Elles fondent leurs arguments sur le choix du Premier ministre, commis de l’Etat, politiquement incolore et professionnellement inodore. En plus, il a déjà occupé par le passé la direction de la campagne du même candidat et qui fait partie de ses proches. De telles déductions ferment toutes les voies de changement en Algérie et coupent tout espoir des citoyens de retrouver l’épanouissement un jour. Ils sombreront dans le dépit et deviendront une cible facile pour toute manipulation. On parle de soulèvement incontrôlable si les dysfonctionnements persisteraient, voire même de suicide collectif. Il ne faut pas sortir de Saint- Cyr pour deviner les intentions des uns et des autres qui attisent le feu en utilisant les tribunes des médias pour chauffer à blanc l’opinion publique en la poussant vers le chaos, seulement on est en droit de se poser la question du pourquoi et à qui profite ce chaos et est-ce vraiment la seule solution ? D’abord au moins quatre motifs principaux et classés par ordre d’importance décroissante pourraient justifier un tel raisonnement pessimiste et intentionnel :
1-Le système instauré depuis le début de l’indépendance n’a désormais pas réussi à développer une idéologie mais un ordre établi où chacun trouve son compte, tente de semer le trouble au sein de la société Algérienne car il ne peut perdurer que dans l’opacité et le désordre. Les actions que mènent les pouvoirs publics pour éradiquer le marché informel et nettoyer les villes et les villages du pays, dérangent les barons de l’import/export qui les utilisent comme étalage pour leur bric-à-brac. Le nouveau Ministre de la justice, garde des seaux a qualifie hier, les larmes aux yeux la corruption en Algérie de « métastasique et qui risque de gangrener le tissu social, de dénaturer l’effort d’édification de l’Etat de droit (voir le discours que Monsieur Mohamed Charifi a prononcé le 16/09/2012 lors de l’ouverture de la session ordinaire du conseil supérieur de la magistrature) ;
2-La crise économique Européenne et par extension celle des Etats Unis, poussent certaines grandes compagnies à rechercher un plan de charge dans les pays à fond souverain important et dont leur économie reste fortement dépendante de l’extérieur. Par l’entremise de leurs agents sur place ou établis à l’étranger créent la pagaille pour s’emparer des marchés juteux en arrosant ces mêmes agents. Sinon comment expliquer que de nombreuses capitales et notamment celles européennes ont plus paniqué à la rumeur du décès du président que les Algériens eux-mêmes. Dans ce cas précis, le trouble permet de s’éloigner des vraies questions. On sait qu’actuellement Sonatrach panique de ne pas pouvoir respecter ses engagements à cause du retard qu’elle accuse dans son programme de forage qui rentre dans le plan moyen terme (PMT) 2012-2016 et, ce parce que tous les appels d’offre qu’elle a lancé sont soit infructueux soit annulés. Cette panique pousse indirectement pour renouer avec le gré à gré afin dans la confusion d’éviter les bonnes questions comme celles du désinvestissement et de la déstructuration de l’ENTP et l’ENAFOR qui sont filialisées au groupe et qui ont une expertise avérée dans ce domaine pour laisser Sonatrach tendre la main vers des entreprises étrangères parfois nouvellement venues dans cette activité. Comment se fait-il que les entreprises Haddad/Kouninef et Cevital s’intéressent-elles au forage ?quelle expertise ont elles, on sait que cette activité est particulièrement capitalistique, d’où ont-elles ramené les capitaux ? comment se fait-il que les entreprises américaines bénéficient de toutes les facilités pour exploiter le gaz de schiste alors que le pays regorge de gaz conventionnel etc.
3-Pour assouvir une vengeance personnelle parce qu’on a été écarté du système ou par une forte ambition d’accéder au pouvoir;
4-Par inconscience car on ne mesure pas l’importance de ce qu’on déclare à l’instar de cette famille qui après une pique-nique laisse le feu allumé et embrase la forêt qui lui a permis de se détendre.
