Une ville respire, s’évertue, s’exhibe et s’angoisse comme une cellule vivante, dit-on. Et sous d’autres cieux, l’impression de l’artiste précède la sollicitation de l’urbaniste dans tout projet d’aménagement ou de restructuration de site. Dans ma ville, des maçons surclassent, d’un revers de main, tous les plans d’architecture. Encore que de maçonnerie, les maçons de ma ville n’ont que la poussière du gâchis. Douar Ouahran douar.
Les façades sont moroses, la pierre taillée repeinte, ses taxiphones et abribus malmenés. Et entre deux cafés est aménagé un café. Une véritable «kiosquemania». Les garages pour voitures sont transformés le temps d’une affaire en zriba pour les moutons à vendre cet aïd et en moutons qui attendent l’arrivée des pèlerins.
Oueld bladi est un type formidable, en apparence civilisé, très consciencieux et intelligent. Khfif drif, il se métamorphose subitement dès qu’un autre résident ou d’autres voisins viennent à former avec lui un groupe d’individus. L’association ainsi faite se transforme, comme par magie, en une démission collective, une indifférence totale ou, tout bêtement, en un laisser-aller écoeurant. Dès lors, il n’y a pas lieu de s’étonner que, dans ma ville que j’aime, des lumières s’en aillent ou qu’elles s’amenuisent en luminosité, pour ne pas perturber le vide dans son paisible et long sommeil. Dort Ouahran dort ! Le tramway arrive. La douara aussi.
24 octobre 2012
El-Guellil