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- Publié le Lundi, 06 Février 2012 10:42
- Écrit par Didi Baracho
Par Didi Baracho
Hier, j’étais invité à dîner chez ma tante. Il fallait par respect, comme on dit, accepter l’idée de passer une journée non éthylique. Chez nous, l’alcool a très mauvaise réputation. J’en ignore la raison, mais il est systématiquement associé aux mauvais garçons. C’est probablement ce qui incite la plupart de nos Indigènes croyants et très pratiquants à préférer le joint à la bière. Même quelques-uns de nos constitutionnalistes ont admis la chose. Certes, le cannabis marocain pue beaucoup moins que notre houblonnée, mais il est clair que le produit est tout aussi hallucinogène et l’un et l’autre feraient passer les versets sataniques pour une fatwa de Abassi Madani.
Bref, bien j’adorasse ma vieille tante, je crus que j’allasse m’ennuyer pendant cette soirée. En vérité, pas du tout ! Très au fait de l’actualité, ma chère parente commença, entre deux louches de chorba, par m’annoncer que Abdelmalek Sayah, ex-bourreau chargé des procès expéditifs de notre grande monarchie militaro-républicaine, a été nommé récemment à la tête d’un observatoire de lutte contre la corruption. À partir de là, ma tante, en bonne vieille commère, sortit sa langue de vipère et s’en alla me rappeler que l’ancien procureur était un homme d’affaires aguerri. Qu’il aurait, entre autres, importé des voitures en veux-tu, en voilà
Ma tante, dans sa profonde naïveté n’a pas compris que dans notre pays, nous avons tous une chance inouïe. Oui ! Les Indigènes, même universitaires et honnêtes resteront des Indigènes. C’est grâce à des gens comme Sayah que l’Algérie continue de tourner. Il nous faut des responsables qui savent être au four et au moulin, au ministère de l’Injustice et dans le commerce de voitures, au ministère de la Défense et dans l’importation de blé, au ministère de l’Intérieur et dans le négoce des pièces détachées, à la présidence de la République et dans toutes les autres affaires, au DRS et à la Sonatrach, etc. Ces vieilles personnes ignorent que chez nous, même moi, je pourrai un jour, si les généraux M. dit T et T. dit B. le veulent bien, devenir ministre des Affaires religieuses, des mosquées et des tapis de prières. Mais ça, c’est une autre histoire. Alors, malgré tout, vive les Indigènes !
18 février 2012
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