir.
    - Sans raison, répond Semra. Je n’ai pas eu de chance avec les trois familles qui m’ont adoptée… J’ai été nourrie et habillée… Aussi, soignée… Seulement, mes devoirs, je les faisais à minuit passé… Il y avait toujours quelque chose à finir avant. Parfois je ne les faisais pas car j’étais fatiguée !
    - Tu as décidé de partir pour réussir ?
    - Oui… J’ai conscience que la vie ne me donnera rien, dit Semra. L’acte de mes parents est irresponsable et impardonnable. Je vais payer pour eux. Alors, puisque je ne dois compter que sur moi, autant réussir mes études et plus tard professionnellement !
    Houria ferme le dossier. Un sourire détend son visage. Elle ignore pourquoi mais elle la croit et lui fait confiance.
    - Tu as raison, tu dois réussir… Tu as un cerveau que personne ne peut t’enlever… Sers-toi-en pour ne jamais te retrouver dans le pétrin. Tu es la première à savoir que la vie ne fait pas de cadeau ! Alors, la prie-t-elle, ne me déçois pas et réussis ! Je serais fière de toi ! Je serais là, pour t’aider ou t’apporter ce dont tu as besoin ! Tu peux compter sur moi !
    - Merci madame !
    C’est la première fois qu’on l’encourage vraiment. Semra est décidée à tenir sa promesse. Elle réussira coûte que coûte. Elle se passera de l’amitié et de l’estime des autres. Leur mépris ne la touchera pas. Elle s’est bien passée de sa mère et de son père, sans le vouloir, mais elle est encore là, malgré leur absence, malgré cet amour dont ils l’ont privée.
    Semra n’a jamais connu l’affection et l’amour. Quant à l’amitié, toutes celles qu’elle a prises pour des amies se sont détournées et éloignées d’elle quand elle leur a confié ce qu’elle est vraiment. Elle ne les a jamais comprises, et pour s’épargner de nouvelles souffrances, elle décide de ne plus avoir d’amies. Enfin, elle ne restera pas seule, mais jamais plus elle ne dira la vérité.
    Houria l’emmène à l’internat et la présente aux jeunes filles. Semra s’efforce de sourire tout en prenant place sur le lit que le proviseur vient de lui désigner.
    - Dalila G. ! à partir de maintenant, tu partages ton armoire avec Semra.
    La jeune fille qui répond au prénom de Dalila vient vers elle et ouvre l’armoire pour lui permettre d‘y ranger ses affaires.
    - Tachez de vous entendre. Je ne veux pas de problèmes, les avertit Houria, ni aujourd’hui ni plus tard !
    Dalila et Semra hochent la tête, toutes deux sourient et ne voient pas pourquoi et comment elles auraient des problèmes. En plus d’avoir à partager le même coin, l’armoire métallique, elles sont dans une même classe. Impossible de s’éviter ou d’éviter les problèmes. Au grand regret de Semra.

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  2. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 3e partie
    Par : Adila KATIA

    - Tu te mêles de ce qui ne te regarde pas, lui reproche Semra. Je ne supporte plus ton regard fouineur et toutes tes questions sur ma vie privée. Pourquoi faut-il toujours que tu veuilles tout savoir sur les autres ? Est-ce que moi je t’interroge sur ta vie privée ?
    - Je n’ai rien à cacher, rétorque Dalila en haussant les épaules. Si tu veux m’interroger, rien ne t’en empêche. Je ne me fâcherai pas. Mais toi. Qu’est-ce qui ne va pas Semra ? Pourquoi passes-tu les week-ends ici ? Pourquoi ton père ne passe jamais te voir ? Pourquoi ne sors-tu jamais ? Tu es mon amie. Normalement, je devrais tout savoir de toi ! Pourquoi tant de mystères, Semra ? Cela fait trois mois qu’on se fréquente et je n’en sais pas plus qu’au premier jour ! constate-t-elle sans joie. Tu refuses tout ce qui vient des autres. Tu ne donnes jamais rien, tu ne racontes rien ! Quand on discute et qu’on blague, c’est à peine si tu as un sourire ! D’où vient la tristesse que tu as en toi ? Pourquoi es-tu comme ça ?
    Semra l’écoute parler d’elle comme d’une personne étrangère. Sa colère est vite tombée. Elle s’est emportée un peu trop vite. Dalila a passé le trimestre à l’observer. Elle la connaît bien. Semra le constate sans joie.
    - Je suis seule au monde, dit-elle à Dalila. C’est pourquoi je ne quitte pas l’internat.
    - Pas même une tante ou un oncle ?
    - Si j’avais eu des parents, j’aurais pu en avoir, mais je suis orpheline. Enfin, j’ai été abandonnée à ma naissance, lâche-t-elle d’un coup. Tu comprends pourquoi je n’ai pas de nom !
    - Mon Dieu ! s’écrie Dalila en posant la main sur son bras. Je suis désolée ! Je regrette de t’avoir interrogée. J’ai dû te mettre mal à l’aise !
    - En effet. J’hésitais à te dire la vérité, lui confie Semra. Même si je me sentais très proche de toi. Je ne te cacherais pas que parfois je me suis surprise à vouloir une sœur, comme toi !
    - J’ai déjà une sœur, lui dit Dalila en souriant. Mais je serais heureuse que tu sois la deuxième !
    - Vraiment ?
    - D’ailleurs, on se ressemble ! remarque Dalila. On fait la même taille, tu es blonde comme moi. Tu as des yeux verts que je t’envie. Tu es belle. J’aurais été très fière d’avoir une sœur aussi belle !
    - Je constate que je me suis trompée. Tu es unique Dalila ! murmure-t-elle avant de lui demander de ne rien dire de sa situation aux autres, pas même à sa mère. Je crains leurs réactions et je ne voudrais pas qu’elles viennent gâcher notre amitié !
    Dalila la rassure. Elle ne dira rien aux autres. Cependant, quand elle rentre chez elle, elle demande à ses parents si elle peut inviter Semra pour le week-end prochain.
    - Sa famille habite loin et n’a pas les moyens de lui payer le transport. Elle est si triste. Je voudrais lui permettre de passer du temps avec nous !
    Dalila n’est pas surprise de les entendre accepter. Elle ne sait pas quoi répondre quand ils veulent savoir d’où est sa famille pour avoir son autorisation. La jeune fille a pensé à tout sauf qu’il en faudra une, pour sortir Semra de l’internat. Mais ces questions sans réponse ne la découragent pas. Elle s’en va trouver le proviseur pour lui en parler. Elle frappe à la bonne porte.

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  3. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 4e partie
    Par : Adila KATIA

    - Tu t’entends bien avec elle ? Vous n’avez jamais eu de problèmes ?
    Les questions de Houria font sourire Dalila. Cette dernière la rassure.
    - Semra est une sœur pour moi, lui dit-elle. Je tiens à elle. Si je suis venue vous demander l’autorisation, c’est parce qu’elle a de la peine.
    Elle n’en parle pas mais je la sens. Ce n’est pas une vie, poursuit la jeune fille. Elle n’a personne qui demande après elle, qui lui propose de sortir. Je veux qu’elle partage quelques moments de bonheur avec moi et ma famille si vous êtes d’accord.
    - Tes parents savent-ils qu’elle n’a pas de famille ? veut savoir le proviseur.
    - Non, je leur ai dit qu’elle habite très loin de chez elle. Je craignais leur réaction, sinon je leur aurais dit, s’excuse-t-elle. C’est pour bien faire que j’ai omis de tout leur dire !
    - Cela me touche que tu tiennes tant à elle, dit le proviseur.
    Et tant que vos résultats seront excellents, je ne refuserai pas de la libérer les week-ends !
    - Merci madame ! Merci !
    Dalila s’en va rejoindre Semra dans la cour du lycée. Elle lui apprend la nouvelle, sautant de joie.
    - Tu vas connaître mon village et ma famille. Mon père est directeur de l’école primaire. Maman Zahia est secrétaire à la mairie. Mes frères sont plus jeunes que moi ! Ils sont insupportables mais adorables !
    - Je les aime déjà, dit Semra émue jusqu’aux larmes. Tu as pensé à tout sauf à ce que je leur répondrai s’ils veulent en savoir plus sur ma vie familiale…
    - Tes parents sont vieux et tu es leur cinquième fille.
    Ils sont surtout pauvres, ajoute Dalila, se prenant très au sérieux. A part ça, tu seras libre de dire ce qui te vient à l’esprit. Le plus important c’est que tu puisses vivre avec nous, les week-ends au moins !
    - Tu es une sœur pour moi ! Je te serai toujours reconnaissante. Merci ! Tu me donnes tant, soupire Semra tout en ayant le sentiment de revenir à la vie. Depuis que je te connais, tu as chassé la solitude de ma vie. Et maintenant, tu veux me donner goût à la vie de famille !
    Ça n’a pas de prix. Même si ce n’est que pour un temps !
    Mais si elle appréhende ce jour, Semra sera vite mise en confiance. Madame la proviseur l’a autorisée à partir en week-end. La famille de Dalila l’a accueillie chaleureusement et s’est comportée comme si elle la connaissait depuis toujours, comme si elle a toujours fait partie de la famille.Ces moments de vie ordinaire, pour les autres, sont des instants de bonheur pour la jeune fille.
    Cependant, ils lui paraissent bien courts. Ils ne manquent pas de lui rappeler sa condition d’enfant abandonnée, d’être le fruit d’un bonheur volé. Et même si elle n’en est pas responsable, elle le payera toute sa vie.
    Plus que jamais, elle en a conscience. Elle passera à côté des belles choses de la vie et du bonheur.
    Parce qu’elle n’y a pas droit. Elle est le fruit d’une relation interdite dont il a fallu se débarrasser au plus vite.
    Elle se demande si ce sont ses grands-parents qui ont décidé pour sa mère. Sa mère a-t-elle pleuré en se séparant d’elle ? Elle aurait voulu savoir si elle avait des regrets ?
    Si elle pensait encore à elle ? Si elle a refait sa vie, a-t-elle eu d’autres enfants ? Son prénom a-t-il été choisi par sa mère ou par quelqu’un d’autre de la famille ? Ont-ils pensé à chercher après elle ? Elle souhaite qu’un jour sa mère tente de la retrouver.
    Quand elle voit des mères tenir leurs enfants fermement par la main, pour leur éviter de tomber, qu’une voiture ne les heurte au passage ou même de peur de les perdre dans la foule, elle se dit qu’elle n’a pas eu cette chance. Personne à qui s’accrocher, sur qui compter. Elle était encore une enfant lorsqu’elle avait compris qu’elle ne devait compter que sur elle-même. La vie n’a rien à lui offrir.

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  4. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 5e partie
    Par : Adila KATIA

    -Semra, pourquoi es-tu si triste ? Quelqu’un t’aurait fait de la peine ? demande Dalila, très inquiète. Qui ?
    Semra s’efforce à sourire. Mais cet effort lui coûte des larmes. Elle aurait pu dissimuler sa peine, sous un visage impassible, auprès des autres, mais en compagnie de Dalila, elle ne peut rien cacher. Elle ne la connaît que trop.
    -Mon destin, mon triste sort, répond-elle. Personne ne peut me faire autant de peine que mon triste sort.
    Chaque jour, je réalise un peu plus que malgré tout le bien que je pourrais faire, malgré toutes mes qualités, tous me croient mauvaise. Je suis une bâtarde, l’enfant d’une liaison illégitime. Ça ne se pardonne pas.
    - Pourquoi te tortures-tu de la sorte ? lui reproche son amie Dalila. Tu n’y es pour rien ! Tu es une victime parmi tant d’autres !
    - Les autres ne me voient pas ainsi !
    - Depuis le temps, tu m’étonnes, soupire Dalila. Tu devrais avoir dépassé tout ça ! Tu ne devrais plus en souffrir ! Ils sont trop bêtes pour réfléchir et comprendre ! Mais toi, tu es assez intelligente pour ne pas en tenir compte. Dans quelques semaines, on passera le bac. On l’aura facilement, on est les meilleures ! Après, à la fac, on se fera de nouveaux amis, tu te sentiras mieux !
    - Et après la fac où irais-je ? se demande Semra. Que dirais-je à ceux qui voudront en savoir plus sur moi ? Qu’écrirais-je à la place du nom ? Je n’en ai pas. Et ça suffira aux autres de me mépriser. Rien qu’à y penser, j’en deviens folle de rage ! Je me sens impuissante ! Je voudrais changer mon destin !
    - En réussissant tes études, tu pourras te trouver du travail, lui affirme son amie. Il n’en faudra pas plus pour gagner le respect des autres. Et puis, quoi que tu en penses, la mentalité des gens évolue. Il ne faut pas tous les mettre dans le même panier !
    Semra voudrait bien la croire. Mais elle a trop mal. Aussi, les résultats du second trimestre ne sont pas réjouissants. La proviseur va vite en parler avec la jeune fille.
    - Qu’est-ce qui ne va pas ? D’où te vient cette fatigue ?
    - Je l’ignore, murmure Semra. Mais je vais me rattraper, lui promet-elle. Ça va passer !
    - Je le souhaite pour toi. Semra, si ces sorties te perturbent, autant les annuler, lui propose la proviseur. Si cela peut te faire du bien et ramener le calme en toi ? A toi de décider…
    - Je n’irais pas ce week-end, répond Semra. J’ai besoin d’être seule, de me retrouver ! On m’a tellement donné, j’étais si heureuse. Un bonheur pareil, c’est plus que je ne pouvais imaginer !
    - Alors, pourquoi tant de tristesse ?
    Semra ne répond pas à la proviseur. Elle fait la moue. Comment lui expliquer qu’elle pense déjà au jour où tout finira ? A la solitude à venir. Elle lui paraît insupportable. Elle voudrait ne plus penser à l’avenir mais c’est plus fort qu’elle.
    - Il faut te ressaisir, lui dit la proviseur qui semble deviner l’origine de ses tourments. Personne ne peut lire en l’avenir ! Car toi aussi, tu as droit au bonheur !

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  5. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 6e partie
    Par : Adila KATIA

    - Semra, c’est quand tu veux, lui dit son amie Dalila qui accepte son refus, sans en discuter même si elle est déçue. Tu seras toujours la bienvenue … Ma famille a demandé de tes nouvelles.
    - Que leur as-tu dit ? veut savoir
    Semra.
    - Que tu allais voir ta famille. Le reste, ça ne regarde que toi et moi. Quand tu en auras envie, tu reviendras chez nous. Tu seras toujours la bienvenue.
    Semra la remercie, tout en appuyant la tête contre son épaule. Dalila la comprend. Elle est bien plus qu’une amie. Elle est la sœur qu’elle n’aura jamais. Elles partagent tant de secrets. Il y a tant de complicité entre elles. Elle ne peut que se confier à elle, sachant qu’elle ne sera pas jugée mais uniquement comprise.
    - Tu te fais du souci pour rien, lui dit-elle. Je serai toujours ton amie.
    - Je n’en doute pas, répond Semra. Dans quelques semaines, on passera le bac. Toi, tu retourneras au village, moi, au foyer. Cela ne me réjouit pas.
    - Mais ce n’est que pour quelques semaines… Une fois qu’on aura décroché le bac, il y aura pleines d’occasions de sortie, lui rappelle-t-elle. On n’ira pas à la fac, sans s’être inscrites, sans avoir choisi une filière… Et puis, il faudra qu’on aille à la cité de jeunes filles pour avoir une chambre. Avec un peu de chances, on sera dans un même groupe et dans une même chambre. Sinon on fera tout pour que ce soit le cas.
    Semra le souhaite autant qu’elle. Mais pour que cela puisse se réaliser, elle reprend ses études, avec plus de sérieux, ne se permettant plus de s’inquiéter quant à l’avenir. Dalila ne change pas d’attitude envers elle, toujours à ses côtés pour l’encourager, au bac, elle ira le fêter avec sa famille.
    Les jours et les semaines passent bien vite au goût de la jeune fille. Et le jour des examens, elle n’est nullement angoissée. Tout comme Dalila, elle s’est bien préparée pour les épreuves du bac. Et le résultat ne surprendra personne. Elle décroche le bac, avec mention, tout comme Dalila.
    Elles ne se sont pas vues durant plusieurs jours. Dalila est très heureuse de la retrouver. Elle ne manque pas de lui rappeler sa promesse. Semra qui est encore à l’internat, doit demander la permission au proviseur Houria. Cette dernière ne refuse pas mais elle veut savoir quand elle rentrera.
    - C’est pour deux raisons que je veux m’y rendre, lui dira Semra. J’ai promis à Dalila de fêter notre succès. Et je veux faire mes adieux, à sa famille. Je rentrerai samedi ou dimanche ! Si vous le permettez !
    Le proviseur la croit sur parole et l’autorise à partir avec Dalila. La jeune fille n’aura pas qu’à fêter leurs succès et à faire ses adieux, elle aura aussi l’occasion de s’attarder auprès de son amie. Le destin y sera pour beaucoup…

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  6. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 7e partie
    Par : Adila KATIA

    - Qu’est-ce que tu vas faire ?
    - Papa m’a inscrite pour une courte formation d’animatrice, répond Dalila. Tu sais qu’il est directeur, et chaque année, il organise les vacances des écoliers. Figure-toi que je serai une des monitrices qui les accompagnera. Comme ça, ils seront rassurés avec quelqu’un du village, de la région !
    - Pourquoi ne lui as-tu pas demandé s’il y a une place de libre pour moi ? lui reproche Semra. Je n’aurais pas eu à retourner au foyer. On ne se serait pas séparées. Pourquoi n’as-tu pas pensé à moi ?
    Dalila est désolée pour elle et regrette son manque de confiance.
    - Comment peux-tu penser que je n’ai pas pensé à toi ? Semra, l’idée, je l’ai eu seulement. Papa aurait découvert que nous lui avons menti, que nous leur avons tous menti depuis des mois ! Après, tu ne pourras plus jamais revenir ici. Pourquoi tout gâcher ?
    - Je reconnais que tu as eu plus de bon sens que moi, soupire Semra. Je me demande comment j’ai bien pu oublier ma condition ! Je n’ai pas de nom, pas d’origines. Qui voudra de moi pour surveiller ses enfants ? Qui pourra se fier à moi ?
    - Tu es quelqu’un de très bien, lui assure son amie Dalila qui se tient le côté droit du ventre. Et digne de confiance. Vois l’estime que Mme Houria te porte ! Tous ceux qui te connaissent vraiment te respectent. Tu es quelqu’un d’attachant malgré tout !
    Dalila ne peut pas poursuivre. Elle a terriblement mal. Ce ne peut pas être un point de côté.
    - Qu’as-tu ? demande Semra. Tu es bien pâle d’un coup !
    - J’ai mal. La douleur… J’ai l’impression qu’une lame me transperce !
    Semra s’en va appeler la mère de Dalila. L’état de celle-ci s’est aggravé. Elle est pliée par la douleur. Zahia fronce les sourcils tout en l’aidant à s’aliter.
    - Ça t’arrive depuis quand ? C’est la première fois ? veut-elle savoir.
    - C’est la deuxième fois, répond Dalila dans un souffle. J’ai l’impression d’être transpercée !
    - Je vais envoyer un message à ton père pour qu’il ramène une voiture, décide-t-elle avant d’aller dehors pour le demander à un de ses fils. Ahmed va dire à ton père que Dalila a besoin d’être transportée à l’hôpital de toute urgence ! Elle souffre d’une crise d’appendicite. Ça ne peut être que ça !
    L’enfant obéit vite à sa mère et va mettre son père au courant. Ils reviennent dans un taxi. Dalila est emmenée aux urgences de l’hôpital. Semra les a accompagnés. Elle est bouleversée, lorsque le médecin des urgences décidera de l’opérer.
    La famille de Dalila repart pour lui chercher des affaires pour son séjour à l’hôpital. Semra, elle, tient à attendre sa sortie du bloc opératoire. Elle ne partira pas sans l’avoir vue et être rassurée quant à son état !

