Ca y est, on s’est de nouveau souvenu de nous. De notre crasse et inutile existence. De nos adresses et de nos cartes de vote. El-Mouradia nous a convoqués, sentencieusement, pour nous réveiller le 29 novembre prochain, laver nos sales figures, si d’aventure l’eau coulait dans les robinets, pour ceux qui ont un robinet, et prendre la direction des bureaux et centres de vote mis à la disposition de nos voix. Because, l’Algérie va renouveler ses élus locaux et dépoussiérer ses mairies. En l’espace de six mois, l’Algérien sera dérangé dans sa morne quiétude et on va le chasser jusqu’au tréfonds de son ennui pour participer à un autre scrutin qui ne l’intéresse ni de près son douar ni de loin sa wilaya. Alors qu’il n’a rien demandé, alors que les prix montent sur son dos, alors que le chômage se fout des chiffres officiels du ministère de l’embauche et qu’il assiste impuissant à des vagues déferlantes de scandales et d’affaires scabreuses sans qu’un haut responsable ne soit inquiété, on vient derechef lui réclamer de perdre son temps et de jouer aux voyeurs. L’Algérien est appelé à renouveller les APC et les APW. Oui, mais pourquoi ? Pour quelle raison va-t-on encore dépenser une fortune pour élire des personnes qui, une fois installées derrière le portrait du président, oublient d’où elles viennent ? Une impression dérangeante d’un remake joué tous les cinq ans avec pour le rôle du dindon de la farce, le citoyen. Le peuple qu’on gave de promesses, c’est du passé, et les prochains candidats à ces élections ne pourront même plus utiliser ce joker. On ne peut plus mentir aux gens, sauf en cadrant serrées les images devant les centres de vote pour entretenir l’illusion. A force de lui jouer les mêmes scènes, de tenir les mêmes discours démagogiques et populistes, le peuple a fini par s’agacer, ne plus croire et ne plus s’intéresser à ces bouches avides et insatiables. Des partis politiques, les mêmes, éternels, coupés de la rue et prenant leurs ordres d’en haut. Des programmes électoraux aussi indigents qu’irréalistes. Des têtes recyclées et des CV bancals. Un discours oiseux, rédigé par un scribe du 15e siècle, inaudible et incompréhensible. Islamistes BCBG, démocrates en carton-pâte, républicains salariés, commis de l’Etat, barbus kholisés, on aura droit à la totale. Et de toute façon, les jeux sont déjà faits et les sièges dispatchés entre les sigles et, à la limite, l’appel au peuple n’est là que pour amuser la galerie. Faire semblant de s’intéresser à son avis et à donner le change aux yeux qui nous épient.
3 septembre 2012
Moncef Wafi