- «Barakette, c’est trop, sborna bezzaf ! Soit tu fais les escaliers, ou alors tu payes garçonna pour le faire à ta place…, sinon n’dirou fik braya pour qu’on nous ramène une autre concierge…»
- «Dirou, dirou benti, kayène Rabbi!»
- «El-houkouma t’a donné ce logement et en échange, tu dois t’occuper de l’entretien…, on n’a pas à te payer… Maintenant, si tu ne peux pas, il y a des femmes qui ne demandent que ça».
- «Sar, ya Zoubida, tu dis ça à la femme qui tenait tes enfants quand tu allais aux mariages… Moi qui te passais mon logement chaque fois que tu as eu trop d’invités… Ghir dirou, kayène Rabbi».
Zouzou tenait ce langage depuis deux ans. Cela fait deux ans, tous les locataires sont devenus propriétaires. Khalti Aïcha ne comprenait pas son acharnement. Chaque fois, elle a réussi à calmer cette voisine. La même expression concluait le même speech: dirou, dirou, kayène Rabbi.
Aujourd’hui, fatiguée de porter sa misère hautaine, la vieille femme claque la porte au nez de Zouzou. Furieuse, la mégère essaye d’ameuter les voisins, mais sans résultat. Le soir, Khalti Aïcha reçoit rajel Zouzou. «Tiens, je t’ai ramené des pommes, lui dit-il, d’une voix mielleuse».
«On n’a jamais vu l’aumône sortir de prison», pense-t-elle, sur ses gardes. «Tu sais, on t’aime bien… et si Zouzou fait ça, c’est pour ton bien. Il ne faut pas trop lui en vouloir… On sait que tu es dans le besoin et il n’y a que nous qui pensons à toi… Voilà, je t’ai trouvé une chambre fidar à M’dina J’dida… Donc, Zouzou te propose de l’acheter ton logement… C’est pour notre fils, il va bientôt se marier…, et avec tout l’argent que tu auras, tu vivras comme une princesse…».
Khalti Aïcha se lève, lui redonne ses pommes, lui ouvre la porte, l’invite à sortir en lui disant : «Zidou dirou, kayène Rabbi».
24 juillet 2013
El-Guellil