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  7. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 8e partie
    Par : Adila KATIA

    - Tu te réveilles enfin, murmure Semra, à l’oreille de son amie Dalila qui revient à elle, quelques heures après son opération. Comment te sens-tu ?.
    - Je souffre. Tu es restée là ?
    Pendant tout ce temps ? l’interroge la malade.
    Semra lui prend la main et hoche la tête.
    - Je ne voulais pas partir sans t’avoir vue te réveiller. J’ai eu peur. J’avais peur de te perdre, lui avoue-t-elle, les larmes aux yeux.
    Mais Dieu merci, tu vas mieux ! D’ici quelques jours, tu te seras vite remise de ton opération.
    - Je sais. Mais j’aurais raté les colonies de vacances, regrette-t-elle dans un soupir. Est-ce que tu as déjà vu la mer ?
    - Non. Pourquoi ?
    - Pourquoi n’irais-tu pas à ma place t’occuper de ces enfants ? lui propose-t-elle en grimaçant de douleur quand elle tente de se redresser. Aïe.
    - Mais qu’est-ce qui te prend de bouger ? lui reproche Semra. Tu te réveilles d’une opération, lui rappelle-t-elle. Tu dois faire très attention.Une infirmière vient voir Dalila et injecte un médicament dans le sérum. Elle demande à Semra de ne pas tarder.
    - Cinq minutes, pas plus !
    - Oui, dit-elle. Je ne tarderai pas.
    Une fois seules, Dalila lui demande de s’approcher. Semra se penche vers elle, la main dans la sienne.
    - Va à ma place en colonies de
    vacances.
    - Ils n’accepteront jamais que je te remplace, lui répond Semra. Et puis, ils ne voudront jamais d’une…
    - Qui te dit de révéler ta vraie identité ? Tu pars avec mes papiers. Je te passerai ma pièce d’identité. Papa l’apportera tout à l’heure, je te la donnerai !
    - Il s’en rendra compte, qu’est-ce que tu lui diras ?
    - Que je l’ai perdue ! Je trouve mon idée géniale ! Reviens tout à l’heure. Je suis fatiguée. Je veux dormir.
    - C’est sûrement l’effet du médicament pour que tu puisses passer une bonne nuit !
    Dalila, ma sœur, je t’aime !
    L’autre, pour réponse, bat des cils. Elle s’endort vite. Semra ne rentrera pas au lycée, même si elle sait que le proviseur doit attendre son retour. Les parents de Dalila sont revenus pour avoir des nouvelles et pour remettre les effets personnels de leur fille à l’infirmière.
    Semra les rassure. Dalila s’est bien réveillée. Elle allait dormir toute la nuit.
    - Si vous me le permettez, je resterai à son chevet, propose Semra qui ne veut pas retourner à l’internat ou au village. Elle aura besoin de moi pour sa toilette, pour la soutenir quand elle pourra se lever.
    L’infirmière n’y voit pas d’objection ainsi que les membres de la famille de Dalila. Ces derniers lui sont reconnaissants.
    Si elle reste avec leur fille, ils n’auront pas de souci à se faire. Leur fille est entre de bonnes mains.

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  8. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 9e partie
    Par : Adila KATIA

    - Semra, pars ! La première session commence demain, lui dit Dalila, le lendemain de son entrée à l’hôpital. Il faudra que tu te prépares !
    - Je sais. Mais est-ce qu’il y aura des gens de ton village ? Quelqu’un qui te connaît, qui pourrait me démasquer ?, veut savoir Semra.
    - Le directeur du centre ne m’a pas vue depuis dix ans, lui confie Dalila. Je n’étais qu’une enfant. Il doit avoir un vague souvenir de moi. Et puis, on se ressemble beaucoup ! Tu en connais long sur ma famille. Tu sauras quoi répondre s’il te pose des questions !
    - Tout m’a l’air facile, beaucoup trop facile ! soupire Semra. J’ai des doutes.
    - Ecoute, qui risque rien n’a rien ! réplique Dalila. A moins que tu ne veuilles pas vraiment passer les vacances loin d’ici ?
    Semra, pour lui prouver que ce n’est pas le cas, saisit la pièce d’identité qu’elle brandit sous son nez. Elle se lève après l’avoir mise dans son sac.
    - Je vais m’y rendre. Quoi qu’il arrive, j’irais à Cherchell, dit-elle d’un air déterminé. Je vais bien m’amuser !
    - Pense à m’envoyer une carte postale ! Bonne chance Semra !
    - Je partirai tout à l’heure, après la visite de tes parents.
    Ces derniers ne tardent pas à venir, lui apportant une pile de livres et à déjeuner pour Semra. Zahia donne un peu d’argent à Semra pour les dépenses. Elle insiste quand Semra
    refuse.
    - Ce n’est pas pour tes dépenses personnelles, lui dit-elle. Dalila peut avoir besoin de quelque chose ! Il ne faudra pas attendre qu’on vienne !
    - D’accord ! Je m’en occuperai.
    Quand la famille part, une fois l’heure des visites écoulée, Dalila et Semra se sourient.
    - Il est temps que tu fasses comme eux, lui dit Dalila. Demain, fais semblant de te reprocher ta mauvaise mémoire. Tu leur diras d’appeler papa. Il sera ici, donc injoignable ! Une fois à Cherchell, sympathise avec le directeur Rabah. Ainsi, tu n’auras aucun souci à te faire ! C’est l’ami de papa !
    - Au cas où un problème se pose, l’avertit Semra, je laisse ta pièce d’identité et je file !
    - Reviens me voir ! Personne ne pourra se douter qu’elle était en ta possession ! Tu seras toujours la bienvenue chez nous, lui assure Dalila en souriant.
    - Tes parents seront surpris demain. Ils vont te poser des questions, dit Semra. Que leur diras-tu ?
    - Toi aussi tu as une famille, répond Dalila qui a de la suite dans les idées. Elle te manquait, tu es partie. Tu reviendras quand tu le pourras !
    - Tu vas me manquer Dalila, soupire son amie en la serrant dans ses bras. Beaucoup, beaucoup !
    Elle veut bien croire en son amie, mais sachant que Semra allait travailler, être en contact d’enfants ou d’adolescents à surveiller, elle sait qu’elle n’aura plus une minute à elle. Elle n’aura plus le temps de penser à quoi que ce soit ni à qui que ce soit. Uniquement au moment présent.

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  9. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 10e partie
    Par : Adila KATIA

    - Vous avez fait bon voyage ?
    - Oui, répond Semra, surprise par l’accueil du directeur qu’elle ne s’attend pas à voir tout de suite. Aami Rabah ?
    - Ne me dis pas que tu ne m’as pas reconnu ! lui reproche-t-il en passant une main sur ses tempes grisonnantes. C’est vrai, j’ai un peu changé. J’ai vieilli, mes cheveux blancs ne se comptent plus ! J’ai même un début de calvitie ! Mais malgré tous ces changements, je suis resté le même !
    Mais toi, tu as embelli ! Je vais devoir garder un œil sur toi !
    - Papa te passe le bonjour. Il a dit qu’il t’appellera, dit Semra pour changer de sujet. Est-ce que je peux retourner auprès de mes colons ?
    - Oui. Mais exceptionnellement tu viendras vivre avec ma famille !
    Tu auras une chambre, personne ne te dérangera ! Je tiens à ce que tu sois à l’aise !
    - Non, non, s’écrie-t-elle, effrayée à l’idée d’avoir à rencontrer sa famille qu’elle est sensée connaître. Elle aurait dû penser à avoir plus de renseignements sur lui et les siens. J’ai trois colons qui se sont séparés de leur famille pour la première fois. Elles me paraissent très tendues et craintives. Si tu le permets aami Rabah, une fois qu’elles seront mieux intégrées dans le groupe et plus en confiance, je viendrai ! Mais pas avant, le prie-t-elle. Je me sens responsable de leur bien-être !
    - C’est tout à ton honneur Dalila ! Je suis heureux de constater que tu te soucies toujours du bien-être de tes proches. Bon, je consens à ce que tu restes avec les monitrices ces premiers jours. Après, tu t’installes dans la chambre qu’on a aménagée pour toi. N’essaie pas de trouver des prétextes pour ne pas venir, je ne les accepterai pas, l’avertit aami Rabah, avant de lui demander : n’hésite pas à te présenter comme étant ma nièce pour avoir la paix ! Semra le remercie et s’en va rejoindre les colons arrivés en sa compagnie. D’autres groupes les ont précédés. Semra prend son sac de voyage et demande aux filles de la suivre. Une monitrice, Karima, leur sert de guide.
    - L’établissement qui est à ta gauche est le réfectoire. Celui de droite est le foyer. Les filles dormiront au premier étage et nous au rez-de-chaussée.
    - Et les garçons ? veut savoir Semra.
    - Ils campent à la sortie du centre, ils sont proches de la plage. Pourquoi ?
    - Comme ça, répond Semra.
    La résidence de aami Rabah est loin d’ici ?
    - Le directeur ? C’est un ami ou un parent ? l’interroge Karima.
    - Mon oncle. J’ai oublié de lui demander où ils logent ? Mais toi, tu dois savoir ?
    - Ils ont un pavillon, pas loin du réfectoire, lui dit-elle alors qu’elles parviennent au premier. Je vous laisse vous installer. à tout à l’heure !
    Semra s’occupe des filles de son groupe. Durant le voyage jusqu’à Cherchell, elle a eu le temps de faire connaissance avec elles. Ayant entre douze et quatorze ans, le contact leur est facilité. Semra a craint d’avoir des fillettes à surveiller. Elle leur donne des conseils avant de les laisser se reposer. Elle décide d’en faire de même. Elle descend au rez-de-chaussée où les monitrices ont des chambres. Semra partagera la sienne avec Karima et Sabah. Celle-ci est venue de France avec des jeunes colons, dans l’intention de leur faire connaître le pays. Sabah, âgée de vingt-huit ans, est psychologue de formation. Elle et son frère Azzedine viennent chaque année au pays. Azzedine, un célibataire endurci, est l’administrateur du centre de formation en France. Ici, il encadre les nouveaux moniteurs. Semra doit le rencontrer à 15h. Elle a tout juste le temps de se rafraîchir et de se préparer pour ce rendez-vous.

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  10. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 11e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra ne se rend pas seule à la réunion. Pendant que les colons font leur sieste, les moniteurs sont réunis autour d’un bon thé que leur a servi Azzedine. Quand elle est entrée au réfectoire, elle l’a tout de suite reconnu. Il s’est assis près du directeur, Rabah. Celui-ci s’est levé, un grand sourire éclaire son visage quand il l’accueille.
    - Ma chère Dalila ! Viens que je te présente à tes collègues ! lui dit-il. Ma nièce Dalila, je te présente Azzedine !
    Il s’est levé pour lui serrer la main. Puis il s’est rassis, les yeux écarquillés, surpris. Agréablement surpris. Les autres collègues se sont contentés de hocher la tête ou d’un mot gentil.
    - Dalila, assieds-toi près de moi, lui dit Rabah. Tu n’es pas fatiguée, j’espère ?
    Semra le rassure. La réunion commence. Azzedine, en face d’elle, la regarde parfois alors qu’il conseille les nouveaux moniteurs et répond à leurs questions. Elle les écoute comme si elle est en classe. Elle est la plus jeune, dix-huit ans. C’est la première fois qu’elle travaillera, qu’elle aura des responsabilités. Mais surtout, elle ne veut pas faire d’erreurs. Elle se fait passer pour Dalila. Elle doit prendre ses précautions. Elle imagine très bien Azzedine ou aami Rabah appeler au village le père de Dalila.
    - Pourquoi es-tu soucieuse Dalila ? Quelque chose te préoccupe ? Tu as peur ? demande Azzedine.
    - Oui, un peu, reconnaît-elle.
    - Je comprends… Si cela peut te mettre en confiance, sache qu’on est là, en cas de problème ou de doute !
    L’origine de sa peur est sans remède et sans solution. Semra s’efforce de sourire. Personne ne doit se douter qu’elle a emprunté cette identité, si elle veut passer des vacances, comme tout le monde.
    - Merci !
    Le sourire de sa sœur Sabah la surprend un peu. Elle n’en connaîtra la raison qu’à la fin de la réunion. Sabah la prend à part, ralentissant l’allure, laissant les monitrices les précéder au foyer.
    - C’est la première fois que mon frère propose son aide à une jeune fille. Tu l’as ébloui ! Il te mangeait des yeux ! C’est évident, tu l’as subjugué !
    - Je ne crois pas, murmure Semra en rougissant. Il est célibataire ?
    - Oui. Moi qui le prenais pour un misogyne ! Mais je dois reconnaître que tu es belle et que tu es attirante, poursuit Sabah. Je ne serais pas surprise de te voir avec lui ! Je suis sûre qu’il voudra tenter sa chance avec toi !
    Et comme pour confirmer ce qu’elle a dit, Azzedine les a rejointes, en courant presque.
    - Dalila, je voudrais parler avec toi. Sabah, s’il te plaît ! prie-t-il sa sœur, mais celle-ci refuse de les laisser, juste deux minutes.
    - Son oncle ! lui dit Sabah. Il ne te portera plus dans son cœur si tu fais la cour à sa nièce ! l’avertit-elle.
    - Je n’ai que d’honorables intentions, réplique-t-il. Vraiment ! Je te le jure !
    Sabah sourit. Elle consent à s’éloigner. Semra, le visage écarlate, a envie de la rejoindre. Comme si Azzedine a deviné son intention, il la prend par le bras, l’empêchant de partir, sans qu’elle ne l’ait écouté auparavant.

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  11. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 12e partie
    Par : Adila KATIA

    Coup de folie, provisoire peut-être, celui qui a toujours été réputé pour être célibataire endurci, à quarante ans, au point où sa famille et ses connaissances l’ont pris pour longtemps pour un misogyne, Azzedine semble être né à la vie, à l’instant même où ses yeux se sont posés sur Semra. Il ignore comment il a fait pour terminer la réunion. Elle l’a troublé, sans le savoir.
    Ce n’est pas la première fois qu’il voit une belle jeune femme, mais elle est la seule qu’il peut imaginer dans son pavillon à Toulouse. Cela ne lui est jamais arrivé auparavant. Tout comme celui qui perd la voix. Quand il l’a retenue, c’est pour lui parler et lui proposer un rendez-vous et non pas pour la regarder. Il aurait voulu lui dire qu’il la trouve belle, à en couper le souffle. Elle est une perle rare. Il voudrait qu’elle devienne sa perle.
    Azzedine regrette de ne pas avoir eu la force de le lui dire. Il s’est traité de tous les noms quand elle s’est empressée de rejoindre sa sœur Sabah. Le regard rieur, elle doit se moquer de lui. Elle, qui a abandonné l’idée de le marier, après lui avoir présenté toutes ses copines et collègues, le voit enfin s’intéresser à quelqu’un. Enfin, elle en est perplexe, sachant qu’il est impossible d’ouvrir les portes de son cœur. Azzedine la surprend.
    Il lui a suffi de voir cette sirène, aux longs cheveux blonds, aux grands yeux verts et au sourire timide mais ensorceleur pour que le cœur du pauvre homme craque et batte à grands coups pour elle. Comment résister devant tant de
    beauté ?
    À la plage où ils emmènent les colons, pour jouer au volley-ball pour certains et pour se baigner, Azzedine cherche Semra des yeux. Elle se tient en retrait, assise en tailleur, les yeux clos, elle médite. Elle lui paraît étrange. Son apparition dans sa vie a étrangement bouleversé son esprit, son cœur. Azzedine ne peut se résigner à s’éloigner de la sirène de son cœur.
    - Cesse de la regarder, lui dit sa sœur Sabah qu’il n’a pas vu arriver. C’est une jeune fille… Tu as le double de son âge ! Son oncle n’acceptera jamais !
    - Si ! Il n’aura pas le choix, rétorque Azzedine. Et cesse de me surveiller, je suis capable de me débrouiller seul et sans tes conseils !
    - Je t’aurais prévenu ! rétorque Sabah.
    - Mais si tu peux m’aider, ce n’est pas de refus.
    Parle-lui pour moi, prie-t-il sa sœur. Je suis sérieux Sabah, je te le jure. Depuis que je l’ai vue, je me sens différent !
    Azzedine change de couleur quand il voit un jeune homme s’asseoir près de Semra et discuter avec elle. Sa sœur n’oubliera jamais cet instant et saura qu’il a eu le coup de foudre pour elle. Pour la première fois de sa vie, il ressent de l’amour mais de la jalousie aussi.
    Sabah doit le retenir, en devinant qu’il veut aller vers eux.
    - De quel droit ?, s’écrie-t-elle, ne fais pas le fou ! Tu risques de l’effrayer !
    - Alors, rejoins-les et ne laisse personne s’approcher d’elle, la prie Azzedine, sinon je ne réponds plus de mes actes ! Je suis fou d’elle !

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  12. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 13e partie
    Par : Adila KATIA

    C’est la première fois de sa vie. Azzedine ne se reconnaît plus. Il ne se maîtrise plus. Lui qui a toujours été un exemple de patience et de tolérance surprend sa sœur.
    Ecoutant les conseils de sa sœur cadette, il s’efforce à rester calme quand il la voit, de loin ou de près. Mais son visage qui prend une couleur brique reflète l’émotion qui l’habite. Elle permet aux autres dans le centre de deviner ses sentiments. Aami Rabah le sent tout de suite. Il connaît Azzedine depuis plusieurs années et sait qu’il est un homme d’honneur.
    Dès le troisième jour, Semra est contrainte d’habiter chez ce dernier. Et par chance, les membres de la famille de Rabah est partie suite à l’appel d’une tante souffrante. Ils reviendront dans quelques jours. Semra prie pour qu’ils soient retenus jusqu’à la fin de la session, uniquement pour ne pas être confrontée à eux. En s’appropriant l’identité de Dalila, en se faisant passer pour elle, elle risque des ennuis. Elle en a conscience mais cela ne l’empêche pas de continuer.
    Quand aami Rabah lui parle de Azzedine dont elle a souvent senti le regard, elle réalise tout l’intérêt qu’il lui porte.
    - Il a voulu en savoir plus sur toi, lui apprend-il. Tu sais, je ne lui ai rien dit ! Je préfère que tout vienne de toi. Donc, je t’autorise à le fréquenter si tu veux, mais je garde un œil sur vous deux !
    - Ah.
    - Il viendra dîner ici ce soir, ajoute-t-il. Je sais qu’il est sérieux. Comment voyais-tu ton avenir ? C’est-à-dire, après les études, veut-il savoir. Est-ce que cela te dit d’aller vivre en France ?
    - Je n’y ai jamais pensé, avoue-t-elle. A part mes études. Le mariage ? Non, jamais je n’y ai pensé !
    - Il est temps alors. Azzedine est un bon parti. Il est plus âgé que toi mais il a une situation stable et enviable, poursuit aami Rabah. Et puis, je suis sûr qu’il fera tout pour ton bonheur !
    Il n’exagère pas. Azzedine est prêt à tout pour la conquérir. Il ne pense qu’à elle. Il n’est plus maître de son esprit ni de son corps. Progressivement, heure après heure, nuit après nuit, il est passé de l’autre côté du miroir, sans s’en rendre compte. Après toutes ces années. L’apparition de Semra dans sa vie le bouleverse. Sans qu’il l’ait voulu, sans qu’il s’y soit préparé.
    Il est venu au pays, comme d’habitude, pour retrouver sa terre natale et sa famille. Celle-ci est nombreuse et installée à travers le pays. Quand il y songe, il ne peut imaginer la famille complète sans Semra et son pavillon de Toulouse sans elle. Il veut faire sa vie avec elle, être là où elle est, maintenant qu’il a enfin trouvé la femme de sa vie. Il l’a tellement cherchée qu’après maintes déceptions, il a fini par renoncer à son idéal féminin. Ce rêve non concrétisé, il l’a complètement oublié depuis des années. Et puis voilà qu’une sirène lui prend le cœur, sans le savoir.
    Pour elle, il est prêt à tout. Il lui offrira ce qu’elle veut, plaisir et cadeaux. Mais surtout si elle le veut aussi, le plus important. Des fiançailles et des projets d’avenir. Elle est l’unique à le mériter. Azzedine ne veut plus voir ces lueurs d’inquiétude dans les yeux de sa sirène. Il ne peut pas en deviner l’origine. Il ne peut pas savoir ce qu’elle traverse, et combien elle se sent seule. Dans sa situation, l’amour et le bonheur lui paraissent inaccessibles.

