Le Carrefour D’algérie
Jeudi 25 Août 2011
Soug ennsa
Par Farida T.
La saignée de l’Aïd
Il faudrait être un génie en mathématique ou plutôt pourvoir carrément les réinventer pour être capable de résoudre l’équation qui permettrait à un petit salarié algérien de passer un mois de Ramadhan dans les règles de la décence, d’offrir des vêtements de l’Aïd à ses trois enfants en moyenne et par la suite, affronter la rentrée scolaire et ses listes interminables d’articles scolaires qui ressemblent plus à une demande de rançon, une extorsion de fonds sous la menace, un racket qui ne dit pas son nom…
Aucun père ne voudrait avoir à refuser ce petit bonheur à ses enfants. Aucun père ne voudrait être humilié face à la cherté des vêtements exposés dans les magasins et autres boutiques de nos villes en effervescence. Il y va de sa crédibilité, de son autorité, de son image paternelle de chef de famille, parfois même de sa virilité. En l’absence remarquée du produit syrien appelé à d’autres fonctions, une véritable profusion de vêtement local, chinois, turc et français est perceptible. Les habits sont heureusement disponibles et en opulence: Il y en a pour tous les goûts et pour toutes les bourses. Ce n’est donc plus une question de disponibilité des produits en Algérie, mais bien une histoire de moyens. Tant que le salaire minimum (si on arrive à l’encaisser) équivaut à cinq kilos de viande d’agneau, un kilo de rougets et une caisse de pommes de terre deuxième choix, le problème de pouvoir d’achat se posera toujours. Tant que les Algériens continueront d’aller au marché comme ils vont à la potence, tant que chaque évènement constituera une saignée pour les parents, les chefs de famille ne trouveront aucun plaisir à ces «fêtes». Quelle est donc la priorité des priorités chez nos familles? Faut-il manger, s’instruire et rester nus ou bien s’habiller, manger et demeurer analphabètes? Faut-il alimenter son cerveau au détriment de son corps ou bien le contraire? L’impératif serait-il de paraître beau, d’être en bonne santé, ou bien encore d’être instruit et intelligent ? Il existe en réalité autant de combinaisons que de probabilités possibles. Evidemment, l’idéal serait d’être les trois à la fois. Mais, car il y a toujours un «mais», étant donné que l’idéal n’existe pas, l’Algérien moyen ne peut même pas s’offrir le luxe d’en rêver. Et par conséquent, ce ne sera qu’au prix de frustrations, encore et toujours, de beaucoup de privations, d’une série de scènes de ménage et bien sûr de quelques humiliations ressenties lors des emprunts faits auprès de certains proches que les enfants seront enfin habillés, de pied en cap, que la femme aura ses gâteaux à offrir aux voisins et à la belle famille et que le chef de famille, une ardoise plus grande chez tous les magasins du quartier.
25 août 2011
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