XXI. Nous eûmes trop peu de répétitions de cette nuit charmante. Je vois un jour Photis accourir tout émue; elle m’annonce que sa maîtresse, ayant échoué dans ses précédentes tentatives, avait résolu de se changer la nuit suivante en oiseau, et d’aller sous cette forme trouver l’objet de sa passion; que j’eusse donc à me tenir prêt,
et qu’elle me ferait assister, discret témoin, à cette scène merveilleuse. En effet, vers la première veille, elle ne manque pas de me venir prendre; elle me mène à pas de loup jusqu’au réduit aérien, puis elle me place à une fente de la porte par où je pouvais tout voir. Pamphile commença par se dépouiller de tous ses vêtements; ensuite elle ouvrit un petit coffret et en tira plusieurs boîtes, ôta le couvercle de l’une, y prit une certaine pommade, s’en frotta longtemps la paume des mains, et, se les passant sur tous les membres, s’en enduisit le corps, de la plante des pieds à la racine des cheveux. Vint après un long colloque à voix basse avec sa lanterne; soudain elle imprime une secousse à toute sa personne, et voilà ses membres qui s’assouplissent et disparaissent, d’abord sous un fin duvet, puis sous un épais plumage. Son nez se courbe et se durcit, ses ongles s’allongent et deviennent crochus. Pamphile est changée en hibou; elle jette un petit cri plaintif, et, après quelques essais de vol à ras de terre, la voilà qui prend l’essor à tire d’aile.
28 août 2011
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