Ils donnent également l’occasion de réfléchir sur l’absence de scrupules de certains candidats, ou du moins les troupes qui les soutiennent, d’aller vers la triche, s’il le faut, pour faire triompher leur poulain, ou leurs thèses, même si l’enjeu ne se situe que dans un simple sondage internet, tel que celui mis en ligne, sur son site, par un hebdomadaire étranger (*).
Celui-ci proposait, à ses lecteurs, de répondre à la question suivante : » qui souhaiteriez-vous voir accéder à la présidence algérienne, après Bouteflika, dont le mandat expire en avril 2014 ? Personnalités proposées : d’anciens premiers ministres (Abdelaziz Belkhadem, Ahmed Benbitour, Ali Benflis), l’actuel détenteur du poste, Abdelmalek Sellal et deux islamistes, Amar Ghoul et Abderrezak Mokri du MSP « .
DU RESULTAT, IL EN EST RESSORTI UN DUEL, BENFLIS VERSUS MOKRI
Normal, diraient certains observateurs, le premier, qui est un nationaliste connu, dispose d’atouts qui ne sont pas négligeables et le second, islamiste invétéré, incarne la rupture de son parti avec la stratégie de l’entrisme, chère à son prédécesseur et compte surfer sur la vague du printemps arabe.
Sauf que le sondage et l’engouement qui s’en est suivi a mis la puce à l’oreille des responsables de l’hebdomadaire en question, qui n’ont jamais connu une telle audience et de surcroit, en pleine nuit : 314 297 votants.
Vérification faite, il s’est avéré que les islamistes ou leurs supporters, sont prêts à tout, puisqu’ils n’ont pas hésité à tricher, selon ce même hebdomadaire, pour permettre à leur champion d’emporter le sondage, grâce à une fraude massive, représentant plus de 190 000 votes, à partir de quatre adresses IP (Internet Protocol) correspondant à des robots situés aux Etats-Unis (Floride, Texas, Michigan et Californie). Ceci pour dire, que dans ce camp-là, on est, semble-t-il, non seulement déterminé à participer à la présidentielle de 2014 mais, également, prêts à tout pour la remporter, quitte à transgresser les règles et à piétiner la morale.
Cette digression fermée, la lecture de la presse nationale de ces derniers jours nous offre déjà, l’occasion de prendre connaissance avec les candidatures des inévitables fantaisistes, qui se sont déclarés qui de Suisse, de Londres ou de Paris. Ils ont pour noms :
1 – Ali Benouari, citoyen suisse, ancien ministre algérien des finances et du trésor, sous le gouvernement Ghozali.
2 – Kamel Boukoussa, expert en économie, installé à Londres.
3 – Madjid Mezghena qui a fait tous les métiers et veut s’essayer à celui de président de la République.
4 – Rachid Nekkaz, enfin, homme politique français, d’origine algérienne, fervent défenseur du port de voile intégral, qui avait déjà tenté le coup médiatique de se présenter à l’élection française de 2007.
Tous ces candidats, auront quelques lignes dans les journaux, d’ici et d’ailleurs. Cela est suffisant pour leur assurer une gloire éphémère au sein de leur famille et du quartier ; de toute façon, ils ne sont même pas éligibles à la candidature, en vertu de l’article 73 de la constitution relatif à l’exigence de la nationalité d’origine algérienne.
Autant dire que les rêves qui les ont animés ne suffisent pas, car la fonction de président de la République, c’est la rencontre d’un homme avec son peuple, comme aimait à le répéter le général De Gaulle.
ALORS EXIT LES HURLUBERLUS ET AUTRES FANTAISISTES !
Cette parenthèse fermée, revenons à ce qui agite nos partis politiques, comme par exemple le FLN, cette machine qui » fait gagner les élections, toutes les élections « .
Tous les observateurs pensent que celui qui aura la caution du parti, aura toutes les chances d’accéder à la présidence.
