Le statu quo va aussi toucher l’équilibre alimentaire : le Régime ne va pas relancer l’économie ni des réformes profondes, ni permettre l’émergence d’un lobby de patrons indépendants de lui, ni lever le pied de sur le cou des institutions, ni permettre une plus grande décentralisation, ni accepter de céder un peu de sa régence, ni rajeunir sa façade et ses visages. Rien. La tendance générale et à somatiser la demande en démocratie pour en faire un problème d’estomac, réglable par le recrutement rentier et le colis alimentaire.
La question philosophique du jour est donc celle-ci : pourquoi l’Etat algérien ne réussit rien en régulation et réussi tout en équilibrages des pneus ? D’où lui vient ce don de pressentir les temps morts, les poids inertes, les tendances profondes et sans pattes ? Selon des historiens, cela peut venir de la guerre d’indépendance : elle n’a pas été menée par un Messali unique mais par plusieurs Messali se surveillant les uns les autres.
Le chroniqueur se rappelle cette anecdote qui lui a été raconté par un ancien moudjahid : « Lors d’une opération d’évasion de la prison à Oran pendant la guerre, nous avions décidé que la liste sera composée de deux individus par région. Comme ça, personne ne dira qu’on a privilégié les prisonniers d’Oran et pas ceux de l’Est ou de la Kabylie ». Le souci des équilibres a donc été une hantise première chez les libérateurs et est resté en l’état pour l’Etat. D’où ce paradoxe superbe et catastrophique : le Régime n’arrive pas à être un bon Etat régulateur mais se surpasse dans sa vocation d’équilibreur de pouvoirs internes.
2012 sera donc l’année morte. Son jeu d’icônes et clair : on donne plus de charrettes et de légumes à Bouazizi, on augmente le salaire de la policière qui l’aurait giflé, on explique que les cendres sont celles des martyrs de l’Indépendance ou des pneus brulés de 2011 et on passe au JT des citoyens de Sidi Bouzid qui remercient les autorités. Le tout multiplié par 48 wilayas et 1500 communes. Cela vous donne donc l’année 2012 avec rien dedans et tout dans l’emballage.
18 janvier 2012
Chroniques