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Il y pense probablement et sans doute qu’il s’y astreindra à cette nécessité le moment venu. Après avoir admis et même avoué que les scrutins du passé sentaient tous le soufre du truquage puis s’être engagé personnellement qu’il en ira autrement cette fois-ci, pourra-t-il se passer de garanties ? Or, parmi les gages qu’il devra fournir à la classe politique qui s’apprête à jouer le jeu, il en est un qui paraît incontournable à une grande partie de celle-ci : celui d’un remaniement strictement politique de l’actuel gouvernement, avant l’ouverture de la campagne.
Loin d’être une demande insurmontable en terme de suspicion morale à l’égard du chef de l’Etat, elle paraît relever, non seulement du bon sens politique mais mieux encore, une opportunité pour Bouteflika de confirmer sa bonne foi. C’est que la sincérité et la loyauté doivent, même dans le peu recommandable jeu de la politique, se prouver d’abord puis nécessairement s’éprouver dans les situations de grande gravité. En référence au passif du passé de nos élections dont, d’ailleurs, l’appareil d’Etat s’est directement rendu coupable, Bouteflika peut-il cette fois-ci opposer un refus hautain à une pareille demande sans que le but qu’il espère atteindre ne soit entaché du même rejet dans l’opinion ? Au moment crucial où son régime joue son va-tout à travers un renouvellement de l’appareil législatif, l’on comprendrait mal qu’il veuille courir ce risque-là. Mettre en congé un Premier ministre dont la casquette de chef de parti prédominera durant la campagne et en faire de même avec ce ministre d’Etat dont la notoriété d’agitateur est plus perceptible que ses qualités de doctrinaire du FLN, ne pourra lui valoir que la bonne caution des futurs souscripteurs à son néo-réformisme. Car enfin qui mieux que lui est qualifié pour savoir que les Ouyahia, Belkhadem et bien d’autres ministres fortement estampillés par leurs obédiences seraient pour lui une source d’inconfort politique s’il venait à les conserver dans l’exécutif ? Peut-il, par ailleurs, se gausser de l’argument fallacieux qui veut que l’Etat doit continuer à fonctionner même lorsque le pays entre en campagne électorale ? Or, l’on sait qu’il n’en est rien depuis longtemps, c’est-à-dire depuis l’assujettissement de l’ensemble des institutions à un exécutif totalitaire et de l’ingérence notoire de celui-ci dans les mécanismes techniques du moindre vote. La réalité est là qu’illustre une somme considérable de malversations électorales qui se sont accomplies, sur ses injonctions, dans le passé récent. Ceux, parmi les courants politiques qui justement plaident pour un gouvernement transitoire et strictement technique ont à l’esprit ce gâchis des manipulations et dans le même temps voudront croire à la conversion du chef de l’Etat à cette occasion. Ils se demandent, in fine, pourquoi Bouteflika ne ferait-il pas cet effort après avoir ordonné la levée de toutes les discriminations administratives concernant la légalisation des partis ? Sachant que l’enjeu va bien au-delà d’un simple «repeuplement » d’une chambre, dès lors que celle-ci est appelée, de facto, à jouer le rôle de constituante chargée d’examiner un projet de loi fondamentale, ils considèrent que la neutralité réelle dans la supervision ne peut plus faire l’économie d’un exécutif au-dessus de tout soupçon de sympathie partisane. A plus d’une raison, ils constatent que le gouvernement en place est contrôlé aux deux tiers par le FLN et le RND alors que le MSP, dont la participation congrue (3 ministres), n’est impliqué que dans des domaines auxquels il est fait, habituellement, appel à des technocrates. La photographie de l’exécutif est suffisamment édifiante à travers ces connexions partisanes trop marquées pour que cela ne suscite pas de l’inquiétude auprès des appareils capables de tenir des rôles notables : FFS, RCD, PT pour ne citer que cette troïka républicaine. Autre fait significatif qui indique qu’une telle demande n’est pas une argutie moins encore une coquetterie politicienne des partis de l’opposition concerne précisément le silence presque désapprobateur du FLN et du RND. Ils participent aux gouvernements depuis 13 années et ont été des «opérateurs » décisifs dans la répartition des quotas mais ne désirent toujours pas se blanchir de ce passé douteux en se retirant de leur propre initiative du gouvernement, afin de se soumettre à l’étalonnage électoral sans parrain. Le constat est désastreux de ce point de vue et ne peut que gêner le président lui-même. Reste à conjecturer sur la lecture de cette problématique qu’il fera dans sa solitude. Rattrapé par une double réalité au moment où il prône la transition, le voilà en butte à la résistance intérieure de ses prétoriens politiques qui ne souhaitent guère se mettre en congé des leviers de l’Etat, juste le temps pour donner le change au dernier carré de l’opposition.
B. H.
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http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/02/18/article.php?sid=130426&cid=8
18 février 2012
Chroniques