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LA DOULEUR D’AIMER, DE M. LARBI BENNACER Aimer sans frontières mais raison garder

20 octobre 2011

1.LECTURE

Pour son tout premier roman, M. Larbi Bennacer a commis une œuvre esthétiquement réussie mais discutable sur le fond. Il s’est, en effet, hasardé à un exercice périlleux : celui de crapahuter, la fleur au fusil, dans le maquis de la guerre des mémoires.


Mû par le rêve généreux d’un contentieux historique (avec l’ancienne puissance coloniale) enfin épuisé, il était inévitable que son élan du cœur l’emporte dans un champ truffé de mines. Le piège pour un auteur algérien qui veut apporter un regard neuf tout en bousculant certains tabous. Le risque que court un acrobate qui exécute son numéro sans filet. Car les faits sont têtus : la réalité historique continue d’être occultée, déniée, la France officielle ne voulant pas reconnaître les crimes et méfaits du système colonial. Mieux encore, la «grandeur» de l’œuvre coloniale a été même légitimée par la loi du 23 février 2005. Dans ces conditions, comment peuton oser faire table rase du passé et se projeter vers l’avenir ? En ces temps d’incertitudes et de turbulences (surtout à l’échelle régionale), le rôle de la littérature est-il de contribuer à défricher le terrain, d’apaiser les esprits ? L’aventure pourrait paraître suspecte, ou alors reléguée au rang de fantasme d’intellectuel. Mais comme aucun mot n’est innocent… Avec La douleur d’aimer, M. larbi Bennacer nous propose un voyage audelà du réel, une lecture ambivalente où l’attraction se conjugue à un malaise grandissant. L’histoire est bien racontée, l’intrigue parfaitement menée, les personnages ont une âme et de la profondeur psychologique, l’émotion est au rendez-vous, les décors sont bien plantés, l’action va crescendo et les rebondissements ne manquent pas. Que voilà un roman bien agréable à lire ! Indiscutablement, l’auteur maîtrise les techniques d’écriture, il sait doser son effort et il a du souffle. Seulement, il y a cette gêne ressentie au fil des pages, le sentiment indéfinissable qui vous fait dire qu’il ne s’agit, tout compte fait, que d’une illusion d’optique. Ici, l’histoire est comme aseptisée (voire neutralisée) par un trop-plein d’humanisme. L’hymne à la tolérance et aux nobles valeurs de l’humanité a alors des accents de panégyrique. La douleur d’aimer, c’est l’histoire de deux êtres que tout oppose et que seul l’amour réunit. Une passion partagée et qui saura résister aux hommes, au temps et aux événements. Nous sommes en pleine guerre d’Algérie. Alain Douvet, officier de réserve, se rend compte que la «salle guerre» n’est pas la sienne. Au hasard d’une opération de l’armée française, le bon Samaritain sauve d’un viol certain une jeune, belle et farouche villageoise, qu’il place petit à petit sous sa protection. Entre Rym et Alain, un lien commence à se tisser malgré les barrières de communication, de classe sociale, la différence de culture… Désormais, leurs deux destins seront liés et jusque bien après l’indépendance de l’Algérie, à l’âge de raison. Deux destins qui se rencontrent, se séparent, se retrouvent sur fond d’exactions et d’atrocités, d’actions de résistance, puis d’exil, de racisme et de bêtise humaine. La trame de ce livre, c’est bien sûr l’histoire «commune» de ces deux mondes différents que sont l’Algérie et la France, et qui vivent toujours une relation passionnelle, conflictuelle et si riche de malentendus, de rendez-vous manqués et d’occasions perdues. Un couple qui a enfanté pas mal d’orphelins de l’histoire et de nostalgiques. Hélas, l’amour est souvent tragique. Par la grâce d’une certaine littérature, la question des clés de l’avenir semble ici avoir trouvé quelques réponses. Et comme un roman ne fait pas le printemps, contentons-nous de recommander la lecture de La douleur d’aimer à tous ceux qui aiment les bons livres qui ne lassent pas. Du moins ceux qui peuvent se le procurer en France. Le reste, tout le reste, est affaire d’interprétation et de convictions personnelles. M. Larbi Bennacer est interprète-consultant et organisateur de conférences. A l’origine, interprète de conférences (arabe, français, anglais, espagnol et italien), il a enseigné l’interprétation simultanée à l’université d’Alger de mars 1980 à juin 1989. Membre de l’association internationale des interprètes de conférences, il a sillonné le monde et rencontré plein de gens intéressants. Des pérégrinations qui ont mûri celui qui pense avoir gagné cette sagesse qui permet d’avoir un regard serein et juste sur la vie et les hommes. Aujourd’hui, il se sent donc prêt pour l’aventure de l’écriture. Qu’il se rassure, son premier livre révèle un authentique écrivain. Chez le même éditeur français, il a déjà à son actif un recueil de poèmes, L’important c’est la rose. Un deuxième roman, Le glacier conjugal, est en chantier.
Hocine T.

M. Larbi Bennacer, La douleur d’aimer, les éditions Persée, Aix-en- Provence, 2011, 296 pages, 19 euros.

Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2011/10/20/article.php?sid=124696&cid=16

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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Une réponse à “LA DOULEUR D’AIMER, DE M. LARBI BENNACER Aimer sans frontières mais raison garder”

  1. Eachman Dit :

    Je suis tombé sur cette page par hasard. Ma surprise a été de trouver cet article du « soir d’Algérie » sur le roman « la douleur d’aimer », un livre que lecteur algérien a très peu de chance de trouver en librairies au « bled », car paru en France métropolitaine. Le thème et la qualité de l’ouvrage font qu’on ne peut que se demander: pourquoi l’Autorité culturelle algérienne ne fait rien pour mettre à la portée de tous des oeuvres aussi démystificatrice de l’entreprise coloniale?

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