Le Carrefour D’algérie
Point de vue
Par Ahmed Meskine
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S’il est une chose dont les Mozabites ont besoin c’est que l’Etat ne s’ingère pas dans leurs affaires. Une société organisée, hiérarchisée, solidaire selon des normes ancestrales, aussi bien en Algérie qu’à l’étranger, qui s’auto-suffit sur le plan alimentaire,
vestimentaire, culturel, spirituel et intellectuel, devrait être un poids de moins pour l’Etat central qui a d’autres charges à remplir pour accomplir ses missions régaliennes. Un exemple des plus parfaits du développement local avec ses structures et pratiques de concertation dans des formes spécifiques, de ce que l’on appelle «l’approche participative», découverte il y a à peine une vingtaine d’années par des institutions internationales. Hissée au rang de patrimoine mondiale de l’UNESCO, la vallée du M’zab est une véritable curiosité touristique, d’un tourisme propre qui ne va pas jusqu’à folkloriser une population pour quelques pièces de monnaie. Tout y est et l’on se demande ce que va apporter le Conseil National Economique et Social à cette région caractéristique de ce que devraient être les autres régions d’Algérie. Le C.N.E.S. a eu plus de choses à apprendre qu’à donner. A apprendre qu’un modèle local peut mieux fonctionner sans l’Etat ou alors avec très peu d’interventions quand les habitants comptent sur leurs propres ressources, leur génie créateur, pour assurer un équilibre social. L’antithèse en fait du rôle de l’Etat réduit à son expression la plus indiquée: assurer la sécurité des biens et des personnes. Et encore ! Car même à ce niveau, les cités du M’zab disposent d’une organisation sans faille pour se prendre en charge. Mais l’Etat a cru bon d’ériger Ghardaïa en wilaya avec des fonctionnaires venus d’ailleurs chacun avec ses habitudes, qu’il faut loger, des services de sécurité qu’il faut entretenir et des constructions en béton qui ont amoché le tissu urbain plus qu’elles ne l’ont complété. S’il y a des dispositions à prendre, c’est bien celles qui consistent à réduire la poussée de l’Etat dans un paysage devenu porteur d’une fausse modernité. Non pas qu’il faille oublier la région dans les plans de développement puisqu’il s’agit d’Algériens à part entière, mais de laisser la société mozabite se prononcer sur les modèles qui vont avec ses spécificités. En somme, c’est de mettre en pratique l’insistance d’un représentant de la société en déclarant: «Ecoutez les gens du Sud, ils ont des spécificités». Ecouter, seulement écouter. Et comme l’édicte un proverbe africain: «Si tu parles à quelqu’un qui ne t’écoute pas, tais-toi. Ecoute-le, tu sauras peut-être pourquoi il ne t’écoute pas».
29 septembre 2011
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