Un héros, commissaire de police beau gosse de son état, redresseur de torts et bon bagarreur, irrespectueux de la hiérarchie, ayant un F2 bien entretenu et couvé par une femme de ménage qui le materne et ne le dérange jamais, ayant pour maîtresse une très belle jeune femme autonome, libre de ses idées et de ses mouvements, vivant dans une ville (Alger) laide et dangereuse, avec ses crapules et des ordures, avec ses «décideurs» pourris… allant jusqu’à l’assassinat. Mais, la vengeance est un plat qui se mange chaud, très chaud Plusieurs jeunes filles, sept au total, toutes de très «bonne famille», sont assassinées par le père d’une de leurs camarades, fille unique d’un ancien moudjahid, un vrai baroudeur qui n’avait demandé ni avantages ni attestation communale, un parmi tant d’autres de nos héros «oubliés» (il fallait «fouiner» pour prouver le lien), fille assassinée il y a longtemps, au lycée par ???????. Devinez !
Sept femmes sont tuées. Sept prénoms dont les premières lettres, assemblées, forment le mot «Algérie». Tuées pour une histoire d’hymen et de pilule. Une seule a échappé Imane (la Foi !). Il fallait le penser. Il fallait le faire.
Avis : Je n’aime pas les pseudos. Et, celui-ci donne l’impression (avec l’utilisation d’appellations qui datent d’une époque lointaine) qu’il n’est pas de «chez nous». Mais, plus pur San Antonio ou je ne m’y connais pas ! Style, personnages, rythme, langage cru mais dérangeant, jeux de mots…. Il y a même Godzila, un sosie Algérien de l’adjoint préféré de San A, Béru le gros, le sale, le glouton, le sympa mais, un adjoint pas «apprenti» pour un sou. A acheter pour lire durant votre congé ou durant un long week-end.
Extrait: Aucun ! C’est un roman policier. Et, dans la police (dans les bons romans, cela s’entend), on agit d’abord. Sacré Commissaire Ben. Avec lui, on oublie les «peaux de banane» de son boss, Hamma Deb et le ministre qui avait couvert le crime de sa fi-fille et qui s’est «racheté» en se suicidant. Dieu bénisse tous ceux qui voudront bien suivre son exemple…ou se retirer.sur la pointe des pieds, rapidement !
Virgules en trombe «Presque roman» de Sarah Haidar, Editions Apic Editions, Alger 2012, 154 pages, 500 dinars.
Une histoire car, il y en a plusieurs : Une ex- écrivaine qui devient «négresse» offrant ses vocables à ceux-là qui ont l’argent et non le talent, qui ont la bénédiction de Crésus et la malédiction de Rimbaud.
Une ex-écrivaine qui se «shoote» au whisky quand elle a des rentrées d’argent et au gros rouge quand elle est fauchée.
Une femme perdue mais qui, en fait, est peut-être la plus «normale» d’entre-nous, son détachement et ses gymnastiques intellectuelles rendant insaisissables et indéfinissables ses personnages. Eux ? Elle ? Du plusieurs en un ?
Et bien d’autres histoires, toutes aussi «illisibles», mais toutes suivant un fil directeur, celui de l’absurde, des «pourritures terrestres», de la laideur, des bizarreries, de la saleté et qui font la tentative du Livre parfait. Un songe. Mais rien n’est impossible. Sacrée Sarah ! Dans la presse comme dans son «presque roman», ses écrits sont des «trombes» que nulle virgule n’arrête
Avis : Une écriture déjantée mais déroutante et prenante. Difficile à lire. Pour publics avertis. Un délice pour ceux ont du temps et ça vaut le détour. La «nouvelle littérature» francophone que l’on avait vu naître, puis se replier mais qu’est-ce qui leur est donc arrivé ? Croient-ils avoir tout dit ? Ou, alors, sont ils désespérés ? Ou, «récupérés» ? – au début des années 2000 (Sas dans une autre vie, Benfodil, Daoud, Adlène Meddi ) va-t-elle revivre ? grâce à une arabophone. Après A. Zaoui, Sarah H. !
Extraits: «L’amour, c’est beau, surtout quand il est ridicule» (p 18), «La rencontre entre un homme et une femme se fait toujours dans la violence car elle n’est rien d’autre qu’une intrusion intolérable dans l’univers de l’autre, une atteinte à sa solitude, un viol, une humiliation..» (p.20), «Dans le ciel, j’ai creusé un trou pour faire fuir mes souvenirs d’enfant. Et puis je mourus, bêtement comme on dit» (p.71)
Sur les allées de ma mémoire
Galerie de portraits de Hamid Grine, Casbah Editions, Alger 2012, 287 pages, 600 dinars
De tous les ouvrages de H. Grine, et Dieu sait qu’il y en a une masse, c’est celui que j’apprécie le plus. D’ailleurs, je l’ai lu, relu…
Ce n’est pas un essai, ni une biographie, ni un roman, ni un style particulier, ni un genre attractif Tout simplement une galerie de dizaines de portraits qui nous guident dans le labyrinthe de notre histoire, celle des années 60 à nos jours. A travers eux, chacun portraituré en quelques lignes avec des mots précis, monté au pinacle ou «descendu en flammes» grâce (sic !) à une citation, comme il sied à une chronique de presse qui se respecte, il ré-invente notre vie quotidienne, en présentant un personnage (ou une personnalité) célèbre ou totalement anonyme. Des connus et des oubliés. Des anonymes et des célébrités. Des vivants et des morts. Quelques étrangers parfois des temps anciens, mais qui restent liés à notre vécu. Ne manquent plus que A. Bouteflika, et quelques autres (et la mère Carmen, du Ccu de la rue «Charras» ?) Le second volume, certainement ? Il est vrai qu’il avoue qu’il n’a retenu (il publie hebdomadairement sa chronique dans un quotidien de la Capitale) «que ceux qui n’ont soulevé aucune vague. L’Algérien a besoin de brise qui lui caresse le visage»
Celui qui m’a le plus ému, c’est le portrait de Maurice… le serveur à la chevelure toujours bien gominée du Cercle Taleb (qui s’appelait l’Ottomatic du temps de la colonisation) qui savait, en son temps, nous faire oublier tous les problèmes de la vie d’étudiant, loin du «pays». Nostalgie, quand tu nous tiens !
Avis : A lire. Un portrait par jour. Et, surtout, n’en sautez aucun, chacun portant en lui des infos’. Manque un sommaire pour nous retrouver !
Extrait: «Depuis l’indépendance, les Algériens courent dans tous les sens derrière le pain, le logement, l’emploi, oubliant la course essentielle : celle du sens à leur vie. Mais, comment donner du sens à sa vie quand la vie n’a pas de sens ? Parole de philosophe ? Non. De hittiste, de harraga… Eux ne connaissent qu’un sens : le sens interdit»
30 juillet 2013
Belkacem AHCENE DJABALLAH