Pour l’instant, sans secrétaire général, ni de porte-parole, puisque beaucoup parlent à son nom, le parti fait savoir qu’il ne cautionne ni les candidats potentiels comme Hamrouche ou Benbitour, encore moins les Benflis ou Belkhadem.
Le FLN attend le bon candidat, semble-t-il, et bien malin celui qui peut, en cette période de flou artistique, en tracer, le simple portrait robot. Chez les islamistes, le MSP par la voix de son président Mokri, après avoir bataillé pour l’application de l’article 88 de la constitution relatif à » l’empêchement médical « , change, étrangement, de fusil d’épaule et demande, maintenant, des garanties pour une élection présidentielle » libre et régulière « .
Dans leurs rangs, ils tentent de trouver un candidat consensuel, par le truchement d’alliances, faisant mine d’ignorer la tentative de Djaballah, qui fait cavalier seul, puisqu’il s’est dit, d’ores et déjà, candidat alors qu’il ne dispose, pour l’instant, d’aucun socle partisan. Les islamistes essayent, également, d’oublier les déboires de Morsy le président égyptien déchu et l’onde de choc provoquée par son éviction sur l’électorat islamiste.
Chez les nationalistes, la parenthèse de Zeroual-président, a était, semble-t-il, définitivement fermée, poliment mais fermement, par l’intéressé lui-même ; que reste-t-il alors, des éventuels Califes qui veulent être à la place du Calife ?
Touati, Menasra, Benyounes, Ghoul, même s’ils se rasent tous les matins, n’y pensent pas pour l’heure. D’ailleurs, Menasra a dit qu’il n’en voulait pas, qu’il soutiendrait un candidat issu du rang des islamistes, des nationalistes, ou autres. C’est ce qu’on appelle « ratisser large et ne pas cracher sur l’avenir « .
Pour Louisa Hanoune, en revanche, le challenge, pour elle, reste différent dans le sens où elle va concourir pour battre le record de participations à une présidentielle, détenu jusque là, par une certaine Arlette Laguillé, en retraite depuis.
Plus sérieusement, les présidentielles, doivent être ouvertes, à tous et à toutes, à fortiori, pour la secrétaire générale du Parti des Travailleurs, qui peut, à juste titre, s’enorgueillir d’un long parcours militant et d’être l’une des rares femmes politiques arabes à postuler à la candidature présidentielle.
Ouyahia, alors ? Notons que depuis sa démission du RND, il n’a fait aucune déclaration à la presse, ni dans un sens, ni dans l’autre.
Toutefois, il y a cette confidence faite par ses proches, selon lesquels Ouyahia sera nommé Vice. Président, lors du prochain remaniement ministériel, ce qui le placerait, confortablement, dans l’antichambre du pouvoir suprême. Tout ça reste bien évidemment des suppositions, quoique.
MOKRI, HANOUNE, OUYAHIA, ET POURQUOI PAS BOUTEFLIKA
Il lui appartient de se déclarer, dans un sens ou dans l’autre. Il a certes le temps de le dire, tant qu’il n’a pas achevé son troisième mandat de président de la République.
Et ce n’est pas la déclaration de Mechati, des 22, qui va l’en empêcher (cf El Watan du 1er juillet), laquelle déclaration a connu, non seulement, une fin de non recevoir, nette et précise, des responsables du MDN, mais, également, elle a été traité de « babillage, de commérage stérile, infondé, accusateur et non constructif » par l’auteur d’une contribution intitulée : » un fuyard, 31 ans après l’indépendance, sort de son nid et dénigre » à lire, dans El Watan du 11 juillet 2013, où l’auteur distille quelques » amabilités » au sieur Mechati.
Le président, bien évidemment, ne renoncera pas à son mandat en cours. Mitterrand, bien que gravement malade et objet d’attaques de tout bord, a bien achevé le sien, au prix de grandes souffrances, certes, mais dans la dignité, se permettant même des déplacements hors de l’hexagone.
