Le Carrefour D’algérie
Vendredi 16 Septembre 2011
Soug ennsa
Par Farida T.
Première rentrée des classes
Pour sa première rentrée scolaire, l’enfant est en principe délicatement et longuement préparé. Depuis que les mamans sont de plus en plus instruites, c’est plus elles qui le prennent en charge. Pendant des semaines et peut-être même des mois, le canal de communication est savamment installé et le code mis à niveau de l’enfant.
Avec une approche psychologique adaptée, on lui apprend qu’à présent il est devenu grand et qu’un nouveau monde s’ouvre à lui. Avec des mots simples et justes, on s’évertuera à le sécuriser, à le rassurer et à lui faire aimer ce nouvel environnement qui lui est si étranger. Pour l’accompagner dans ce saut vers l’inconnu, on lui dira ce qui l’attend, par exemple: qu’il aura droit à un joli sac à dos comme celui des grands garçons car dorénavant, il portera au moins cinq kilos sur son dos. Qu’il ne pourra plus jouer en classe, mais qu’il devra étudier sérieusement. Qu’il faudra obéir à son maître sinon, il sera puni; qu’il devra apprendre par cœur des récitations même s’il n’en comprend pas le moindre mot: On ne lui demande pas de comprendre, juste d’apprendre, au risque d’être, le plus naturellement, frappé, pas torturé, mais, sévèrement corrigé avec au mieux une règle en bois et au pire un tuyau de caoutchouc, ce sera variable, en fonction de la longueur de la récitation ou de la sourate, du début ou de la fin du mois et surtout du degré de prise en charge par le ministère des revendications du syndicat auquel est affilié le maître. Aussi, il ne devra parler que si le maître l’interroge mais, s’il se contentait d’un hochement de la tête, ce serait encore mieux car la libre parole devient vite un chahut pour certains enseignants inaptes à l’écoute et pour qui l’extraversion est synonyme d’insolence. On lui conseillera d’être sage comme une image et de ne pas essayer d’imaginer au-delà des murs de la classe qu’il vaut mieux raser, car la créativité peut-être confondue avec un déséquilibre mental pervers et menaçant. Que si le maître lui demandait un dessin, qu’il réalise une nature morte, ce serait moins risqué qu’un portrait. Pendant la récréation, il vaudrait mieux ne pas courir car s’il se blessait, personne ne pourrait le soigner. Pour sa santé, on insistera pour que l’enfant ne boive pas de l’eau du robinet car les citernes n’ont jamais été nettoyées même si elles sont encore en fibrociment. Et, évidemment, il devra s’interdire de penser à aller aux sanitaires qui portent très mal leurs noms. Voilà, à présent, votre enfant est bien armé, prêt à embarquer pour au moins quinze ans de guerre.
17 septembre 2011
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