LA FRANCE DOIT-ELLE DEMANDER PARDON A L’ALGERIE ? AU TITRE DE LA CONQUETE EN 1830 OU ENCORE AU TITRE DE LA GUERRE D’INDEPENDANCE EN 1954, CE N’EST NI FONDE, NI OPPORTUN.
1- La repentance par la France au titre de la guerre de conquête en 1830 n’est pas fondée. La raison est simple. Le peuple algérien n’était pas souverain en 1830. Le pouvoir était entre les mains des Ottomans (turcs) qui l’avaient repris aux Arabes. Le règne arabe commencé au VIIIe siècle s’est étalé jusqu’au XVe. Et durant ce temps, le pouvoir était exercé par les émirs des dynasties : Rostomide suivie des Fatimides, des Zirides, des Hammadites, des Almoravides, des Amohades, enfin des Zianides. Et avant eux, aussi la souveraineté sur l’Algérie n’appartenait pas aux autochtones depuis les Phéniciens suivis des Romains, des Vandales et des Byzantins. Alors demander à la France de s’excuser de la violence faite à ses prédécesseurs les Turcs, cela s’appelle faire l’avocat de l’empire turque alors qu’elle n’a aucun droit pour s’approprier cet héritage. De plus, le peuple algérien a sacrifié sur le champ de bataille en France et en Algérie, pour sa liberté, ses meilleurs fils. Il ne faut pas l’oublier. L’offense au peuple algérien, c’est la culture de l’oubli à dessein des persécutions vécues par nos aïeuls que tous ces systèmes coloniaux venus d’Europe ou du Moyen-Orient leur ont infligées. Moi un citoyen algérien fier et heureux de mon appartenance à ce noble peuple vivant dans le plus beau pays de la terre ; je ne comprends rien à ce raisonnement. Ouvrir un débat national direct sur la question. Plus de refoulement, il faut parler haut et fort et tout le temps et à la face de tous. Victor Hugo avait dit : «Les idées, c’est comme un clou plus on frappe dessus et plus il s’enfonce. » Il faut alors le répéter à tous et tous les jours, aux cultivateurs de l’amnésie, qu’avant 1830, l’Algérie était une colonie turque et avant les Turcs, colonie arabe et avant colonie byzantine et avant colonie vandale et avant colonie romaine et avant colonie phénicienne et cela depuis 1000 avant J.-C. Nous avons besoin d’éclairage sur ces différentes époques restées obscures. Nous remercions tous les historiens les nôtres ou les leurs s’ils peuvent l’apporter et fournir une image complète de notre histoire antique et médiévale avec seulement des-dits et débarrassée des non-dits. Les restes de populations conquérantes des différentes époques ont fondu certes et disparus, englouties elles-mêmes dans l’Algérie. D’oppresseurs, ils ont intégré le camp d’autochtones et intégré les rangs d’opprimés et vécu cette condition. Ils sont mélangés à nous et nous à eux, formant une nation algérienne. C’est de vérité que nous avons besoin et non de non-dit et de refoulement. Le recouvrement de la personnalité et sa consolidation est à ce prix. C’est le sultan de Turquie qui nommait depuis 1530 les gouverneurs d’Algérie. Le dernier, le 96e, Hussein-Dey avait signé l’accord de reddition sans résistance avec le général de Bourbon commandant l’armée de la conquête le 5/7/1830, soit quelques jours après le débarquement et fui par mer avec ses sbires et son armada, laissant la fantasia et baroud d’honneur aux beys ses substituts régionaux sachant les jeux déjà faits. Avant 1830, l’administration en place pour l’exploitation sauvage des ressources agricoles du pays était très répressive (histoire orale). Elle se composait des caïds à la base sous les aghas, bachaghas, beys (chef de région) et au sommet le dey. Des supplétifs autochtones complètent les réseaux du pouvoir de la base.
La France fait comme l’Empire ottoman
Le pouvoir s’est accaparé les meilleures terres et refoulé les autochtones dans les montagnes où ils survivaient avec des ressources réduites comme peau de chagrin à quelques bestioles dans le meilleur des cas et les terres arides des montagnes. Les terres cultivables ont intégré le domaine beylical et furent réparties entre les notables venus d’ailleurs et les beys régionaux. Les Français ont confisqué ces terres à leur tour lors de la conquête. Ils les ont versées dans le fonds foncier de l’empereur devenu domaine public. L’empereur Napoléon III a hérité d’un domaine très consistant qu’il a agrandi après. La distribution des terres aux nouveaux notables et ses soutiens autochtones s’est réalisée aisément. L’administration refaite sur le modèle prédécesseur en place a été reconduite pour l’essentiel. Il ne reste aux autochtones que les travaux d’ouvrier agricole dans les champs passés entre les mains des nouveaux dominants et des retournés contre leur communauté.
