Alors, me diriez-vous, que deviendrait la fission nucléaire ? Une explosion de joie ! [Raymond Devos]
Hiver 1993. Folkestone. Royaume Uni. Dans le bus qui nous conduit à Sheffield, les voyageurs semblent exténués. La traversée de la manche a été mouvementée. L’heure est déjà tardive et la route semble déserte. Le weekend sera de courte durée. Une visité d’un établissement scolaire modèle à Sheffield et une incursion rapide à York sont au programme. Les Gnossiennes de Satie invitent aux songes et les souvenirs se confondent avec les lumières qui scintillent dans la nuit.
Sheffield était le fleuron de la sidérurgie et de l’acier. Elle se reconvertit comme elle peut. Certaines anciennes mines, partiellement inondées, sont devenues des lieux de villégiature, de tourisme et de mémoire. La ville est scindée en deux fiefs . Sheffield United et Sheffield Wednesday, les deux clubs de football mythiques de la ville.
Hiver 2010. Paris. France. Le débat sur la laïcité et les signes dits ostentatoires notamment musulmans fait rage. Les tenant du discours laïc dur squattent les médias et font la une des journaux. Ils disent que le principe de laïcité dont les piliers sont la neutralité de l’Etat, la liberté de conscience et le pluralisme doit être appliqué dans son intégralité et que la séparation du pouvoir politique et administratif de l’Etat et du pouvoir religieux doit être absolue.
Ces débats semblent provoquer le repli sur soi et la crispation identitaire. Faut-il donc faire offrande, à sa culture d’adoption, du don du sacrifice de soi ? Ou partir.
Hiver 2011. Alger. La résurgence de la dissidence et du redressement dans les structures politiques partisanes semble récurrente. Le redressement est fondamentalement un triple comportement. Un comportement induit par une exigence d’ordre optique. Il s’agit donc d’un processus qui permet de rectifier la vue. Un comportement de justicier qui permet de susciter chez autrui une vive émotion (peine, compassion, sympathie ) et un comportement d’essence énergétique, de stabilisation de tension et de conversion de courant.
Dans les rédactions, les questions récurrentes qui taraudent les esprits sont relatives à la transparence des élections qui arrivent et à qui les remportera.
A Sheffield, nous entamons une visite guidée d’un grand établissement scolaire public. L’institution est réputée pour ses bons résultats et dispose de grandes infrastructures pédagogiques. Elle accueille des élèves de toutes origines. Nous manquons de crédits, nous précise notre guide, Professeure de Français. C’est l’heure de la récréation et la grande cour grouille déjà de monde. Le look afro-reggae côtoie le costume cravate strict. Il y’a de très nombreuses filles toutes voilées de blanc. Notre guide nous dit que la communauté musulmane de Sheffield est essentiellement d’origine indienne, sri-lankaise ou pakistanaise. Elle nous précise que c’est le modèle communautaire anglo-saxon, l’abondant du principe de laïcité au profit du principe d’une liberté de culte totale et de la reconnaissance des communautés.
Une journaliste d’un hebdomadaire français demande à un responsable d’un centre culturel et cultuel musulman, connu pour ses efforts intellectuels en faveur du dialogue entre les trois grandes religions monothéistes, son avis sur l’intégration des musulmans en France. Il répond que selon lui, l’intégration est synonyme de désintégration et que dans la vie il n’y a de place que pour le respect mutuel.
Nous quittons Sheffield, Folkestone, Paris et rentrons sur Alger. La nuit est déjà là et l’appel du muezzin se fait entendre. C’est l’heure de la dernière prière obligatoire, celle du soir. C’est bon d’être à la maison.
5 janvier 2012
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