Suspense
La mystérieuse affaire de Styles (75e partie)
Résumé de la 74e partie : Poirot interroge Miss Howard pour savoir si elle est convaincue de la culpabilité de Mr Inglethorp…
Précisément, répéta Poirot. C’est ce qui confirme exactement ma petite idée.
— Quelle petite idée ?
— Miss Howard, vous rappelez-vous une conversation qui eut lieu le jour où mon ami arriva à Styles ? Il me l’a répétée, et il y a une de vos phrases qui m’a causé une vive impression. Vous souvenez-vous avoir affirmé que, si un crime était commis, vous étiez certaine que votre instinct vous dirait qui était le criminel, même si vous étiez tout à fait incapable de le prouver ?
— Oui, je me souviens d’avoir dit cela. Et je le crois. Mais je présume que cela vous paraît une bêtise ?
— Pas du tout.
— Et pourtant vous refusez de prêter aucune attention à mes soupçons instinctifs contre Alfred Inglethorp ?
— Oui, répliqua Poirot sèchement. Car votre instinct ne vous dirige pas contre Mr Inglethorp.
— Comment ?
— Non ! Vous voulez croire qu’il a commis le crime.
Vous le croyez capable de commettre un crime. Mais votre instinct vous dit qu’il ne l’a pas commis. Désirez-vous que j’en dise davantage ?
Elle le fixait, fascinée, et fit un petit geste affirmatif de la main.
— Voulez-vous que je vous dise pourquoi vous avez montré tant de violence contre Mr Inglethorp ? C’est parce que vous vous efforcez de croire ce que vous voulez croire. C’est parce que vous essayez de noyer et d’étouffer votre instinct qui vous murmure un autre nom.
— Non non ! non ! s’écria Miss Howard, en lançant les deux mains en avant, en proie à la plus vive agitation. Ne le dites pas ! Oh ! ne dites pas cela ! Ce n’est pas vrai ! Cela ne peut pas être vrai ! Oh ! je ne sais vraiment pas ce qui a pu me mettre en tête une idée aussi insensée, aussi monstrueuse !
— J’ai raison, n’est-ce pas ? demanda Poirot.
— Oui ! oui ! Vous devez être un sorcier pour l’avoir deviné. Mais cela ne peut être vrai : ce serait trop monstrueux, trop impossible. Le coupable doit être Alfred Inglethorp.
Poirot secoua gravement la tête.
— Ne m’interrogez pas, continua-t-elle. Car je ne vous dirai rien. Je ne peux pas l’avouer, ne fut-ce qu’à moi-même. Je dois être folle de songer à pareille chose !
Poirot hocha la tête, comme satisfait.
— Je ne vous demanderai rien. Il me suffit que ce soit comme je pensais. Moi aussi, j’ai un sentiment instinctif.
Nous travaillerons ensemble, dans un but commun.
— Ne me demandez pas de vous aider, car je ne le ferai pas ! Je ne lèverai pas le doigt pour… pour…
Elle s’interrompit, la gorge serrée.
— Vous m’aiderez malgré vous. Je ne vous demanderai rien, mais vous serez mon alliée. Vous ne pouvez pas refuser. Vous ferez l’unique chose que j’attends de vous.
— Et c’est ?
— D’être vigilante ! (A suivre…)
D’après Agatha Christie
16 août 2011
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