Dès l’aurore de sa vie, l’être humain avait senti le besoin instinctif de transmettre son savoir et son savoir-faire à sa progéniture. Ainsi, l’humanité léguait continuellement, dans un relais générationnel, les fondements qui faisaient clore les bourgeons de différentes civilisations ayant caractérisé le sablier séculaire. Nombreux furent les penseurs, depuis les philosophes de la Grèce antique aux sociologues de la renaissance, qui se penchèrent que la problématique de l’éducation et épluchèrent les procédés pédagogiques pour en extraire le pollen magique qui refermait la force miraculeuse transformant la ruche sociétale de sorte qu’elle se métamorphose en civilisation puissante et prospère et dont le miel est aux mille et un bienfaits
Le XX° siècle, quant à lui, connut un foisonnement d’idées accouchées par une foultitude de gestations des chercheurs principalement dans la psychopédagogie et les sciences didactiques dont la finalité avait pour horizon claire et unique de donner naissance à une société exemplaire voire une « Cité idéale »(2).
L’école algérienne qui a su relever le défi, dès l’aube de l’indépendance, pour instaurer les bases sacrées de la démocratie de l’enseignement, avait pu accoucher durant le fleurissement des années soixante dix et la floraison des années quatre vingt, une génération de « produits » d’une qualité concurrentielle, lesquels, étalés sur les grandes surfaces universitaires occidentales avaient même la capacité élogieuse d’étouffer par leurs scintillements les plus éblouissants astres qui dominaient l’espace des connaissances
En effet, cette bonne vielle école, à la doctrine «L’éducation est pour l’enfance ce qu’est l’eau pour une plante.»(3) avait, rien que par son tableau noir et sa craie blanche, la capacité et était en mesure de «produire » une ressource humaine dont la qualité tenait compte, non seulement du besoin du passage du noir de la nuit coloniale à la blancheur du jour de l’indépendance, mais se préoccupait dans sa « fabrication » des facteurs ; éducationnels, scientifiques, civiques, morales, religieux etc. au point où on lui avait prédit, durant les somptueuses années soixante dix, un avenir prospère et un positionnement avec les pays développés au courant des années quatre vingt dix, soit vingt années après !
Que s’est-il passé ? Pourquoi l’Algérie de Malek BENABI n’avait pas atteint l’objectif prévu ? Et comment voire pourquoi la terre d’Ibn BADIS avait-elle succombé sous la menace terroriste ?
Beaucoup de questions légitimes se posent de facto pour ce polygone étoilé dont la position géostratégique et ses richesses qui ont toujours été – et le sont encore convoitées par des colonisations « civilisatrices ! » en relais, depuis que le jour doit beaucoup aux nuits des gladiateurs romains jusqu’à celles des troupes de Bugeaud
Cependant, le sésame de l’énigme ne réside-t-il pas dans le labyrinthique système adopté par l’éducation nationale ? L’école fondamentale, ou comme aime à ironiser le commun des badauds « fawda-mentale », qui avait détrôné l’ancien système classique n’a à ce jour pas su accoster sur une terre ferme voire à bon port ! Il ne faut pas être un psychopédagogue, sociologue ou didacticien pour constater son échec flagrant – quoiqu’en disent les chiffres miracle de poussière afghane qui pulvérisa las chars soviétiques tant les « produits » étalés sur les bancs des amphithéâtres, des ateliers de la formations professionnelle ou faisant éternellement la queue aux niveaux des files d’attentes caractérisant l’ANSEJ, les consulats étrangers et que sais-je , sont, exception faite – euphémisme oblige – des haraga, explicitement « No comment» !
Le highlander «Zid ya Bouzid», que bon nombre croyait indétrônable, s’est finalement avéré éphémère Quel héritage a-t-il laissé ou légué ? Quelle crédibilité ont «ses» diplômes (6°, BEF et BAC)? Les chiffres pompeusement annoncés vingt années durant, par une école en crise (lire les trois paliers) avaient-il un sens qui dépassait les statistiques ramadhanesques ?
Un grand chantier, plus lourd que celui incombant au présidentiable Est/Ouest, attend le nouveau premier pédagogue de l’éducation nationale Allah ikoun Fel aaoun ! Surtout quand on nous raconte qu’une fille, très bonne élève du primaire, vient à son père, toute joyeuse lui annoncer son vœux de devenir une institutrice. Quand son père, tout content de ce profil semant le savoir à tous vents, lui demanda le pourquoi, elle lui répondit qu’elle veut être servie comme sa maitresse. En effet, cette dernière avait chargé cette très bonne élève, en plus de la responsabilité de la classe quand elle s’absentait pour des quart d’heure dubitatifs, de lui apporter en classe un plat «arraché» de la cantine scolaire, caractérisé par les morceaux de viande pêchés dans la sauce «el ma wa zgharit» servie aux futurs hommes et femmes de la nation et orné d’une grande quantité de fruits Il ne faut donc plus blâmer voire condamner le parcours de combattant, au ticket à un dinar vingt, au sein des de ces restos universitaires où bon nombre de pensionnaires parasites (de l’exécution jusqu’au cadre supérieur) s’engraissent faisant fi d’un quelconque cholestérol financier ! Comment on «ferme» les cursus universitaires pour en obtenir des diplômes de rattrapage et replâtrage, c’est un autre épineux sujet Montaigne avait dit, voilà cinq siècles passés «Mieux vaut une tête bien faite, plutôt qu’une tête bien remplie»(4)
- Avons-nous les moyens matériels et humains pour ressusciter l’école algérienne d’antan qui produisait des génies aux esprits critiques créatifs ?
Avons-nous assez de mémoires et de thèses «algérianisés» ayant traité les problématiques de l’éducation ?
- Avons-nous une vision lointaine qui dépasse les conflits d’intérêts politico-financiers voire la vision partisane des opportunistes caméléonesques qui sautillent de la grenouille à l’éléphant ?
- Nos prophètes auront-ils des revendications soucieuses d’une pédagogie prometteuse, autres que celles, il est vrai légitimes, socioprofessionnelles – Cours de soutien payants obligent ! qui prirent comme otages des élèves en plein naufrage ?
Le devenir de toute une nation, qui a « généreusement » sacrifié des millions d’âmes, depuis l’ancienne Numidie jusqu’à la contemporaine Algérie, est encore emprisonné sur les cahiers d’écoliers, sur les pupitres et les ardoises Son bonheur est là-dedans, courons y vite, courons y vite, il va filer !
* Parent d’élève préoccupé par le devenir de sa relève
Notes :
1- John Dewey (1859 1952), philosophe et pédagogue américain
2- la Cité idéale, rêvée entre autres par les philosophes grecques est une conception urbanistique visant à la perfection architecturale et humaine. Elle aspire à bâtir et à faire vivre en harmonie une organisation sociale singulière basée sur certains préceptes moraux et politiques.
3- La Rochefoucauld-Doudeauville ; Livre des pensées, 8 – 1861.
4- Michèl de Montaigne, Les Essais, « de l’éducation ».
13 septembre 2012
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