La pelouse du stade du 5-Juillet est une honte ? Oui, dit le peuple, parce que le 5 Juillet est lui-même traité comme le projet de cette pelouse, ainsi que tout le pays, son argent et son peuple. Le gazon est donc la face visible d’une jungle plus profonde et d’une arnaque plus ténébreuse. Si on en est arrivé à ce champ de pomme de terre au milieu de la capitale, c’est à cause du régime, son manque de transparence, son personnel, son impunité, son irresponsabilité et ses formules.
Donc que faire ? Si on laisse la pelouse en l’état, l’Etat prouve qu’il n’existe pas. Si on limoge le DG, les Algériens auront le droit de demander plus : que l’on répare le gazon du reste du pays, qu’on limoge ses mauvais gestionnaires, qu’on enquête sur ses marchés frauduleux et ses Hollandais volants. Il faut vite prouver que l’Algérie vaut plus que la pelouse. Possible ? Non. Cela s’appellera une auto-révolution : de main à couper en main à couper, le régime va se retrouver à s’accuser lui-même. Autant ne pas étendre le cas de la pelouse au cas du pays. D’autant que la pelouse est visible sur la télé, pas le reste du peuple. Et donc le reste du stade national, qui a lui aussi le nom du pays 5 Juillet ? On va attendre. Le pays n’y joue que contre lui-même, on n’y inscrit pas de but sauf quinquennal et c’est seulement un match de façade dite démocratique. Pour le moment, le gazon est plus fort que le peuple : il a renversé son chef.
Que veut le peuple ? Du gazon partout. Du bon gazon vert, éternel, soyeux et doux. Bien fait et que l’on ne peut arracher même avec des dents aux orteils. Exactement ce que promettent les religieux et le projet de la plus haute mosquée d’Afrique : du bon gazon. Après la mort du but et du vivant.
20 novembre 2012
Kamel Daoud