Ces quatre motifs peuvent coexister en même temps mais en s’ajoutant l’un à l’autre en fonction de leur poids d’importance font l’événement certain. Il reste tout de même extrêmement difficile de croire à une candidature éventuelle de Bouteflika en 2014 ou d’un transfert du pouvoir à une forme héréditaire pour deux raisons. La première, est la reconnaissance publique le 8 mai dernier à Sétif du président lui-même de la fin de sa mission en entrainant avec lui sa génération, certainement faisant allusion aux ténors du FLN qui font tout pour perpétuer le système.il a employé un adage fort : «Tab Ejnanna»pour qu’il revienne aujourd’hui sur sa décision afin de succéder à lui-même. Les gens qui le connaissent disent qu’il est trop fier pour se retrouver dans ce genre de situation, au demeurant comique. La deuxième est que le transfert d’un pouvoir héréditaire «si telle est son intention», ne pouvait se faire qu’à travers la création d’un nouveau parti ou par le biais du FLN. Or, les échéances sont trop courtes pour le premier cas et la crise que connait actuellement l’ancien parti unique écartent de très loin cette éventualité. Donc, ces spéculations stériles ne font qu’éloigner les citoyens des vraies questions qui les préoccupent et qui ne sont certainement ni Bouteflika et encore moins son état de santé. Il est vrai que c’est un droit constitutionnel de s’enquérir de la capacité physique et mentale de ceux qui nous gouvernent mais la pratique fait que depuis les temps les plus reculés, on entretient un mystère autour de cette question.
On raconte qu’un monarque français mourant demandait à sa fille ainée de le maquiller pour paraitre en forme devant son conseil, sachant qu’elle avait la main pour ce genre de travail. Lorsqu’il est apparu devant les membres, sa décision a été de confier la régence à sa maquilleuse au détriment des compétences en attendant que son fils atteigne la majorité. On se rappelle la mort de Franco d’Espagne, gardait secrète plusieurs semaines, les mystères qui ont entouré la mort de Boumedienne et plus récemment celle de Arafat. Mitterrand avait entamé un deuxième septennat avec un cancer de la prostate et on peut citer des milliers d’exemples de ce genre. On a toujours évoqué pour cela, les raisons d’Etat. Et ce n’est certainement pas aux Algériens de déroger à cette règle sauf si cette incapacité soit visible et handicape l’exercice de la fonction présidentielle. Alors ! A-t-il dérivé dans ses discours comme l’a fait Bourguiba de Tunisie, Etait-il apparu en public sou ou drogué pour cacher les douleurs de sa maladie comme l’a fait Boris Eltsine de Russie, se serait-il absenté en laissant l’intérim à son frère comme l’a fait Fidel Castro de Cuba, aurait-il favorisé un de ses proche pour prendre la présidence du parti dont il a la charge comme a fait Hosni Moubarak etc., absolument rien de tout cela, alors en quoi les algériens seraient-ils concernés par ses problèmes intimes ? Par contre, la situation économique du pays devra les préoccuper et elle est effectivement très préoccupante. Voilà plus de treize ans que les gouvernements successifs sous la présidence de Bouteflika n’ont pas réussi à asseoir une stratégie à même de sortir le pays de la forte dépendance des hydrocarbures. C’est un constat d’échec indiscutable. Il peut évoquer les raisons qu’il voudra pour le justifier, cela ne changera rien à la situation. Il n’a pas pu, il aurait du quitter le pouvoir depuis longtemps il l’a pas fait. Maintenant, il a compris qu’il doit passer la main à d’autres tout simplement.
On n’a pas vu de pays juger leurs présidents pour un échec de démarche, il faut donc assumer. Dieu merci, l’Algérie n’est pas comme la Syrie de Hafedh El Assad ou l’Irak de Sadam Hossein où se pratiquent des massacres collectifs dans lesquels, il est impossible de laisser partir leurs leaders sans les faire payer. Nonobstant la décennie noire durant laquelle la responsabilité est peut être collective, les régimes Algériens ont brillé par des coups fourrés, des éliminations physiques qui se comptent au bout des doigts, des abus de pouvoir, l’arbitraire, et l’enrichissement illégal par des détournements de fonds publics sur le dos de la population. Pour tout cela, il reste très difficile de situer avec exactitude la responsabilité sinon de s’en remettre à Dieu. Donc s’attendre à ce que les responsables rendent des comptes serait se leurrer, Il faut donc commencer à oublier Bouteflika et préparer la relève qu’il faudrait orienter vers le volet économique. La situation dans laquelle se trouve actuellement le pays exige du charisme, de la vision et la bonne combinaison de l’autorité, du pouvoir et de la responsabilité pour mener la force de travail vers un objectif clairement défini et précis. Le futur président devra trouver les moyens pour réhabiliter l’autorité régalienne bafouée par le système, stimuler la confiance pour remettre les gens au travail et renouer avec la croissance hors hydrocarbures, réorienter le secteur privé vers des tâches plus créatrices et enfin disposer d’un programme à même de redresser les orientations économiques actuelles. Voilà une démarche productive au lieu de perdre son temps dans des supputations aseptiques.
* Consultant, Economiste Pétrolier
20 septembre 2012
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