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  13. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 14e partie
    Par : Adila KATIA

    Quels seront ses sentiments quand il saura qu’elle n’est pas Dalila mais Semra, une jeune fille qui a été abandonnée à sa naissance ? La regardera-t-il toujours avec autant d’amour ? Voudra-t-il toujours faire des projets avec elle, pour eux deux ?
    - Dalila ! Dalila !
    Perdue dans ses pensées, elle n’a pas entendu Azzedine et aami Rabah entrer. L’appel de celui-ci lui paraît adressé à une autre.
    - Dalila, est-ce que tu peux venir ?
    Aami Rabah a dû frapper à la porte de sa chambre pour qu’elle se rappelle être Dalila. Elle s’est oubliée, en pensant à elle-même, en se posant toutes ces questions.
    - J’arrive, dit-elle en se levant, pour lui ouvrir. Tu as besoin de quelque chose ? Ah…
    Semra se tait, en rencontrant le regard de Azzedine. Elle le salue d’un hochement de tête avant de se tourner vers aami Rabah. Il s’explique.
    - C’est pour te dire que tu peux préparer à dîner, pour toi et Azzedine. Vous pourrez discuter à l’aise !
    - Et toi ? Où vas-tu dîner ? lui demande-t-elle, surprise par sa tolérance et son ouverture d’esprit.
    - J’ai une réunion, lui apprend-il. Mais je ne tarderai pas, la rassure-t-il. Si tu te sens mal à l’aise, tu peux inviter sa sœur !
    - Pourquoi ne pas remettre ce dîner, à demain ?
    Aami Rabah sourit, lui reprochant presque ses peurs.
    - Je connais depuis dix ans Azzedine, lui dit-il. C’est quelqu’un de formidable. Crois-tu que s’il n’était pas fiable que je te laisserai avec lui ?, l’interroge-t-il à voix basse. Je voudrais vous donner une chance de mieux vous connaître. Je serais si heureux de vous marier. Mais pour pouvoir le faire, il faut déjà que je sache si vous êtes fait l’un pour l’autre ! Oublie tes soucis et ris un peu. Il ne t’arrivera rien de fâcheux. A tout à l’heure !
    Semra a l’impression de rêver. Aami Rabah part, les laissant seuls. Elle n’en revient pas. C’est la première fois qu’elle connaît un être confiant, sans arrière-pensée.
    Azzedine semble gêné.
    - Si tu veux, je peux partir, lui propose-t-il. Je respecterai ta volonté.
    - Tu m’aimes vraiment ? l’interroge-t-elle, en le regardant dans les yeux.
    - Oui, plus que tu ne peux te l’imaginer, répond-il, soulagé qu’elle lui ait posé la question. Je ferai tout pour toi, pour ton bonheur !
    Il est si sincère qu’elle le croit sans
    peine.
    - Qu’est-ce que je fais pour le dîner ? lui demande-t-elle.
    - Rien, je voudrais profiter de la moindre seconde pour te connaître, dit
    Azzedine.
    Semra s’imagine mal discuter avec lui pendant des heures et des heures. Alors, elle insiste pour préparer le dîner, même si elle ne connaît pas grand-chose à la cuisine.

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  14. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 15e partie
    Par : Adila KATIA

    Azzedine aurait voulu rester avec elle, dans la cuisine. Mais Semra-Dalila a refusé. Elle a allumé la radio, à fond. Lui qui aime le silence voit combien il allait devoir changer pour lui plaire. Elle est la première femme à entrer dans son cœur. Il allait devoir se faire à ses goûts, aux bruits qu’elle traînera derrière elle. Dans sa vie.
    Azzedine sourit tout en s’enfonçant dans son fauteuil. Il a envie de penser à l’avenir, aux choses qu’ils feront ensembles, mais la radio, à fond, l’empêche de s’entendre. Elle écoute la radio trop fort. Il allait devoir lui en toucher deux mots. Enfin, ce n’est qu’un prétexte pour la rejoindre à la cuisine. Au fond de lui, tout cela ne lui déplaît pas. Tant que c’est elle qui brise le silence, tant qu’il aura changé d’habitudes, pour elle tout est supportable et même parfait.
    Semra est aux fourneaux, une poêle à faire à la main. Azzedine doit s’y prendre par deux fois avant qu’elle ne l’entende. Elle-même crie pour lui répondre.
    - Ça va être prêt dans cinq minutes. Tu veux du jus ?
    - Non ! Ce que j’aimerais, c’est que tu baisses le volume de la radio !
    Mais Semra n’entend rien.
    - Quoi ?
    Azzedine traverse la cuisine et coupe la radio.
    - Tu ne trouves pas que c’est mieux ainsi ? l’interroge-t-il.
    - La musique à fond m’inspire beaucoup quand je cuisine, répond-elle. Vraiment !
    Azzedine jette un coup d’œil aux plats déjà prêts, et grimace.
    - Il faudrait trouver un autre style de musique, peut-être que les plats que tu prépares seront meilleurs !, ose-t-il lui dire au risque de la mettre en colère. Ta mère ne t’a rien appris ?
    - Elle travaille. Et puis, je ne me souviens jamais des recettes. Mais toi, tu dois t’y connaître. Ou bien vis-tu encore avec ta famille ?
    - Non, je vis seul depuis des années, mais maman et Sabah viennent toujours s’assurer qu’il ne me manque rien, dit Azzedine. Elles seront heureuses quand elles sauront pour nous, surtout Sabah.
    - Est-elle au moins discrète ? s’inquiète Semra-Dalila en portant les morceaux de poulet cuits à la table où son invité s’est déjà installé. Rien n’est encore sûr !
    - Je sais bien. mais avec maman il faut s’y faire, la nouvelle va se répandre comme une traînée de poudre. Je suppose, poursuit Azzedine, les yeux rieurs, qu’elle a dû atteindre Paris et Lille où mes tantes vivent. D’ici demain, Béjaïa et Annaba seront aussi au courant. S’ils ne le sont pas déjà !
    - Tu as une grande famille, remarque la jeune fille en devenant pâle. Tous seront présents au mariage ?
    - Je suis fou de joie. Tu parles de mariage ! s’écrie Azzedine. Es-tu d’accord ? Partages-tu les mêmes sentiments que moi ?
    - Oui. Enfin, je crois.
    Quand elle le regarde, elle éprouve un sentiment inattendu qu’elle n’a jamais éprouvé auparavant. Son cœur bat un peu trop vite. Ses mains tremblent. La fourchette lui glisse des doigts. D’une certaine façon, elle s’est faite piéger sur son propre territoire.

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  15. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 16e partie
    Par : Adila KATIA

    - Tu fais de moi l’homme le plus heureux du monde, lui affirme Azzedine en posant la main sur la sienne.
    Semra-Dalila sent ses joues s’enflammer, et son cœur bat encore plus fort dans sa poitrine. Habituée à contrôler ses émotions, elle en est impressionnée. Elle a la certitude qu’elle ne pourra jamais oublier le contact de sa main, le regard étonné de Azzedine. Elle ne pourra jamais oublier le calme qui a suivi, comme si la terre avait cessé de tourner pendant un instant.
    Que lui arrive-t-il ? C’est la première pensée qui vient à l’esprit de Semra-Dalila. Il tient encore sa main et elle ne cherche pas à rompre le contact.
    - Tu m’as ensorcelé Dalila ! dit-il, l’air grave. Je suis ton prisonnier volontaire et à vie ! Je t’ai enfin trouvée. Je n’y croyais plus. Dalila, mon amour !
    Semra retire sa main et se reproche de se laisser emporter par l’émotion. Elle ne doit pas. Dans sa situation, toute relation est vouée à l’échec. Cela ne doit pas lui sortir de la tête. Mais comment ne pas s’émouvoir devant cet homme qui l’aime à la folie ? Même s’il ne la connaît pas.
    Qu’en sera-t-il lorsqu’il saura ? La regardera-t-il toujours avec ces yeux brillants d’amour ? Le charme se dissipera-t-il ? Sera-t-il toujours ensorcelé ? Elle est sûre de son amour fou. Le sentiment est sincère. Elle en est touchée jusqu’au plus profond de son être, et si elle peut mettre un nom à l’émotion qui la fait trembler, ce n’est peut-être que pour une seule raison. C’est partagé et réciproque.
    - Pourquoi cette lueur d’inquiétude ?, l’interroge-t-il. Penses-tu à la réaction de ta famille ?
    - Euh… oui.
    Semra se lève et va chercher le dessert du frigo. Azzedine débarrasse la table. Un peu pour être plus proche d’elle. Elle trouve la cuisine plus exiguë quand il va et vient entre le plan de travail et la table. Pour ne pas se heurter à lui, elle va au salon. Elle a besoin de mettre un peu de distance entre eux. Il faut qu’elle retrouve ses esprits.
    Elle ne réalise pas qu’elle ne le pourra pas, que la magie de l’amour a opéré sur elle.
    - Qu’est-ce qui m’arrive ? se demande-t-elle. Je ne dois pas. Il faut que je lui dise que ce n’est pas possible entre nous.
    Elle doit rester sur ses gardes. Elle n’est pas Dalila, elle n’a pas de famille, pas de nom et aucunement un avenir à partager avec lui. Il lui plairait d’en avoir un, de pouvoir crier à la face du monde que leur amour est éternel, mais les choses étant ce qu’elles sont, Semra-Dalila sait qu’il y a plus important que l’amour. Elle n’a que dix-huit ans mais en sait beaucoup sur la vie. Cette dernière le lui a enseigné très tôt.
    - Pourquoi es-tu si soucieuse ? Pourquoi fronces-tu ainsi les sourcils ? Crains-tu que ta famille refuse que je t’emmène en France ? Qu’elle voudra que je réside ici pour que tu sois plus proche d’elle ?
    - J’ignore qu’elle sera la réaction de ma famille, soupire-t-elle. Si tu leur plairas ? S’ils voudront qu’on se marie ? Si tu auras assez d’arguments pour les convaincre ?
    Azzedine sourit, nullement inquiet. L’argument, il l’a. Il leur suffira de l’écouter, de lui faire confiance. Il dépend de peu pour que Semra-Dalila connaisse le bonheur. Avec lui.

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  16. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 18e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra suit un des conseils, peu de temps après avoir raccroché. Elle est allée se farder légèrement. Un peu de blush sur les joues, un délicat trait de crayon aux yeux, elle se voit transformée. Elle est plus belle. Dalila ne s’est pas trompée. Un rien l’a changée. Elle aurait dû y penser toute seule. Elle n’est pas habituée à se maquiller.
    - Dalila ! Dalila !
    Semra l’entend venir derrière elle et prend tout son temps pour se tourner vers lui. Elle lui adresse son plus beau sourire. Azzedine a une mine épouvantable et un air misérable. Elle devine qu’il a dû passer la nuit à se retourner dans son lit.
    - Je m’inquiétais de ne pas te voir à la plage ! lui dit-il. On m’a dit que tu as reçu un appel. De bonnes nouvelles, j’espère ?
    - Oui, j’ai parlé avec ma sœur, lui répond-elle.
    - Lui as-tu dit pour nous ?,
    l’interroge-t-il.
    - Non, je trouve qu’il est encore trop tôt pour en parler à ma famille !
    Depuis qu’elle a fait irruption dans sa vie, il n’est plus le même. Il faut remonter à son adolescence pour qu’il se souvienne s’être senti aussi mal qu’aujourd’hui. Pourquoi le regarde-t-elle ainsi ? Pourquoi sourit-elle ? Comment se fait-il qu’elle ne soit plus soucieuse ? Les lui aurait-elle refilés ?
    - Quand on sera sûr, poursuit-elle. Imagine que c’est juste une amourette de passage !
    - Moi, je suis vraiment amoureux de toi !, l’interrompt-il. J’ai peur que tu te volatilises.
    Azzedine la compare à un ange. Elle lui paraît plus belle qu’hier ou peut-être est-ce seulement un tour de son imagination ?
    - Et si on parlait de ce que tu as mis sur les lèvres ?
    - Quoi ? ça ? dit-elle en passant la langue sur la lèvre inférieure. Une femme peut se mettre du rouge à lèvres de temps en temps. Tu n’aimes pas ?
    Azzedine ne répond pas à la question. Semra a un mal fou à ne pas éclater de rire.
    - Tu as aussi mis quelque chose sur tes yeux !, remarque-t-il.
    - A t’entendre, il y a une loi qui l’interdit, réplique-t-elle en riant doucement.
    - Non. Non. Tout simplement, je suis à bout. Tu es si belle, tu es en train de me provoquer !
    - Loin de moi cette envie, murmure-t-elle d’une voix si innocente et si douce que Azzedine l’imagine avec des ailes. Rassure-toi. A partir de maintenant, je ne mettrai plus rien sur mes lèvres !
    - Ne joue plus avec le feu ! Tu risques de te brûler.
    Semra l’a sous-estimé. Pas de beaucoup, mais elle réalise qu’en dépassant les limites, ça risque de lui être fatal.
    - Dalila ! Tu ne trouves pas qu’il est temps d’aller surveiller les colons ! lui crie aami Rabah qui passe à quelques mètres d’eux.
    Semra est sauvée. Elle part en premier, pour qu’il ne voie pas son soulagement et sa mine devenir grave. Elle en a trop fait. L’avertissement de Azzedine n’est pas gratuit. Elle risque de se brûler les ailes. Elle a envie de pleurer. L’amour n’est pas un jeu. Elle a souvent lu cet ensorcellement dans des romans, mais jamais elle ne s’est attendue à en être la proie. Et à vouloir l’être.

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  17. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 19e partie
    Par : Adila KATIA

    Azzedine ne se comprend plus. C’est un homme correct, bien éduqué. Il sait se montrer pointilleux, perfectionniste et impatient dans son métier quand il le faut. Il est capable de harceler son personnel, voire même le renvoyer quand il n’est pas satisfait.
    Mais dans sa vie privée, il n’a jamais donné à quiconque la moindre raison de le détester. Il n’a jamais blessé une femme … jamais !
    Depuis qu’il connaît Semra, il ne se maîtrise plus. Il ne comprend pas ce qui lui arrive. Il a beau avoir quarante ans, il n’a aucune expérience qui aurait pu lui servir aujourd’hui.
    Avant son entrée à l’université, très timide, il n’a jamais eu de copines. Et ce n’est pas avec enthousiasme qu’il en a côtoyées. Malgré tout cela, il sait se montrer galant mais jamais il n’a été jusqu’à faire la cour à une femme, au grand désespoir de sa famille. Semra est la seule à être entrée dans le royaume de son cœur.
    Depuis quelques jours, elle a mis de la distance entre eux, lui parlant peu. Cela l’inquiète car il se culpabilise depuis qu’il lui a demandé de ne plus se maquiller, parce qu’il perd la tête en sa
    présence.
    -Est-ce que vous êtes en froid ? lui demande sa sœur Sabah qui a de la peine pour lui.
    -Je l’ignore, elle me paraît si pensive.
    -Pourquoi ne vas-tu pas discuter avec elle, elle est allée donner un coup de fil, du bureau. Tu peux l’y rejoindre, en prétextant, au début, chercher ammi Rabah, lui dit-elle. Il faut rompre la
    glace !
    -Tu as raison, je suis stupide !
    -Cueille-lui quelques fleurs du jardin, ajoute-t-elle alors qu’il s’apprête à rejoindre Semra.
    Il trouve l’idée bonne et cueille quelques fleurs au passage. Semra est dans le bureau de l’administration. Elle est au téléphone.
    -Ma tante, il est adorable. Nous nous entendons bien, nous sommes juste des amis, de la pure amitié. Tu le verrais, il est presque chauve, il a une petite brioche.
    Azzedine qui suit la conversation, passe la main sur ses cheveux puis sur son ventre.
    -Ma tante, il y a une soirée dansante, il faut que j’y aille ! Embrasse toute la famille !
    Semra raccroche et se tourne vers Azzedine qui vient d’entrer. Il est mécontent. Elle l’accueille avec un sourire, sachant qu’il a entendu la conversation.
    -Bonsoir Azzedine, ces fleurs sont pour qui ?
    -Pour toi, tu parlais de moi à ta tante ? l’interroge-t-il en lui remettant le bouquet de fleurs.
    -Oui.
    -Je n’ai pas perdu mes cheveux !
    -Je sais, répond-t-elle en refoulant une terrible envie de rire. Ils sont noirs.
    -Pas plus que je n’ai de brioche, ajoute-t-il.
    -Pas encore, dit Semra en regardant son ventre plat. D’ici quelques années.
    -Tu as aussi dit que j’étais adorable, tu le penses vraiment ? veut-il savoir.
    -Oui, merci pour les fleurs, dit-elle en souriant. Tu es venu pourquoi ?
    -Oui, es-tu d’accord pour prendre un nouveau départ ? lui propose-t-il. Amis ?
    -Amis, reprend Semra en mettant sa main dans celle qu’il tend vers elle. Pour toujours.
    Elle aurait pu lui fournir mille raisons de ne pas l’être. Elle a passé ces derniers jours à penser, à se faire au fait que malgré l’amour qu’ils éprouvent l’un pour l’autre, tout est voué à l’échec. Mais sa raison devient muette et sourde quand elle est en sa présence. Rien ne peut l’empêcher de le suivre à la soirée dansante.
    -Dalila, je t’aime !
    -Moi aussi, murmure-t-elle, les yeux brillants de larmes, tout en le suivant à la piste de danse où les colons et moniteurs, les ont devancés.
    Un orchestre a mis de l’ambiance. Semra et Azzedine dansent. Elle s’efforce de ne plus penser. A quoi bon penser à demain ou à après-demain alors qu’elle tient son rêve entre les mains ?
    Même si elle sait que ce rêve filera comme du sable fin entre les doigts. Les jours sont comptés.
    Rien ne peut arrêter le temps et encore rien ne peut lui éviter les souffrances à venir. Ce ne sera pas facile de l’oublier. Lui qu’elle aime tant. Lui, l’homme de sa vie.

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  18. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 20e partie
    Par : Adila KATIA

    - Nous ferons bien mieux de rentrer Dalila …
    Les deux amoureux sont sur le rocher depuis le début de la sieste. Semra a confié ses colons à Sabah. Quant à Azzedine, il n’aura qu’à rentrer avant le goûter.
    Trois heures de bonheur. Rien qu’eux deux. Ils se sont racontés tant de choses. Jamais ils n’ont été aussi proches.
    - Non…
    Semra songe que Azzedine aurait pu tout lui demander à cet instant, c’est le pouvoir de l’amour. Elle ferme les yeux et lutte contre son refus de revenir sur terre.
    S’il ne tient qu’à elle, elle aurait pu rester jusqu’à la fin de sa vie, dans ses bras. Elle se mord la lèvre, le cœur serré par la douleur.
    - Je n’aime pas commettre les erreurs Dalila … il serait préférable d’attendre, dit Azzedine. On a toute la vie, devant nous !
    Il se lève, sachant très bien qu’il ne pourra pas résister à l’envie de la reprendre dans ses bras. S’il reste encore près d’elle…
    - Allons-y ! … Je ne voudrais pas que aami Rabah remarque notre absence… Dalila, mon amour… lève-toi !
    Il soupire quand elle l’écoute enfin. Durant le trajet jusqu’au centre, ils ne se disent rien. Semra pense à Dalila. Quand elle lui a proposé de la remplacer, c’est pour qu’elle puisse passer des vacances, au bord de la mer. Elle aurait ri au nez de celui ou celle qui lui aurait dit qu’ici, à Cherchell, elle tomberait sur l’homme de sa vie. Elle n’a pas prévu de tomber amoureuse.
    Avec Azzedine, l’amour est né de façon inattendue. C’est arrivé tout simplement, comme dans ses rêves de petite fille. Même si dans sa vie, elle a eu rarement l’occasion de rêver, en allant d’une famille à une autre, d’une désillusion à une autre. La réalité est toute différente, de ce qu’elle lui a raconté. Elle lui a confié les souvenirs d’une autre à laquelle elle a emprunté l’identité. Mais le temps s’écoule. Un jour, la vérité la dévoilera. Malgré toutes les qualités qu’elle connaît à Azzedine, elle ne se fait pas d’illusions. Il ne lui pardonnera jamais. D’ailleurs, cela n’a aucune importance. Puisqu’ils se seront déjà séparés…
    De toute façon, les regrets ne pourront jamais faire mentir la vérité ! Semra a beau être courageuse et avoir une volonté de fer, pour tenter de changer de sentiments, rien n’y fait. Elle allait souffrir. Tant pis pour elle puisqu’elle n’écoute pas sa raison.
    - Comment cela s’est passé l’après-midi ? L’interroge Sabah en la suivant aux douches. Est-ce que mon frère t’a parlé de mariage ?
    - Oui … Mais je t’en prie Sabah… Si je réponds à toutes tes questions maintenant, je risque de me réveiller de mon rêve ! Et je ne veux pas…
    Sabah la comprend et la laisse tranquille. Semra ne lui a pas menti. Elle est encore dans sa bulle rose et continue malgré tout son rêve. Elle rêve de l’avenir. Ils resteraient côte à côte, ne cessant de chercher à comprendre ce que l’autre pense, pour répondre et prévenir au moindre de ses désirs. Après l’arrivée des enfants, alors pendant quelques années, ils resteraient à la maison pour les élever.
    Bref, Semra sera toujours là, pour l’épauler, pour chasser sa mauvaise humeur et pour voir grandir son génie. Il apprendra à sourire plus souvent. Elle sera fière de lui. Tout est merveilleusement simple. Mais ce n’est qu’un rêve proche de la réalité. Il suffit de franchir un pas…

