Après l’exil forcé du Maroc, le père, toujours traqué par la police coloniale, rentre clandestinement à Nemours (Ghazaouet) où il continue à militer pour la cause nationale. Il prendra part au congrès musulman de juin 1936.
Mamia, entama dès 1935 des études secondaires au Lycée de Mascara pour les achever en 1942.
Nourrie par les préceptes réformistes inculqués par son père, Mamia s’intéresse, très jeune au sort fait à ses coreligionnaires femmes. Et c’est à l’âge de 16 ans qu’elle choisit un thème de dissertation original qu’elle intitule : « Ce que peuvent penser les femmes musulmanes de leur émancipation ». Au grand étonnement de la classe, elle obtint un 17/20 et des félicitations, alors que son professeur était réputé pour ne jamais noter au-delà de 13/20. A la fin de ses études secondaires, son père l’accompagna, début novembre 1942, à Alger qui abritait l’unique université en terre algérienne. Le 8 novembre, c’est le débarquement américain, bombardements sur Alger et courses folles vers les abris. L’université fermée, la rentrée universitaire est reportée sine die.
Son père, qui veillait à son éducation, l’a poussa vers les études de sage-femme pour lesquelles elle n’était pas, particulièrement, encline à l’époque. Il pensait à l’aspect social et aux services que pouvait rendre sa fille aux femmes enceintes.
Après un court intermède d’enseignante, elle renoua, l’année suivante, avec Alger pour entamer et terminer ses études de sage-femme. En exerçant, par la suite, le plus beau métier du monde, aidé à donner la vie, Mamia en tira les plus belles satisfactions de sa vie.
En 1943, Mamia sympathisante du PPA/MTLD participe aux premières cellules des AML (Amis du Manifeste et de la Liberté), créées à l’université et qui regroupent tous les partis nationalistes.
Le 1er mai 1945, elle est présente à la manifestation qui regroupe des milliers de manifestants à la rue d’Isly (Ben M’hidi) ; celle-ci sera violemment réprimée. Avec ses sœurs de combat, elle fait partie des équipes organisées par le PPA, pour aller soigner clandestinement les blessés aux cotés d’étudiants en médecine.
En 1946, elle est élue vice-présidente de l’Association des Etudiants Musulmans d’Afrique du Nord (AEMAN). En 1947, elle participe à la constitution de l’Association des Femmes Musulmanes Algériennes (AFMA), organisation féminine légale impulsée par le MTLD. Elle est élue présidente de l’association qui tient sa première assemblée générale en Juillet 1947.
Avec son conjoint Abderezak Chentouf (1919-2010) avocat et grand militant lui aussi, ils défilent le 14 juillet 1950, place de la Bastille, le drapeau algérien flottant au vent.
A la veille du 1er novembre 1954, Mamia fait partie de celles qui impulsent le développement du nationalisme parmi les femmes algériennes dans les quartiers de Belcourt, La Casbah, El Harrach et Notre Dame d’Afrique.
En novembre 1955, son activisme politique, l’a faite vite expulser hors du territoire national. A la dissolution de l’Assemblée nationale française, quelques mois plus tard, la loi sur l’état d’urgence prit fin, elle pu regagner l’Algérie et militer au sein d’une cellule FLN.
Avec ses camarades, elle était plus particulièrement chargée d’assurer l’hébergement et la liaison à Abane Ramdane et Benyoucef Benkhedda. Le 24 mai 1956, les premières grandes vagues d’arrestations eurent lieu à Belcourt et à La Casbah, investis par l’armée française. Mamia est arrêtée. Libérée elle demeure traquée ; ce qui l’obligea à aller en Tunisie, où son mari, recherché par la police, la rejoint un mois plus tard. Ses activités au sein du Croissant Rouge Algérien (CRA), l’emmenèrent avec d’autres militantes à faire entendre la voix de l’Algérie en lutte dans les rencontres féminines internationales. Amie de Salima El Haffaf (épouse Benkhedda) qui était trésorière de la section feminine du PPA/ MTLD qu’elle dirigeait, Mamia était entourée de Malika Hablal, Malika Mefti (épouse Lamine Khene) Nfissa Hamoud. Elles prirent des chemins différents après l’indépendance. En dépit de leurs divergences idéologiques ultérieures, ces houris de la liberté ont eu un seul idéal et non des moindres, la lutte pour le recouvrement de l’indépendance de leur pays subjugué par la longue nuit coloniale. Pour cela, elles n’ont pas hésité à sacrifier leur propre vie pour certaines ou leur jeunesse pour d’autres. Qu’elles trouvent, dans cette modeste contribution, notre reconnaissant attachement.
3 novembre 2012
Farouk Zahi