- Publié le Mardi, 31 Janvier 2012 10:11
- Écrit par Didi Baracho
Par Didi Baracho
Je mâchai mon kebab en sirotant ma bouteille de vin, évidemment dernière mauvaise cuvée du Président, lorsque me parvint le SMS m’annonçant le décès de Abdelhamid Mehri. Quoi il est mort !, m’exclamai-je. Sur le coup, je ne puis m’empêcher de boire une gorgée au goulot tant le choc fut énorme. Croyez-moi, je ne savais pas que les dinosaures pouvaient, eux aussi, casser leur pipe, leur Marlboro ou leur cigare à l’instar des Indigènes que nous sommes.
Je repris mes esprits. Observant cette bouteille déjà à moitié vide, je décidai d’aller au cybercafé pour me connecter à mon compte Facebook. Chemin faisant, je fis en sorte de venir à bout du Saint breuvage tout en pensant à ce pauvre Mehri. Donc si lui est mort, Belkhadem, Bouteflika, Ouyahia, Soltani, le général M. dit T. et le général T. dit B. ainsi que les autres généraux bardés de galons, d’initiales et de pseudonymes pourraient, eux aussi, un jour, tout comme l’ancien cacique du FLN, passer de vie à trépas. Finalement, ils sont presque comme nous, contrairement aux racontars des mauvaises langues.
Arrivé dans ce lieu de la convivialité virtuelle et après avoir salué le boutonneux branché sur un site interdit aux gens de son âge, je pris place devant la machine et en deux clics, trois mouvements, je me retrouvai devant le « fil de l’actualité » qui me confirma le décès tragique de Si Abdelhamid Mehri. Les communiqués rendant hommage au Saint homme affluèrent de toute part. De la Kasma du FLN de Bir Ghbalou à la section affairiste du RND des Hauts-plateaux en passant par la grande « famille révolutionnaire » de Sidi Yahia, tous ceux qui comptent en Algérie pleurèrent, d’une seule et même larme, ce « grand militant de la cause nationale ». Alors que je lisais les différents commentaires, celui d’un facebookeur attira mon attention. Le bonhomme s’étonnait qu’aucune émotion n’ait été exprimée à la suite du suicide par immolation d’un jeune désespéré de 22 ans alors que la vraie Algérie (pas les Indigènes !) pleurait la mort naturelle d’un presque centenaire. Je me dis que je ne pouvais garder l’auteur d’une telle idiotie sur ma liste d’amis. Le type n’a rien compris. Les décideurs ne s’émeuvent jamais pour celui qui, par désespoir s’immole, mais seulement pour ceux qui suscitent (ou qui ont suscité) le désespoir. Je décidai donc de supprimer et de bloquer l’ignare de ma liste. Demain, pour supporter mon chagrin, j’avalerai deux doses de Whisky au réveil et j’irai au cimetière participer à la mise sous terre du dinosaure en espérant que ses émules n’arriveront jamais à enterrer l’Algérie. Mais ça, c’est une autre histoire. Alors, malgré tout, vive les Indigènes!
2 février 2012
BILLET