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  19. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 21e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra a passé une mauvaise journée. Pourtant, elle s’est levée de bonne humeur. La bonne mine des filles de son groupe, avec qui elle s’entend à merveille, n’a pas déteint sur elle.
    Azzedine a disparu très tôt. Il ne lui a laissé aucun mot.
    Elle en est peinée. Il est parti pour toute la journée.
    Il aurait pu lui dire où il se rendait. Après tout ce qu’ils ont partagé, elle attend plus de considération de sa part.
    Son départ ne la réjouit pas.
    En y réfléchissant, elle se dit que c’est tout à fait normal.
    Ils ne se connaissent que depuis quelques jours.
    Ils ont beau s’aimer, Azzedine ne s’est pas cru obligé de la prévenir. Son attitude la bouleverse plus qu’elle ne veuille l’admettre.
    - Pourquoi es-tu soucieuse ? l’interroge Sabah qu’elle n’a pas croisée de toute la journée. Quelque chose ne va pas ?
    - Comment voudrais-tu qu’il en soit autrement ? rétorque Semra. Ton frère n’est pas là. J’ignore où il est parti ni quand il reviendra. Pourquoi ne m’a-t-il rien dit ?
    Sabah sourit, tout en la prenant par le bras. Elle comprend sa colère, même si elle est injustifiée.
    - Il a des priorités dans son travail, lui dit-elle. Il a sûrement reçu un coup de fil tard hier soir, il ne pouvait pas aller chez ton oncle et vous réveiller. Ton oncle se serait fâché !
    - Il aurait pu laisser un mot, soupire Semra.
    - Et puis, ton oncle sait sûrement où il est parti, poursuit Sabah. Pourquoi ne vas-tu pas le lui demander ?
    - J’ai honte, je n’ose pas.
    Mais comment se fait-il que toi tu ignores où s’est rendu ton frère ? s’étonne Semra.
    Même les autres ne savent pas. Cela ne t’inquiète pas ?
    - Non, mais puisque tu es inquiète, je vais aller aux nouvelles ! propose Sabah. Je suis sûre que tu te fais du souci pour rien !
    Semra le voudrait bien mais elle a un drôle de pressentiment. Elle ne comprend pas pourquoi Sabah n’est pas au courant, pourquoi âami Rabah n’a aucune information sur la brusque absence d’Azzedine.
    Ce dernier a pris le soin de le prévenir sans toutefois lui dire où il se rendra.
    La jeune fille accompagne en ville les colons qui ont envie d’acheter des souvenirs ou d’envoyer des cartes postales à leur famille ou amis.
    Cette heure de promenade la détend un peu.
    Elle fait comme ces colons et achète une carte postale.
    Elle a l’intention de l’envoyer à Dalila.
    Elle et son groupe prennent place à la terrasse d’un salon de thé.
    Tout en consommant leurs glaces, elles écrivent. Semra ne sait pas quoi lui confier.
    Elle hésite à le faire sachant que la carte allait tomber entre les mains de ses parents avant qu’elle ne lui soit remise. Alors, elle se contente de lui passer son bonjour et de souhaiter qu’elle se soit remise de son opération.
    Après avoir réglé les consommations, elles se rendent à la poste et envoient leurs cartes.
    Elles prennent le chemin du retour. Semra, que ses colons précèdent, ferme la marche.
    Elle remarque une voiture s’engager à l’intérieur du centre de vacances. Azzedine la conduit. Il n’est pas seul. Une femme l’accompagne…

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  20. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 22e partie
    Par : Adila KATIA

    Il a pris sa journée pour être avec une autre femme. Semra en est furieuse. Elle aimerait le maudire.
    Un peu de haine l’aurait aidée à retrouver du calme. Le fait de l’avoir vu avec une femme l’a bouleversée. Dès qu’elle en a fini avec ses colons, elle s’en va chez aami Rabah.
    Ce dernier n’est pas là et cela l’arrange. Elle ne veut pas qu’il la voie dans cet état.
    - En plus, il l’amène ici ! Il voulait me mettre hors de moi ou quoi ? Est-ce que je ne suis rien pour lui ?, s’interroge-t-elle en arpentant sa chambre. Qu’est-ce qu’il lui a pris de l’amener ici ?
    Semra n’a pas eu le temps de la voir, de pouvoir lui donner un âge. Elle l’imagine belle, intelligente mais surtout charmeuse. Azzedine doit être suspendu à ses lèves. Elle, elle n’est plus rien pour lui. Il lui en a donné la preuve aujourd’hui.
    - Je n’ai jamais eu de chance, se dit-elle. Pourquoi espérer en avoir maintenant ?
    Quand on frappe à la porte d’entrée, elle ne va pas ouvrir tout de suite. Elle prend le temps d’aller se rincer le visage, d’essuyer toute trace de larmes avant d’aller ouvrir.
    - J’arrive !
    En repoussant ses cheveux en arrière, elle ouvre le battant. C’est une femme rousse. Elle la reconnaît. C’est elle qui accompagnait Azzedine. Décidément, ce n’est pas son meilleur jour. Elle ne l’invite pas à entrer.
    - Bonsoir !
    - Comment ça va ? Est-ce que aami Rabah est là ?, l’interroge l’inconnue.
    - Non, il est sorti.
    Les doigts toujours sur la poignée de la porte, Semra allait déjà refermer après avoir suggéré à la visiteuse de partir. Mais ç’aurait été grossier. Elle prend une profonde inspiration avant d’ajouter :
    - Il n’a pas dit quand il rentrerait, mais vous pouvez l’attendre au salon.
    - Merci.
    Une fois à l’intérieur, l’inconnue la scrute de haut en bas. Ses yeux verts la pénètrent et lui empoisonnent le cœur. Semra se préoccupe rarement de ce qu’elle porte. Aujourd’hui, par malheur, elle porte un vieux jean et une chemise à fleurs roses.
    Elle n’a aucun bijou et marche pieds nus. Pour comble de malheur, l’unique barrette qu’elle possède retient tant bien que mal ses cheveux.
    Elle est tout le contraire de la belle inconnue. Pantalon blanc, chemisier de soie vert, un collier en or et des boucles d’oreilles pour tout bijou. Ses cheveux retombent en vague sur ses épaules, retenus derrière les oreilles par des barrettes de perles. Elle est parfaite, ravissante. Tout ce qu’elle n’est pas.
    - Vous vous appelez ?, lui demande-t-elle.
    - Semra, répond la jeune fille. Et vous ?
    - Kenza. Vous êtes une parente à aami Rabah ?
    - Oui, sa nièce. Et vous, vous êtes ici pour le travail ?, ose demander Semra. Ou pour une autre raison ?
    - En effet, pour une autre raison, répond Kenza, avant de s’asseoir dans un fauteuil, la regardant avec une moue presque méprisable.
    Semra se détourne. Si tout à l’heure elle n’a eu aucune raison de la détester, maintenant elle l’en a.

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  21. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 23e partie
    Par : Adila KATIA

    Cette autre raison ne peut être que Azzedine. Il lui a manqué. Elle a dû l’appeler hier soir, pour lui demander de venir la chercher. Azzedine n’a pas pensé sur un coup de tête à elle. Pendant plusieurs jours, il n’a été qu’à elle. Semra regrette déjà cette période. Mais leur séparation est inévitable. Elle le sait depuis le début. Seulement, elle a été prise de court. Elle a toujours pensé au jour où elle partira sans le prévenir. La fin de leur histoire aurait dû venir d’elle, pas de lui.
    Elle n’en revient toujours pas. Azzedine n’a pas attendu d’être reparti en France pour retourner à son ancien amour. Semra a très mal, même si elle s’efforce de sourire devant Kenza.
    - Vous devez être une amie proche de Azzedine, remarque Semra.
    - En effet, reconnaît l’inconnue. Vous le connaissez ?
    - Oui, il vient souvent voir mon oncle, lui apprend-elle en ajoutant, en son for intérieur, et moi aussi. Est-ce que vous voulez prendre quelque chose ? Une boisson fraîche ou du café ?, lui propose-t-elle.
    - Une boisson fraîche, répond Kenza. C’est gentil. Merci.
    - Très bien. J’en ai pour une minute.
    Semra ne tarde pas à la cuisine, juste le temps de poser sur un plateau deux verres de limonade et une assiette de gâteaux.
    Mais un temps suffisamment long pour permettre à aami Rabah et à Azzedine d’entrer. La jeune fille manque de lâcher le plateau quand elle les voit.
    - Bonsoir, lui dit Azzedine. Ça va ? Tu as eu le temps de faire connaissance avec Kenza ?
    - Oui, dit-elle d’une voix neutre.
    - Viens t’asseoir, la prie-t-il en la voyant se détourner d’eux après avoir posé le plateau, sur la table basse. J’ai des choses à te dire.
    - Je sais tout. Kenza m’a raconté.
    - Vraiment ? Et c’est tout l’effet que cela te fait ?, l’interroge-t-il, surpris. Tu m’étonnes !
    - Il n’y a pas de quoi être surpris, rétorque-t-elle. Vous m’excuserez mais je suis fatiguée. la journée a été pénible.
    - Mais on doit discuter, insiste Azzedine. J’ai amené Kenza pour ça.
    - Je ne vois pas en quoi je pourrais être concernée par votre discussion !, soupire-t-elle, les yeux larmoyants. Non, vraiment pas. Vous pouvez discuter sans moi.
    - Je ne vois pas comment !, intervient aami Rabah. Sa tante est venue pour s’entendre avec toi sur les coutumes de ta région.
    - Kenza n’est pas sa tante, rectifie-t-elle. C’est une amie.
    - Mais non. C’est sa tante maternelle. C’est vrai qu’ils ont presque le même âge, mais Azzedine est bel et bien son neveu, dit aami Rabah. Reste discuter avec eux. Elle ne peut pas repartir sans savoir !
    - Ah.
    Semra se sent rougir. Elle s’est trompée. Depuis deux heures, la colère et la jalousie l’ont poussée à tirer des conclusions hâtives. Elle a pris Kenza pour une rivale, sans preuve. Et sans raison, elle s’est mise à la détester. Alors qu’elle n’a rien à craindre d’elle.

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  22. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 24e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra n’a pas la force de présenter ses excuses. Cramoisie, elle se contente de garder la tête baissée pendant un moment, le temps de se remettre de son émotion. La jalousie l’a induite en erreur. Elle a failli tout gâcher.
    Azzedine en rit, pendant la courte absence de l’oncle. Ce dernier est allé chercher deux autres verres de limonade pour eux.
    - Qu’est-ce que tu as cru ?
    - Rien… je l’ai seulement prise pour ton amie, répond-elle, arrachant un sourire à Kenza. Je ne pouvais pas deviner !
    - Parce qu’elle est jeune ? J’ignorais que tu pouvais être jalouse ! dit Azzedine sans cacher sa joie. Ça m’a fait plaisir !
    - Semra, intervient sa jeune tante, a été très correcte. Elle s’est même occupée de moi malgré la colère et la déception ! Elle a su se maîtriser ; c’est remarquable ! Elle m’a fait bonne impression !
    - Je suis heureux de te l’entendre dire, soupire Azzedine, visiblement soulagé par le jugement positif de sa tante. A moi aussi, elle me plaît !
    - Si ce n’était pas le cas, tu ne serais pas venu me chercher ! rétorque Kenza. Où est Sabah ? Pourquoi n’est-elle pas venue me voir ?
    Azzedine lui propose de l’emmener vers elle. Après avoir goûté aux gâteaux et bu leurs limonades, ils partent.
    Rabah est resté pour discuter avec Semra.
    - Dalila, ma fille, Kenza veut rencontrer ta famille. Est-ce que tu es sûre de tes sentiments ?, l’interroge-t-il. Si ce n’est pas le cas, autant qu’elle le sache ! Je ne serais pas étonné d’apprendre qu’elle a appelé sa sœur pour la mettre au courant et lui donner son avis ! Alors, dis-moi, est-ce que je dois demander à ton père de venir ?
    Semra se mord la lèvre, fronçant les sourcils.
    La situation a pris un coup de sérieux qui la déconcerte et l’inquiète. Elle s’est permise d’imaginer bon nombre de situations mais jamais elle n’a songé que Azzedine irait jusqu’à chercher sa tante pour la lui présenter.
    Elle a deviné que sa mère ne sera pas facile à convaincre. Sinon il n’aurait pas amené sa tante pour plaider sa cause. Elle réalise que même avec une vraie identité, une famille, un passé, le bonheur n’est pas à portée de main. Il dépend aussi des autres.
    Azzedine a beau avoir quarante ans et une situation stable, avant de s’engager avec elle, il a fait appel à sa tante. Son jugement allait influencer celui du reste de la famille. Tout tourne autour de la famille. Ce qu’elle n’a pas…
    - Dalila ! Alors, qu’est-ce que tu décides ?, veut savoir âami Rabah.
    - Et si on attendait encore un peu ? propose-t-elle, hésitante. Je sais que tu les affectionnes beaucoup, mais…
    - Ça va ! J’ai compris, réplique-t-il. Tu as besoin de temps et tu l’auras ! Rien ne presse ! Il te reste quelques jours pour te décider ! Même plus…
    Ce soir-là, Semra n’assistera pas à la pièce de théâtre que présentera un groupe de colons. Azzedine voudra qu’elle reste avec eux. Il lui donne ainsi l’occasion de mieux connaître sa tante Kenza. Semra reste sur ses gardes, se contentant de sourire et d’approuver de la tête. Elle a fait l’erreur de se présenter avec son vrai prénom. Kenza ne l’a pas oublié. Elle n’a pas caché sa surprise lorsque Sabah et Azzedine l’ont appelée Dalila…

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  23. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 25e partie
    Par : Adila KATIA

    - Non, je t’assure qu’elle a bien dit Semra, insiste Kenza.
    Je ne l’ai pas imaginé.
    - Je te répète qu’elle s’appelle Dalila, réplique Azzedine. Sauf si Semra est son deuxième prénom, mais je l’aurais su avant toi Dalila.
    Comme elle ne peut pas nier, elle excuse son geste. Même si ses explications sont loin de le satisfaire.
    - Je ne voulais pas qu’elle sache que j’étais ton amie. J’étais jalouse. Je vous avais vus venir en voiture !
    - Comment pouvais-tu être jalouse ? Et puis, à quoi t’aurais servi ce mensonge ? insiste Azzedine.
    - A ne pas être jugée tout de suite ; et alors, ça change quoi ? l’interroge-t-elle, les yeux larmoyants, que je m’appelle Dalila ou Semra, n’a aucune importance ! Tu me connais moi, l’être humain ! L’amie…
    - En effet, reconnaît Azzedine. Celle que je connais est un être merveilleux avec qui je veux passer ma vie !
    Excuse-moi, j’aurais dû tenter de te comprendre ! Cette pression, ce n’est pas facile !
    Il regrette de ne pas y avoir pensé. Cela fait plusieurs jours depuis qu’il la presse de prendre une décision. Il ne peut que comprendre sa surprise quand Kenza, qu’elle a vue auparavant avec lui, débarque chez son oncle.
    - Est-ce que tu comprends mon envie de te présenter à ma famille ? Est-ce que tu m’excuses ?
    Semra soupire et d’efforce de sourire pour le rassurer.
    - Bien sûr !
    Kenza sourit elle aussi et ne dit pas un mot de plus sur le sujet. Le reste de la soirée se termine dans une ambiance, plus détendue. Quand vient l’heure de se coucher, Azzedine raccompagne Semra chez son oncle. Semra n’a pas proposé à Kenza de venir passer la nuit, redoutant d’avoir à répondre à des questions qui dévoileraient vraiment qui elle est et ce qu’elle est.
    Aami Rabah l’a attendue. Il veut savoir comment elle a passé la soirée.
    - Bien ! répond-elle.
    - Je voulais ton avis sur sa famille, Kenza a l’habitude d’être bavarde ! Tu en sais plus sur eux, maintenant. Alors, ton avis, est-ce que je peux le connaître ?
    - Ce sont des gens bien…
    Mais j’ai encore besoin de temps pour me décider !
    - Au fait, dit âami Rabah pour changer de sujet, j’ai prévu une sortie sur Alger, est-ce que tu veux faire partie du premier groupe ?
    - Oui !
    Semra n’aura pas à en dire davantage. Quelqu’un a sonné. Aami Rabah s’en va ouvrir. Elle reste dans le salon, pour écouter. Elle s’attend à Kenza. Mais ce n’est pas elle.
    - Un coup de fil pour elle ? A onze heures et demi !
    Rien de grave, j’espère ?
    - Je l’ignore. Il veut parler avec elle !
    Aami Rabah l’appelle.
    - On va au bureau… tu as un appel urgent !
    Semra le suit. Inquiète. Elle se demande d’où vient cet appel…

    Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup

  24. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 26e partie
    Par : Adila KATIA

    - Aami Tahar ? Comment vas-tu ? Qu’y a-t-il d’urgent pour que tu appelles au milieu de la nuit ?
    Semra s’efforce de paraître détendue. Dalila ne lui a pas caché avoir un oncle, à Alger. Il a été prévenu de sa venue à Cherchell, peu de temps avant que Dalila ne soit hospitalisée. Semra se demande s’il est au courant ou s’il n’a pas été en contact avec eux.
    - Cela fait plusieurs jours depuis que j’attends l’appel de ton père, il avait promis de m’appeler dès que tu serais au centre. Je ne comprends pas pourquoi il ne l’a pas fait !
    - C’est sûrement en dérangement, dit-elle. J’essaye de les avoir depuis deux jours mais en vain ! Tu te fais du mauvais sang pour rien. Est-ce que tu seras à la maison ces jours-ci ? Car on fera une excursion, je voudrais en profiter pour te dire bonjour !
    - Bien sûr ! Préviens-moi la veille !
    Semra soupire de soulagement quand elle raccroche. Apparemment, il ne s’est douté de rien. Elle réalise, pour la énième fois de la soirée, que le temps court après elle. Tout comme la vérité. Il ne lui reste que quelques jours à passer au centre et elle risque d’être découverte, avant d’avoir pris les dispositions nécessaires pour partir et s’envoler dans la nature. Là d’où elle est venue.
    - Que voulait-il ? Pourquoi se fait-il du souci ?, l’interroge aami Rabah.
    - Il est sans nouvelles de papa, répond-elle. C’est en dérangement !
    - Ça arrive souvent ! Mais s’il a réclamé, d’ici quelques jours, la ligne sera rétablie, la rassure aami Rabah.
    - Si tu me le permets, je ne voudrais plus partir sur Alger, par le premier groupe, le prie-t-elle.
    Dans le deuxième !
    - Le premier part dans quatre jours ! D’ici là, tu auras eu des nouvelles de la famille ! Tu te fais du mouron pour rien!
    - Je sais, j’ai besoin de rester un peu seule, insiste-t-elle. J’en profiterais pour me décider ! Sans influence quelconque !
    Aami Rabah semble comprendre. Il accepte de lui laisser ce temps pour prendre sa décision.
    Cette nuit-là, la jeune fille aura du mal à s’endormir. Sachant son temps compté, elle pense à son départ. Si Tahar parvient à parler à la famille de Dalila, elle sera vite découverte.
    Elle craint sa réaction. Il a beau s’être attaché à elle, quand il saura qu’elle a abusé de sa confiance, se faisant passer pour la fille de son ami, elle risque de se retrouver entre les mains des gendarmes. Il n’hésitera pas à le faire.
    Semra décide de profiter de leur sortie, sur Alger, pour partir. Il n’y aura personne pour le remarquer. L’instant de plier bagage n’est pas encore arrivé mais elle pleure déjà.
    Il lui sera difficile de vivre après, en n’emportant que des souvenirs au fond du cœur. Depuis le début, elle a su qu’elle aura à tout quitter, brusquement. Mais jamais elle ne s’est imaginée en souffrir autant…

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  25. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 27e partie
    Par : Adila KATIA

    Azzedine la regarde longuement. Semra y voit de l’inquiétude et une lueur interrogative. Elle se détourne, ne les supportant pas. Elle a passé toute la nuit à pleurer. Elle en a les yeux rouges. A ceux qui lui en ont demandé la cause, elle a répondu avoir une allergie. En pensant à la réelle cause, elle sent son cœur se déchirer. Elle se mord la lèvre de douleur.
    - à quoi penses-tu ?, l’interroge-t-il. Aurais-tu des soucis ?
    - Non. Il y a une excursion sur Alger, aâmi Rabah m’a dit que tu dois te rendre là-bas la veille pour tout organiser, dit-elle pour changer de sujet. Ta tante rentrera avec toi ?
    - Oui si elle ne part pas aujourd’hui, lui apprend-il, avant de lui rapporter ce qu’elle pensait d’elle. Tu lui plais beaucoup. Elle dit que je ne pouvais pas trouver mieux !
    Semra s’efforce à sourire.
    - Et si on allait prendre un café avec elle ? propose-t-il.
    La jeune fille ne refuse pas. Kenza est au bureau de aâmi Rabah. Elle y attend un coup de fil. Azzedine va leur chercher du café, leur donnant l’occasion d’être seules. Semra ne trouve rien à dire. Elle a toujours le cœur serré. Un soupir lui échappe malgré elle.
    Kenza, la tante, sourit. ça ne lui a pas échappé. Elle l’interprète à sa façon.
    - Semra, est-tu inquiète quant à ta relation avec mon neveu ?, veut-elle savoir. Je te prierais d’être franche !
    - Les choses vont beaucoup trop vite, murmure la jeune fille, en ne la regardant pas dans les yeux. Mais oui. Je suis inquiète, je n’ai pas encore fini mes études, et là, je suis amoureuse de lui !
    - Il a besoin d’une femme dans sa vie, dit Kenza. Je suis heureuse et soulagée que ce soit toi. En général, les rares fois qu’il a connu des femmes, elles étaient coincées et assommantes ! Sache que même là-bas, tu pourras finir tes études ! J’y veillerai !
    Semra ne peut s’empêcher de sourire. En dépit du côté froid qu’elle lui a trouvé la veille, quelque chose comme de la bonté perce dans son regard.
    Eh oui !
    Kenza lui retourne le sourire. Semra se sent moins tendue.
    - Je comprends pourquoi il a vite été séduit ! Tu es unique. Je suis sincèrement heureuse pour vous ! Je vous souhaite tout le bonheur du monde ! J’ai hâte de revenir faire les démarches nécessaires avec ma sœur et de vous marier !
    - Vous êtes en train de parler de qui ?
    - Et voilà un de ses défauts ! Il adore écouter aux portes, dit sa tante, alors qu’il entre avec deux grands verres de jus de fruits pour elles.
    - Seulement quand on parle de moi !, réplique Azzedine. Alors, tu pars aujourd’hui ou demain ?
    - Aujourd’hui. Maintenant, rectifie-t-elle, en se levant.
    - Je t’accompagne à la station de taxi, décide son neveu.
    Kenza embrasse Semra avant de partir. Semra est soulagée de ne pas avoir eu à se disputer ou à se battre pour garder Azzedine. Même si elle sait que jamais il ne sera à elle.

