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Larbi : «le Maghreb zuni, c’est pas demain la vieille…» Premier ramadhan sans notre ami Azzouz ————————————————-

3 août 2012

Farid Talbi

Décédé l’an dernier, après un dernier exploit honorant la communauté en général, un douar près de M’sila en particulier. Lieu dit, connu sous le nom de « Dinazzah Felfili ». A quatre vingt deux balais passés, dont soixante cinq d‘immigration continue en célibataire endurci,  Azzouz s’était fait piéger. Il avait fini par épouser une rifaine des reggada, de cinquante ans plus jeune. Mahdjoubia bent Baba Zouina-Thalitha (beaucoup de numéros dans les patronymes dans le coin). 
Après observation de la concernée , Azzouz déclenche  un libidineux incendiaire codes/phares de l’œil gauche, pendant que l’œil droit agissait séparément comme rayons X pour transpercer par balayage, à distance, les vêtements de la promise. Donc surtout s’assurer du contenu généreux de l’emballage. Et çà mon ami, fallait voir le laser pour le croire. La fierté nationale t’envahit. Un frère du bled, de cet âge, grabataire, mais encore opérationnel du bâton de pèlerin menaçant, chapeau !.
T’inquiètes pour Mahdjoubia, elle en avait de la jugeotte et de l‘expérience. A peine avait-t-elle esquissé deux pas de la fameuse danse de la mariée de l’Atlas, projetant impudiquement alentours sa surcharge pondérale et d’énormes glandes mammaires avant retour de la marchandise à l’expéditrice et en bonne place (olé !!), qu’Azzouz s’enflamma. Presque à faire fondre les bijoux de famille que le retraité avait déjà, heureusement placés en prévision d‘une réutilisation, au frais dans un sac en plastic, sous un genou. C‘est dire ! Et Azzouz en transes de chanter «One, too, tree…» à tue tête, juste au moment où garait,  boulevard Victor Hugo, un car bondé de voyageurs provenant de Darhas Azemour, un patelin  entre Agadir et Tiznit : 44 places théoriques 220 personnes d‘embarquées, 14 tonnes de bagages à mains, dont sept de fourbis spécialités locales. Voilà que  tout s’explique. Si Azzouz n’avait pas osé la provocation avec ce refrain (one ,too,tree…) de stade, jamais les équipes de foot du Maroc n’auraient eu à le savoir et se venger plus tard, aussi méchamment, chaque fois de quatre buts dans le panier. L’effet papillon en quelque sort.
Donc Azzouz se maria et nous fûmes de la cérémonie. Or l’affaire prit une tournure inattendue. Zohra une vieille et veuve voisine d’origine tunisienne, profitant de la crédulité d’Azzouz un soir d‘ébats conjugaux inachevés et tumultueux, lui conseilla d’adopter un orphelin à l’occasion pour gagner, par là même, les grâces d’une providence, au Maghreb  chargée de tout. Justement Zohra avait un arrière petit neveu de cinq ans, selon elle,  Habibou, correspondant au gosse recherché, résidant au bled plus bas géographiquement que Tataouine, à la frontière avec les pays du Sud. Le gamin parlait un patois local  uniquement pratiqué par les contrebandiers et quelques gradés douaniers cultivés , fervents adeptes de Lavoisier (rien ne se perd…).
On réussit à ramener le petit à Paris chez ses parents adoptifs, le régulariser, le scolariser. Et là miracle : le gosse premier en français histoire, musique, sport, considéré comme surdoué, se vit placé en un an, vers deux classes supérieures. Seul problème, en dehors de l’enseignement, l’enfant ne communiquait que dans son patois inconnu. Et incompréhensible.
La communauté maghrébine en était fière de son petit génie. Or, tout s’écroula un sombre jour d’octobre où, visite médicale scolaire oblige, le praticien glissa négligemment la main experte là où se contrôle l’hernie des coucougnettes. Le médecin marqua net un temps d’arrêt, écarquilla les yeux, suffoqua de stupeur, poussant un cri d’horreur, entendu à des kilomètres à la ronde : le petit Habibou s’en tenait un  véritable flexible de pompe à essence (volucompteur pour les usagers) dans le short…
En fait quand on ramena un interprète (un targui, taxiphone itinérant…), le gosse expliqua qu’il était effectivement tunisien, vraiment nain, grand père d‘une quarantaine de petits enfants (tous prénommés Slim ou Habib), ex prof de philologie créto-phénicienne dans une  ZEP de la banlieue sud de Gabès. Et avait cru, par le moyen de l’adoption, obtenir une carte de résident etc…Zohra l’avait escroqué au passage ! Comme d’hab’, une coutume régionale  !
Larbi, mon copain l’émigré retraité a résumé l’affaire : « le Maghreb zuni, c’est pas demain la vieille ! Azzouz qui croye faire sur le final une bonne affaire, s’est fait bananer par Mahdjoubia de l’Atlas qui l’a chauffé, qui se sont faits possédés par Zohra de Tataouine qui les a entubés !  » .
Habibou a rejoint son douar, chantonnant sur la dune , 50 ° à l’ombre, le refrain appris à l’école française, «il pleut, il pleut bergère…». En y croyant naïvement ..

Azzouz est décédé. Un brave homme, paix à son âme.

 
Farid Talbi

 

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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