Il a également conféré au courant politique de l’extrême droite française le futur rôle de chef de file de l’opposition. L’échec annoncé au second tour, par les dernières enquêtes d’opinions effectuées à la sortie des urnes, provoquera probablement une reconfiguration de la droite parlementaire aux prochaines élections législatives au profit de l’extrême droite française qui devra siéger confortablement à l’assemblée française.
La constitution d’un bloc ancré à la gauche du Parti Socialiste a été l’autre surprise de ce premier tour. Crédité d’un bon score, le leader du Front de Gauche, constitué avec le Parti Communiste Français, a fait de la lutte contre les idées de l’extrême droite et de la dénonciation de la main basse des marchés financiers sur l’économie française le leitmotiv de sa campagne électorale. Sauf retournement de situation et report massif en sa faveur des voix du centre et de l’extrême droite, qui sera plus difficile à obtenir que celui qui semble se profiler au profit du candidat socialiste, le candidat sortant semble payer le bilan d’une politique économique injuste, aggravée certes par un contexte de déliquescence de l’économie occidentale, dont les effets pervers ont été surtout subis par les classes populaires et une partie des classes moyennes et dont la stratégie de confiscation des thèmes de l’extrême droite s’est avérée, cette fois-ci et contrairement à l’élection de 2007, un cuisant échec.
Ce courant politique semble désormais s’installer dans la durée d’autant plus que son électorat dépasse largement le socle traditionnel acquis aux idées de l’extrême droite mais réussit à capter une nouvelle catégorie d’électeurs composée notamment de salariés et autres habitants des zones rurales. La Présidente du Front National a, au cours d’une campagne électorale menée au pas de charge, stigmatisé les élites, défendu avec acharnement le pouvoir d’achat des classes populaires et soutenu avec ferveur l’idée de la nation française contre les lobbies de la mondialisation, le diktat des marchés financiers et les concessions de souveraineté, faites selon elle par le candidat sortant, au profit des structures supranationales.
Ce dernier devra donc, pour espérer être reconduit dans ses fonctions, convaincre les indécis et faire et surtout réussir le grand écart entre une extrême droite, dont l’ancien Chef charismatique lui voue un mépris notoire et un centre dont le Chef ne lui pardonnera sans doute pas d’avoir fragmenté son courant et encouragé à la création d’autres formations se réclamant de la même obédience.
La tentation de muscler le discours notamment à l’égard de l’immigration ressurgira, sans doute, à l’occasion de la campagne du second tour d’autant plus que le candidat sortant dit avoir pris acte des angoisses des électeurs, notamment ceux qui n’ont pas voté pour lui, qui, selon lui, «portent sur le respect des frontières, la lutte déterminée contre les délocalisations, la maîtrise de l’immigration, la valorisation du travail et la sécurité». La tâche sera rude, même si pour ne pas effrayer les électeurs du centre, d’anciens membres du gouvernement français, d’origine arabe notamment et qui non pas de complexes vis-à-vis de la sémantique de l’extrême-droite, sont rappelés en renfort après avoir, faut-il le préciser, été congédiés du devant de la scène politique.
Le second tour de l’élection présidentielle française aura lieu le 06 mai prochain et la confrontation entre le bilan d’un président sortant et le projet d’un président en devenir s’annonce sans équivoque et sans concessions.
Mais ce qui pourrait retenir le plus notre attention de ce coté-ci de la méditerranée et du point de vue du quinquennat qui s’achève en France, est incontestablement une relation algéro-française qui a été, et c’est le moins que l’on puisse dire, tumultueuse. Un partenariat économique qui n’a pas atteint le statut que les deux rives souhaitaient lui conférer, des investissement stratégiques effectués ailleurs qu’en Algérie, une politique étrangère dont le socle aura été cette stratégie récurrente, mais non couronnée de succès, d’isolement de l’Algérie et d’endiguement de son émergence, une lecture hostile de l’histoire de la colonisation française de l’Algérie et une jonction permanente avec les idées les plus farfelues notamment celles qui jusqu’à présent contestent l’indépendance de l’Algérie auront constitué les éléments caractéristiques de cette mandature.
Avant ce second tour qui vient, l’acte symbolique majeur du candidat socialiste à la Présidence de la République Française, qu’il faudra aussi retenir et qui augure peut-être d’une nouvelle perspective de la relation algéro-française, a été sans aucun doute cette gerbe de fleurs déposée le 17 octobre 2011 sur le pont de Clichy-La-Garenne en hommage aux Algériens jetés dans la seine en 1961.
Cette incursion dans la conjoncture de l’hexagone et de son élection présidentielle ne nous fera pas oublier cependant que seules nos propres perspectives politiques sont et seront la clé de notre émergence. Espérons, dans ce contexte, que la participation aux élections législatives qui seront les nôtres le 10 mai 2012 sera massive car la nécessité d’une seconde république, qui devra naitre délestée de toutes les tares du passé, doit bien commencer par quelque chose !
26 avril 2012
Salim Metref