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La pluie se remet à tomber. Fine, elle s’abat sur les champs comme un immense écran qui cache peu à peu le paysage. La nostalgie de l’été et de ses plaisirs submerge les esprits… Alors que l’hiver garde intactes ses vertus car il s’agit d’une saison bienfaisante sur le plan de la santé pour peu que l’on sache se couvrir convenablement et que l’on ait les moyens de se chauffer correctement, on entend souvent les gens se lamenter. Ignorant les apports fabuleux en eau et cette exceptionnelle qualité de l’air qui lui sont propres, ils pestent contre l’hiver et disent, à qui veut les entendre, que l’été est de loin la meilleure saison. Ils lui trouvent subitement mille mérites !
Cependant, aux premiers lance-flammes de juin, lorsque le sirocco balayera l’intérieur de nos appartements de ses poussées de fièvre, ils fulmineront contre l’été et regretteront… l’hiver ! Nous sommes ainsi faits ! Pauvres créatures bourrées de contradictions : nous n’apprécions les choses que lorsque nous ne les avons plus ! Nous nous satisfaisons rarement de ce que nous possédons, et ce qui est entre nos mains nous paraît souvent futile et dérisoire ; nous cherchons toujours ce que nous n’avons pas. Et jusqu’au dernier souffle, l’homme continue d’ignorer les trésors qui sont en sa possession pour consacrer tout ce qui lui reste d’énergie à pourchasser des chimères ! Notre grand tort est de ne pas apprécier ce que nous avons. Nous trouvons un malin plaisir à courir derrière ce que nous n’avons pas ! Oui, c’est sûr, une villa aurait satisfait tous vos désirs ! Mais, sachez, pour un moment, apprécier votre logement actuel. Si vous regardez bien, vous lui découvrirez un certain charme, une note de gaieté… Et puis, ce fut votre nid d’amour lorsque vous aviez décidé de fonder une famille ; vos enfants y ont grandi et prospéré ! Si vous en avez les moyens, offrez-leur un palais ; sinon, cessez de rêver à ce que vous n’avez pas et sachez mieux jouir de ce que vous avez ! Et d’ailleurs, même celui qui a la grande villa de vos rêves, n’est certainement pas plus heureux que vous ! Il est sans cesse tourmenté par le désir d’en avoir une plus grande. Comme celle de son voisin. Mais il ne sait pas non plus que celui d’en face rêve d’en avoir plus… Ainsi va la vie. Nous la gaspillons comme ces rivières gonflées d’eau qui finissent bêtement dans la mer. Que de fleuves d’illusions, d’ambitions mal placées et de basses jalousies lâchons-nous dans les océans sans fin de la prétention humaine ! La société d’aujourd’hui semble avoir perdu tous ses repères. Le niveau culturel vole au ras des pâquerettes et l’appétit du gain devient le principal moteur qui fait bouger les hommes, les groupes et les clans ! Et il n’y a aucun espoir de voir les choses changer d’ici peu, parce que, après avoir tout gâché, nous avons aussi réussi à pourrir la mentalité de nos enfants. Ils rivalisent dans l’art d’acheter des souliers à deux millions de centimes, de s’habiller «griffé», de posséder la meilleure moto ou la plus belle voiture. En ces temps de l’indignité, la pauvreté devient une tare ! Les femmes mettent leurs plus beaux bijoux (quand elles ne les «empruntent» pas !) pour éblouir leurs voisines et amies ! Dans les cortèges des mariages, j’ai vu cette chose abominable, inimaginable il y a peu : des camionnettes surchargées de matelas et de robes brodées, dans une «exposition mobile» qui est le summum du «m’as-tu-vu» ! Permettez-moi, enfin, de vous proposer ce soir, à l’heure où vous rentrerez chez vous, de voir autrement la vie. Peu importe l’endroit où vous habitez. Que ce soit un palais ou une masure, je vous invite à apprécier ces rares moments où toute la famille est réunie : ça, c’est un vrai bonheur ! Peu importe ce qu’il y a dans les plats que vous partagez, l’essentiel est qu’ils aient le goût du pain honnêtement gagné. Demandez des nouvelles de vos proches, de vos voisins. Ils ont peut-être besoin de vous. Voilà en quoi nous devons rivaliser : dans l’art de faire du bien, de le propager autour de nous, d’élever nos enfants dans le respect des grandes valeurs morales. «La vraie richesse est de continuer à apprécier ce que l’on possède» a dit Saint Augustin, fils de la très proche Thagaste et qui a étudié ici, à Madaure. Et permettez-moi enfin de conclure avec les paroles d’un grand philosophe de chez moi : «Moins on désirera, plus on aura. Celui qui voudra (se limiter à) peu de choses, possédera autant qu’il voudra. La richesse se mesure donc dans le cœur même de l’homme, plutôt que dans ses biens et les intérêts qu’ils lui procurent. S’il est désarmé face à son désir (de richesse), insatiable chaque fois qu’il s’agit de son profit, l’homme ne sera pas comblé par des montagnes d’or ; toujours, il réclamera, comme un pauvre, de quoi accroître son bien. La vraie pauvreté se reconnaît à ceci : notre désir d’avoir plus nous vient toujours de notre conviction d’être dans le besoin. Peu importe l’ampleur de ce qu’on a si on croit que c’est peu. On est pauvre lorsqu’on ressent une frustration liée au désir, riche, lorsque l’absence de besoins nous ravit. Les pauvres, on les reconnaît à leur insatisfaction, les riches, à leur contentement. » Apulée, Apologie, XX, 2-4 et 8.
M. F.
P.S. 1 : le moudjahid Abdelmajid Maâlem m’a fait l’honneur de m’inviter à une marche symbolique qu’il a baptisée «sur la piste Amirouche» et qui ira de Souk- Ahras à la région de Kherrata (Serj- El-Ghoul), en passant par Guelma, Constantine et El-Milia. Un itinéraire par lequel il suivi, à l’âge de 15 ans, les pas du chahid colonel Amirouche, au sein d’une compagnie d’acheminement d’armes vers la Wilaya III. Il s’agit d’une initiative strictement personnelle qui coïncide avec son 70e anniversaire et, bien heureusement, avec le 50e anniversaire de l’Indépendance. D’ores et déjà, j’ai le plaisir d’annoncer que notre journal patronnera cette marche et nous lançons un appel aux sociétés publiques et privées pour participer à cet événement.
- Voici les e-mails où vous pourrez déposer vos suggestions : soirsat2@ gmail.com
- L’adresse électronique de Si Abdelmadjid : abdelmadjidmaalem@ gmail.com
P.S. 2 : comme par hasard, le lien sur la visite de l’émir du Qatar en Israël a été effacé suite à notre billet d’hier. Mais nos lecteurs sont tenaces. Ils me livrent une nouvelle adresse ! http://www.youtube.com/watch?v =Sp2KWV6gWB8
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2012/02/02/article.php?sid=129752&cid=8
2 février 2012
Chroniques