Samedi, 12 Novembre 2011
J’ai toujours considéré que les commis de l’idéologie dominante ont plutôt tendance à jeter le bébé avec l’eau du bain qu’à reconnaître le mérite de ceux qui se sont exposés pour que rejaillisse la vérité et soient jetés les jalons idoines et pérennes d’une véritable vie démocratique dans un pays qui en a tant besoin. J’avoue donc que le fait d’opter pour l’argumentaire d’aujourd’hui est loin d’être fortuit, innocent, tant les positions de l’électron libre que je suis ne font pas dans la dentelle, sont loin d’admettre que la négation de l’autre et l’intérêt suprême d’un peuple puissent former les deux manches de la même chemise. C’est, assurément, pour combattre l’hégémonisme et l’injustice imposés par une conception mécaniste et technicienne du développement que j’ai opté très tôt, pour une autonomie et une indépendance vis-à-vis du groupe social dominant. Je suis allé jusqu’à décliner une invitation à prendre part à la première conférence que le CNES a dédiée à la résurrection de la société civile. J’avoue que j’ai été particulièrement touché par l’intention de cet appareil idéologique d’État, marginalisé que je suis. L’émotion était grande mais, irréfragable, la lucidité aussi. Je concevais en effet très mal qu’une structure déconcentrée de l’État puisse se transformer en un levier de la démocratie dans un pays où le bonapartisme, le régionalisme et le clientélisme ont encore de beaux jours devant eux. Et les faits sont là, têtus plus que jamais, pour rappeler à notre bon souvenir que le système en place ne veut pas changer de nature, fragilisant encore davantage une société désormais réceptive à tous les chants de sirènes, y compris aux relais nationaux de l’OTAN dont les gesticulations et les courbettes en direction du philosophe militaro-sioniste Bernard Henri-Lévy ne sont un secret pour personne. Nous attendions la révolution, pas seulement une révolution politique, mais une révolution qui serait celle des idées, de la perception du monde, qui serait une nouvelle construction. Mais que nenni ! Le travail d’arrache-pied mené par le CNES pour gagner la bataille de la proximité est voué sinon à un cuisant échec du moins à l’inefficacité. Comment peut-ont procéder à la reconstruction impérieuse de la base citoyenne de la capitale alors que le premier magistrat de la wilaya d’Alger doit son ascension au seul fait du prince donc au détriment des compétences avérées que compte le corps préfectoral ? Mohamed Seghir Babès a raison de dire qu’Alger a un rôle sensible et une place importante, compte tenu de son histoire. Mais de quelle histoire s’agit-il, lorsque les enfants illustres de cet espace emblématique sont voués à la négation, ses savants, révolutionnaires artistes et sportifs victimes de la culture de l’oubli ? Bien que le doute soit permis en pareil cas, cela ne m’empêche pas pour autant d’apprécier la démarche en cours, tant votre chroniqueur du samedi, fidèle en cela à Antonio Gramsci, passe plutôt pour un pessimiste-optimiste. Pour autant, l’idée que les commis de l’idéologie dominante tentent d’enlever dans chaque protestation morale et politique tout ce qui peut devenir mise en question des rapports de classe n’est pas à écarter. En s’appuyant sur ce qui se passe présentement à travers les revendications “modernistes” de certains franges de la société, les théoriciens du système comptent travailler sur la modernité du décor, sur ce qui convient le mieux au bonapartisme qui veut moderniser l’industrie, les structures, l’art de vivre, les mentalités, rajeunir l’appareil administratif et économique sans opérer des adaptations sans toucher ni aux structures sociales profondes ni à son propre pouvoir politique. Je suis de ceux qui croient à un sursaut d’orgueil, à une alternative nationale. Je trouve même que l’indécence avec laquelle se manifestent les relais locaux de l’OTAN est une atteinte à la dignité nationale. Mais je ne suis pas loin de penser que l’époque dans laquelle nous entrons et qui s’étendra sur une cinquantaine, voire une centaine d’années, sera une grande époque. Elle verra un changement radical du système social à l’échelle mondiale et provoquera de grands bouleversements…y compris dans notre propre pays.
A. M.
zianide2@gmail.com
19 décembre 2011
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