Culture :
Après Le porteur de cartable et il était une fois… Peut-être pas, ses deux précédents romans adaptés à la télévision, Akli Tadjer récidive avec une belle histoire structurée sous forme d’un monologue alterné.
Dès l’entame du roman, une avalanche de catastrophes s’abat sur son personnage principal, Saïd Meziane, 30 ans et quelques poussières. Primo, il vient de se faire renvoyer comme un malpropre par la Cristalline d’Assurance, l’entreprise qui l’employait ; secundo Clothilde, sa petite amie, a mis un point final à leur love-story et tertio, sa maman Fatima vient d’être victime d’un AVC (accident vasculaire cérébral). Elle a été transportée d’urgence à l’hôpital Bicêtre à Paris. louée sur son lit à l’hosto, elle ne peut ni bouger ni émettre le moindre son. Mais l’auteur ouvre une fenêtre aux lecteurs que nous sommes pour entendre tout ce qu’elle pense. Et c’est d’un drôle ! Florilège : «Au soir, Mme Décimus et la nouvelle me mettent au lit. La nouvelle me propose un plateau-repas avec tout plein de nouveautés, de la choucroute avec de la cochonnaille halal, un baba au rhum sans rhum et du vin rouge sans alcool». P.138. «Ça la rend folle de rage d’avoir à nettoyer le vomi sur mon menton, sur ma chemise de nuit, sur mon oreiller et sur mon drap. Elle brait que je vais mourir bientôt si je persiste à ne faire aucun effort pour m’alimenter. Pour me ficher la trouille, elle énumère les noms des malades qu’elle a accompagnés à la morgue depuis le début du mois» (PP. 18 et 19). Fatima porte en elle un lourd secret. Celui de la petite fille en robe jaune . Fruit d’un viol. Par la pensée, elle revisite son passé : la disparition de ses parents déchiquetés par la bombe qu’ils venaient de déposer durant la Révolution, ses années à l’orphelinat de Bab-El-Oued, son adoption par le couple Sanchez, son arrivée en France, la mort de son mari Ali… Et puis une blessure toujours béante, celle de la disparition de la petite fille en robe jaune. Chaque jour, Saïd Meziane rend visite à sa mère. Il maudit la fausse pudeur qui les a empêchés de se dire «je t’aime» pendant qu’il en était encore temps. Rencontré lors du 17e Sila, Akli Tadjer nous a révélé s’être inspiré de la mort de sa mère il y a quelques années pour écrire ce roman : «Pour moi, ça a été une forme d’exutoire car j’ai beaucoup souffert de la maladie puis de la disparition de ma mère.» Un roman entre rire et larmes qui confirme le talent de cet écrivain-scénariste qui parle de choses graves avec humour et dérision.
Sabrinal
La meilleure façon de s’aimer d’Akli Tadjer, Editions APIC, 2012, 600 DA, 172 p.
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/10/07/article.php?sid=140010&cid=16
7 octobre 2012
1.LECTURE