2- La repentance au titre de la guerre d’Indépendance en 1954 n’est pas opportune. La guerre d’Indépendance menée par les seigneurs de la guerre authentiquement algériens, les hommes d’honneur de l’Algérie (dommage que cet honneur ait été sacrifié par beaucoup sur l’autel de l’argent) qui ont tout plaqué pour se battre au sacrifice de leur vie et de tous leurs biens pour rendre sa dignité à la mère patrie, l’Algérie, a pris fin il y a cinquante (50) ans. Et les hommes, ces héros ayant commandé la Révolution, resteront éternellement dans nos mémoires : Ben Bella, Aït Ahmed, Didouche, Boudiaf, Bitat, Benboulaïd, Ben M’hidi, Krim, Khider, tous morts à l’exception d’Aït Ahmed. L’Algérie reconnaissante à ses fils doit les immortaliser par des statues dans les places publiques des communes. On tente déjà de faire oublier cela pour brouiller la vérité. Immortalisons les symboles de la guerre d’Indépendance pour la vérité historique et pour combattre l’oubli du sacrifice suprême du peuple pour son indépendance. Passons à l’étape de consolidation de cette indépendance pour la préserver pour l’éternité. Or, on préconise une démarche réductrice de la grandeur du combat mené par le mythique FLN et son bras armé la légendaire ALN soutenue indéfectiblement par tout le peuple. L’issue du combat, tout le monde la connaît : c’est une victoire éclatante sur l’armée française décadente qui essuie défaite sur défaite depuis 1871, face à l’empire allemand, ensuite en juin 1940 face au 3e Reich. Dans les guerres coloniales, en Indochine face aux combattants de Giap et en Algérie face à l’ALN. Qui veut transformer cette éclatante victoire en terne défaite par cette histoire de demande de repentance à la France coloniale. Oui à la réconciliation entre nos nations à cause des liens culturels et de sang tissés entre elles très nombreux avant et beaucoup plus après l’indépendance. Quelle famille algérienne aujourd’hui qui ne compte pas au moins un membre binational en France ? Alors valorisons dans l’intérêt mutuel ce capital humain commun et allons de l’avant. Oui ! Comme dans le foot. Faisons- lui appel dans les autres secteurs de l’économie : industrie, commerce, et autres. Dans la guerre qui nous a opposés, chaque partie a payé son tribu en sang, nous pour notre liberté et notre dignité et eux pour leur agression et oppression d’autrui. Le recouvrement de la souveraineté par le peuple sur sa terre et ses richesses et la confiscation de tout ce qu’ils ont réalisé depuis la conquête en 1830 sont suffisants… L’indépendance a coûté la vie à des milliers de personnes de part et d’autre et des traumatismes indélébiles. Les Français font état de 27 000 morts. Nous leur demandons eux qui sont forts en archives de faire connaître le chiffre des morts côté Algérie en leur possession.
21 morts algériens pour 1 Français !
Personnellement, j’ai fait une étude en prenant pour échantillon la mechta où je suis né et vécu la guerre dans mon enfance et échappé à la mort miraculeusement grâce à un colonel de l’armée Guy Rivière appelé le manchot, commandant cette base vers 1959-1960. On allait nous tuer moi et un autre de mon âge lui-même fils de chahid lorsqu’arriva ce colonel, comme tombé du ciel, lorsqu’on allait nous exécuter à l’endroit même où furent tombés des soldats dans une embuscade. Il nous enjoigna nerveusement de quitter les lieux. Que Dieu ait son âme au paradis. Cette méchta se composait de 11 îlots d’habitation comprenant au total deux cents habitants. Elle est rurale et se situe à la périphérie d’un village du Nord constantinois ayant abrité la base de la Wilaya II. La violence a atteint son paroxysme en cet endroit qui a souffert de toutes les actions de la guerre, bombardements aériens (par les B26) attaques par avion de chasse, bombardements par l’artillerie de 105 (2 morts et 4 blessés graves dont mon père ayant survécu), attaques directes, embuscades quasipermanentes. Située dans une clairière à la périphérie d’un village du rang de sous-préfecture, ses habitants y travaillaient le jour dans le commerce et services auprès des pieds-noirs, l’administration mixte et l’armée et rentraient le soir chez eux où ils rencontraient les moudjahidine. Les enfants fréquentaient depuis longtemps l’école communale. La grève de 1956 les a mis tous dehors pour au moins 2 ans jusqu’en 1959 avec l’aval du FLN. Ceux qui sont allés au lycée à cette époque se comptaient sur les doigts de la main. Cette mechta a compté 11 décès de mort violente parmi une population totale de 200 personnes.
- Djounoud, 4 morts au combat les armes à la main entre 1958-1962.
- Mort dans l’armée française :
1 – Tués par l’armée directement :
2 – Tués par l’artillerie : 2 dont une femme.
- Tués par le FLN : 2 Les blessés rétablis : 4 dont mon père dont le corps a été déchiqueté par plus de vingt éclats de bombe de 105. Ni les internés libérés dont mon père mort après l’indépendance de mort naturelle, avec le sentiment d’avoir accompli son devoir de citoyen et vivant de son salaire comme tous les citoyens. Il n’en sera pas tenu compte dans cette analyse de cette catégorie.
- Soit au total 11 personnes dont 6 civils et 4 combattants armés et un soldat dans l’armée francaise. Moudjahidine ayant survécu jusqu’à l’indépendance : 2 Soit 200/11 = 5.5 % Hypothèse : population algérienne en 1962 = 10 000 000/100 = 100.000. x 5.5 = 550.000. Soit du côté algérien. 550 000/27000 = 21 Algériens pour 1 Français. Ce chiffre sur lequel je peux me tromper souligne bien la violence de cette guerre.
Le citoyen M. Bouchouit
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/11/06/article.php?sid=141089&cid=49
6 novembre 2012
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