Ainsi va la vie
Résumé de la 3e partie : Après avoir abandonné son bébé, Fatma a refait sa vie dans une ville de l’intérieur. Les années ont passé… Un jour, le directeur de l’école où elle enseigne, demande sa main…
Elle va longtemps refuser, arguant qu’elle a passé l’âge de se marier, mais Athmane ne veut pas lâcher prise.
— Nous sommes seuls tous les deux, alors pourquoi ne pas unir nos solitudes ?
— Tu as tes enfants, répond-elle.
— Ils sont tous mariés et vivent chez eux !
— Moi, j’ai toujours vécu seule, il me sera difficile de me mettre en ménage !
— La vieillesse arrivera et tu auras besoin d’un compagnon !
Des amis la poussent à accepter, elle-même se dit que le directeur a raison. Tant qu’elle était jeune et en bonne santé, elle pouvait se passer d’un compagnon, mais avec l’âge, le besoin d’être soutenue, d’avoir quelqu’un sur qui on puisse compter, en cas de difficulté, se fait ressentir. Elle finit donc par accepter.
— Tu as sans doute des parents à inviter, lui dit Athmane.
— Non, dit-elle, ma famille a été décimée par la guerre, j’ai un ou deux cousins mais j’ai perdu leur contact depuis longtemps.
Le mariage est célébré dans l’intimité. Elle quitte avec regret le petit appartement qu’elle occupe depuis de nombreuses années pour s’installer dans le logement de son époux. Ici, elle se sent un peu étrangère, mais elle sait qu’avec le temps, elle finira par s’habituer. De toute façon, on s’habitue à tout, dans la vie.
A l’école, elle reprend son poste et fait son travail, comme elle l’a toujours fait, c’est-à-dire avec sérieux et dévouement. A aucun moment, elle ne sent qu’elle est la «femme du directeur» et à aucun moment elle ne cherchera à faire valoir ce titre.
Deux années passent et voilà que Athmane est nommé à Alger. Pour le petit directeur de province, c’est une belle promotion, mais pour Fatma, c’est une mauvaise surprise.
— Quoi, s’écrie-t-elle, tu as accepté le poste !
— Je connais des gens qui donneraient cher pour aller à Alger ! Tu t’imagines, la capitale !
— Et moi, je donnerai cher pour rester ici !
— Je croyais que cela te ferai plaisir de retourner à Alger… Tu m’as dit que tu y as passé ta jeunesse !
— C’était autrefois… Depuis, je me suis fait des amis, je me suis habituée à B.
— Eh bien, tu te réhabitueras à Alger !
C’était une façon de lui dire qu’elle n’avait pas le choix et qu’elle devait le suivre.
Elle va le suivre, en effet. si elle ne veut pas retourner à Alger ce n’est pas pour les raisons qu’elle a invoquées, mais parce qu’elle a peur de renouer avec le passé. Plus de trente ans ont passé depuis qu’elle est partie, mais elle redoute toujours qu’on la reconnaisse, qu’elle rencontre un parent qui lui demande des comptes… Et puis, il y a ce garçon qu’elle a abandonné à la naissance et qui pèse lourdement sur sa conscience.
«Je n’aurais pas dû me marier, regrette-t-elle, j’aurais dû rester comme j’étais, simple institutrice, dans mon petit appartement… Je serais morte dans l’anonymat, comme j’ai toujours vécu !» (A suivre…)
22 août 2011
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