Culture Mardi, 03 Janvier 2012
Ce n’est parce que nous parlons la même langue que nous disons tous forcément la même chose. Même unique à un même groupe humain la langue est plurielle dans les différents usages qu’on en fait. Elle varie d’un locuteur à un autre selon le degré de connaissance du vocabulaire et la maîtrise du langage que chacun a. La parole comme synthèse à la fois de l’expression de la pensée, du vocabulaire et du langage personnalise l’individu selon son style et son genre. Kurt Goldstein spécialiste de la psychologie du langage pense que “dès lors que l’homme use du langage pour établir une communication vivante avec lui-même ou avec ses semblables, le langage n’est plus un instrument, n’est plus un moyen : il est une manifestation, une révélation de notre essence la plus intime et du lien psychologique qui nous lie à nous-mêmes et à nos semblables”. Le volume du vocabulaire possédé par chacun d’entre nous est ainsi déterminant dans la chaîne langagière. Plus le vocabulaire possédé est fourni, plus il est aisé de parler. Mais le vocabulaire n’est pas inné. Il ne s’hérite pas au sens classique de l’acquisition d’une propriété ou d’un bien quelconque. Il est apprentissage et constamment en évolution dynamique. Les phénomènes mutants des sens que peut prendre un même mot en sens connotés et en sens dénotés, l’usage et le contexte du sens propre et du sens figuré, l’extension de sens des mots, leurs nouvelles indications, leurs nombreuses suggestions, la déclinaison langagière, les tournures métaphoriques et rhétoriques sont autant de variantes et de possibilités par lesquelles nous usons inégalement de la parole. Par-delà les points de vue des uns et des autres sur un sujet donné, ces nombreuses images parlantes à plusieurs teintes et nuances font que parler la même langue ne signifie pas pour autant que nous disons la même chose. Taha Hussein disait : “Quand je parle il m’arrive de me faire vérifier en demandant à mon interlocuteur de dire la même chose avec ses propres rudiments langagiers. C’est toutes les fois différent.” La langue a aussi cela de magique : elle est libre et décontractée. Elle est plus qu’un simple instrument de communication. Aussi, Marcel Texier ne s’est pas hasardé en disant que les langues n’ont à demander à personne la permission d’exister.
A. A.
kocilnour@yahoo.fr
3 janvier 2012
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