LE CHEF DE L’ETAT, INCONTESTABLEMENT, RESTE LE MAITRE DU JEU
Et puis, tous ces califes qui trépignent du pied, qui s’impatientent déjà, qui veulent sa place, qu’ils sachent, au moins, que président de la République, c’est aussi un métier ! Sinon, comment expliquer les déclarations des grands de ce monde, qui se sont exprimés sur leur fonction.
Comme Nicolas Sarkozy, par exemple, qui a déclaré aux ouvriers, lors d’un déplacement dans un chantier naval à Saint-Nazaire : » Votre métier est dur, le mien aussi « .
Ce même Sarkozy, qui a eu souvent à répéter » si je ne fais pas le travail, qui le fera ? »
Ou encore, le président François Hollande, qui n’a pas été ménagé par sa presse, qui a eu recours aux grosses manchettes, pour qualifier les difficultés de sa présidence : » le dur métier de président de la République « .
Quant à Barack Obama, il doit, en partie, sa victoire grâce à sa fameuse déclaration » We haven’t finish the job » (nous n’avons pas fini le travail), allusion à la nécessité de lui confier un deuxième mandat, maintenant qu’il en maitrise les leviers.
Bouteflika dans ce registre, a eu, aussi, à s’exprimer puisqu’il a affirmé, une fois, au journaliste français El Kabbach, qui le questionnait sur ce qu’il serait devenu s’il n’était pas président, lui répondit : » de toute façon, je ne sais faire que ça ! « , comprendre, c’est mon métier.
Le même Bouteflika a été, également, l’auteur d’une phrase restée dans les annales : » il n’y a pas de place pour les présidents-stagiaires « .
Et si cette déclaration pouvait recentrer le débat, tant mieux.
Donc, messieurs les apprentis candidats, revoyez vos copies et sachez que » l’Ecole des présidents de la République » n’existe pas, du moins pas encore.
D’AILLEURS, EN PLUS DU METIER, IL Y A AUSSI «LE COSTUME PRESIDENTIEL»
Et force est d’admettre que très peu d’aspirants-présidents sont faits pour le porter, tellement ce costume est lourd à porter ; il est, sans nul doute, mal taillé pour certains, qui hésitent, ne sont pas sûr de vouloir y aller, ou, tapis dans l’ombre, attendent un quelconque signal. Et puis ce costume, dans nos contrées d’ici-bas, n’a été livré que dans sa version masculine ! Bien évidemment, dans le camp des islamistes on ne s’embarrasse guère de costume et n’attendez pas de moi de vanne à ce propos.
Dans la sphère des candidats potentiels, il y a aussi des grosses pointures, qui voudront y aller, dans le cas où, Abdelaziz Bouteflika renoncerait à se présenter.
Le nom de Sellal Abdelmalek commence à être chuchoté, celui d’Ahmed Ouyahia, aussi.
Le dénominateur commun de ces deux hommes réside dans le fait qu’ils ont occupé la fonction de premier ministre, ce qui leur confère un statut indéniable d’homme d’Etat.
Il y a aussi la similitude des études effectuées par l’un et l’autre, puisqu’ils sont énarques tous les deux, sans être adeptes toutefois de » l’énarchie « , que d’aucuns, tapis dans les ministères, tentent d’imposer comme unique voie d’avancement et de gouvernance (notons qu’en France par exemple, des voix s’élèvent pour contester, haut et fort, la cooptation de responsables dont » le seul fait d’armes » connu, c’est qu’ils sont issus de l’ENA et plus précisément de » la promotion Voltaire « , celle de François Hollande, en l’occurrence).
Ahmed Ouyahia cependant à ceci en plus, c’est qu’il a été aussi chef de gouvernement et qu’il s’est distingué à l’international, notamment, dans la résolution du conflit de la Corne de l’Afrique, mettant en cause l’Erythrée à l’Ethiopie.
