Chronique du jour : ICI MIEUX QUE LA-BAS
arezkimetref@free.fr
Ce qu’il y a de fabuleux, c’est que ni la canicule, ni le Ramadan, ni même l’alchimie explosive que forment l’un et l’autre, n’empêchent le théâtre d’ombres politique de se jouer. Qu’importe si, pris par la nécessité de se protéger de l’insolation et des coups de sang, et de rendre le jeûne le moins insupportable possible, nous autres citoyens n’en avons cure. Tu ne vois pas de quoi je cause ? Ça tombe bien, moi non plus ! Non, sérieux !
Entre la pression de M. Celsius et celle des appels subliminaux de l’estomac, comment veux-tu accorder un intérêt lucide à cette information parue dans ce même canard le 23 juillet ? Que nous dit-elle ? Eh bien que le projet de révision constitutionnelle prévoit un vice-président. Evidemment, dans l’absolu, et bien que procédant de cette conception détestable et infantilisante de la politique consistant à ce que tout se passe dans la sphère privatisée du pouvoir, l’information aurait eu, en d’autres circonstances, un certain impact. Mais là, franchement !… Un peu d’ombre, un peu d’eau… Et vogue la galère ! J’ai quand même lu le papier de mon confrère Kamel Amarni. Comme d’habitude avec les «sources bien informées», ce qui niche entre les lignes est aussi sinon plus important que ce qui se trimballe sur les lignes. On nous apprend comme ça que la révision constitutionnelle qui surviendra probablement courant 2013, sans plus de précision, reviendra à la limitation des mandats à 2 successifs, et consitutionnalisera un poste de vice-président. Un commentaire sur le premier fait. La Constitution de 1996 que Liamine Zeroual avait fait élaborer était la plus avancée du «monde arabe» puisqu’elle limitait les mandats présidentiels à deux successifs et posait un verrou pour la tentation de la présidence à vie. L’arrivée de Bouteflika au pouvoir et la contagion despotique de la présidence à vie ont conduit à une campagne absolument délirante menée notamment par Belkhadem, dont on devrait relire les arguments aujourd’hui. Cette campagne a été suivie d’un référendum maison qui a en deux temps trois mouvements supprimé la limitation et ouvert à Bouteflika la présidence à vie. Manque de pot, c’est à ce moment-là, à l’instant où Bouteflika s’est mis sur la même ligne de départ que ses homologues arabes que les peuples se sont levés pour crier : «Basta !» Ils ont dégagé vite fait les impétrants du club des présidents à vie. Exit Ben Ali, Kadhafi, Moubarak and co ! Bouche cousue, et il y avait de quoi, les fans de Bouteflika font machine arrière allant jusqu’à imputer à de fantomatiques ennemis les rodomontades en faveur de la présidence à vie qu’ils avaient eux-mêmes proférées. Et là, nous y voilà ! Faut revenir aux deux mandats successifs, ça fait plus «Printemps-arabe», mon vieux ! Et si accessoirement, ça permet une survie au pouvoir, c’est deux en un, donc tout bénéfice ! Que tu le veuilles ou non, il faut stopper à deux mandats ! Dans bien des cas, et c’est le cas, c’est déjà énorme ! Et le vice-président, ça fait aussi «Printempsarabe » ? Apparemment, si on déchiffre les hiéroglyphes entre les lignes des confidences de la «source», un vice-président, c’est surtout une réponse à une double cuisine interne. Un : plutôt qu’un second de Bouteflika, il en serait la doublure. Celle qui ferait les cascades ! Il devrait assurer l’activité routinière qui témoigne de l’exercice effectif du pouvoir dont Bouteflika se trouve privé depuis sa maladie en 2005. C’est donc davantage une doublure que d’un vice-président dont a besoin le pouvoir actuel. Deux : s’il faut, comme le souligne la «source» du Soir d’Algérie, un homme qui fasse le consensus entre Bouteflika et la haute hiérarchie militaire, c’est que ça doit grincer là-haut. De ce fait, un vice-président savamment choisi, ce serait utile pour une éventuelle transition dans la continuité. L’oiseau rare, sur lequel les deux têtes du pouvoir semblent s’accorder, a été trouvé. La «source» l’affirme mais ne donne pas le nom qui doit circuler d’ores et déjà dans les travées du pouvoir et de ses environs. Concours de l’été : le premier lecteur à nous envoyer ce nom gagnera de passer le 27e jour du Ramadan, la nuit du destin, à In Salah où la météo prévoit 47° à l’ombre ! Sérieux… Les confidences de la «source» nous révèlent que la désignation d’un vice-président consiste à donner latitude à Bouteflika de remettre les clés de la maison à un homme de confiance en cas de départ impromptu. On comprend dès lors que la hiérarchie militaire adoube le dauphin. Ceci, tu vois, aurait été une grande nouvelle si elle avait procédé d’un changement profond dans la façon de faire de la politique dans ce bled et dans l’architecture du pouvoir, l’une et l’autre ayant besoin d’être d’abord déprivatisées avant d’être démocratisées. Mais non ce n’est pas le cas. C’est pourquoi, on te balance l’info en pleine canicule et en plein Ramadan. Ce n’est même pas une douche froide !
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/07/29/article.php?sid=137240&cid=8
30 juillet 2012
Arezki Metref