(Par S. Hammoum). Rachid Boudjedra a animé une conférence-débat jeudi à Bouzeguène en tant qu’invité des Mois littéraires de l’association Igelfan avec son épouse Michèle.
Sur Tahar Ouettar et Yasmina Khadra : Répondant à une avalanche de questions sur ses pairs de la littérature algérienne, le conférencier qui ne cache pas son admiration pour l’écriture de Kateb, son modèle algérien, fustigera Ouettar, «un opportuniste de tous les courants» dont il n’oubliera pas ce qu’il a dit à la mort de Djaout et de Sebti : «Tahar Ouettar est nul, un méchant, un khabith ». Qualifiant l’entrée de Assia Djebbar à l’Académie française de non-événement, l’auteur de FIS de la haine répond que la littérature de Yasmina Khadra est mineure».Rachid Boudjedra explique qu’en racontant une histoire avec des zigzags et des flashs-back, il ne fait que refléter la complexité de la vie.
Sur l’histoire : «L’Algérie a été conquise par les musulmans non par les Arabes, c’est une conquête musulmane réussie car les autres conquêtes n’avaient pas d’idéologie. L’Arabe est innocent dans cette conquête ». La francophonie ? «Elle est truffée de coquetterie», concède l’écrivain qui estime qu’au Canada, elle aura plus de chance de se rallier les suffrages algériens de par sa neutralité. L’humour et le côté épicurien apportés dans certains romans tragiques, c’est pour dénouer le drame et pour que le tragique ne l’emporte pas, explique le conférencier qui se décrit comme quelqu’un de très triste au fond : «C’est d’ailleurs toujours une partie de moi que je décris dans les personnages de mes romans.»
Sur ses projets : Révélant qu’il est en train d’écrire son roman sur la guerre d’Algérie qui commencera en 1830 et se terminera en 2008, il indiquera que dans «le démantèlement, c’est une partie de la guerre d’Algérie qui est traitée», faisant ce constat que «le FLN a fait la Révolution, il ne peut faire désormais que de la corruption». Boudjedra, moudjahid lui-même, salue la mémoire des combattants qui ont rejoint les rangs du peuple après l’Indépendance. Parlant de son expérience de scénariste, l’écrivain confie qu’il écrit de manière cinématographique, réfléchissant en plans et estimant qu’un bon film commence toujours par un bon scénario. La bureaucratie ? «En chacun de nous sommeille un censeur car la société est basée sur le mensonge et l’intellectuel n’est pas un sauveur, c’est quelqu’un qui peut proposer des idées.» Ne perdant pas espoir de voir un jour l’Algérie renouer avec l’écriture et les arts, l’hôte de Igelfan avoue avoir un peu de culpabilité envers l’Algérie : «Je peux vivre partout dans le monde où je suis traduit dans 32 langues, mais je ne peux pas quitter mon pays», concluant qu’«il faut dire le mal de l’Algérie ici et pas là-bas au risque de devenir louche».
2 mars 2012
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