Je ne sais pas pour vous mais, personnellement, j’ai le sentiment que Sellal et Ouyahia, à ce moment de leur carrière politique, sont dans la même configuration que De Villepin et Sarkozy, quand il s’agissait pour le président Chirac, de désigner son dauphin. Ils peuvent succéder à Bouteflika, s’il décide, bien sûr, de ne pas se représenter et de donner sa caution, à l’un ou à l’autre, ce qui le placerait dans la trajectoire d’El-Mouradia.
Etrange destin tout de même de ces deux valeureux serviteurs de la République, qui veilleront à nous épargner, ce n’est pas le genre de la maison, » clear stream » et » le crochet de boucher « , qui ont terni la politique française.
Et bien sûr, je ne vous dirais pas lequel est » sarko » dans cette affaire, libre à chacun de faire son propre pronostic !
N’oublions pas aussi, dans cette lignée des présidentiables, Mouloud Hamrouche, qui n’est pas à présenter et qui a déclaré, par le passé : » je ne serais pas candidat contre le président Bouteflika » ; donc, pour le cas présent, en cas de renoncement du président de la République à postuler pour un quatrième mandat, faudrait-il le compter parmi les postulants ?
Comment aussi ne pas reparler d’Abdelaziz Belkhadem et la croisée des chemins où il est arrivé.
La présidence, il l’a veut. Il l’a dit, c’est l’aboutissement d’un combat politique, c’est la finalité d’une carrière de militant. S’il n’a pas le quitus du FLN, il ira quand même aux élections, car en croire certains « radars « , il en est déjà au stade des souscriptions et des signatures des militants de base qui lui sont restés fidèles. Au besoin, il irait sous la bannière des islamo-conservateurs.
Je dirais même plus, il serait peut-être, le champion des islamistes, leur candidat consensuel, celui qui peut faire gagner la mouvance. Et dans ce cas de figure, Mokri ravalerait ses ambitions, pour faire triompher les frères musulmans algériens, atteints par le syndrome de Morsy et les déboires de leurs frères d’Egypte.
Je vous le dis, les présidentielles de 2014 seront passionnantes et connaitront plusieurs rebondissements voire même des surprises de taille. Attendons pour voir.
D’ici là, le président de la République qui, reste le maître du jeu comme je l’ai affirmé supra, doit reprendre l’initiative et prouver, s’il en était besoin, qu’il reste le patron.
En décidant, par exemple, de remanier le gouvernement, d’aller vers une équipe resserrée, composée, essentiellement, de technocrates ou de compétences issues de la société civile, ce qui contribuerait à restaurer la confiance et à donner des garanties concernant les élections présidentielles à venir.
Ça serait une première initiative, à même de sortir le pays de sa torpeur.
La seconde décision qu’il pourrait prendre, consisterait à réactiver la réforme constitutionnelle promise, aller vers un régime parlementaire, pourquoi pas, et faire rentrer le pays, dans l’ère de la deuxième République, et en finir avec » l’hyper-présidence « , et le centralisme du pouvoir politique et économique, notamment. C’est cela, peut-être, qui fait courir quelques candidats connus, aussi revanchards qu’avides du prestige de la fonction et des dorures de la République.
Le président peut aussi décider de la limitation des mandats présidentiels et de la suppression du Sénat, dont on ne perçoit pas l’utilité, encore moins, l’expertise tant louée.
La troisième décision que le président de la République serait amené à prendre, consisterait à dissoudre le parlement. Ainsi le président qui aura été élu, conforterait soit sa position, grâce à une majorité qui se dégagerait des élections législatives, ou alors, et cela serait une première en Algérie, il devrait s’accommoder d’une cohabitation, aussi gênante pour lui, peut-être, que bénéfique pour le pays, qui en finirait, définitivement, avec le pouvoir absolu.
Si après ça, le président de la République viendrait à tirer sa révérence, il n’en sortirait que plus grand.
(*) cf éditorial de Marouane Benyahmed » Benflis, Mokri et les robots américains » in Jeune-Afrique du 16-22 juin 2013.
25 juillet 2013
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