Bonjour à vous Madame Amel. Je vous remercie pour tous vos efforts déployés à l’égard de vos lecteurs. Je ne rate aucun jour pour acheter mon journal, rien que pour ma rubrique préférée «Premiers pas». Bref, le voile noir de la dépression assombrit la vie de la personne qui en souffre, mais il tombe aussi sur son entourage, le conjoint en premier. Que faire quand le mal de l’âme anéantit celui qu’on aime ? Halim
Réponse
L’âge, le sexe, le statut social ou la scolarité n’entrent pas en ligne de compte, mais il reste que les catastrophes (une perte d’emploi, par exemple) n’ont pas la même ampleur pour tous : ultimement, l’impact est plus dévastateur chez un pigiste que chez un employé de l’État, chez une mère monoparentale qu’au sein d’une famille unie, et un haut salarié a plus de moyens de guérir qu’un travailleur au salaire minimum. Il faut s’armer de patience. La maladie peut durer des mois, voire des années. Il faut aussi bien s’entourer, en identifiant des proches sur qui compter. Des alliés bien choisis vont faire toute la différence pour un conjoint qui tente de garder la tête hors de l’eau. Il ne faut pas le nier: notre bien-aimé est malade et il souffre. Mais il ne faut pas non plus le materner et le déresponsabiliser: il a besoin de soutien, mais, si on le met en situation de dépendance, il va devenir un enfant au sein de la famille, et la situation risque de perdurer une fois la maladie résorbée. Finalement, quand on a l’impression d’être à bout de ressources, il est normal d’avoir envie de brasser le conjoint malade, de crier : «Aide-toi !» Mais plus on dit ça, plus on blesse. Il faut se souvenir que le jugement de l’autre est altéré pendant la dépression. Sa souffrance est tellement grande qu’il veut parfois mourir. Douceur et patience sont de mise. L’humour est une stratégie réellement efficace. Si on arrive à désamorcer des situations graves, on peut trouver la force d’en rire ! Le conjoint malade aura certes de la difficulté à s’esclaffer, mais la personne saine va garder un pied dans une zone proche du bonheur. L’autre bouée, c’est l’espoir: continuer d’avancer en sachant dans son coeur qu’il y aura des jours meilleurs. Si on se sent en danger et qu’on n’a plus rien à donner. Le pire, c’est partir et revenir. La décision doit donc être éclairée et réfléchie parce que le manque de constance peut être un coup fatal à la personne dépressive. Par contre, si le patient fait son bout, si le conjoint le soutient, le couple s’en sort plus fort. Chaque individu devient plus solide, et les enfants développent une sensibilité à la souffrance qui peut les aider dans la vie. Le pire, c’est le silence. On leur explique, en mots faciles à comprendre, que papa ou maman est malade, que cela n’est surtout pas de leur faute et que la guérison sera sans doute très longue. On déresponsabilise les enfants. Ils ont tendance à se sentir coupables et peuvent facilement croire que maman est «triste» parce qu’ils lui ont fait de la peine. Si on se tait, ils vont tout prendre sur leurs épaules. On leur explique qu’on est leur allié devant la maladie de papa ou maman. «S’il ou elle crie ou se fâche, viens m’en parler, je vais régler ça.» Si un enfant s’emmure et qu’on n’arrive plus à l’atteindre, il faut aller chercher de l’aide. Si notre conjoint entend des voix ou se sent persécuté, coupable de tout ou carrément indigne de vivre, il souffre peut être de dépression psychotique. Il s’agit d’un cas d’urgence : les sentiments que cette maladie engendre sont si intenses que la personne peut devenir dangereuse pour elle-même ou les autres. Il faut la convaincre d’aller consulter Mme N. Amel
15 août 2011
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