Par Aomar MOHELLEBI
En dédicaçant son livre, l’ancien président de l’APN échange à chaque fois des propos et des réflexions avec ses lecteurs.
Venu, avant-hier, dédicacer son livre «De la Numidie à l’Algérie, grandeurs et ruptures», Karim Younès, ancien président de l’Assemblée populaire nationale, a eu droit à un vrai bain de foule au niveau de la librairie Aït Mouloud sise en face de l’ex-cinéma Djurdjura de Tizi Ouzou. Même le gérant de la librairie, M.Aït Mouloud a été surpris par cet engouement sans précédent à l’égard d’un écrivain.
Quant à Karim Younès, il a été impressionné de constater que le public était plutôt constitué, dans sa grande majorité, de jeunes. «C’est vrai que partout où je suis passé, il y avait beaucoup de monde mais je suis surpris de remarquer qu’ici à Tizi Ouzou, il y a plus de jeunes», souligne l’hôte de Tizi Ouzou. Ce qui ne manquera pas aussi de susciter un commentaire de la part de notre confrère d’El Moudjahid, Belkacem Adrar: «Finalement, les jeunes lisent», souligne le journaliste qui, il y a plus de vingt ans, fréquentait un CEM à Tichy dont le proviseur n’était autre qu’un certain… Karim Younès. Il n’y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas. Karim Younès, après avoir dédicacé son livre, échange à chaque fois des propos et des réflexions avec ses lecteurs et ne cesse de répéter qu’il faut bien connaître notre histoire ancienne et récente pour pouvoir comprendre le présent et oser un regard vers des horizons plus cléments.
En discutant un peu avec un cadre de la jeunesse et des sports, venu acheter son livre, il a été question de la fuite vers l’étranger qui obsède une partie de la jeunesse algérienne. Karim Younès conclut en disant qu’il ne faut pas perdre espoir et en précisant à son interlocuteur, un quadragénaire: «En tout cas, le contenu de notre conversation est dans ce livre.» Des étudiants de droit, en tourisme, en économie s’avancent, un exemplaire du livre à la main et, une fois arrivés devant l’auteur, sont systématiquement interrogés par ce dernier, notamment sur ce qu’ils font dans la vie.
Le thème de l’histoire de l’Algérie qui occupe la part du lion dans le livre de Karim Younès semble l’une des raisons qui ont amené ces jeunes à venir à la librairie Aït Mouloud en sacrifiant le match de football JSK-USMA qui se jouait à dix minutes de là. Aux environs de quinze heures, un homme du haut de ses soixante-quinze ans arbore un sourire et s’avance vers l’écrivain et lui tend des dattes en guise de bienvenue dans la capitale du Djurdjura.
Spontanément, l’assistance applaudit. La séance de vente-dédicace prend alors des allures plus conviviales après avoir été plutôt empreinte d’une certaine sobriété. Mais Karim Younès ne cesse de faire appel à son sens de l’humour dont il semble incapable de se départir comme cette fois-ci quand il lève la tête et ne voit que des jeunes devant lui. Il leur lance: «Quand je vois des jeunes, je me vois moi-même, parce qu’il y a quelques années, j’étais jeune moi aussi… Vous ne me croyez pas?!!!» Les éclats de rire fusent et l’ambiance devient de plus en plus détendue dans une librairie pleine à craquer. Karim Younès continue de lancer de brèves réflexions en faisant par exemple lecture d’une des dédicaces: «Connaître notre histoire, c’est asseoir définitivement notre être en ce millénaire de l’identité».
Se trouvant à Tizi Ouzou et sachant ce que cette région éprouve comme sensibilité à la question, Karim Younès a beaucoup parlé
d’identité avant-hier: «Les Egyptiens sont fiers de leur identité pharaonique, les Tunisiens sont en train de creuser et continuent de fouiller en étant fiers de leur appartenance à la grande Carthage. Nous aussi, nous sommes fiers et nous devons l’être de la nôtre. Renforcer notre identité nous permettra d’exister.»
Pressé par un confrère pour lui arracher quelques propos par rapport à l’actualité en Algérie, Karim Younès qui a vite saisi les intentions du journaliste, répond: «Le militantisme a évolué des espaces organiques et partisans vers un militantisme plus moral où de nouvelles solidarités apparaissent qui sont source de bonne gouvernance et de démocratie. Je m’investis dans cet espace-là.»
A une autre question concernant un éventuel retour au-devant de la scène politique, Karim Younès réplique fermement mais avec tact: «On ne peut pas être acteur de premier plan tout le temps ni s’effacer tout le temps». Et de renchérir:
«On peut être un bon militant sans occuper un poste de responsabilité.» Karim Younès résume une nouvelle fois son livre en confiant qu’écrire constitue un espace de liberté et un moment de paix. «On y expose une réflexion sur un sujet unique qui est l’Algérie. L’auteur donne son appréciation sur l’Histoire, la politique, l’identité, la révolution, le système politique. Le but est de baliser un meilleur horizon à travers ces pages. Un pays sans identité est un pays qui nait or nous, nous ne venons pas de nulle part. Nous devons être fiers de ce constat. L’Algérie a une Histoire mais a eu plusieurs étapes. Ce livre fait aussi le bilan du parcours traversé par notre pays depuis 1962.»
Pour conclure, Karim Younès se réjouit: «Je suis content de constater qu’il y a un tel engouement. C’est encourageant pour tout auteur qui écrit. Ceci prouve qu’il s’agit d’une problématique qui intéresse le lecteur et montre que ce dernier a un désir ardent de comprendre.»
23 novembre 2011
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