Les Algériens croient aussi que le destin de leurs présidents est l’argument principal de leur fatalisme: ils ont le peuple en face d’eux et le rideau derrière eux. Où est la fuite ? Donc, des solutions: se taire comme Chadli, se ranger comme Ben Bella, se retirer comme Zeroual, s’immobiliser comme Ali Kafi ou se faire tuer comme Boudiaf ou démissionner mais rester pour le salaire comme Bouteflika. Chacun des cas illustre une solution, un comportement ou un choix fait par des millions d’Algériens. Ceux qui choisissent de ne rien dire et de s’occuper de leur santé comme Chadli. Ceux qui boudent et se retirent comme Zeroual et qui refusent la responsabilité car c’est une saleté. Ou les millions qui font comme Ben Bella: soutiennent le régime, en vivent, l’applaudissent et le chérissent comme un vieux souvenir personnel. Ou ceux qui se font avoir, se font ramener, puis tuer dans le dos. Ou les millions qui critiquent tout, ont des avis sur tout, ont un sale caractère mais préfèrent le pouvoir à la démocratie comme Ali Kafi. Et il y a, en dernier, ceux comme Bouteflika: rusés, séducteurs, mêlant nationalisme et narcissisme et qui ont de l’ambition et de l’amertume, du mépris et de la fascination, beaux parleurs mais malléables devant l’adversité, gâtés mais toujours mécontents.
Au choix donc: les Algériens ne choisissent pas leurs présidents mais peuvent choisir les solutions choisies par ces présidents face à l’unique problème de l’Algérien: comment survivre en Algérie sans en mourir, sans être l’idiot de la farce, la victime de la balle ou la tête du mouton et surtout après avoir été tué par son propre pays ? Les présidents algériens ne sont des modèles de comportement qu’après leurs mandats, pas pendant et surtout pas avant.
Dernière question: et ceux qui veulent ressembler à Boumediène ? Ils feront mieux que Boumediène: ils donneront le burnous à l’élu du peuple et garderont la moustache pour mieux en décider.
19 juillet 2013
Kamel Daoud