Pour mieux cerner l’historique de la Fédération de France, il faut remonter au 17 janvier 1955, une époque ou le MTLD était bien implanté, parmi les Algériens immigrés. Les militants du MTLD sont généralement fichés, connus de la police et de la DST car le parti de Messali, officiellement déclaré, était pénétré par des informateurs.
C’est ce parti qui va subir le premier choc policier après sa dissolution en novembre 1954. Les immigrés sont, la plupart du temps, regroupés dans des quartiers définis ou des bidonvilles de banlieue constituant des ghettos malsains, difficilement accessibles, à la police qui pouvait se perdre, aussi ne pouvait-elle contrôlée efficacement ces sortes de labyrinthes d’habitations. C’est l’époque ou les cafés maures et les hôtels arabes, deviendront des lieux de ralliement et de points forts pour l’un ou l’autre parti qui se disputaient l’immigration. Les établissements sont mis à sac, attaqués avec des armes à feu, des armes blanches par des « éléments troubles » comme titre la presse de l’époque qui parle de « règlement de comptes entre Nord- Africains ». Au départ, le FLN va très vite étendre son champ d’action en s’imposant sur toute la population nord-africaine résidente en France Pourtant les indices ne manquent pas, ni même les preuves flagrantes de l’existence en France d’un mouvement émanant du FLN, qui deviendra central et l’organisateur de nouveau réseaux à l’intérieur de la métropole. Pour arriver à une certaine maturé politique, le FLN sur le plan organisationnel, il recrutera dans le milieu de l’immigration. L’ossature de cette nouvelle organisation qui deviendra la Fédération de France, sera composée par des ex- militants très engagés du parti de Messali. Ils vont fournir l’ossature du mouvement qui s’installera en métropole, du fait qu’ils connaissent parfaitement les méthodes et les hommes du MNA avec leur connaissance et leur dynamisme leur permettront de rallier le FLN. La fédération FLN de France se constituera dès le début de 1955 malgré les difficultés inhérentes à la constitution d’un mouvement clandestin, au cœur même d’un territoire ennemi. Dès avril 1955 plusieurs responsables dont Terbouche sont arrêtés; la fédération n’en disparaît pas pour autant, au contraire, elle renforce son état-major et augmente ses effectifs. Se posent d’abord les problèmes de liaison avec l’extérieur, avec le commandement de la Révolution qui ne semble guère coordonné; il fallait tout d’abord choisir entre Boudiaf au Caire, ou Abane Ramdane à Alger.
La fédération de France reste pour les forces de l’ordre une nébuleuse indéfinissable, mouvante, complexe, très difficile à pénétrer
Les réactions policières sont loin d’être négligeables; l’action de la DST provoque de sérieux dégâts dans les rangs de l’état-major métropolitain du FLN. Celui-ci est sérieusement handicapé par les arrestations d’avril 1955 puis par celles d’août 1956. En février 1957, la presse annonce que « le FLN en France est décapité ». Les actions policières s’en prennent surtout aux dirigeants dont les déplacements trop fréquents, l’absence de moyens d’existence contrôlables attirait l’attention mais, sur le terrain, l’organisation de la fédération de France reste pour les forces de l’ordre une nébuleuse indéfinissable, mouvante, complexe, très difficile à pénétrer. En juin 1957, Amar Boudaoud succéde à Mourad Terbouche et à Mohamed Lebjaoui, comme nous l’avons évoqué dans notre précédente édition de mercredi, et devient responsable de la Fédération de France. Le FLN comptait déjà plus 20.000 adhérents en métropole; et les collectes de fonds, rapportaient mensuellement plus de 20 millions (anciens francs). Il mettra en place ce que l’on appellera désormais l’organisation politico -administrative, d’où l’établissement des contacts avec les Européens anticolonialistes. Trois wilayas partagent l’hexagone, la une région parisienne étendue à la Bretagne et la Normandie, la 2 centre qui comprend Marseille, Bordeaux, Lyon, la 3 nord et est (et belgique). Chaque région, disposait de groupes armés baptisés groupes de choc ou fedayin. Ces éléments composés d’hommes sûrs sont destinés aux opérations contre les forces de l’ordre, dés les premiers temps La lutte pour le pouvoir, donc pour la prise en main de la masse nord-africaine, s’étend sur tout le territoire .avec le MNA.
L’immigration algérienne, édifice fondamental de la Fédération de France
Le 1er mai est l’occasion de violentes manifestations de Nord- Africains à Lille et à Maubeuge; elles font 30 blessés parmi les policiers du service d’ordre. Le même jour, 1 500 membres du MNA attaquent à Vincennes une manifestation du PCF qu’ils accusent de trahison. A Paris et dans plusieurs villes de l’Est, la police entreprend d’importantes opérations de contrôle dans les regroupements nord-africains. Le même jour, à Livry-Gargan, un Algérien est tué; attaqué pour la deuxième fois, il avait auparavant repoussé une trentaine d’agresseurs au fusil de chasse. Le 31 mai, un café maure de Saint-Denis est attaqué par une centaine d’Algériens après une première tentative la semaine précédente. Le 1er juillet, plusieurs membres de l’état-major FLN sont arrêtés à Paris, 6 millions de francs sont saisis. En août, le commissariat du 18e arrondissement est pris à partie par plus d’un millier d’Algériens qui saccagent également une quarantaine de commerces voisins. L’intervention de renforts de police coûte 15 blessés aux agresseurs. La Fédération de France du FLN comptait 15 000 militants implantés au sein de l’immigration algérienne. « Avant la guerre d’Algérie, écrit l’historien Benjamin Stora, les ouvriers exilés mènent une double existence. Une fois les sirènes des entreprises éteintes, l’existence du militant débutait. Le Parti populaire algérien-Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (PPA-MTLD), qui a succédé à l’Étoile nord-africaine, fondée en 1924 au sein de l’immigration algérienne par Messali Hadj (15 000 militants), « est alors le seul mouvement nationaliste moderne et constitue également une école formidable, ajoute Stora. On y apprend à lire, mais le parti suscite également des débats sur le communisme, sur la révolution nassérienne, sur le rapport à la France ou avec le syndicalisme » C’est au sein de cette immigration algérienne dont l’histoire est caractérisée par une violence extrême, une histoire bien différente de celle des immigrés en provenance des autres pays du Maghreb et d’Afrique, que le FLN, minoritaire en 1955, va s’imposer par la force contre son rival le MNA (Mouvement national algérien), En parallèle, le FLN mène une lutte tout aussi impitoyable contre les services de police français, appuyés par des harkis venus en France sur les conseils de Maurice Papon. À Paris, la Force de police auxiliaire (FPA), composée de 400 harkis, agit hors de tout contrôle : on torture et on fait disparaître des détenus dans les commissariats du 13e et du 18e arrondissement Afin de dénoncer le couvre-feu imposé aux Algériens, il lance un appel à manifester à Paris, le 17 octobre 1961. La manifestation pacifique sera sauvagement réprimée et fera entre 200 et 300 morts. Le FLN en France, c’était aussi l’argent récolté au sein de l’immigration – plus d’un milliard de centimes de l’époque par mois –, autant que l’aide fournie par les pays arabes. Il a su surtout, grâce à une politique intelligente, rallier les artistes et les intellectuels et une majorité de Français à la cause algérienne.
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2 août 2012
Benyahia Aek, Guerre d-ALGERIE