Chronique du jour : DECODAGES
abdelmadjidbouzidi@yahoo.fr
I/ La situation financière est encourageante
La balance des paiements qui renseigne sur l’état de nos relations financières avec le reste du monde affiche à fin décembre 2011 un solde positif de +19,91 milliards de dollars. La dette extérieure totale du pays est de 4,4 milliards de dollars, soit 0,9% du PIB. Les réserves de change sont de 188,22 milliards de dollars (or non compris). Le fonds de régulation des recettes est de 5.116,7 milliards de dinars (quelque 71 milliards de dollars). La dette publique interne est de 10% PIB.
Ces chiffres n’ont pas besoin de commentaire, la situation financière de l’Algérie est bonne, très bonne. Merci le pétrole ! (et le gaz bien sûr). Il faut aussi reconnaître, pour être juste, que la gestion de la cagnotte (de la rente diront les puristes) s’effectue sans gros dégâts et dans une relative lisibilité. Ce qui ne veut pas dire bien sûr qu’elle est gérée avec l’efficacité, voulue dans un schéma d’allocation sectorielle judicieux qui favorise l’investissement productif et dans une dynamique de croissance économique qui repose, non pas sur un seul moteur comme elle l’est aujourd’hui, celui de la dépense publique, mais doit allumer les autres réacteurs (investissement, exportations et consommation). Dans ce domaine tout est à faire. En un mot, nous avons de l’argent, nous n’avons pas de projet pour le dépenser efficacement.
II/ L’économie algérienne est fortement dépendante de l’extérieur
Du point de vue des exportations, nous dépendons des fluctuations du marché mondial des hydrocarbures sur lequel nous n’avons, bien sûr, aucune prise. Nous aimerions bien nous passer un jour de ressasser cette banalité. Du point de vue des importations, celles-ci ne cessent de croître, dépendance alimentaire, dépendance de notre outil de production des approvisionnements extérieurs, dépendance pour la satisfaction de nos besoins de santé…, dépendance enfin pour les services non facteurs nécessaires au fonctionnement de nos entreprises, à la réalisation de nos projets d’investissements… (études, engineering, audit, services à l’entreprise). 44,19 milliards de dollars d’importations de biens divers. 11,77 milliards de dollars d’importations de services. Jamais l’Algérie n’a connu une telle facture d’importations : 56 milliards de dollars !! Entièrement financés par le pétrole !
III/La lutte contre le chômage
Il s’agit de la deuxième médaille que le gouvernement accroche à son revers de veste. Mais elle est aussi peu reluisante que la première. Si l’on en croit le Premier ministre, au cours du premier semestre 2011, plus d’un million d’emplois ont été créés. Le bilan présenté fait état, exactement, de 1 090 435 emplois créés. Cette création d’emplois se répartit comme suit :
L’effort de l’Etat dans sa politique de lutte contre le chômage est comme on peut le constater significatif. Mais il nous faut bien souligner que 80% des emplois créés restent des emplois d’attente même si encore une fois, la lutte contre le chômage, et notamment le chômage des jeunes, est bien là. Hélas, l’utilité économique de ces emplois créés n’est pas toujours prouvée. Les emplois créés ont pour la plupart d’entre eux une contrepartie économique mais ils restent des emplois à durée déterminée qui ne font que reporter la crise du chômage. L’économie nationale gagnerait à mettre à profit cette aisance financière pour relancer l’investissement productif et donc l’emploi à durée indéterminée. On voit bien que cela est possible puisque près de 160 000 emplois productifs et permanents ont pu être créés durant le premier semestre 2011.
IV/- La reprise de l’investissement
Selon le bilan du Premier ministère, au premier semestre 2011, 28,8 milliards de dollars ont été investis comprenant les investissements nationaux publics et privés et les investissements directs étrangers en 51/49 et en partenariat (51% pour le national et 49% pour l’étranger).
Les investissements nationaux
Les opérateurs économiques nationaux publics et privés ainsi que l’Etat auraient investi durant le premier semestre de l’année 2011 une enveloppe financière de 21,8 milliards de dollars.
• Les investissements publics ont été de 18,67 milliards de dollars répartis entre
* le budget d’équipement pour 16,32 milliards de dollars.
* le Fonds national d’investissement pour 2,33 millions de dollars.
• Les investissements privés nationaux ont été de 3,19 milliards de dollars répartis comme suit :
Les investissements directs étrangers (IDE)
Dans le domaine des investissements directs étrangers (IDE), l’économie nationale a reçu un montant de 6,9 milliards de dollars durant le premier semestre 2011. S’agit-il d’intentions d’investissements ou d’investissements définitivement décidés et en réalisation ? Ces IDE se répartissent comme suit :
• 1,5 milliard de dollars pour le secteur énergie et mines
• 5,4 milliards de dollars pour les secteurs hors hydrocarbures.
Dans le secteur énergie et mines, la répartition des investissements est la suivante (en nombre de projets)
Dans les secteurs hors hydrocarbures la répartition des IDE est la suivante :
Parmi les 32 projets réalisés en partenariat, huit concernent le secteur de l’eau. En ce qui concerne les projets IDE en 51/49, quatre projets ont été réalisés dans le secteur BTPH : trois projets dans le secteur industries du liège, papier et bois ; deux projets dans les branches sidérurgie, mécanique, électrique.
V/- Le secteur industriel
Si l’on en croit le bilan présenté par le ministre de l’Industrie, de la Petite et Moyenne entreprise et de la Promotion de l’investissement, l’industrie algérienne semble reprendre des couleurs : le chiffre d’affaires du secteur public est en nette amélioration. Le secteur privé, notamment dans ses branches agro-alimentaires, chimie, matériaux de construction, affiche des taux de croissance appréciables. Mais c’est surtout dans le domaine de l’investissement public que la relance est significative. Le ministre a annoncé la prochaine réception de deux nouvelles aciéries et trois usines sidérurgiques. Dans la branche ciment, l’investissement en cours de réalisation est de deux milliards de dollars et permettra la progression de la production qui passera de 11,5 millions de tonnes en 2010 à 20 millions de tonnes en 2015. Dans la branche «médicaments», six nouvelles usines sont en réalisation. Dans la branche agro-alimentaire, l’Etat réalise quatre technopoles associant producteurs, universitaires chercheurs et pouvoirs publics. Bilan impressionnant et on est étonné du peu de «tapage» que devrait faire le gouvernement sur toutes ces réalisations ?!
VI/- Le logement
Le bilan présenté par le Premier ministre lors de son point de presse fait état de la réalisation de 64.552 logements durant le premier semestre 2011 se répartissant comme suit :
Ce niveau de réalisation, s’il se confirmait révèle une meilleure maîtrise dans la construction de logements puisque le record atteint à ce jour dans notre pays dans les années 70 était de 100 000 logements par an.
VII/- Que retenir de ce bulletin de santé de l’économie algérienne ?
Quatre conclusions :
1- Les finances sont bonnes
2- Il y a de l’investissement mais la structure de ces investissements n’est pas orientée sur la production, sur la réindustrialisation du pays.
3- L’emploi créé est important. Ce fait est incontestable mais cet emploi reste précaire et financé par la dépense publique.
4- Notre pays n’a pas encore de projet économique.
A. B.
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/02/29/article.php?sid=130946&cid=8
29 février 2012
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