Dans le système algérien, on peut être pendant longtemps le « centre » apparent, on est toujours seul en bout de course. Ahmed Ouyahia le sait. Il a probablement pris de manière « consentante » son éviction de la direction du RND. Un autre « sale boulot », tout autant nécessaire que celui qu’il a accompli, doit-il penser. Et pourtant, même si l’homme semble une machine, Robocop disent les mauvaises langues, on peut l’imaginer, seul, face à un miroir, se dire quand même que le système algérien est une accumulation d’ingratitude. C’est d’ailleurs pour cela qu’il n’accumule rien au niveau politique, hormis la roublardise, la ruse (qui n’est pas l’intelligence) et la versatilité de ceux qui ne sont pas vraiment au « centre ». Il ne sert à rien de tirer sur les ambulances et bien entendu personne ne peut décréter avec certitude qu’Ahmed Ouyahia est vraiment fini mais on peut réfléchir à cette notion de « centre » dans le système algérien. Il y a de faux centres qui peuvent être ministres, Premier ministre. Il y à les quart-centres qui peuvent être les trois-quarts de président qui deviennent, par impératif «légalistes» – car il faut bien signer les lois et les promotions !- des actionnaires. Il y a enfin les autres trois-quarts, les «décideurs» qui bien entendu font les présidents et décident, en off, qui pourra faire le lièvre et qui sera la sardine que l’on jette à l’eau pour le gros poisson. On présume que le « centre » est là. Mais c’est peut-être déjà une illusion d’optique. Et pourtant, même cela devient problématique. En Algérie, on découvre d’une élection à l’autre, qu’il n’y a plus de centre, qu’il n’y a que les variétés de « chkara» qui fabriquent l’édifice, de bas en haut, de la commune au sommet. Car dans le système où le centre présumé est constitué du « président et des décideurs », Ahmed Ouyahia serait un héros, indétrônable. Ce n’est pas un hasard que sa popularité dans le système est inversement proportionnelle à sa popularité chez les gens normaux. Ahmed Ouyahia, devenu homme politique par décision des appareils, incarne une classe de bureaucrate qui n’a jamais fait de politique mais a exercé des responsabilités. Il est représentatif y compris dans son présumé discours novembriste qui se piquerait d’être plus patriote par exemple qu’Abdelhamid Mehri ou Aït Ahmed de cette génération de quinquagénaires algériens qui aura raté sa part d’histoire. Cette génération est aujourd’hui en exil à l’étranger, dans les appareils, dans les affaires et accessoirement dans l’expertise. Elle n’est pas dans l’histoire.
29 juillet 2013
Chroniques