Comme semble l’affirmer depuis si longtemps l’adage romain, beaucoup choisissent d’aller vivre là ou ils espèrent trouver un emploi, un gîte, une vie paisible et surtout le respect de la personne humaine. Des centaines de milliers d’Algériens ont quitté ce pays, souvent sans le sou, désespérés et humiliés par une machine infernale qui fauche tout ce qui espère, travaille honnêtement et aspire à changer les choses. Ces Algériens ont choisi d’aller se reconstruire sous d’autres cieux en ne comptant que sur leur intelligence, leurs compétences et le fruit de leur travail. D’autres plus endurants ont préféré rester ici, chez eux, et ont essayé de continuer de se battre, sans succès, pour espérer de jours meilleurs. D’autres, enfin, plus malins sans doute que les autres, ont «prospéré dans le système», pillé ce pays et appauvri son peuple. Comme tout a été déjà dit, nul besoin de s’étaler sur l’immense gâchis infligé à l’Algérie indépendante et sur le dévoiement des idéaux de liberté et de justice pour lesquels des millions d’Algériens ont sacrifié leurs vies. Nul besoin de ressasser la profonde humiliation subie depuis si longtemps par tout un peuple. Nul besoin encore d’énumérer les nombreux symptômes de résurgence du sous-développement qui rongent notre pays malgré sa richesse supposée et l’autosatisfaction militante de ceux qui se remplissent la panse et piaffent d’impatience de nous bouffer tout cru encore très longtemps. Nul besoin, enfin, de redire ce qu’est devenu notre pays. L’échec est tellement patent, visible, qu’il frise l’indécence. Et cette machine infernale qui, depuis très longtemps, nous malmène et nous empêche de grandir a fini, comme la mort, par avoir notre peau. Et si l’amertume et le désespoir se sont insidieusement substitués à tout ce qui faisait la grandeur de notre peuple, la flamme de l’espérance ne s’est pas encore complètement éteinte. Et lorsqu’au crépuscule d’une vie, les images de cet immense gâchis vous remplissent la vue, que la fatigue et l’âge viennent à bout de votre colère, qu’il est déjà trop tard, que le temps a passé et que le sentiment d’avoir failli, peut-être malgré soi mais avec beaucoup d’autres, vous prend à la gorge, alors il nous faut malgré tout continuer de prier, pour tous, pour ce pays, pour ce peuple, pour que tous les maux guérissent et que s’apaisent les souffrances de ceux que plus rien ici-bas ne peut plus consoler.
13 juillet 2013
Salim Metref