le 04.10.11 | 01h00
A propos de l’indépendance de l’Algérie, Mohamed Benchicou s’interroge : «Les occupants ont-ils été remplacés par les ravisseurs ?»
Le premier tirage du dernier roman de Mohamed Benchicou Le mensonge de Dieu, publié au début de l’été 2011 par les éditions Koukou, est déjà épuisé. «Nous n’avons pas pu faire à temps un deuxième tirage en raison de problèmes avec notre imprimeur qui, pour la première fois, a exigé d’être payé à l’avance. Auparavant, on payait 50% à la commande et 50% soixante jours après. Là, on vient de faire un deuxième tirage», a précisé Arezki Aït Larbi, directeur des éditions Koukou. Rencontré en marge d’une séance de vente-dédicace de son roman au dernier Salon international du livre d’Alger (SILA), Mohamed Benchicou a qualifié la réaction suscitée par son livre de marginale. Le ministre des Affaires religieuses, Bouabdallah Ghlamallah, a, sans l’avoir lu, vivement réagi au roman Le mensonge de Dieu.
«Les plumes qui ne respectent pas autrui ne méritent pas de respect. Celui qui vit dans un pays musulman et qui ne respecte pas ses valeurs est comparable à une personne qui fait ses besoins publiquement. C’est une position nauséabonde», avait-il dit. «C’est un épiphénomène. C’est la réaction d’un ministre en mal de publicité qui voulait se faire valoir auprès de catégories intégristes. Il aurait dû au moins prendre le livre et le lire. En règle générale, la population a bien réagi. L’accueil réservé à mon roman m’a moi-même surpris. Je suis content car le roman s’adresse aux Algériens», a déclaré l’auteur. Selon lui, les Algériens ont compris l’obsession contenue dans le livre.
«Celle de savoir pourquoi les hommes se battent ? Et pourquoi nos guerres ont abouti au néant ? Pourquoi nos pères se sont battus ? Tous ces questionnements qui me tarabustaient depuis longtemps et qui, au final, ont constitué un roman. C’est ici, en Algérie, que cette obsession a été comprise», a-t-il appuyé. Mohamed Benchicou dit avoir écouté des avis favorables et des critiques à propos de son livre. «Cela m’a fait énormément plaisir. Le débat ne fait que commencer. Je vais organiser une série de conférences en Algérie ce mois-ci (octobre). Je suis invité en Tunisie, au Maroc et en France. Je suis surpris par l’accueil réservé à mon roman au Maghreb. En Tunisie, le livre se vend bien», a-t-il noté.
Les révoltes arabes et le cinquantième anniversaire du recouvrement de la souveraineté nationale (en 2012) sont, d’après lui, accompagnés d’importantes interrogations. «Qu’est-ce que l’indépendance ? C’est la trame même du livre. L’indépendance signifie-t-elle la libération ? La délivrance ? Avons-nous été délivrés ? Les occupants ont-ils été remplacés par les ravisseurs ? Toutes ces questions que se pose la descendance de Bélaïd, le personnage principal du roman, ont été partagées par le citoyen algérien», a constaté le journaliste romancier. Pourquoi le choix du roman ? «C’est une écriture qui libère et qui fait sortir un peu des obligations étroites du journalisme. Dans ce métier, on est obligé de tenir compte de toutes les opinions. Cela limite la marge de manœuvre, et on n’écrit pas toujours ce que l’on veut. Le roman offre la profondeur que le journalisme ne permet pas. Cela dit, le roman et le journalisme aboutissent au même phénomène : je me fais autant d’ennemis. Je m’y adapte. Cela veut dire que les gens ne sont pas indifférents à ce que l’on fait», a-t-il expliqué.
Fayçal Métaoui
© El Watan
12 octobre 2011
LITTERATURE