…PORTRAIT…
Je connais Ali Fergani depuis toujours, exactement depuis que j’étais au Lycée Thalibiya d’Hussein Dey et lui vedette de notre équipe fanion, le NAHD. Je le connaissais de loin mais déjà j’admirais sa pose de fils de famille, toujours tiré à quatre épingles, ne répugnant pas à faire causette avec les jeunes lycéens qu’on était. On le saluait, il répondait, on lui souriait, il répondait, et même si on ne le saluait point et on ne lui souriait point, il saluait et souriait quand même. Un morceau de sucre que cet homme qui résumait en lui la quintessence du footballeur algérien : doué mais point cancre à l’école puisqu’il faisait architecture, vedette mais sans rouler des mécaniques. Plus tard, lui capitaine de l’équipe nationale et moi journaliste, nous avons appris à mieux nous connaître. J’ai découvert d’autres qualités : la rectitude, l’honnêteté et, ce qui est rare dans ce milieu, l’absence totale d’envie, de jalousie et de médisances. Bien au contraire, il mettait en valeur ses coéquipiers. Il était le boss, mais aussi, quand les circonstances l’exigent, le grand frère qui écoute, console, guide et décide. Jusqu’à aujourd’hui les Verts sont orphelins d’un capitaine comme lui.
Au fil des matches, des voyages et des rencontres, nous sommes devenus amis. Mais comme toute amitié s’éprouve dans l’épreuve, les circonstances m’ont permis d’expérimenter, malgré moi, malgré lui, la solidité de nos liens. Il était alors entraîneur au Maroc, à Mohammedia, une riante bourgade près de Casa. Il vivait en famille. J’étais seul. C’était le Ramadhan. Ayant appris que je venais d’arriver, il me chercha dans tous les hôtels de la ville jusqu’à ce qu’il me trouve. Il m’invita chez-lui pour le f’tour une fois, deux fois, trois fois, quatre fois… Ma gêne n’avait d’égale que ma peur de déranger. Je décidais de ne plus venir chez lui. Il me fallait un prétexte. En prenant un jour congé de lui, je le remerciais pour sa gentillesse et le priait de ne pas m’attendre pour le f’tour du lendemain. Il insista pour savoir si j’étais vraiment invité ailleurs. Je lui jurai sur toutes les chères têtes -adieu ces têtes !- que j’étais vraiment invité chez des amis marocains. Et pour faire plus vrai que vrai, je citais un nom. Il a fait semblant de me croire. Le lendemain, alors que j’étais dans ma chambre attendant l’appel du muezzin pour que j’aille dans un restaurant, voilà qu’on frappe à la porte. Qui était-ce ? Comme on n’est jamais tranquille que dans son pays, je pensais avec quelques inquiétudes que c’était la police. Pire, c’était Fergani faussement courroucé. “Je savais que tu n’étais invité nulle part ! Qu’est-ce que c’est que ces manières, hein dis-moi ? On se gêne maintenant entre nous ? Allez on y va, tu mérites qu’on te mette à l’eau et au pain. Plumitif, va ! “ Depuis, Ali Fergani est resté proche de moi même si on se voit rarement, me prouvant à chaque fois combien sont rares les gens comme lui. Merci mon ami…
H. G.
hagrine@gmail.com
19 septembre 2012
Personnalités