L’école algérienne s’est-elle piégée dans sa propre logique ? C’est l’ensemble des anomalies qui se sont accumulées depuis des années «de réformes» à ce jour qui récolte ses fruits : de la violence contre la société, à la violence contre soi ! Toutes les réformes, depuis les années soixante-dix à nos jours, sont condamnées à l’échec, car ces réformes sont de substance dogmatique et identitaire, sans qu’elle soit d’une réforme pédagogique en s’appuyant sur un progrès scientifique ! Autrement dit, elles enseignent un contenu dogmatique-chauviniste et non des méthodes à acquérir, la critique, l’analyse et à utiliser la connaissance ! Ceci relève de notre incapacité culturelle à penser les problèmes en dehors du registre de l’émotion et de la compassion !
Selon Meziane Meriane, coordinateur national du Snapest1, «ce que nous avons vécu au baccalauréat 2013 ne s’est jamais produit depuis l’indépendance. C’est une situation inédite qui mérite qu’on s’y attarde et qu’on comprenne la véritable portée et les conséquences fâcheuses qui peuvent en découler à l’avenir». Pour M. Meriane, les événements du bac de cette année traduisent «un fait de société». «Les gens sont avides de réussite et d’enrichissement, du jour au lendemain, sans effort. C’est exactement ce que traduit l’attitude des élèves. Ils veulent réussir leur bac sans travailler, sans veiller, sans donner de leur temps», dit-il. Cependant, ces élèves reproduisent exactement les mêmes logiques d’enrichissement que la société leur renvoie ! Au final, cet échec traduit l’absence de l’éthique dans la société algérienne. Quand la corruption devient une carte de visite et une valeur pour se réaliser soi-même, c’est là où réside la violence et ce n’est pas à l’école. Ceux qui accusent l’actuel ministre de laxisme me semble une exagération, car d’une part l’écolier avant qu’il soit élève il est un enfant, qui vit dans une société, qui a ses propres règles anthropologiques et ses mécanismes de cohabitation, qui sont généralement déficitaires et en distorsion ! D’autre part, la violence observée lors des derniers examens au BAC reflète la réalité de notre société, mais aussi c’est l’aval d’une logique des réformes minés perpétuellement ! Ni réforme, ni discussion ne pourrait aboutir, car les deux idéologies se confrontent au quotidien à haut niveau ! Entre ceux qui souhaitent une école ouverte au monde, enfermée dans une logique guerrière sans pédagogie moderne et une école qui cherche le retour aux valeurs authentiques, enfermer dans les idéologies et les identités meurtrières, l’avenir de notre société restera prisonnière de ces logiques ! Ce processus conflictuel continuera à détruire la transmission dans la société si rien n’est fait. Le besoin d’une nouvelle élite qui réfléchit autrement, qui se libérera de ce fardeau dogmatique et historique, pour préparer une nouvelle génération capable d’agir avec les méthodes de son siècle ; est une urgence.
Hannah Arendt a écrit, dans son essai la Crise de l’éducation : «L’éducation est le point où se décide si nous aimons assez le monde pour assumer la responsabilité ( ). C’est également avec l’éducation que nous décidons si nous aimons assez nos enfants pour ne pas les ( ) abandonner à eux-mêmes, ( ) mais les préparer d’avance à la tâche de renouveler un monde commun.» Le contraire de notre société où la banalité de la violence s’étend de jour en jour !
(1) Le quotidien d’Oran du 08/06/2013.
30 juillet 2013
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