Le Carrefour D’algérie
Point de vue
Par Ahmed Meskine
Messali, un re-père de l’indépendance
Né à Tlemcen en 1898, mort à Gouvieux en France en 1974, Messali El Hadj est entré dans les livres d’Histoire par mérite d’un homme qui a porté l’idée d’indépendance comme on porte un fardeau,
des années durant. Malgré les tentatives de son exclusion par des historiens à la solde de quelques douteux combattants, l’homme continue de s’imposer à une écriture hésitante entre la plume et l’encre qui l’imbibe. «Cette terre n’est pas à vendre» phrase qu’il prononce du haut d’une tribune un certain 2 août 1936 à Alger, était un avertissement à ceux qui, profitant d’une relative accalmie, voulaient accrocher le wagon Algérie à la locomotive coloniale en restant assis sur leur honneur. La force de l’homme, son profil politique, sa croyance en un pays de droit, moderne et respectueux des valeurs fondatrices lui ont permis de rester vivant après sa mort, mais aussi après avoir été exclus de l’Algérie indépendante au point de n’obtenir sa nationalité qu’en 1965. «Messali Hadj avait prononcé le mot magique ‘‘indépendance’’ au moment où d’autres en étaient à l’assimilation et à la reconnaissance de la citoyenneté au rabais», rappelle le professeur Abdallah Bendi lors du colloque destiné à la mémoire de Messali ce 17 septembre dernier. Au-delà de la recherche de la vérité sur ce qu’a été le mouvement national et sur ses objectifs, il demeure quelques zones d’ombre que n’ont pu régler les constitutions successives réclamant une écriture des segments de notre Histoire qui semblent buter sur la période 54-62. Comme si l’Histoire de notre peuple, de nos peuples, se limitait à cette seule période. La question mérite plus qu’une attention car elle soulève des enjeux importants pour le fonctionnement du pouvoir et des intérêts que cela dérange. Nous en sommes 50 ans après l’indépendance à se demander qui a fait la révolution et qui a préféré la neutralité ou rejoindre les tenants de l’Algérie française. Vue sous cet angle, la question nécessite beaucoup de temps pour être résolue. Seul le statut de harki est clair. L’Algérie indépendante s’est construite sur le mode du pour et du contre. Il reste à savoir parmi ceux qui ont été pour l’indépendance, qui a menti sur des faits d’armes et qui a dit la vérité. La fiche communale qui offrait des avantages en nature et en numéraires a brouillé toutes les pistes et on en est se demander en 2011 qui est un vrai et qui est un faux moudjahid. De cela, découle toute notre vision du pouvoir depuis précisément 62. Comment alors situer Messali El Hadj mort en exil et dont le corps avait été rapatrié dans la clandestinité et comment faire en sorte qu’on en fasse un repère du combat libérateur non seulement de l’Algérie mais de tout le Maghreb. Sans avoir à remettre en cause le déclenchement du premier Novembre 54 et tous les tabous qui persistent. Un travail de scientifiques est à ce prix et l’Histoire n’est plus un jeu d’enfants. Le dernier né à l’indépendance aura bientôt 50 ans. Plus que jamais, nous sommes en droit de dire que « cette terre n’est pas à vendre», ni à acheter.
20 septembre 2011
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