Mercredi, 29 Février 2012 10:00
Par : Kouceila Tighilt
Hier, un recueillement sur la tombe de cet illustre écrivain algérien a clôturé cet hommage de quatre jours.
La maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou a abrité durant quatre jours une série d’activités culturelles pour marquer le 23e anniversaire de la mort de l’illustre écrivain, journaliste et anthropologue que fut le regretté Mouloud Mammeri.
Dimanche passé, il y avait pourtant moins d’engouement que d’habitude au petit théâtre de la maison de la Culture de Tizi Ouzou pour l’ouverture des activités commémoratives. Deux des trois conférenciers conviés à cette rencontre, l’auteur et parent de Mouloud Mammeri, Gana Mammeri et Rachid Bellil, chercheur au Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (Cnrpah), n’étaient pas au rendez-vous pour des raisons encore inconnues. L’ouverture de la manifestation a été confiée solennellement à un jeune étudiant du département de Lettres françaises de l’université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou qui a retracé une large rétrospective sur les œuvres de l’écrivain, avant de céder la parole à Youcef Merahi, secrétaire général du Haut commissariat pour l’amazighité qui, lui aussi, s’étalera sur l’œuvre gigantesque et la vie plurielle de l’écrivain au même titre d’ailleurs que ses confrères Mouloud Feraoun, Mohamed Dib et Kateb Yacine. “Chaque époque donne ses hommes qui écrivent selon leur temps. Il est de notre devoir de traduire les œuvres de ces hommes qui ont marqué leur ère vers tamazight et de les introduire dans le système scolaire”, dira Youcef Merahi. Toutefois, de nombreux aspects de l’œuvre colossale de Mouloud Mammeri ont été omis lors de ce début de commémoration ou on s’attendait pourtant à une rencontre qui devait impliquer des scientifiques et des hommes de lettres qui devaient apporter un éclairage sur l’œuvre Mammeri, dont la portée esthétique reste méconnue auprès de la nouvelle génération.
Dimanche soir, on a eu droit à la projection du film la Colline oubliée du cinéaste Abderahmane Bouguermouh, suivi d’un débat et d’une conférence animée par Mme Boukhlou, docteur en langue et civilisation française, auteur d’une thèse intitulée “Définition de la figure de l’intellectuelle dans l’œuvre romanesque de Mouloud Mammeri et apport des nouvelles dans l’évolution de cette figure, ou l’Amusnaw chantre de la culture berbère”.
Lundi, d’autres communications ont été animées par Saïd Chemakh, docteur en linguistique, Samia Daouedi, enseignante au département Langue et culture amazighes de l’université de Tizi Ouzou et par Abdenour Abdeslam, auteur et journaliste.
Hier mardi, dernier jour des festivités, un recueillement sur la tombe de Mouloud Mammeri a eu lieu dans son village natal Taourirt Mimoune chez les Ath Yenni. Par ailleurs, cette rencontre a également été une occasion de faire renaître de ses cendres un autre personnage de notre culture et notre identité nationales que fut le regretté M’hamed Yazid, homme politique bien connu et ancien ministre de l’information du GPRA.
Avec Ben Youcef Ben Khedda, il avait réussi à faire évader Ben Bella de sa prison de Blida. Après l’indépendance du pays, il a été progressivement écarté du pouvoir avant de décéder en 2003, et enterré à Blida.
Une biographie de son parcours a été exposée au hall de la maison de la Culture de Tizi Ouzou.
K. T
28 mai 2012 à 18 06 15 05155
Mouloud Mammeri : l?écho immortel de la colline oubliée
Par Yacine Idjer
Il y a 15 ans, le 28 février 1989, l’écrivain algérien de langue française, Mouloud Mammeri, l’un des pionniers du roman algérien, nous a quittés, laissant à la postérité une remarquable fresque romanesque, une impressionnante et immense mémoire littéraire.
Entrant ainsi dans le panthéon de la littérature universelle et s’imprimant dans la mémoire collective, il s’est illustré par une écriture dépouillée. Son écriture est une mise en scène de la société algérienne d’avant et après-indépendance, une représentation de la mentalité qui la définit et la fait fonctionner ; la société est présentée dans ses contradictions et ses conflits, dans ses fantasmes et ses espoirs et même dans ses désillusions, une société en pleine mutation, aux prises avec le réel et l’histoire. Et même si son écriture, s’inscrivant dans des dates bien précises, raconte une époque bien déterminée, il s’avère qu’elle est , et reste d’actualité. Il s’agit d’une écriture intemporelle, s’étalant dans le temps. Jusqu’à présent, en lisant l’oeuvre de Mouloud Mammeri, le lecteur algérien s’étonne de pouvoir s’identifier au personnage autour duquel vient s’organiser le récit et gravitent les autres protagonistes ; il s’étonne du fait de se voir à travers la société où le personnage est ancré, une société qui lui est familière, car elle est sienne. Ainsi, le lecteur se reconnaît à travers le personnage, l’histoire racontée, l’environnement social et culturel auquel celui-ci appartient. En somme, il se retrouve à travers cet imaginaire littéraire calqué soigneusement, fidèlement et avec intelligence sur la réalité, sur le vécu du lecteur. Mouloud Mammeri a voulu que son écriture soit un reflet, un miroir dans lequel chacun peut voir son image, il a voulu qu’elle échappe au temps, qu’elle ne soit pas contrainte ou soumise à la durée, seulement parce qu’il a traité des réalités qui, jusqu’à présent, agitent la société, la font bouger, la tiraillent, la divisent, en la présentant dans son tumulte et ses contrastes. Parce qu’il a décrit des situations que nous vivons aujourd’hui, comme l’opposition entre «tradition» et «modernité», le conflit entre «vieux» et «jeunes», l’exil… son écriture est d?un réalisme saisissant. Jusqu’à présent, nous lisons dans les romans de Mouloud Mammeri notre société.
Y. I.
Info Soir