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- Publié le Mercredi, 22 Février 2012 15:55
- Écrit par Malek Yacini
Les livres retraçant des parcours ou des évènements politiques sont courants. Le rôle du syndicalisme avec ses apports et ses instrumentalisations politiques d’après guerre a fait défaut. Il faut savoir gré à Abdelmadjid AZZI d’avoir produit un ouvrage qui fera date sur l’UGTA dans l’Algérie indépendante. Le titre lui-même est évocateur de la problématique : « Le mouvement syndical à l’épreuve de l’indépendance. ».
C’est à travers le passionnant témoignage d’un membre d’une famille de résistants cheminots, l’auteur lui-même étant maquisard pendant la guerre, que l’on revisite les méandres d’un mouvement syndical qui essaie de préserver son autonomie dans un univers dominé par les intérêts claniques. Sans rien occulter et sans rien enjoliver AZZI, nous dévoile les principales étapes qui ont rythmé la vie de l’UGTA. On découvre dans l’entrelacement des diverses périodes, l’emprise progressive des politiques sur le syndicat algérien qui avait réussi à préserver une certaine liberté d’action à l’époque de la guerre; ABANE Ramdane, à l’origine de la création des organisations socio-professionnelles, ayant toujours refusé leur embrigadement. Les narrations factuelles de AZZI sont intéressantes car elles donnent du sens politique à son récit sans être inspirées par des partis pris. Un exemple des conflits qui ont pris en otage l’UGTA et, au-delà, toute la question sociale algérienne. « C’est aujourd’hui, 21 juin 1972, que débute le congrès de notre fédération (les cheminots) dans l’hémicycle du Palais Zirout Youcef….Les délégués ont déjà pris place derrière les pupitres et les invités, confortablement installés dans la mezzanine,…au bout d’un moment j’entre dans la salle sous un tonnerre d’applaudissements accompagné de Kaïd Ahmed, responsable de l’appareil du parti, de Mohamed Chérif Messaadia, responsable du département information et orientation, Brahim Kabouya, responsable du département des organisations de masse…Comme on peut cependant le constater, le ministre des transports, Rabah Bitat et le directeur général des chemins de fer, Sadek Benmahdjouba ont, pour la première fois décliné, l’invitation…Il est fort possible que ces absences…soient liées au conflit qui oppose Kaïd Ahmed au président Boumediene. » L’ouvrage fourmille de petites histoires qui, au final, ont fait la grande histoire.
En fermant le livre, on ne peut s’empêcher d’éprouver un sentiment de dépit. L’inculture et l’irresponsabilité des dirigeants politiques ont provoqué l’extinction d’une belle culture syndicale en Algérie. Comme sur la scène politique, il suffit de comparer l’envergure des syndicalistes au lendemain de la guerre avec le niveau de ceux d’aujourd’hui pour comprendre la régression du pays.
Le livre de A. AZZI constitue une source inestimable d’informations dont il faut espérer qu’elle soit mise à profit par les chercheurs universitaires.
« Le mouvement syndical algérien à l’épreuve de l’indépendance » par A. AZZI, préface de Tahar Gaïd, membre fondateur de l’UGTA . 437 pages, Alger-livres Editions
Du même auteur, Parcours d’un combattant de l’ALN
23 février 2012
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