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  26. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 28e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra est bouleversée. Quand elle voit le car s’éloigner, elle réalise qu’elle ne reverra plus jamais Azzedine. Il est parti, pour préparer la sortie des colons à Alger. Demain, elle fera de même. Elle n’a pas le choix. Il ne lui reste que cette journée pour prendre ses affaires et partir.
    - Pourquoi être aussi triste alors qu’il va revenir demain, en fin de journée ! lui dit Sabah quand elle remarque sa petite mine à la plage. Il te manque déjà ! Cela lui fera plaisir quand il le saura ! Feras-tu partie des encadreuses ?
    - Peut-être ? Et toi ?
    - Oui, j’adore me rendre à Alger !
    La jeune fille en doute fort. Personne ne comprendra sa fuite. Elle a longtemps réfléchi à la situation et il n’y a pas d’autre solution.
    Semra songe à son passé. Le dortoir froid du centre d’éducation la fait frissonner. Elle a beau être sous le soleil chaud, le souvenir la glace et la rattrape. Elle ne se fait pas d’illusions.
    Elle ne pourra pas jouer davantage à ce jeu où elle risque de perdre. Elle ne peut pas continuer à prétendre être Dalila. Si son oncle Tahar rappelle par hasard ou même le père de Dalila, elle sera découverte. Aâmi Rabah n’hésitera pas à la remettre entre les mains de la police ou des gendarmes.
    Tous sauront alors qu’elle n’est en fait qu’une pupille de l’Etat et qu’elle a été abandonnée dans le coin d’un vieux bâtiment. C’est un agent de l’ordre qui l’a trouvée et qui a pris soin de la remettre à la maternité la plus proche.
    Semra serre les poings devant tant d’injustice. N’a-t-elle pas le droit à la paix, au respect, au bonheur ?
    Elle joue la comédie, sans rôle précis, sans espoir de renommée. Elle sait, pour l’avoir vécu à plusieurs reprises, dans sa courte vie de ne pas s’attendre au meilleur. Le meilleur est pour les enfants légitimes.
    Elle se rappelle les parents de ses camarades de classe qui lui ont caressé les cheveux, donné des bonbons avec un mot gentil, ceci, avant de savoir qu’elle est une enfant naturelle. Après, elle a eu droit au mépris et certains n’ont pas hésité à recommander aux enfants de ne plus jouer avec elle, comme par crainte de les voir attraper une maladie grave et incurable !
    Semra n’a jamais eu d’amie avant Dalila. Grâce à celle-ci, elle a eu la chance de travailler, de se faire des amis. Mais surtout, de connaître Azzedine.
    Pourquoi rêver puisqu’il ne lui reste que quelques heures avant son
    départ ?
    - Dalila… Tu voulais me parler ? lui demande aâmi Rabah en s’arrêtant à sa hauteur. La secrétaire m’a dit que tu étais passée au bureau !
    - Oui, j’ai un souci, lui avoue-t-elle, un peu gênée. Je n’ai plus d’argent. Est-il possible de percevoir une partie de… ?
    - Bien sûr, l’interrompt-il. Tu passes demain, à la comptabilité ?
    - Et aujourd’hui ? demande-t-elle. Je voulais m’acheter des choses, cet après-midi ! Et même des souvenirs d’Alger. Personne ne peut me prêter ?
    - Puisque c’est urgent, je pourrais le faire, propose-t-il. Je te remettrai la somme que tu veux, tout à l’heure !
    Semra le remercie et ne cache pas son soulagement. Elle ne peut pas partir les poches vides…

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  27. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 29e partie
    Par : Adila KATIA

    Jamais Semra n’a été aussi triste de toute sa vie. Tout en fourrant ses affaires dans son sac, elle pleure. Azzedine allait lui manquer. Il est à ses yeux quelques pages en couleurs, dans le triste livre de sa vie.
    Elle sait qu’elle n’aura de cesse de revenir en arrière pour feuilleter ces pages. Malgré la douleur…
    Elle est si vive en elle qu’elle se mord les lèvres. Du bruit du côté du salon lui parvient. Semra se ressaisit. Elle va à la salle de bains et se rafraîchit le visage. Elle se regarde dans la glace et se trouve bien pâle. Ses yeux sont gonflés et les paupières sont rouges. Si elle sort maintenant de la chambre, âami Rabah allait le remarquer. Qu’allait-elle lui répondre quand il voudra savoir la cause de son chagrin ?
    - Dalila, il est l’heure de te lever ! crie âami Rabah derrière la porte. Je pars dans quelques minutes, les colons sont prêts eux aussi.
    - J’arrive !
    Mais Semra ne sort pas tout de suite de la chambre. Elle attend qu’il soit parti pour en faire de même. Elle n’aura pas à le voir. Occupé à organiser les départs des colons en excursion sur Alger, il n’a plus le temps de chercher après elle. Elle s’est gardée de se mettre dans son champ visuel. Elle aurait eu du mal à lui expliquer ce qui lui est arrivé.
    Elle soupire de soulagement quand elle le voit prendre place à l’avant du car. Le chauffeur démarre. Il doit la croire dans l’autre bus, avec Sabah et les jeunes colons. Le car disparaît au premier tournant.
    - Enfin, murmure-t-elle en retournant à la maison, il est temps pour moi de faire comme eux !
    Et c’est le pire moment de sa vie. Jamais elle n’a autant souffert. Son sac lui paraît très lourd. Elle traîne les pieds quand elle quitte la villa. Près de l’entrée du centre, elle tombe sur la cuisinière et son aide. Elles s’inquiètent en la voyant.
    - Quelque chose ne va pas ? Pourquoi es-tu si triste ? Serait-il arrivé un malheur dans ta famille ?
    - Oui, il faut que je rentre aujourd’hui !
    - Aami Rabah n’est pas au courant ?
    - Non, je lui ai laissé un mot ! Au revoir !
    En ville, Semra ne part pas tout de suite. Elle entre dans un salon de thé et prend place, au fond, pour ne pas être dérangée. Elle a acheté du papier à lettre et deux enveloppes.
    Elle ne peut pas partir sans leur avoir écrit la vérité.
    Elle la leur doit. En les fréquentant, elle en a appris beaucoup. Ils ont partagé tant de choses qui rendent leurs relations uniques. Elle ne regrette pas de les avoir connus. Ils allaient lui manquer. La courte lettre qu’elle écrit à âami Rabah lui arrache un sourire. Mais celle destinée à Azzedine la fait de nouveau pleurer.
    Elle n’est pas au bout de ses souffrances. Tout comme Azzedine.

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  28. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 30e partie
    Par : Adila KATIA

    Il est 11h lorsque Azzedine arrive au centre de vacances. Il est impatient de retrouver Semra. La veille, il a eu une conversation avec sa sœur Sabah. Elle ne lui a pas caché combien Semra est triste depuis son départ. Elle a traîné sa peine toute la journée. Comment rester loin d’elle dans ce cas ? S’il ne l’aime pas autant, il aurait pu, mais il l’adore. Il est sensible à tout ce qui la touche.
    C’est la raison qui l’a poussé à ne pas attendre la fin de l’excursion pour rentrer.
    Il s’inquiète. Il ne la trouve nulle part au centre. Il a demandé à ceux qu’il a croisés s’ils l’auraient vue, mais aucun ne sait où elle est allée.
    Azzedine va à la plage, espérant l’y trouver mais aucune trace d’elle. Ses pas le mèneront ensuite en ville. Il va aux endroits où elle a l’habitude de se rendre. Il est déçu de ne pas l’y trouver. Il retourne au centre, et cette fois, il va chez aami Rabah. Les volets sont fermés, mais il sonne plusieurs fois à la porte. Personne ne vient ouvrir.
    - Qu’est-ce qui se passe ?
    C’est l’heure du goûter, il se rend au réfectoire et se sert un café. Les employés de l’administration et de l’entretien remarquent son visage fermé. Azzedine sent leurs regards. Tous savent qu’il a longtemps cherché Semra.
    - Salut Azzedine ! Tu es rentré d’Alger ?
    - En fin de matinée, répond-il. J’ai passé mon temps à chercher Dalila !
    Elle a comme disparu ! J’ignore où la trouver.
    La cuisinière frappe dans ses mains. Elle vient de se rappeler l’avoir croisée.
    - Elle est partie chez elle, lui apprend-elle. Elle m’a fait beaucoup de peine. Elle était si triste ! Je crois qu’il est arrivé malheur. C’est pourquoi elle est rentrée !
    Azzedine la remercie et ne termine pas son café. Il va à l’administration.
    Il a de la chance.
    Le comptable a encore à faire. Habituellement, l’administration ferme à 16h.
    - J’ai besoin d’un renseignement, lui dit-il. Je voudrais les coordonnées de Dalila G. ! C’est urgent ! Il faut que je contacte sa famille !
    L’employé n’hésite pas à fouiller dans les formulaires et le lui remet. Azzedine va dans le bureau d’à côté où se trouve le téléphone.
    Il compose le numéro et soupire de soulagement lorsque la première sonnerie lui parvient. A l’autre bout de la ligne, un homme décroche. Azzedine se présente et demande des nouvelles de la famille.
    - Dalila est partie sans laisser de mot ! Je me suis inquiété.
    - Mais ma fille n’est jamais partie ! Elle se remet de son opération. Elle n’est jamais partie à Cherchell !
    - Cela fait dix-huit jours qu’elle est ici ! Elle est partie ce matin !, insiste-t-il.
    - Impossible ! Ce n’est pas ma fille !, réplique le père.
    Dalila est au lit depuis le début des vacances ! Vous devez vous tromper. C’est quelqu’un d’autre alors !
    - Je ne comprends rien ! Quelque chose m’échappe, murmure Azzedine. Si ce n’était pas votre fille, qui était-ce ?
    Comment se fait-il qu’elle ait écrit votre adresse, votre numéro de téléphone ?

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  29. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 31e partie
    Par : Adila KATIA

    - Comment est votre fille ?, veut savoir Azzedine.
    - Comment ? Elle est grande, blonde… des yeux verts, répond le père de Dalila. Un peu maigre. Et celle qui était là-bas, comment est-elle ?
    - Même description, soupire Azzedine. Mais ce n’est pas votre fille. Comment s’est-elle procuré ses papiers ? Est-ce que votre fille a été volée ? Qui est celle qui a usurpé son identité ?
    - Ma fille n’a pas été volée, sinon je l’aurais su. En fait, depuis qu’elle a quitté l’hôpital, je n’ai pas cherché ses papiers, dit le père de Dalila. Là, elle est sortie avec sa mère. A son retour, je
    vérifierai !
    - Oui, faites-le ! Si votre fille a un compte en banque, elle risque de tout perdre ! Qui sait dans quel genre de pétrin elle risque de se retrouver si l’autre loue à son nom, participe à un cambriolage ou à quelque trafic, dit Azzedine.
    - Je vais tirer cela au clair et m’adresser à la gendarmerie, le rassure le père de Dalila. Et vous, vous a-t-elle volé ? Je voudrais bien savoir comment vous l’avez connue !
    - Ici même au centre de colonie de vacances, répond Azzedine. Pour ce qui est de ce qu’elle a fait, elle a tout pris. Elle n’a rien laissé !
    Sur ce, il raccroche après un au revoir. Elle a pris son cœur et le laisse perdu dans ses questionnements sans réponse. Il ne comprend pas. Quelque chose lui échappe. Si elle n’est pas Dalila, qui est-elle ? Comment a-t-elle fait pour être en possession de ses papiers d’identité ? Pourquoi s’est-elle fait passer pour elle ? Elle n’est pas une voleuse. Il sait qu’il n’y a eu aucun vol de commis au centre de colonie. Sinon, il les lui aurait attribués.
    - Au fait, il y a un courrier pour vous, lui dit le comptable en le voyant sortir du bureau.
    - Plus tard ! dit Azzedine en pensant à repasser le lendemain, mais il rebrousse chemin, curieux.
    L’enveloppe ne porte aucun cachet de poste. Il l’ouvre avec empressement. Il a deviné qui en est l’expéditeur. Ce ne peut être que Dalila. Enfin, celle qui s’est fait passer pour elle !
    Et c’est bien elle qui lui a écrit la lettre. Les mots écrits d’une main tremblante, sur un papier mouillé de larmes, lui vont droit au cœur. L’écho de sa voix résonne en lui.
    “A l’homme de mes rêves,
    Je sais que c’est mal de mentir, de partir sans donner d’explication, mais je n’avais pas le choix. Tu dois savoir que je ne m’appelle pas Dalila. Je regrette de ne pas avoir eu le courage de te dire la vérité. Je suis une pupille de l’Etat, sans nom, le reste n’a aucune valeur. Ces quelques jours passés avec toi, je ne les oublierai jamais. Des moments de bonheur qui ont filé trop vite. Le bonheur rêvé. Il n’aura duré qu’un temps. La réalité y a mis fin. A mon grand regret. J’aurais pu tout dire mais je craignais ta réaction. Je ne m’attends pas à recevoir des fleurs. Quant aux insultes, j’en ai assez entendu. Je garderai gravé en moi le souvenir, le meilleur…
    Une fille sans nom”.
    Azzedine n’arrive pas à y croire. Il a beau lire la lettre plusieurs fois, il ne peut s’empêcher de se demander s’il a vraiment vécu ces merveilleux moments en compagnie de la jeune fille pleine de vie et d’aspirations ? Qui a-t-il vraiment aimé ? Dalila ou la fille qu’il y a en elle ? En y réfléchissant, il se dit qu’il l’a aimée pour ce qu’elle est ou le peu qu’elle a bien voulu lui montrer.
    Elle a profité de son absence pour partir. Il se rappelle que Sabah lui avait dit qu’elle était triste depuis son départ sur Alger. Il regrette d’être parti sur Alger. Il a suffi d’une nuit pour qu’elle se décide à partir. Que s’est-il passé ? Craignait-elle d’être découverte ?
    Tout en réfléchissant, il est persuadé que sa demande en mariage en est la raison. Il aurait dû prendre son temps au lieu de vouloir tout précipiter. Il la voulait à lui, officiellement, de peur qu’elle ne lui file entre les doigts. Mais n’est-ce pas ce qui était arrivé ?

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  30. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 32e partie
    Par : Adila KATIA

    - Qu’est-ce que je fais maintenant ?
    Il est complètement désemparé. Il n’a pas le cœur à appeler la gendarmerie et encore moins à s’y rendre. Il traîne, l’âme en peine, et tente de se remémorer chaque instant passé en compagnie de Dalila. Il sait qu’elle a volé cette identité mais il ne peut pas l’appeler autrement. De cette inconnue, il ne garde que des souvenirs.
    Il soupire de soulagement en pensant aux photos qu’ils avaient prises lors des soirées, à la plage, lors du dîner avec sa tante.
    “Qu’est-ce que je vais devenir sans elle ?”
    Il va s’asseoir à même l’escalier et se perd dans ses souvenirs.
    “Ce sont déjà des souvenirs !”
    Pourtant, c’était hier, avant-hier, si proches dans le temps. Mais elle est partie. Les souvenirs se bousculent dans sa tête. Il se revoie en sa compagnie. Lorsque les colons dormaient, ils aimaient filer à la plage. Ils restaient de longues heures, assis dans l’ombre, à se murmurer des promesses. Le cœur déchiré, il a le sentiment d’avoir été trahi. Lors de leurs discussions, il était le seul à parler de l’avenir, à élaborer des projets pour eux. Il se rappelle qu’elle se contentait de sourire, d’approuver d’un hochement de la tête. Lorsqu’il la pressait de questions, sur tel ou tel sujet, elle lui avait souvent répondu : “Attends que ce jour arrive, et là, repose-moi la question !”
    Elle savait depuis le début qu’ils n’auront rien de commun. Pourtant, il est sûr de son amour. Le sentiment était sincère. Elle n’avait pas profité de lui. Il ne comprend pas pourquoi elle a pris l’identité d’une autre. Serait-elle
    recherchée ? Quel crime aurait-elle commis ?
    à part celui de lui voler son cœur et sa tranquillité d’esprit, il lui semble qu’elle n’a rien fait d’autre.
    Il s’en veut de ne rien avoir vu venir. Perdu dans ses pensées, il ne voit pas le car s’arrêter à l’entrée du centre de vacances. Le directeur Rabah en descend le premier, suivi des enfants. Le voyage les a épuisés. Ils ne chahutent pas en regagnant leurs tentes, surveillés de près par leurs moniteurs.
    - Salam alikoum ! Azzedine, mais que fais-tu ici ?
    - Ah, tu es rentré oncle Rabah…
    Ce dernier remarque sa mine sombre et renfermée. Son front est barré de rides.
    - Qu’est-ce qui ne va pas Azzedine ?
    - Tout, répond-il d’un coup. As-tu vu Dalila aujourd’hui ?
    Rabah hoche la tête, tout en regardant autour de lui.
    - Je lui ai parlé, elle devait venir avec nous… Je la croyais dans l’autre bus, lui dit-il. Une fois qu’on est arrivé à Alger, j’ai découvert qu’elle n’est pas venue ! J’espère qu’elle n’est pas souffrante ! Rassure-moi, il ne lui est rien arrivé ?
    - Non, dit Azzedine en se levant avant de crier presque. En fait, je n’en sais rien ! Elle est partie ! Où ?
    Je l’ignore !
    - Tu plaisantes ! Elle devait venir avec nous à Alger ! Elle doit avoir une bonne excuse de s’être absentée, réplique Rabah, en le précédant à l’intérieur de l’administration. Elle doit être quelque part dans le centre !
    Azzedine secoue la tête, tout en le suivant à l’intérieur. Ils entrent dans son bureau où son courrier l’attend. Parmi les lettres, il reconnaît le même type d’enveloppe que Dalila a utilisé. Il a encore la sienne dans la poche de sa chemise.
    - Je ne crois pas qu’elle soit dans le centre ou même dans la région ! Si tu permets, ouvre ton courrier ! Je pense qu’elle t’y a laissé un mot d’excuses !
    - Ce n’est pas ton genre, les mauvaises blagues !
    Rabah les prend et ouvre celle qui n’a pas de timbre. L’écriture est fine et penchée. Elle est bien de Dalila. Tout en lisant les quelques lignes, son visage est devenu blême…

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  31. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 33e partie
    Par : Adila KATIA

