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- Publié le Dimanche, 05 Février 2012 16:16
- Écrit par Rachid Bali
Rachid Bali
Depuis le 31 janvier, la semaine est dominée par la présence de la mission d’exploration de l’Union Européenne dans notre pays. Du coup, les Algériens découvrent ce que recouvre précisément le concept de surveillance internationale. Jusque là, on pensait qu’il suffisait d’admettre des observateurs crédibles pour prévenir les fraudes. Eh bien non ! Une fois de plus, on vérifie qu’en matière d’opacité, le régime n’a pas son pareil quand il s’agit d’enfumer son monde.
La surveillance internationale a deux volets : la préparation et l’observation. Alger a fini par admettre les observateurs européens mais rejette toute investigation concernant la préparation. Concrètement cela veut dire que le pouvoir veut bien faire quelques efforts à propos du bourrage des urnes mais se réserve le droit de manipuler le fichier électoral allant jusqu’ à l’augmenter de 4 millions d’électeurs. En ajoutant les votes des corps constitués et ceux de leurs familles, cela fait quelques six millions de voix qui sont mises à la discrétion de l’administration. Avec une telle marge, il y a de quoi fausser toutes les élections dans une Algérie qui compte officiellement 21 millions d’inscrits. Ce chiffre est, par ailleurs, fantaisiste ; figurer sur une liste électorale relevant d’un acte volontaire, chacun peut constater autour de soi que les proches qui vont s’inscrire ou se réinscrire chaque année sont des exceptions.
Si le fichier reste en l’état actuel, ce qui est probable, l’union européenne ne pourrait, dans le meilleur des cas, que déplorer la fraude. En aucune façon, elle n’est en mesure de l’empêcher.
Un communiqué de l’UE dénonçant des irrégularités au mois de mai prochain est largement absorbable pour le système. Les présidentielles françaises et américaines focaliseront les opinions et on peut compter sur la télévision nationale pour passer en boucle des observateurs européens évoluant librement parmi des électeurs enthousiastes. La manipulation ne réglera aucun problème mais permettra au pouvoir algérien de disposer de quelques mois. Et dans la conjoncture actuelle cela est précieux. Le temps de régler en 2014 la question de la succession et de voir, peut-être, comment passer entre les gouttes de la tempête régionale. Autant de temps de gagné pour le pouvoir et perdu pour le pays.
Cependant si l’UE se désengage de cette surveillance biaisée, le signal sera fort. Pour une fois, la communauté internationale, refusant de rentrer dans la combine qui a toujours fait du régime algérien une exception régionale, contribuerait à l’émergence d’une Afrique du nord régie par la citoyenneté ; ce qui est aussi une condition pour qu’elle devienne un partenaire adulte, prévisible et fiable.
18 février 2012
BILLET