Culture : Le coup de bill’art du Soir
Nous qui n’avons plus vingt ans depuis très longtemps, avons tendance à juger trop sévèrement la jeunesse d’aujourd’hui. Quand nous avions leur âge, à Alger et ailleurs, à travers l’Algérie, il y avait des touristes partout, comme dans le film Les vacances de l’Inspecteur Tahar. Des écrivains et des artistes européens venaient passer leurs vacances à Sidi Fredj. A l’époque, les débats à la cinémathèque algérienne du temps de «Boudj» Karéche, notamment, duraient des heures et se déroulaient en présence de grands cinéastes étrangers.
Rien qu’à la rue Ben M’hidi, il y avait une dizaine de salles de cinéma que remplissaient quotidiennement des milliers de cinéphiles. Au hall, les albums de bande dessinée se vendaient comme des petits pains. Le TNA qui affichait presque toujours complet programmait des pièces de Rouiched, Abdelkader Alloula ou Azzeddine Medjoubi. Dans les rues, on pouvait rencontrer Kateb Yacine, Mustapha Kateb, M’hamed Issiakhem ou Mohammad Khadda. Si vous avez envie d’écouter El Anka, il suffit d’aller au quartier populaire où il anime une fête familiale. Pour aller à l’étranger, il suffit d’acheter un billet vers la destination de son choix. On avait même le droit d’acheter, en Algérie et en dinars, un billet de train entre, par exemple, Marseille et Lyon. Les voyages et le contact avec des sociétés civilisées forment la jeunesse. Aussi, les jeunes Algériens à l’époque avaient une culture universelle qui étonnait les Européens quelque peu «ethno-centristes». On connaissait mieux que les Français des tubes comme Hotel California du groupe Eagles ou Staying alivedes Bee Gees. Ceux qui ont vingt ans aujourd’hui ont du mal à croire que l’Algérie était ainsi. «Vous, vous avez vécu !» disent-ils à ceux qui leur parlent de la vie à «la belle époque». Ce n’est pas de leur faute s’ils sont «comme ça» les jeunes. Ceux qui ont vingt ans aujourd’hui en Algérie sont nés quand les bombes avaient commencé à exploser. Ceux qui ont la quarantaine aujourd’hui, avaient la vingtaine au début de la décennie noire.C’est un miracle que des artistes comme Souad Massi, Mohamed Allaoua ou Houari Dauphin ont pu éclore comme des «Flowers in the dirt», pour reprendre le titre d’un album de Paul McCartney.
K. B.
bakoukader@yahoo.fr
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/02/25/article.php?sid=130710&cid=16
25 février 2012
Chroniques