    - Ce n’est possible ! Je n’en crois pas mes yeux…
    Mais en croisant le regard de Azzedine, Rabah secoue la tête. Il s’assoie dans son fauteuil, derrière son bureau, puis la relit. Cette fois-ci, à voix haute.
    “Oncle Rabah
    Je serais déjà loin lorsque vous la lirez. Sachez qu’il n’y a pas de mots assez forts pour vous remercier. J’ai beaucoup appris auprès de vous tous. Vos amis ont de la chance de vous avoir. Je vous regretterais tous.
    Une fille sans nom”
    - Azzedine, ce n’est pas possible ! Elle ressemble comme deux gouttes d’eau à la fille de mon ami ! Tu te rends compte, elle a pu faire des conneries à droite à gauche ! Dalila, la fille de mon ami, est peut-être recherchée pour des délits qu’elle n’a pas commis ! J’ai peut-être abrité une criminelle chez moi, Azzedine ! Il faut que je prévienne son père et que j’appelle la gendarmerie…
    Rabah vérifie que les tiroirs sont fermés. Il les ouvre et s’assure qu’il ne manque rien.
    Il a laissé de l’argent, une somme importante, dans sa chambre. Elle n’y était jamais entrée, mais qui sait, en son absence, si elle ne s’y est pas introduite ? Elle a pu mettre la main dessus. Il porte la main, à son front, en pensant aux bijoux de sa femme qu’elle garde dans une mallette.
    - Qu’est-ce qu’il y a ? Vous êtes si pâle !
    Rabah cherche ses clefs dans sa poche et se rassure en les trouvant.
    - Je dois aller vérifier… J’ai laissé des choses de valeur à la maison ! J’espère que ce n’est pas une voleuse !
    - Je peux venir ?
    Rabah lui fait signe de le suivre. La villa qu’il occupe n’est pas très loin. Il ouvre sans jeter un regard vers Azzedine qui est tout aussi inquiet que lui. Le premier responsable du centre ouvre les fenêtres et les volets qu’elle avait pris le soin de fermer. Sa chambre était rangée, aucune trace de son passage. A part le reste d’un parfum qui flotte dans l’air.
    - Elle n’a rien laissé ! Tout est propre et rangé, comme si…
    - Comme si elle n’était jamais venue ici !, termine Azzedine.
    Rabah approuve. Il se rend à sa chambre et ouvre la garde-robe. La mallette fermée à clef est bien là. Il en possède une et il l’ouvre, soupirant de soulagement. Elle n’a pas volé les bijoux ni même les parfums coûteux. L’argent qu’il gardait à la maison était à sa place. Rien n’a été touché. Tout est comme dans son souvenir. Il se peut qu’elle ne soit jamais entrée dans sa chambre.
    - Elle aurait pu les prendre mais elle ne l’a pas fait, s’écrie-t-il. Ce n’est pas une voleuse ! On n’aurait pas pu la retrouver. Mais pourquoi est-elle partie ? On ne se doutait de rien. Elle aurait pu jouer la comédie jusqu’au dernier jour ! On ne se serait jamais méfié d’elle ! Elle était sympathique et réservée !
    - Je comprends maintenant pourquoi, dit Azzedine, en s’appuyant à la porte. Elle ne pouvait pas en dire plus sur la famille de Dalila, puisqu’elle ne la connaissait pas ! J’ai téléphoné au père de la jeune fille et il était surpris… Sa fille n’a jamais travaillé ici parce qu’elle se remettait d’une intervention chirurgicale, et d’après lui, elle n’a pas perdu ses papiers !
    - Comment pouvaient-ils être entre les mains de… ?, lâche Rabah, agacé.
    - Oui, de… qui ?
    Azzedine se demande s’il saura un jour qui elle est et surtout pourquoi elle est partie, alors qu’il a parlé d’elle à sa famille et à ses amis. Est-ce ce projet d’avenir commun qui l’a effrayée et qui a précipité son départ ?
    - Azzedine, je dois parler aux gendarmes. Tu viens avec moi ?
    Il ne refuse pas. Rabah ferme la villa et ils s’y rendent sur-le-champ…

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  32. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 34e partie
    Par : Adila KATIA

    -Vous voulez porter plainte ?
    Le gendarme qui les a reçus les a écoutés jusqu’au bout. Rabah lui avait raconté comment et pourquoi il l’avait recrutée.
    - C’est la fille d’un ami de longue date. Il voulait qu’elle travaille durant l’été. Bien avant la première session, j’avais ses papiers ! Je n’avais pas vu Dalila depuis quelques années mais je me rappelais d’elle ! Celle qui a usurpé son identité lui ressemble beaucoup, poursuit-il. Je ne me suis douté de rien. Sans son départ et ses lettres, je n’aurais jamais su qu’elle était une autre ! Il ne s’est rien passé d’inquiétant, pas de vol, rien…
    - Alors que voulez-vous faire maintenant ?
    - Nous voulions vous aviser qu’une jeune fille a usurpé l’identité de la fille de mon ami, insiste Rabah.
    - A elle et à sa famille de porter plainte…
    - Pourriez-vous regarder vos fiches des personnes recherchées ? demande Azzedine. Peut-être qu’elle est recherchée ?
    - Vous voulez dire à l’échelle nationale ?
    Rabah hausse les sourcils.
    - Oui, pourquoi pas ? On est là… on pourrait l’identifier.
    - Je ne crois pas qu’on soit à jour ! Mais si vous avez une photo, nous pourrons lancer un avis de recherche, propose le gendarme. Il faut impérativement que l’intéressée porte plainte et fasse une déclaration de perte !
    - Oui, je vais vous chercher une photo d’elle, dit Azzedine qui se rappelle l’avoir photographiée lors des soirées et sur la plage, en compagnie de colons et de ses collègues. Je veux la retrouver…
    Le gendarme promet de les aider une fois qu’il aura la photo en main. Rabah et Azzedine retournent au centre de vacances. Le deuxième car parti en excursion passe devant eux.
    Rabah va s’assurer que les colons ont fait bon voyage. Sa sœur descend en dernier, des casquettes à la main. Elle rappelle les enfants de son groupe. Certains d’entre eux reviennent vers elle, réalisant les avoir oubliées. Les garçons sont plus distraits que les filles.
    - Heureusement que tu es là, petite sœur ! Sois la bienvenue !
    Sabah vient à lui en souriant. Elle le remercie. Elle remarque tout de suite son visage fermé.
    - Quelque chose ne va pas ?
    - On peut dire, réplique-t-il en se détournant. Tu sais Dalila…
    - Elle n’est pas malade, j’espère ? Il était prévu qu’elle encadre avec moi ! Est-ce un prétexte pour te retrouver et pour que vous passiez la journée ensemble ?
    Il secoue la tête, ne parvenant toujours pas à accepter d’avoir perdu Dalila. Dans son esprit, il continuait à la nommer ainsi. Il ne lui connaissait pas d’autre prénom.
    - Si seulement c’était le cas, répond-il en secouant la tête. Sabah, elle est partie…
    - Où est-elle partie ?
    Azzedine soupire tout en haussant les épaules.
    - Comment voudrais-tu que je le sache ? Elle m’a laissé cette lettre… Je crois que plus jamais on ne la reverra !
    Sabah croit avoir raté un épisode. Elle veut comprendre ce qui s’est passé. Ils vont s’asseoir à l’ombre. Azzedine lui donne la lettre. Tout comme il l’a été, elle est sous le choc après sa lecture. Elle comprend pourquoi son frère est si triste. Il venait de perdre l’unique amour de sa vie…

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  33. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 35e partie
    Par : Adila KATIA

    - Mon frère, j’ai tant de peine pour toi, mais qui sait, peut-être qu’ils la retrouveront ?
    Azzedine a un éclat de rire, sans joie.
    -S’ils la retrouvent, ils l’arrêteront ! On ne sera plus jamais ensemble. Dire que je projetais de me marier avec elle !
    Il surprend sa sœur en lui arrachant la lettre des mains et la déchire.
    - Elle s’est foutue de moi ! Si elle savait qu’il n’y aurait rien entre nous, pourquoi a-t-elle passé tout ce temps avec moi ? Pourquoi m’avoir laissé entrevoir le bonheur ? J’étais si heureux Sabah ! Et maintenant !
    Plus de Dalila, plus de projet d’avenir.
    Il a réellement le sentiment qu’il n’a plus d’avenir.
    - Je suis sûre qu’il y a une explication, dit sa sœur. Un jour, tu finiras par la retrouver !
    - Je suis remonté contre elle, l’interrompt-il. Elle sait que je l’aime, elle aurait pu me parler, se confier à moi ! Je l’aurais aidée !
    - Tu ignores ce qu’elle a fait et pourquoi elle est partie. Il n’y a aucune explication dans sa lettre mais elle devait avoir honte. Personne n’avouerait avoir volé, trahi ! Qui sait dans quoi elle est impliquée pour avoir décidé de partir aujourd’hui !
    Azzedine secoue la tête. Il reconnaît qu’elle a raison.
    - Mais j’étais sincère avec elle ! Elle aurait pu compter sur moi, quoi qu’elle ait fait ! Tant pis pour elle ! Sabah, je voudrais tant savoir qui elle est et pourquoi elle est partie !
    Le gendarme a demandé une photo d’elle ! Tu en as, n’est-ce pas ?
    - J’en ai fait plusieurs mais je ne les ai pas encore développées !
    - Donne-moi la pellicule !, la prie Azzedine. Je le ferai !
    Il la regarde sortir son appareil photo et le saisit vite quand elle le lui tend.
    - On se retrouve plus tard !, dit-il en partant rapidement, espérant encore trouver ouvert le laboratoire photo.
    Le technicien s’apprêtait à fermer quand Azzedine arrive et frappe.
    - S’il vous plaît, c’est urgent !
    - Je veux bien prendre la pellicule mais vous aurez vos photos demain !, l’avertit le technicien.
    - C’est extrêmement urgent !
    Mais le technicien refuse, l’air désolé.
    - Mon frère, j’ai tardé à fermer et j’habite loin d’ici ! Revenez demain matin, je vous les développerai à la première heure, promet-il. Mais maintenant, c’est impossible !
    -Y a-t-il un autre labo photo dans les environs ?
    Le technicien secoue la tête, faisant la moue.
    - Mon frère, revenez demain matin.
    Azzedine lui laisse la pellicule et le regarde noter son nom.
    - Demain matin !, insiste-t-il. A la première heure !
    - Incha Allah !
    Il a hâte d’être au matin. Il ne cesse de soupirer en chemin. La nuit commence à tomber. Il rentre au centre et voit les colons et les moniteurs entrer dans le réfectoire pour dîner. Ce soir, il est prévu une soirée animée par un jeune groupe de musiciens. Azzedine évite tout le monde. Il n’a pas faim et n’a guère le cœur à s’amuser et à écouter de la musique. Comme pour remuer le couteau dans la plaie ouverte de son cœur, le groupe joue les notes du tube de cet été-là “Ya Zina”.
    Dalila avec sa beauté angélique l’empêche même de dormir. Il se dit que demain est un autre jour et il espère son retour.

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  34. Artisans de l'ombre Dit :

    ’usurpatrice 36e partie
    Par : Adila KATIA

    - Déjà là !
    Le technicien est surpris de trouver Azzedine en train de l’attendre. Il n’est pas encore 8h.
    - Bonjour ! Vous avez passé la nuit à attendre ici !, plaisante-t-il.
    - Oui, répond Azzedine sans sourire. Vous allez vous en occuper maintenant ?
    - Bien sûr ! Donnez-moi le temps de mettre les machines en route.
    Cela prend un moment. Azzedine est resté derrière le comptoir et le regarde faire. Lorsqu’il voit les premières photos tomber, il ne tient plus en place. Le technicien sourit devant son impatience.
    - Vous voulez les voir maintenant ?
    - Oui.
    Il les pose devant lui, sur le comptoir. Azzedine les saisit et pose chaque photo qu’il a regardée. Les dernières qu’a prises sa sœur sont lors de l’excursion avec les colons. Il les range dans une enveloppe que lui tend le technicien. Dans les autres photos, il y a bien Dalila. Mais celles-ci sont soit floues, soit sa dulcinée est de profil, en plein soleil. Si bien qu’on ne peut pas voir ses traits.
    - Vous ne pouvez pas les améliorer ?
    - Impossible, le soleil derrière la jeune fille ou la lumière du projecteur gâche la netteté de la photo, explique le technicien. Allah ghaleb, j’aurais voulu faire mieux !
    Azzedine est déçu. Il n’a aucune photo d’elle où on peut voir ses traits. Aucune de face, juste des profils flous. Etait-ce voulu de sa part ? Il le croit, car à chaque fois qu’elle était la cible de l’objectif, elle se tournait. Déjà, elle pensait à ne rien laisser après son départ.
    Le technicien remarque que ses mains tremblent quand il ramasse les photos. Il lui tend une deuxième enveloppe où il les glisse. Les lèvres pincées, il sort un billet et le pose sur le comptoir. Il n’attend pas sa monnaie, le saluant d’un geste de la main. Une main invisible l’étrangle. Une fois loin du labo photo, il s’arrête et s’appuie à un arbre, à l’ombre.
    Azzedine ne sait plus ni quoi penser ni quoi faire. S’il n’y avait pas ces photos ratées, il croirait l’avoir imaginée. Dalila est la perle rare qu’il n’a cessé de chercher. Pendant des années, il s’est résigné, persuadé qu’aucune femme ne pouvait l’émouvoir. Sa famille, en particulier sa mère, avait toujours pensé qu’il était victime d’un mauvais sort jeté par quelqu’un de jaloux et de malintentionné. Bien des fois, il a trouvé des petits papiers avec des signes cabalistiques dans ses poches. Combien de fois il l’avait surprise en train de brûler des bâtons d’encens. Il se rappelle s’être souvent emporté contre elle, lui reprochant gentiment de trop en faire. Mais cet envoûtement pour Dalila est si puissant qu’il en est à s’interroger si toutes les incantations des marabouts africains n’ont pas fonctionné. Lui le célibataire endurci a été désenvoûté.
    Il est prêt à tout pour la retrouver. S’il faut s’adresser de nouveau à la gendarmerie, pour savoir qui elle est et même s’ils l’arrêtent, il est prêt à lui trouver un bon avocat pour la défendre. Il ne supporte pas l’idée qu’elle ne fasse plus partie de sa vie. Elle n’a rien pris de particulier, juste son cœur.
    Azzedine retourne au centre de vacances et il est surpris de trouver l’oncle Rabah et les autres moniteurs et animateurs en train de l’attendre.
    - Mais où étais-tu passé ? Tu aurais pu prévenir ta sœur, laisser un mot, lui reproche le premier responsable du centre. On s’inquiétait…
    - Je m’excuse ! J’aurais dû y penser !, dit-il, comme pris en faute. Je voulais développer les photos et voilà…
    Rabah saisit l’enveloppe qu’il lui tend et en sort les photos.
    - Incroyable ! lâche-t-il. La gendarmerie ne pourra rien en tirer ! Elle est méconnaissable dessus !
    - Je sais ! J’enrage ! Je ne pourrai jamais la retrouver, savoir qui elle est, pourquoi elle a pris la poudre d’escampette ! Je suis perdu comme jamais je ne l’ai été de toute ma vie !

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  35. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 37e partie
    Par : Adila KATIA

    Tous ceux et celles qui ont pris des photos avec Dalila décident de les développer dans l’espoir qu’elles seront meilleures en netteté. Celles de Azzedine ne seront d’aucune utilité pour les gendarmes. Le lendemain, Rabah et Azzedine se rendent chez la famille de “Dalila” où ils doivent rencontrer celui qui aurait dû être son père. Mahmoud, c’est son prénom, les reçoit chaleureusement. Toutefois, il ne cache pas son incompréhension.
    - Pourquoi n’as-tu pas vérifié si les papiers étaient authentiques ?, reproche-t-il à son ami Rabah.
    Ce dernier éclate d’un rire sans joie.
    - Mais c’est toi qui me les a apportés !, lui rappelle-t-il. Comment aurais-je pu me douter que celle qui s’est présentée n’était pas ta fille ? Je te rappelle aussi que tu es venu seul ! Et elle lui ressemble beaucoup, comme dans mes souvenirs !
    - Mais si c’était ma fille, je l’aurais accompagnée ! Tu me connais, je me serais assuré qu’elle était bien sous ta protection !, réplique Mahmoud. Je lui aurais rendu visite les week-ends !
    Rabah hausse les épaules. Il ne pouvait pas s’en douter.
    - Elle a bien joué la comédie ! Si Azzedine n’avait pas tenu à se marier avec elle, elle ne serait jamais partie !
    - Que vas-tu faire ?
    Azzedine secoue la tête.
    - Je voudrais la retrouver, dit-il. Est-ce que votre fille a perdu ses papiers ?
    - Non.
    Azzedine sort les photos et les lui montre. Mahmoud secoue la tête.
    - C’est vrai, elle est blonde, peut-être de la même taille que ma fille ! Mais son visage ne me dit rien,
    - Dommage ! On aura fait ce déplacement pour rien, dit Azzedine en les rangeant, il est dégoûté.
    - Mais c’était un plaisir de te revoir mon ami ! Ta fille va mieux ?
    Mahmoud le remercie.
    - Oui, elle va mieux ! D’ailleurs, elle est allée avec sa mère à une fête !
    - Je te conseille de porter plainte quand même !, insiste Rabah. Cette écervelée a déjà usurpé son identité ! Elle peut recommencer, et qui sait dans quelle situation elle mettra ta fille !
    - Ne t’inquiète pas ! Je passerai à la gendarmerie.
    Azzedine et Rabah n’abusent pas du temps de Mahmoud. Ils repartent au centre de vacances. Durant tout le voyage en taxi, Azzedine ne desserre pas les dents. Il est déçu comme jamais.
    Sans Rabah, sa sœur Sabah et tous ceux qui l’ont connue, il aurait cru l’avoir imaginée ou rêvée. Azzedine a voulu partir à sa recherche, mais qui chercher et où ? Il ne sait rien d’elle. A part les photos ratées, sa description et le fait qu’elle est une pupille de l’Etat, ses renseignements ne le mènent nulle part. C’est sans espoir.
    Dès qu’ils arrivent, sa sœur le rejoint sous sa tente. Ils vont s’asseoir à l’ombre des arbres. A son visage fermé, elle sent sa déception et en voyant ses yeux tristes, elle soupire.
    - Tu ne t’attendais pas à la trouver là-bas, dit-elle. Pourquoi es-tu si triste alors ?
    - Je l’ignore. Peut-être que je gardais espoir au fond de moi, réplique-t-il, très amer. Il ne me reste que des souvenirs d’elle, rien de matériel que je puisse conserver dans un tiroir. Juste des moments de pur bonheur ! Jamais je ne l’oublierai !
    - A t’entendre, si elle revenait, tu reprendrais avec elle !, remarque Sabah.
    - Oui, je crois que j’en suis capable ! Je l’aime tant, murmure-t-il avant d’avoir une pensée pour sa mère qui devait déjà organiser son mariage. Yemma sera malheureuse de ne pas pouvoir me caser ! Elle ne l’espérait plus et moi je n’y pensais plus, jusqu’à ce que je rencontre Dalila, enfin cette inconnue !
    Azzedine soupire. Il se lève brusquement. Il a pris une décision. Il reste quelques semaines avant leur retour en France. S’il ne la retrouve pas avant, plus jamais il ne reviendra,

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  36. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 38e partie
    Par : Adila KATIA

