Culture : Le coup de bill’art du Soir
Au cœur de l’océan gnawi
Par Kader Bakou
Quelque part à Alger, des artistes algériens et marocains discutent. La majorité sont noirs et portent des boubous traditionnels. Il y a aussi le jazzman algérien blanc Karim Ziad et des métis. On ne peut pas différencier les Algériens des Marocains. Même leur accent est parfois identique. Karim Ziad parle des similitudes entre le blues et le gnawi appelé aussi tagnawit au Maroc.
Le jazzman algérien sans tabous dit que les gens du gnawi marocain sont plus ouverts que les Algériens. «Sans être un Noir, j’ai été adopté par les gnawis au Maroc sans le moindre problème. En Algérie, cela n’a été possible qu’après la caution d’un maâlem», révèle-t-il. Le journaliste H’mida Ayachi fait part de ses craintes au sujet d’une déviation du genre musical gnawi sous l’influence des médias et des exigences du marché. «Il n’y a aucun risque !» lui répond le maâlemmarocain Hamid El Kassri. Un silence et il explique : «Sur scène, c’est vrai que tout est calculé et préparé à l’avance y compris la durée du spectacle. Mais quand je prends mon guembri à deux heures du matin pour faire de la musique, c’est ça le vrai gnawi.» Voilà, nous sommes au cœur du sujet. Pour faire du vrai gnawi, il faut avoir l’esprit gnawi et dans son contexte naturel. C’est toute une cérémonie. La soirée commence au crépuscule et dure jusqu’à l’aube. Le maâlem ouvre la voie ( tariq). Il connaît par cœur les 363 bordjsde la musique gnawi. Le kodjo qui connaît lui aussi tout les bordjs est prêt à prendre la relève à tout moment. Le gnawi est un océan. Il faut encore une demi-journée pour terminer tous les bordjs.Les gnawis marocains, algériens et Karim Ziad interprètent ensemble quelques morceaux avant de donner le témoin au groupe algérien Ouled Haoussa et son maâlem Aîssa. «Nous avons choisi ce nom parce que nous sommes originaires de la tribu des Haoussa d’Afrique noire. On dit que c’est la première tribu qui a embrassé l’islam. En ce qui me concerne, mon grand-père vient du Grand Soudan, tandis que ma grand-mère est marocaine», explique un membre de Ouled Haoussa. Le groupe algérien vient d’enregistrer un nouvel album. Dans cet album, il y a un morceau inédit : un bordj appris auprès d’un maâlem de Ghardaïa octogénaire. Ce maître de Ghardaïa connaît des bordjs datant de l’an 1800.
K. B.
bakoukader@yahoo.fr
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2011/08/27/article.php?sid=122071&cid=16
27 août 2011
Contributions