    Plus les jours passent, plus Azzedine perd espoir. Les gendarmes ont bien ouvert une enquête mais aucun nouvel élément. C’est à croire qu’elle a disparu de la surface de la terre. Aucun taxieur ne reconnaît son portrait, aucun réceptionniste des hôtels de la région et même d’Alger ne l’a vue. Il en est de même à la gare routière. Ni les agents de sécurité, ni les receveurs des bus, ni les serveurs de petits restaurants et des salons de thé ne la reconnaissent. Ils voient tant de jeunes filles passer dans la gare. L’agent de gare, réputé être physionomiste et vers qui est dirigé l’enquêteur, regarde le portrait et fait la moue.
    - Je suis toujours posté à l’entrée et je ne crois pas qu’elle soit venue ici ! Maintenant que je l’ai vue, si elle vient à la gare, je vous appellerai !
    L’enquêteur lui laisse le numéro de la gendarmerie et celui de son poste. Mais il ne se fait pas d’illusion.
    “Autant chercher une aiguille dans une botte de foin ! Elles sont toutes blondes de nos jours ! Les salons de coiffure sont là pour les transformer. Peut-être qu’on devrait établir le portrait d’une brune ? Si c’est une professionnelle, elle a dû penser à changer pour qu’on ne la reconnaisse pas !”
    Azzedine passait tous les jours au siège de la gendarmerie pour s’enquérir de l’avancement de l’enquête. A chaque fois, il rentrait au centre de vacances déçu. Sabah ne le laisse jamais seul et tente à chaque fois de le dérider, de ramener le sourire sur ses lèvres, mais rien n’y fait.
    Elle se rappelle une citation qui disait que “l’empreinte laissée par un amour véritable se lit dans la tristesse du regard”.
    Il suffit de voir son frère pour s’en convaincre. Son frère aimait sincèrement “Dalila”, elle regrette de ne pas l’avoir eue à l’œil. Elle aurait dû se douter qu’elle était fausse avec son frère. La jeune fille les a tous trompés.
    Elle voit la fin de la dernière session arriver avec soulagement. Elle a hâte de repartir avec son frère et de le voir se remettre de cette histoire d’amour. Les adieux sont pénibles. Les enfants se sont attachés à eux. Ils échangent leurs adresses et numéros de téléphone. Ils promettent de garder contact et de tout mettre en œuvre plus tard pour se revoir. Ils ont passé des moments magnifiques en compagnie de leurs moniteurs et monitrices. Ils ont découvert des personnes attachantes, soucieuses de leur bien-être. Ils ont appris tant de choses auprès d’eux. Ils allaient les regretter.
    Même si les adolescents sont tristes et font bonne figure, les filles ne cachent pas leurs larmes avant de monter dans les bus qui allaient les ramener chez eux. Les derniers à partir sont ceux qui allaient rentrer en France. Un bus les emmène à l’aéroport en compagnie des moniteurs venus avec eux. Azzedine, sa sœur et deux autres jeunes femmes tentent de leur remonter le moral. En plus de quitter les amis qu’ils s’étaient faits durant les vacances, ils quittaient le pays. Une double déchirure qui les laisse sur leur faim.
    Epuisés par les émotions, certains finirent par s’assoupir. Azzedine est assis côté fenêtre. Sa sœur le rejoint pour lui tenir compagnie. Il regarde le ciel bleu où il n’y a pas un seul nuage.
    - Ça va ?, lui demande-t-elle en posant la main sur son bras.
    - Je l’ignore, dit-il sans se tourner vers elle. Elle a disparu si brusquement, envolée dans le ciel ou avalée par la terre… Je me demande si un jour je saurais qui elle est et pourquoi elle m’a quitté !
    - Elle ne te mérite pas, ose-t-elle lui répondre au risque de se fâcher avec lui. Tu as un cœur en or et elle a réussi à le briser… Si je mets la main sur elle, menace-t-elle, je lui en ferai voir de toutes les couleurs !
    - Ça ne risque pas d’arriver ! Quand elle a décidé de sortir de ma vie, elle n’a rien laissé qui puisse nous mener à elle !, réplique-t-il. Je pense que même Interpol serait inefficace dans ce coup-là !
    Sabah espère que la Méditerranée entre eux réussira à le guérir de cet amour qui n’en est plus un. Elle presse son bras, comme pour lui rappeler qu’elle sera toujours avec lui. Leur mère et leurs amis les attendent. Ils seront tous là pour lui. Qu’il le veuille ou pas…

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  37. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 39e partie
    Par : Adila KATIA

    La vie reprend son cours. Azzedine retrouve avec joie le collège où il enseigne. Comme il vit avec sa mère et sa sœur, il ne peut pas se morfondre dans les doux souvenirs de sa bien-aimée. Même si elle est sortie brusquement de sa vie, il continue à penser du bien d’elle. Les mois, les années filent sans qu’il ne l’oublie. Après que Sabah se soit fiancée, et maintenant qu’ils avaient choisi une date pour le mariage, sa mère pense à l’avenir de son fils. Elle tente de le marier, lui présentant des parentes venues du pays, des filles de bonne famille. Des brunes, des blondes, petites, grandes, des minces et certaines avec des rondeurs. Elles avaient toutes un point commun, elles avaient toutes étudié. Certaines d’entre elles travaillent déjà. D’autres sont en attente d’un boulot qui leur permettra d’être indépendantes. Sa mère avait beau vanter leur beauté, leurs qualités, leur niveau intellectuel, il semblait ne pas les voir. Aucune n’a de grâce à ses yeux. Il sort marcher dans les rues pour se changer les idées. Celles de sa mère l’empêchent de dormir. Un soir où sa tante Kenza est venue leur rendre visite, il en profite pour lui dire ce qu’il en pense.
    - S’il te plaît yemma, tu perds ton temps ! Et le mien aussi !, lui dit-il un soir où elle relance le sujet en compagnie de sa sœur Kenza et de sa fille. Je ne veux pas me marier… Aucune femme ne m’intéresse !
    El-hadja Aïcha semble désespérée. Elle saisit la main de sa sœur et lui dit.
    - Je suis sûre qu’elle lui a jeté un sort ! Qu’elle soit maudite où qu’elle soit ! Elle a gâché la vie de mon fils !
    Kenza tente de la réconforter.
    - Elle ne lui a rien fait. C’était une jeune fille… Il est tombé amoureux d’elle et c’est tout ! Il ne s’agit de mauvais sort ou autre ma chère sœur ! Laisse-lui le temps…
    - Cela fait quatre ans, cinq ans, rectifie el-hadja Aïcha. Sabah va se marier. Je suis vieille et incapable de m’occuper du pavillon. Je peux lui cuisiner des petits plats mais sans plus !
    - Tu prendras une aide à domicile si Sabah part vivre loin d’ici !, dit Azzedine.
    Sabah ignore encore si elle restera dans la région.
    - Mais maman veut que tu…
    - Personne ne parlera de ce que je veux à ma place !, dit-il en regardant sa mère dans les yeux. Et je ne veux pas vous entendre la maudire ! Qui sait pourquoi elle est partie ?
    - Elle s’est enfuie…
    Pour la énième fois, il la défend.
    - Elle m’aimait mais elle n’avait pas confiance. Le fait d’être une pupille de l’Etat a brisé tous ses rêves… et les miens.
    - Mais tu n’aurais pas pu te marier avec une… une…
    El-hadja ne termine pas la phrase en rencontrant le regard noir de son fils.
    - Tu ne l’aurais jamais acceptée ? “Dalila” s’en doutait et c’est pourquoi je lui souhaite de trouver la paix et le bonheur où qu’elle soit, dit Azzedine. A partir d’aujourd’hui, je ne veux plus entendre parler de mariage et gare à celle que tu oseras amener à la maison pour me la présenter !
    Car au fond de lui, il a toujours une pensée pour “Dalila”, même s’il n’a plus remis les pieds au pays depuis. Sabah et sa tante Kenza l’avaient souvent encouragé à reprendre ses activités d’été, mais il refusait, ne voulant pas se leurrer de faux espoirs.
    Si elle avait été une criminelle recherchée, la gendarmerie et la police l’auraient fichée. Ils auraient vite su qui elle était et les crimes qu’elle aurait commis. Le directeur Rabah l’en aurait informé. En fait, son seul crime est de lui avoir permis de croire en leur amour…

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  38. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 40e partie
    Par : Adila KATIA

    A des milliers de kilomètres de là, le temps avait aussi passé pour Semra et Dalila. Les deux amies étaient liées par une sincère amitié. Ensemble depuis le lycée, elles partagent des rêves et des secrets.
    Après avoir décroché le bac, elles se sont retrouvées toutes les deux à Alger, où elles se sont inscrites à l’université. Elles ont pris des chambres à la cité universitaire. Elles sont studieuses et elles ne ratent aucune année. Les succès les accompagnent.
    Peu de temps après avoir fini leurs études en économie, Semra a la chance de trouver un poste dans un lycée. Elle loue une chambre toute équipée, en plein cœur d’Alger-Centre, dans un foyer pour femmes.
    Elles sont nombreuses à travailler loin de leur ville ou village natals. Elle et Dalila ne se verront pas pendant quelque temps. Dalila enseigne les maths, dans le même établissement où travaille son père. Elles s’appellent souvent en fin de journée. Elles continuent à se voir durant les week-ends.
    Lors des déplacements à Alger, elles se rendent parfois en discothèque où elles dansent parfois jusqu’à l’aube, la veille des week-ends surtout, avant de rentrer complètement éreintées et s’affaler sur leur lit, heureuses et déchargées du stress de toute la semaine.
    Au village, Dalila ne pouvait pas sortir s’amuser. D’ailleurs, il n’y avait aucun lieu de détente. Il y a bien un jardin public squatté par les jeunes désœuvrés. Elle ne s’est jamais aventurée par là. D’ailleurs, au village, on craint tellement son père qu’on n’ose pas l’approcher.
    Depuis quelque temps, un professeur d’arabe ne cesse de la complimenter sur sa beauté lorsqu’il leur arrivait de se croiser dans la salle des profs et qu’il n’y avait pas d’oreilles indiscrètes. Dalila n’est pas insensible à son charme mais la présence de son père et des surveillants les empêchaient de passer un peu de temps ensemble.
    Un soir, elle appelle Semra pour la prévenir de sa visite. Elle viendra plus tôt que d’habitude. En général, lorsqu’elle se rendait chez elle, c’est en fin d’après-midi mais pour cette fois, elle veut arriver avant.
    - Je te rappelle que je travaille jusqu’à 16h, répond Semra. Mais je peux laisser une consigne à la propriétaire. Tu pourras récupérer la clef chez elle !
    - Tu me sauves la vie !
    - Tu n’exagères pas un peu, répond l’amie. Dis, tu n’aurais pas des secrets ?
    - Non ! Demain soir, je te raconterai !, lui promet-elle.
    - Dis, tu n’aurais pas un rendez-vous ?, demande Semra avant de voir clair dans ses projets. Cachotière !
    - Non, je te jure. Tu sauras tout demain ! Bonne nuit.Elle pose le combiné. Elle remet le son de la télé qu’elle avait coupé lorsque le téléphone a sonné. Leur discussion lui a rappelé de doux souvenirs. Les fois où elle et Azzedine se voyaient durant les siestes des colons. Elle se souvient avoir dansé avec lui, avoir partagé ses desserts. Ils auraient dû partager tant de choses. Un soupir lui échappe. L’envie de le revoir la pousse vers l’album à photos. Elle a quelques photos prises par des colons. Elle leur avait payé celles où ils y étaient ensemble. On peut les voir sourire, s’amuser lors des soirées et s’échanger des regards. Semra a agrandi l’une d’elles. Azzedine lui parlait à l’oreille, elle ne se souvient pas de quoi mais elle remercie l’adolescent qui avait pris des photos des moniteurs et des animateurs qui étaient assis près de la piste de danse. Il y avait tant d’affection dans son sourire et tant de promesses dans son regard qu’elle ne peut s’empêcher de verser quelques larmes. Elle le regrette tant.

    Dernière publication sur 1.Bonjour de Sougueur : Mon bébé, Justin, me manque beaucoup

  39. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 41e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra est restée à son bureau jusqu’à la fin de la journée. Elle n’attend pas le tramway comme d’habitude. Elle hèle un taxi à Alger-Centre. Elle passe au marché et effectue quelques achats, en prévision du dîner. A chaque fois que son amie Dalila lui rend visite, c’est l’occasion pour elle de cuisiner des petits plats. Même si cela lui prend du temps, elle le fait avec plaisir.
    Une fois rentrée, elle pose les achats dans la cuisine puis va prendre une douche. Elle ressort de la salle de bains avec un survêtement rose pâle. Elle met la cafetière sur le feu. Elle range une boîte de gâteaux orientaux dans le buffet. Puis elle vide les sachets, pleins de légumes et de fruits. Le poulet est déjà vidé. Elle le nettoie et le coupe en morceaux avant de le mettre dans un plat allant au four.
    Elle se sert une tasse de café puis s’assoie le temps de la savourer. C’est sa pause sacrée, en fin de journée. Elle décroche le téléphone et s’assure que sa ligne n’est pas en dérangement.
    Elle hausse les sourcils en voyant la pendule.
    - Déjà 19h !, s’écrie-t-elle en retournant à la cuisine où elle se met à préparer le dîner. Pour quelqu’un qui devait arriver tôt, où est-elle passée ?
    Dalila aurait pu l’appeler pour la rassurer de son arrivée quand elle était au bureau. Même si elle a un rendez-vous, elle devrait être rentrée. Semra va à la fenêtre et regarde la ruelle mal éclairée. Son cœur se serre d’angoisse. Mais elle se fait du souci pour rien. Elle habite un quartier tranquille, et depuis qu’elle y habite, il n’y a jamais eu d’agressions ou un quelconque incident.
    - Allez, rentre !, murmure-t-elle entre les dents tout en retournant à ses fourneaux.
    Elle trompe l’attente en sortant la vaisselle, en préparant la table. Elle regarde de nouveau la pendule. 19h30. Elle a envie de crier. Son amie Dalila n’a pas l’habitude de rester dehors aussi tard. Elle panique en se demandant ce qu’elle dira à ses parents s’ils appelaient pour savoir si elle est bien arrivée. Qui sait ? Peut-être lui est-il arrivé un accident ? Comment savoir ? Elle se tord les doigts en pensant que son rendez-vous avait peut-être mal tourné !
    Deux coups discrets à la porte d’entrée la tirent de ses sombres pensées.
    - Qui est-ce ?
    - Ouvre ! C’est moi.
    Semra est soulagée de l’entendre derrière la porte. Elle s’empresse de lui ouvrir et l’accueille dans ses bras.
    - Ma chère Dalila, tu vois tous ces cheveux blancs, c’est à cause de toi !
    Celle-ci rit doucement tout en retirant ses chaussures. Elle glisse les pieds dans des mules confortables puis se débarrasse de sa veste qu’elle accroche au porte-manteau, dans l’entrée.
    - Je t’achèterai une teinte, réplique Dalila.
    - Oui mais cela ne chassera pas mes angoisses ! Où avais-tu la tête pour rentrer à une heure aussi tardive ?, lui reproche-t-elle. J’ai pensé au pire ! Je ne savais plus si je devais appeler ta famille ou attendre.
    Dalila s’arrête en face d’elle. Elle s’émeut devant ses yeux larmoyants et cette colère qu’elle tente de refouler. Même si elle est justifiée, elle trouve qu’elle en fait trop !
    - Je ne suis pas une enfant !, lui rappelle-t-elle.
    - Raison de plus. Une belle jeune femme voyage seule, a rendez-vous quelque part, dit Semra. Il est tard, elle traîne encore dans les rues ! Et tu voudrais que je ne m’inquiète pas !
    Dalila va la prendre dans ses bras et lui demande pardon.
    - C’est vrai que j’ai traîné. En fait, je n’avais pas envie de rentrer tout de suite !, lui confie-t-elle. Je passais un agréable moment en compagnie de mon ami. Semra, il est a-do-ra-ble!
    Semra sent sa colère tomber d’un coup et sourit devant les yeux brillants d’amour et de rêves de sa meilleure amie. Elle est sa sœur, pour la vie.
    - Le dîner est presque prêt ! Va te mettre à l’aise ! Ensuite, tu devras tout me raconter !
    - Promis juré !
    Dalila lui fait la bise avant d’aller s’enfermer dans la salle de bains. Un court moment où elle allait encore rêver de son jules !

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  40. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 43e partie
    Par : Adila KATIA

    Dalila est très émue. Elle s’efforce de ravaler ses larmes. Elle aurait voulu la soulager de cette plaie ouverte. Les questions que ne cessent de se poser son amie ne l’aideront jamais à trouver la paix intérieure. Elle a ce mal en elle qui ne cesse de la ronger. Quand Semra en parle ouvertement, la souffrance se lit sur son visage. Des larmes coulent sur ses joues.
    - Même si j’ai réussi ma vie, il me manque l’essentiel ! Lorsque je me regarde dans une glace, je vois une jeune femme sans identité, sans origines ! Je sais que ce n’est pas ma mère qui m’a donné ce prénom ! Je voudrais savoir qui sont mes parents, d’où ils sont…
    - As-tu demandé à voir ton dossier ? Peut-être y a-t-il une information qui pourrait t’aider à retrouver ta mère ?
    - Figure-toi qu’il est vide, car je ne suis pas née à la maternité, réplique Semra en essuyant ses larmes avec rage. J’ai été abandonnée dans le vieux quartier de Sour El-Ghozlane, près de la mosquée, dans un carton fermé ! J’aurais pu mourir !
    - Noon !, s’écrie Dalila. Celui qui l’a fermé voulait te protéger du froid, des chats et des chiens errants ! En posant le carton près de la mosquée, il ou elle avait voulu te confier à Allah ! Hamdoullah ma sœur, le bébé est devenu une belle jeune femme qui réussit tout ! Te rends-tu compte que tu es mieux éduquée que les filles élevées par leurs propres parents ! En plus, Lalla est économe !
    - Toi aussi tu as réussi tes études, lui rappelle Semra.
    - Vois donc ce que j’ai fait aujourd’hui pour être avec Noureddine ?
    Ce n’est pas digne d’une fille de bonne famille !
    Semra sourit à travers ses larmes.
    - C’est parce que tu l’aimes !
    - Comme ta mère devait aimer ton père biologique !, dit Dalila, heureuse de la voir sourire. Ta mère ne t’a pas abandonnée. On a dû la forcer… Je suis sûre qu’elle devait t’aimer et qu’elle aurait été fière de toi ! Elle doit encore penser à toi !
    - Mais cela ne change rien à ma situation… Je dois vivre avec mes questions, avec mes doutes et ma solitude forcée !, dit Semra en se levant pour aller se rafraîchir le visage. A son retour, elle trouve Dalila en train de discuter au téléphone.
    - Noureddine…
    Semra se retire dans le coin cuisine, la laissant discuter tranquillement. Elle s’en veut un peu. En ouvrant son cœur, elle a jeté de la tristesse sur leur soirée, alors que Dalila rayonnait de joie. Son amie pense à fonder un foyer. C’est l’âge où on pense à se poser.
    Semra a conscience que cela ne pourra jamais lui arriver. Elle est sincèrement heureuse pour son amie même si elle sait, et cela l’attriste au fond de son cœur, qu’elles ne pourront pas se voir aussi souvent.
    Elle allait regretter les nuits qu’elles passaient ensemble.
    Dalila est encore en train de parler à voix basse au téléphone quand elle sort les couettes et des coussins du placard. Elle fait de l’espace dans le coin salon, pose un tapis et installe des matelas. Elle prend place sur l’un d’eux et attend son amie. Dalila ne tarde pas à la rejoindre.
    - Semra, je lui ai parlé de toi, lui dit-elle. Je tiens à ce que tu le rencontres… Je veux ton avis ! S’il devient mon mari, je voudrais qu’il soit un frère pour toi !
    - N’en demande pas trop ! Mais je te prierais de ne jamais lui dire ce que je suis !, dit Semra.
    - Je te le promets ! Il ne le saura jamais…
    Dalila s’endort sur cette promesse. Semra éteint la lumière du plafond et laisse la petite veilleuse de coin allumée. Elle n’a pas envie de dormir. Elle prend un roman emprunté à une collègue et tente de se concentrer. Elle veut lire pour oublier mais ses pensées la détournent du texte. Le regard attendri, elle regarde son amie endormie avec un sourire. Elle l’imagine en robe de mariée, au bras de son ami. Elle est heureuse pour elle, mais qui sait si elle ne va pas la perdre si elle ne s’entend pas avec lui. Leur amitié allait être mise à l’épreuve sans qu’elle le veuille…

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  41. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 44e partie
    Par : Adila KATIA

    Semra finit par s’endormir à l’aube. Elle n’entendra pas Dalila se lever et préparer du café. Elle prend sa douche puis s’habille et sort acheter des croissants tout chauds chez le boulanger du coin. Le téléphone sonne au moment où elle rentre. Elle pose les croissants sur la table et s’empresse de décrocher. La sonnerie a tiré Semra de son sommeil.
    Alors que Dalila parle doucement. Elle grimace en la voyant se lever.
    - Bonjour ! Pardon !, dit-elle en recouvrant le combiné de sa main. Je pensais arriver avant son appel !
    - T’inquiète, j’ai l’habitude de me lever tôt ! Je prends une douche et te rejoins !
    - Fais vite, le café est prêt…
    Semra va s’enfermer dans la salle de bains. Dalila finit de s’entendre avec Noureddine avant de raccrocher. Elle range les couettes et coussins avant de remettre le salon en place. Elle fait chauffer du lait et prépare la table. Lorsque Semra la rejoint, Dalila est déjà en train de le verser dans deux grandes tasses. Elle y ajoute du café. Elle lui tend le sucre.
    - Noureddine te passe le bonjour, lui dit-elle.
    - Il n’est pas rentré ?
    - Non, on rentrera demain, en train, répond Dalila. Il nous invite à déjeuner… Bien sûr, j’ai accepté !
    - Mais j’ai des choses à faire ! Je ne pourrai pas venir…
    - J’ai besoin de toi pour me décider ! Tu es ma sœur, dit Dalila le regard suppliant, presque larmoyant. Je t’en prie, ne refuse pas !
    - Je ne peux pas…
    - Je lui ai dit que tu venais ! De quoi aurais-je l’air ? Je lui ai dit que tu étais mieux qu’une sœur !
    - Dalila, la prochaine fois, consulte-moi…
    - Je te le promets ! Plus jamais je ne déciderai pour toi ! Il nous attendra dans un salon, pas loin d’ici ! Dans une heure…
    Semra est très gênée. Elle n’a pas envie de le voir ce matin.
    - Une autre fois, tente-t-elle, mais c’est peine perdue d’avance.
    - Je veux que tu le rencontres aujourd’hui, car je vais devoir prendre une décision ! Et je veux savoir si tu t’entendras avec lui !
    - Mais si je ne m’entends pas avec lui, qu’est-ce que tu feras ? Me sacrifieras-tu pour ton amour ? Ou le sacrifieras-tu pour notre amitié ?
    Dalila a pris un air grave.
    - Je vous veux tous les deux ! Tu es l’unique amie que j’ai et je ne veux pas te perdre… Des prétendants, j’en aurais d’autres, lui dit-elle. Mais toi, tu seras irremplaçable !
    Semra est émue jusqu’aux larmes. Elle a toujours su qu’elle comptait pour elle. Doit-elle vraiment sacrifier l’un ou l’autre ?
    -Même si je ne m’entends pas avec lui, on restera amies !
    - Oui mais si je me marie, c’est pour la vie et je tiens à ce que tu viennes les week-ends, les vacances ! Je serai ta famille pour toujours ! Alors, je t’en prie, fais un effort ! Viens à ce rendez-vous !
    - Donne-moi une demi-heure et je serai prête !

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  42. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 45e partie
    Par : Adila KATIA

    Le salon de thé n’est pas très loin. Elles s’y rendent à pied. Elles auraient pu y être en 20 minutes, mais c’est sans compter sur Dalila qui en profite pour faire du lèche-vitrine. Elle s’arrête devant les vitrines et elle a des envies d’acheter des choses. Elle achète des produits cosmétiques et un parfum.
    - Je croyais que tu avais rendez-vous, lui rappelle Semra qui a hâte d’en finir avec cette rencontre.
    - Oui mais regarde…
    Dalila lui a montré la boutique de robes de mariage, en face. Elles traversent la rue et s’arrêtent devant la vitrine. Les mannequins portent de belles robes blanches. L’une d’elles laisse Dalila bouche bée. Elle s’accroche au bras de son amie.
    -Ce sera celle-là Semra! Elle est magnifique !
    -En effet, elle l’est!, répond Semra.
    -Viens, on entre!
    -Et ton ami, lui rappelle Semra alors qu’elle la traîne à l’intérieur de la boutique.
    Elles saluent les vendeuses et Dalila s’approche du modèle qui lui plaît. Une des vendeuse s’approche.
    -Je peux vous aider, propose-t-elle à Dalila.
    -Oui et non…La robe…
    -Un de nos derniers modèles, précise la vendeuse. C’est une robe très élégante. Comme vous le voyez, sa dentelle est fine et voyez, nous avons tous les accessoires qui vont avec, les bijoux, les gants, les chaussures…
    - Comment la trouves-tu Semra ?
    - Je trouve la traîne un peu longue mais c’est toi qui la porteras, répond l’amie en souriant avant d’ajouter : je veillerais à ce que personne ne marche dessus !
    - Je l’adore ! Je me vois avec !
    La vendeuse lui propose de l’essayer.
    - Nous avons des cabines d’essayage et la couturière est ici…Elle pourra vous en coudre une sur mesure !
    - Vous nous excusez mais l’essayage ce sera pour une autre fois, intervient Semra. On repassera !
    - Penses-tu qu’elle plaira à Noureddine ?
    Semra hausse les épaules.
    - Ce n’est pas lui qui la portera !
    - Je veux être la plus belle, ce jour-là !
    En l’affirmant avec tant de ferveur, elle réalise que Dalila n’envisage pas l’avenir sans lui. Elle espère qu’il n’y aura aucune animosité entre eux. D’ailleurs, pourquoi y en aurait-il ? Elle sourit à son amie alors qu’elles sortent de la boutique.
    - Tu seras la plus belle…On en parlera pendant des années, la rassure-t-elle. Mais nous avons le temps de faire toutes les boutiques de la capitale, pour trouver celle qui te plaira !
    - Tu as raison ! Et puis ne plaçons pas la charrue avant les bœufs ! Noureddine devra te plaire !
    - Ma chère, je ne vais pas me marier avec lui ! Tu l’aimes, il t’aime, je ne suis là que pour te faire plaisir ! Au fond de moi, je sais qu’il doit être quelqu’un de bien ! Tu n’aimerais pas un homme aux manières de voyou !
    - Qui sait ?
    Le salon de thé a une terrasse et voulant sûrement surveiller l’arrivée de sa bien-aimée, Noureddine s’était installé à l’extérieur sous un parasol. Il se lève à leur arrivée, ne cachant pas sa surprise en voyant Semra…

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  43. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 46e partie
    Par : Adila KATIA

    Noureddine embrasse Dalila sur les joues, puis serre chaleureusement la main de Semra. Dalila en profite pour la lui présenter.
    - Mon amie de toujours, Semra ! En fait, elle est une sœur pour moi !
    - Enchantée, dit-elle alors qu’ils prennent place autour de la table. Ils sont en face d’elle. Noureddine est un grand brun, très charmant. Il a un regard perçant et un sourire irrésistible. Elle comprend pourquoi Dalila est sous son charme. Il est plus âgé qu’elle, c’est visible, mais ils vont bien ensemble. Elle pose son sac à main et les regarde échanger des sourires. Il y a tant d’amour dans leurs regards et de promesses muettes qu’elle se sent gênée. Elle toussote, histoire de leur rappeler sa présence. Dalila rit doucement et rougit lorsqu’il prend sa main dans la sienne.
    - Vous en avez pris du temps pour arriver, leur reproche-t-il doucement. Je vous attends depuis plus d’une heure !
    - Ah si tu savais, réplique Dalila. Je n’ai pas pu me retenir d’acheter…
    - Ton amie n’a pas eu autant de coups de cœur que toi, remarque
    Noureddine.
    - J’habite ici, répond-elle, je passe devant matin et soir !
    - Si tu savais, je suis tombée sur une robe blanche magnifique !, lui confie Dalila en soupirant. Lorsqu’on se mariera, c’est celle-là que je porterai !
    Un serveur vient prendre leur commande. Ils passent leurs commandes, du café pour Semra et des jus de fruits pour Dalila et Noureddine.
    - Vous avez passé une bonne soirée ?, demande Noureddine lorsque le serveur s’éloigne avec leurs commandes.
    - Oui, à casser du sucre, répond Dalila en riant. Tu n’as pas eu mal aux oreilles ?
    - Si… Je pensais à un courant d’air ! Ma chère, j’attendais mieux de ta part… Je l’ai demandé en mariage, ajoute-t-il à l’intention de Semra. Elle vous l’a dit ?
    - Non !
    - Dalila m’a dit que vous êtes économe… C’est un beau métier avec plein d’avantages, dit-il. Vous avez eu droit au logement de fonction ?
    - Pas encore… Mais on me l’a promis, répond-elle. En attendant, j’ai loué un studio meublé !
    - Elle a toutes les commodités ! Sauf une machine à laver…
    - C’est un studio, lui rappelle Semra, pas un grand appartement ! Il n’y a pas où la placer ! Si vous vous mariez, où allez-vous vivre ?
    - Chez mes parents, répond
    Noureddine.
    - On louera… si cela se passe mal avec eux, ajoute-t-elle.
    - Oui, si ça ne marche pas, rien ne nous empêchera de nous installer ailleurs, dit Noureddine. Vous serez là lorsque je ferai ma demande en mariage ?
    Les deux amies échangent un regard.
    -Oui, dit Dalila. C’est ma meilleure amie… Elle sera près de moi, avant, durant et après le mariage !
    - Pas de problème…
    Noureddine fronce légèrement les sourcils en observant Semra. Il se gratte légèrement la tête, n’arrivant pas à répondre à une question qu’il ne cesse de se poser depuis leur arrivée.
    - J’ai l’impression de vous avoir déjà vue, lâche-t-il.
    - Moi non…
    - Je jure qu’il me semble vous avoir vue quelque part, insiste-t-il. Je me demande où !
    Semra sourit.
    - C’est la première fois que je vous vois, dit-elle gravement.
    Mais lui, il est sûr de l’avoir déjà vue quelque part. Dalila rit doucement et lui explique pourquoi.
    - On se ressemble beaucoup, c’est pourquoi tu as cette impression !
    - Peut-être…
    Mais il n’en est pas convaincu…

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  44. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 47e partie
    Par : Adila KATIA

    - Regarde mieux ! Tu vas comprendre pourquoi son visage t’est familier !
    Dalila n’a pas hésité à déplacer sa chaise et va s’asseoir près de son amie. Elle prend le foulard de Semra, le passe autour de son cou, relève les cheveux et les retient à l’aide d’un crabe. Elle se tourne de profil tout en lui demandant :
    - Alors ? On se ressemble ou pas ?
    Noureddine a froncé les sourcils, allant de l’une à l’autre. Il secoue la tête, n’en revenant pas.
    - Incroyable ! lâche-t-il. C’est vrai, si tu changes ta coiffure et que vous portez les mêmes couleurs, on penserait à des sœurs… qui se ressemblent beaucoup !
    Dalila en rit.
    - Tu as compris pourquoi tu as eu cette impression ?
    Noureddine le reconnaît.
    - Oh que oui ! J’ai bien compris !
    Dalila retourne à sa place. Un fleuriste passe entre les tables et propose des roses. Noureddine en offre à Dalila et à Semra.
    - Merci, dit cette dernière. Il ne fallait pas !
    Elle finit son café et elle cherche un prétexte pour partir et les laisser en tête-à-tête. Elle ne veut pas tenir la chandelle. Son amie est décidée. Elle n’attend pas son encouragement pour aller plus loin dans sa relation. Le tableau est peint. Il illustre une femme et un homme qui s’aiment sincèrement. Elle ne peut que leur souhaiter d’être heureux. Elle veut s’éclipser. Ils ont des choses à se dire en toute intimité.
    - Vous m’excusez mais je dois y aller ! Je verrais plus tard Dalila…
    - Mais tu nous fausses compagnie !
    C’est l’année où la téléphonie mobile est apparue au pays.
    - Je vais me choisir un portable et une puce, voir celle qui a le plus d’avantages, répond-elle. Comme ça, on pourra se joindre à tout moment !
    - On aurait pu le choisir, dit Dalila. Peut-être que j’en prendrais un, moi aussi !
    - Non, reste avec lui ! Mais ne tarde pas comme hier, lui rappelle-t-elle avant de leur souhaiter une bonne journée et de partir.
    Elle flâne dans les rues tout en pensant à Dalila et son ami. Elle les imagine en train de fixer la date de leurs fiançailles, d’élaborer d’autres projets. Elle regrette sa condition de pupille de l’Etat. Elle aurait voulu avoir un ami et des projets communs. Il y a bien des hommes à avoir tenté leur chance mais le seul qu’elle a laissé l’approcher est Azzedine. Même si les années ont passé, elle pense souvent, trop souvent à lui. Elle se demande ce qu’il est devenu depuis.
    “S’il s’est marié, j’espère qu’il est heureux ! C’était quelqu’un de bien, pense-t-elle avant de rectifier. C’est quelqu’un de bien ! Il n’a pas pu changer. Il a des qualités humaines. Je vais le regretter toute ma vie !”
    Après avoir fait plusieurs boutiques de téléphonie, elle se décide à acheter un portable. Elle ne prend pas le plus cher. Il n’a pas beaucoup d’options. Alors qu’elle s’apprête à passer à la caisse, lui prend l’envie d’en offrir un à Dalila. Avec tous les événements qu’elle sent venir, elles auront des choses à se raconter chaque jour. Elle demande à l’agent commercial d’emballer celui qu’elle destine à Dalila. Elle achète des fruits avant de rentrer. Elle n’aime pas traîner dans les rues. Il y a longtemps qu’elles ne sont pas sorties la nuit pour se défouler. Maintenant qu’elle allait s’engager dans une relation sérieuse, il est certain qu’elles ne sortiront plus. Sauf s’il les accompagne. Mais si elle l’a bien cerné, Noureddine n’est pas du genre à aller en discothèque. Elle se demande si Dalila lui a raconté leurs escapades nocturnes. Et si oui, qu’est-ce qu’il en pense ?
    Mais Dalila n’est pas obligée de tout lui raconter. Il y a des choses dont on n’est pas fier et qu’on préfère taire. Un peu comme elle quant à ses origines…

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  45. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 48e partie
    Par :Adila Katia

    Plusieurs heures passent avant que Dalila ne rentre. C’est la fin de la journée. Semra a profité de son temps libre pour faire du rangement. Elle a préparé le dîner et l’a réservé au chaud en l’attendant. Lorsque Dalila rentre, elle a un bouquet de fleurs et des sacs pleins d’achats effectués en compagnie de Noureddine.
    - Bienvenue à la future mariée, plaisante Semra.
    - Merci… Tu as vu, je n’ai pas tardé !
    - Oui, je vois qu’il t’arrive de m’écouter, plaisante son amie avant de poser son cadeau sur les genoux. Allez, ouvre !
    Dalila ne perd pas son temps. Elle ouvre et crie de joie en le découvrant.
    - Un portable ! Il ne fallait pas !
    - Si ! On aura tellement de choses à se raconter, dit Semra. J’imagine qu’il s’en est passé des choses depuis que je vous ai quittés !
    Le regard brillant de Dalila est une réponse évidente. Elle sourit. Le bonheur lui va si bien. Semra souhaite de la voir toute sa vie ainsi.
    - Merci !
    - Montre-moi ce qu’il t’a offert !
    Dalila sort des sacs, les petits cadeaux, des vêtements qu’il lui a choisis. Un tailleur mauve, un chemisier blanc, des chaussures et un sac assortis.
    - Cette semaine, il enverra ses parents faire la demande, lui apprend-elle. Il tient à ce qu’on se marie prochainement !
    - Tout prochainement ?
    - Oui ! Dès demain, j’en parlerai à maman, elle préviendra papa, dit Dalila. Réserve le prochain week-end pour moi !
    - Bien sûr ! Tu me tiens au courant de tout !, la prie Semra en lui serrant les mains. Je serai là quand tu le voudras… Je t’aiderai à préparer ton mariage ! Tu n’as pas de souci à te faire ! J’assumerai tout à ta place ! Tu n’auras qu’à être belle et souriante !
    Le lendemain, Dalila retourne chez elle par le premier bus en partance dans sa région. En attendant de se retrouver le week-end, elles gardent le contact par téléphone. Le mobile les rapproche encore plus. Semra est au courant de tout. Dalila lui rapporte le moindre fait à l’école où ils enseignent tous les deux, à la maison où ses parents sont agréablement surpris. Ils ont accepté de recevoir ces parents, heureux de la marier à un bon parti.
    Ils attendent ce jour avec impatience. Sa mère refait le ménage de fond en comble.
    - Comme s’ils allaient l’inspecter, ironise Dalila, en le rapportant à son amie. J’ai dû acheter de nouveaux rideaux, une nappe et même des serviettes de table brodées à la main !
    Les deux amies en rient. Semra aurait voulu être à sa place. Avoir une mère qui chercherait à impressionner sa future belle-famille.
    - Tu as de la chance, lui rappelle-t-elle. Prends bien soin de ta mère plus tard !
    - Oui, t’inquiète ! Alors, tu viens jeudi soir ?
    - Vendredi matin, répond Semra. J’ai des choses à régler ce jeudi !
    - Viens le plus tôt possible !
    Semra le lui promet mais elle ne pourra pas tenir parole. Durant la semaine, elle prend froid et ne quitte pas le lit durant deux jours. Fiévreuse, elle se sent trop faible pour partir chez son amie. Elle l’appelle vendredi matin. Dalila ne reconnaît pas tout de suite sa voix. Elle est déçue de se retrouver sans elle.
    - Tu as vu un médecin au moins ?
    - Oui, ment Semra qui avait acheté le nécessaire à la pharmacie du coin. J’ai tout ce qu’il faut…
    - Si je l’avais su plus tôt, je leur aurais demandé de venir une autre fois, dit Dalila avant de s’emporter. Pourquoi on a un portable ? Pourquoi on se parlait tous les jours de l’actualité, de ma mère, de mon ami ? Pourquoi ne m’as-tu pas dit le plus important ? Tu es souffrante et seule ! Je voudrais être là-bas avec toi !
    - C’était à moi de venir ! Je ne voulais pas te gâcher le week-end ! J’aurais d’autres occasions pour m’occuper de toi ! Il reste les fiançailles, le mariage… et entre ces deux événements, ma chère, d’autres occasions de se retrouver ! Je ne t’imagine pas faire les boutiques sans moi ! Dis, tu ne le ferais pas ?
    - Semra, tu es… impossible ! Sache que la prochaine fois, ton absence ne sera pas pardonnée !
    Elle le lui promet. Elle raccroche et met son portable hors ligne. Elle n’aspire qu’à dormir. Le médicament contre le rhume a cet effet bénéfique de l’envoyer dans les bras de Morphée. C’est si bon de pouvoir s’endormir, en oubliant tous les tracas du quotidien. En ne se posant plus de questions…

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  46. Artisans de l'ombre Dit :

    L’usurpatrice 49e partie
    Par : Adila KATIA

    Les prochaines semaines, les deux amies n’auront pas le temps de se voir. Même si elles restent en contact et sont au courant de ce qui se passe chez l’une et chez l’autre, elles regrettent de ne pas pouvoir se retrouver.
    - Alors, quoi de nouveau ?
    Semra s’éclaircit la gorge.
    - J’ai déposé mon dossier à l’académie, lui dit-elle. Normalement, si tout se passe bien, j’aurai ce poste et un logement de fonction ! Je ne serais plus à Alger-Centre, mais au moins je n’aurais plus à louer ! J’aurais mon chez moi et je pourrais le décorer comme je veux, acheter ce dont j’ai envie ! Parfois j’ai le moral à zéro. L’autre fois, je voulais refaire la peinture, et devine quoi ! La propriétaire a refusé ! Je ne peux pas percer les murs, je ne peux rien faire parce que je ne suis pas chez moi ! Tu comprends ? J’ai besoin de ce poste même en dehors de la capitale !
    Elle entend son amie soupirer.
    - Je prierai pour qu’on te l’accorde ! Garde la foi Semra ! Allah n’abandonne pas Ses créatures !
    - Ma mère m’a bien abandonnée !
    - Je sais mais Lui ne t’a pas abandonnée, lui rappelle Dalila. Et je suis là ! Un jour, toi aussi tu rencontreras la paix et le bonheur !
    - La paix, c’est tout ce que je veux, répond Semra. Le bonheur ? Je n’y crois plus. Mais toi, de ton côté, qu’as-tu fait ?
    - On a décidé de ne pas fêter nos fiançailles et de nous marier cet été !, lui dit-elle. On passera à la mairie. Tu es invitée au déjeuner !
    - Incha Allah ! Mais ne me cries pas dessus s’il y a un imprévu !, la prévient Semra. Il y a tant de papiers à fournir ! Tant de gens à voir.
    Ah ma chère amie, ma chère sœur, le jour où j’aurai ce poste et ce logement, ce sera la fête alors ! J’aurais l’impression de renaître ! Peut-être que ce sera là mon bonheur, en plus de partager le tien !
    - Incha Allah Semra ! On s’appelle plus tard !
    Elles raccrochent en souriant. Toutes deux ont conscience que leur vie est en train de prendre un tournant décisif. Toutes deux aspirent à trouver une stabilité. L’une en se mariant avec celui qu’elle aime, et l’autre en ayant un travail et un logement, à défaut d’un nom et d’une famille sur qui s’appuyer.
    Semra ne demande rien de plus. Elle sait que Dalila sera prise par son mari, son foyer, mais elle espère que cette amitié qui est née dès la première semaine de leur rencontre résistera au temps et à l’éloignement.
    Elle sourit en pensant que Dalila aura des enfants dont elle s’occupera volontiers.
    - Dommage que le poste soit dans les environs de Boumerdès ! J’aurais dû essayer de me rapprocher de Sour El-Ghozlane ! On aurait pu se voir plus souvent !
    L’idée la travaille durant la nuit. Le lendemain matin, en se rendant à l’académie, elle se renseigne. La chargée des dossiers prend note de sa demande mais lui parle franchement.
    - Des lycées et collèges sont en construction. On ignore quand ils les livreront, poursuit-elle. Au rythme où vont les travaux, ça prendra des années ! Suivez mon conseil, ne lâchez pas le poste de Boumerdès ! Le lycée est fini et ouvre ses portes en fin d’année !
    - Vous voulez dire en juin ?
    - Oui !
    Semra sait que c’est une occasion qui ne se présentera pas deux fois dans sa vie. Le temps d’une nuit, elle avait espéré en se disant pourquoi pas. Mais elle reste réaliste.
    Elle dépose son dossier et lui remet son numéro de portable.
    - Vous pensez avoir une réponse quand ?
    - C’est une question de jours et je ne vous cache pas qu’il y a plusieurs postulants, lui confie-t-elle.
    Mais je vous promets de vous aider !

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